Prévention et traitement du virus Zika au Canada

RMTC

Volume 42-5, le 5 mai 2016 : Virus Zika

Recommendations

Recommandations canadiennes pour la prévention et le traitement du virus Zika : mise à jour

Groupe de travail sur Zika1 du Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages (CCMTMV)*

Affiliation

1 Les membres du Groupe de travail sur Zika se retrouvent dans la section Remerciements

Correspondance

catmat.secretariat@phac-aspc.gc.ca

Citation proposée

Groupe de travail sur Zika du Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages (CCMTMV). Recommandations canadiennes pour la prévention et le traitement du virus Zika : mise à jour. Relevé des maladies transmissibles au Canada 2016;42:114-25. https://doi.org/10.14745/ccdr.v42i05a01f

Remarque

Des directive mis à jour ont été publiés. Se référer à la mise à jour Recommandations sur la prévention et le traitement du virus Zika.

Table des matières

Résumé

Contexte : Le virus Zika est récemment devenu une préoccupation de santé publique majeure. Une grande éclosion sévit actuellement, principalement dans les Amériques. L’infection par le virus Zika est une cause de microcéphalie et d’autres anomalies congénitales et peut également entraîner des complications neurologiques comme le syndrome de Guillain-Barré.

Objectif : Revoir les connaissances actuelles sur l’infection par le virus Zika et fournir des lignes directrices à l’intention des professionnels de la santé qui conseillent les Canadiens pouvant être touchés par cette infection.

Méthodologie : Cette déclaration a été élaborée par un groupe de travail du Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages (CCMTMV). Les recommandations sont basées sur une revue de la littérature et le jugement clinique.

Résultats : Tous les voyageurs devraient utiliser des mesures de protection individuelle contre les piqûres de moustique notamment des insectifuges et des moustiquaires protégeant les lieux de vie contre l’entrée des moustiques. Les femmes enceintes devraient éviter de voyager dans des régions désignées par l’Agence de la santé publique du Canada comme étant une source d’inquiétude en raison de la transmission continue du virus Zika. Les femmes qui planifient une grossesse devraient consulter leur fournisseur de soins de santé et envisager de reporter leur voyage dans ces régions. Tous les autres voyageurs pourraient envisager de reporter leur voyage dans les zones désignées en fonction de leur tolérance au risque, de leurs valeurs et de leurs préférences.

La transmission sexuelle du virus Zika par des partenaires masculins a été documentée, et les couples devraient pratiquer l’abstinence ou utiliser des condoms pendant toute la durée de la grossesse, lorsqu’ils se trouvent dans une région à risque ou jusqu’à la fin probable de l’excrétion virale. L’excrétion virale semble persister durant six mois chez les hommes et durant deux mois chez les femmes.

Les fournisseurs de soins de santé doivent s’enquérir des antécédents de voyage de leurs patientes enceintes, y compris les renseignements pertinents liés aux antécédents de voyage de leur(s) partenaire(s). Les recommandations en matière de dépistage et de gestion sont fournies pour tous les voyageurs, y compris les partenaires masculins possiblement contagieux, les femmes enceintes (symptomatiques ou asymptomatiques) ainsi que le fœtus ou le nourrisson des femmes possiblement infectées. En l'absence de données claires, nous faisons l'hypothèse qu'il est peu probable que l'excrétion virale persiste au-delà de 6 mois pour les hommes et deux mois pour les femmes non enceintes.

Conclusion : Il n’est pas possible de mener de solides évaluations quantitatives pour l’ensemble du spectre des risques associés au virus Zika. Cela reflète, entre autres, les incertitudes liées à la probabilité d’infection chez les voyageurs se rendant dans les zones infectées par le virus Zika, la probabilité de transmission verticale de la mère au fœtus, la probabilité de transmission sexuelle (de partenaires symptomatiques ou asymptomatiques) et la probabilité de graves séquelles associées au virus Zika chez les voyageurs. Dans un tel contexte d’incertitude, ainsi qu’en raison des répercussions possiblement graves de l’infection par le virus Zika chez le fœtus, les recommandations sont prudentes. Le Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages mettra à jour ses recommandations à mesure que de nouveaux renseignements deviennent disponibles.

Introduction

L’infection par le virus Zika est causée par un flavivirus qui est transmis par la morsure d’un moustique Aedes infecté, notamment du genre Aedes aegypti. On a également établi un lien entre le genre Aedes albopictus et la transmission du virus Zika Note de bas de page 3.  Bien que des infections chez les humains aient été observées dans les années 1950, le virus Zika ne s’est que tout récemment propagé et représente désormais une préoccupation de santé publique majeure. À l’heure actuelle, une éclosion importante est en cours dans les Amériques; la transmission se produit également dans certains autres pays. Des éclosions sont également survenues sur les îles du Pacifique-Sud et sur l’archipel du Cap-Vert. Avant cette éclosion, les zones de transmission endémique connues se réduisaient à l’Asie et à l’Afrique et les taux de transmission dans ces régions sont généralement faibles. Il est probable que le virus continuera de se propager, puisque les moustiques vecteurs se trouvent dans de nombreuses régions tropicales et subtropicales, ainsi que dans certaines régions tempérées plus chaudes Note de bas de page 4Note de bas de page 5.

Une inquiétude majeure à l’égard de l’éclosion actuelle a trait au regroupement spatial et temporel de l’activité du virus Zika qui est accompagné d’une incidence accrue de microcéphalie chez les nouveau-nés, définie comme une mesure de la circonférence crânienne inférieure au troisième percentile et disproportionnée par rapport au poids et à la taille Note de bas de page 6Note de bas de page 7. Une récente étude épidémiologique a également démontré une forte association entre le virus Zika et la microcéphalie au sein de la population de la Polynésie française, où une éclosion a eu lieu de 2013 à 2015 Note de bas de page 8. Le rôle du virus Zika dans la microcéphalie est corroboré par la découverte du génome viral du virus Zika dans le liquide amniotique, le placenta et les tissus de fœtus et de nouveau-nés présentant cette malformation Note de bas de page 1Note de bas de page 9 et le profil de microcéphalie associé au virus Zika semble s’inscrire dans le contexte d’un syndrome plus vaste qui peut être différent de celui causé par d’autres agressions du fœtusNote de bas de page 9.  Selon les données probantes disponibles à l’heure actuelle, une relation de cause à effet entre l’infection par le virus Zika et la microcéphalie ou d’autres anomalies graves du cerveau chez le nourrisson a été reconnue au sein de la communauté scientifique Note de bas de page 10.

Bien que la maladie soit habituellement bénigne chez l’adulte, l’infection par le virus Zika peut causer de grave séquelle telle que le syndrome de Guillain-Barré (SGB) Note de bas de page 7Note de bas de page 11. Une étude cas-témoins réalisée en Polynésie française estime un risque de développer le SGB de 0,24 pour 1 000 personnes infectées par le virus Zika, ce qui est comparable au risque de 0,25 à 0,65 pour 1 000 personnes infectées par Campylobacter jejuni qui est bien établi. On a également signalé des cas d’encéphalomyélite aiguë disséminée suivant l’infection par le virus Zika Note de bas de page 12.

Finalement, il existe de nombreuses données témoignant d’une transmission sexuelle du virus Zika des hommes à leur(s) partenaire(s), incluant entre hommes Note de bas de page 2Note de bas de page 13Note de bas de page 14Note de bas de page 15Note de bas de page 16 laissant entendre que cet événement n’est pas rare.

La présente déclaration vise à revoir nos connaissances actuelles de l’infection au virus Zika et fournir des lignes directrices aux fournisseurs de soins de santé en ce qui concerne la prévention et la gestion du virus Zika.

Méthodologie

Cette déclaration a été élaborée par un groupe de travail du Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages (CCMTMV). Les membres du groupe de travail proviennent du CCMTMV, de l’Agence de la santé publique du Canada (l’Agence) et de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada. Chaque membre était bénévole, et aucun d’entre eux n’a signalé de conflit d’intérêts pertinent. Ces lignes directrices complètent plusieurs déclarations actuelles du CCMTMV, notamment la Déclaration relative aux mesures de protection individuelle pour prévenir les piqûres ou morsures d’arthropodes Note de bas de page 17 et la Déclaration relative à la voyageuse enceinte Note de bas de page 18. Une recherche de la documentation liée au virus Zika a été effectuée. Les lignes directrices et les rapports des organismes de santé publique nationaux et internationaux, notamment les Centers for Disease Control des États-Unis, l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS) et l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), ont également été saisis et examinés.

Épidémiologie

Le virus Zika a été isolé pour la première fois en 1947 chez des singes en Ouganda. Peu après (1952), des infections chez les humains ont été détectées en Ouganda et en Tanzanie Note de bas de page 19Note de bas de page 20. En revanche, peu de cas ont été recensés chez les humains avant 2007, date à laquelle la première grande éclosion d’infection par le virus Zika est survenue sur l’île de Yap (Micronésie), dans le sud-ouest de l’océan Pacifique Note de bas de page 21. Entre 2013 et 2015, d’autres éclosions sont survenues sur les îles et les archipels de la région du Pacifique, notamment une importante éclosion en Polynésie française Note de bas de page 22Note de bas de page 23 ainsi qu’une autre éclosion sur l’archipel du Cap-Vert Note de bas de page 24. En 2014, le premier cas de transmission locale dans les Amériques a été signalé sur l’île de Pâques Note de bas de page 25. Le virus Zika s’est depuis propagé dans de nombreuses régions des Amériques, incluant au moment de la mise à jour du présent rapport, plus de 43 pays et territoires. On s’attend à ce que le virus Zika continue de se propager dans les Amériques, particulièrement dans les régions tropicales et subtropicales Note de bas de page 27Note de bas de page 28.

Transmission

Les moustiques associés au virus Zika sont actifs à la fois pendant le jour et la nuit; les morsures se font souvent les plus fréquentes le matin et en fin d’après-midi. Chez les hôtes vertébrés, la période d’incubation est généralement de trois à douze jours, alors que la virémie (période pendant laquelle le virus Zika est présent dans le sang) dure habituellement de trois à cinq jours Note de bas de page 29Note de bas de page 30. La virémie est généralement détectée seulement lors de symptômes, bien qu’un cas de virémie prolongée lors d’une grossesse ait été déclaré Note de bas de page 31.  Il est incertain si la virémie est détectable avant les symptômes, ou lors d'une infection asymptomatique. Si un hôte humain (ou autre) est piqué par un moustique compétent alors qu’il est virémique, il pourrait infecter le moustique, contribuant ainsi au cycle de transmission Note de bas de page 28. En outre, on croit que la transmission verticale entre la mère et son fœtus en développement survient lors de cette période virémique Note de bas de page 32Note de bas de page 33. Les autres voies de transmission comprennent la transfusion de produits sanguins Note de bas de page 34 et la transmission sexuelle par un homme après une infection symptomatique Note de bas de page 13Note de bas de page 14Note de bas de page 15Note de bas de page 16. L’ARN viral a été détecté dans le sperme des hommes présentant des antécédents connus de maladie symptomatique à des taux très élevés; il n’a pas été déterminé si la situation est la même chez les hommes présentant des antécédents de maladie asymptomatique. L’ARN viral a également été détecté dans la salive Note de bas de page 23 ou l’urine Note de bas de page 35Note de bas de page 36 plus d’une semaine après la clairance de la virémie. Des anticorps neutralisants anti-virus Zika sont détectables après l’infection, de sorte que l’on peut présumer, en extrapolant à partir d’autres flavivirus, que l’immunité est de longue durée après l’infection.

Bien qu’aucune transmission sexuelle du virus Zika de femmes infectées à leurs partenaires sexuels ni de personnes infectées mais asymptomatiques n’ait été signalée, les données actuelles ne sont pas suffisantes pour exclure ces voies de transmission.

Aussi, bien que l’ARN du virus Zika ait été détecté dans le lait maternel, aucun cas documenté de transmission aux nourrissons par le biais de l’allaitement n’a été rapporté Note de bas de page 19. Pour le moment, l’Organisation mondiale de la Santé estime que « les avantages de l’allaitement pour le nourrisson et la mère l’emportent sur les risques potentiels de transmission du virus Zika dans le lait maternel » Note de bas de page 37. Le CCMTMV partage cette opinion.

Manifestations cliniques

Environ de 20 à 25 % des personnes infectées par le virus Zika vont manifester des symptômes tels que la fièvre, la myalgie, un prurit, une douleur oculaire et une éruption cutanée maculopapulaire Note de bas de page 21Note de bas de page 38. En règle générale, les manifestations cliniques précoces du virus Zika sont semblables à celles d’autres infections à arbovirus, y compris la dengue et le chikungunya Note de bas de page 38Note de bas de page 39. Par conséquent, il est fort probable que le diagnostic différentiel d’un voyageur fébrile de retour d’un pays des Amériques comprenne ces entités arbovirus, de même que la paludisme Note de bas de page 40 et d’autres infections virales Note de bas de page 41Note de bas de page 42.

Des complications neurologiques, telles que le syndrome de Guillain-Barré (SGB), ont été signalées dans plusieurs pays touchés par des éclosions d’infection par le virus Zika Note de bas de page 11Note de bas de page 30Note de bas de page 43Note de bas de page 44. Ceux-ci inclus la Polynésie française, où une étude cas-témoins a estimé que la probabilité d’une sérologie positive pour le virus Zika était substantiellement plus élevée chez les cas de SGB que chez les sujets témoins appariés (rapport de cotes [RC] de 59,7; IC à 95 % de 10,4 à ∞) Note de bas de page 45. Dans cette même étude, en fonction d’une séroprévalence de 0,66 au sein d’une population infectée par le virus Zika, le risque de SGB après une infection par le virus Zika a été estimé à environ 1 pour 4 000 personnes infectées. Les autres manifestations neurologiques associées à une infection par le virus Zika ayant aussi été récemment signalées, telles que la myélite aiguë, la méningo-encéphalite aiguë et l’encéphalomyélite aiguë disséminée Note de bas de page 12Note de bas de page 46Note de bas de page 47 indiquent que le spectre neurologique des séquelles associées au virus Zika pourrait être plus large que l’on croyait.

Une thrombopénie cliniquement significative ainsi que des hématomes sous-cutanés ont également été signalés en faible nombre Note de bas de page 48Note de bas de page 49. Des décès attribuables à d’autres causes ont également été signalés Note de bas de page 50Note de bas de page 51.

Le Brésil, la Polynésie française et plusieurs autres pays touchés (p. ex., la Colombie) Note de bas de page 7 ont fait état d’une association entre le virus Zika et la microcéphalie. Des malformations oculaires ainsi que d’autres malformations congénitales, comme une arthrogrypose et une anasarque fœtoplacentaire, ont également été décrites Note de bas de page 52Note de bas de page 53Note de bas de page 54. Même si l’ensemble des effets d’une infection par le virus Zika durant la grossesse restent à être détaillés, il y a consensus que l’infection cause des anomalies congénitales du fœtus Note de bas de page 8Note de bas de page 10.  Bien que la probabilité de graves dommages pour le fœtus suite à une infection soit méconnue, il existe des preuves qui suggèrent que ce n’est pas un événement rare. Par exemple, une étude de cas récente au Brésil indique que l’infection serait associée à de lourdes conséquences, notamment le décès du fœtus, une insuffisance placentaire, un retard de croissance fœtale et une atteinte du système nerveux central (SNC) (12 des 42 femmes infectées par le virus Zika ayant subi une échographie Doppler) Note de bas de page 55 et une étude rétrospective de patients de la Polynésie française a indiqué que les répercussions du virus Zika étaient principalement attribuables aux infections survenues au cours du premier trimestre (on a estimé que ces infections entraînent un risque d’environ 1 % de microcéphalie) Note de bas de page 8.

Les examens de l’épidémiologie du virus Zika, ainsi que le lien de causalité entre le virus Zika et la microcéphalie ont été publiés récemment Note de bas de page 10.

Risque pour les Canadiens

L’Agence a publié une évaluation du risque associé au virus Zika pour les Canadiens Note de bas de page 56. En voici les conclusions :

  • Pour la plupart des voyageurs infectés, l’incidence du virus Zika sur la santé sera faible, voire inexistante (répercussions faibles, niveau de confiance modéré). Cependant, de graves répercussions (p. ex. SGB) peuvent se produire chez certaines personnes touchées (répercussions élevées, niveau de confiance modéré).
  • On pourrait observer des répercussions très élevées (niveau de confiance modéré) chez l’enfant à naître des femmes infectées par le virus Zika pendant leur grossesse.
  • La transmission sexuelle, de voyageurs symptomatiques de sexe masculin à un ou plusieurs partenaires sexuels qui n’ont pas voyagé, a été signalée. Étant donné que la probabilité d’infection par le virus Zika est considérée comme faible, la probabilité de transmission par cette voie est également faible (probabilité faible, niveau de confiance modéré). Toutefois, si un homme contracte une infection par le virus Zika, la probabilité de transmission à son partenaire sexuel est évaluée comme étant modérée (niveau de confiance faible).

Cette évaluation tenait également compte de facteurs qui pourraient avoir une incidence sur la probabilité ou les répercussions d’une infection par le virus Zika. Même si les données probantes à cet égard sont très limitées, on a déterminé plusieurs relations plausibles :

  • Les conditions à une altitude plus élevée (≥ 2 000 m) ne sont généralement pas en faveur de la réplication virale ou de la survie des populations d’Aedes aegypti. Proportionnellement, la probabilité relative d’infection par le virus Zika pourrait être considérablement moins élevée pour les voyageurs (selon le temps passé à une altitude plus élevée par rapport à une altitude plus faible) qui se rendent dans de telles régions.
  • Toute autre chose étant égale, la probabilité d’infection est plus élevée dans les pays et les régions qui signalent des niveaux élevés d’activité du virus Zika que dans ceux qui n’en signalent pas.
  • La probabilité d’infection est probablement plus faible pour les voyages plus courts ou pour les voyageurs qui demeurent dans des environnements protégés (p. ex. hébergement climatisé et muni de bonnes moustiquaires, transit dans un aéroport dans une région à risque). Cela peut également s’appliquer aux situations où le voyageur demeure dans un endroit isolé, c’est-à-dire où il existe relativement peu de résidents qui pourraient faciliter une transmission soutenue.

Le CCMTMV souligne que des évaluations quantitatives rigoureuses pour la gamme complète des risques associés au virus Zika sont pour le moment impossibles. Ceci reflète, entre autres, les incertitudes liées aux éléments suivants : probabilité que les voyageurs soient infectés par le virus Zika, probabilité que les voyageurs infectés par le virus Zika manifestent des séquelles graves comme le SGB, et probabilité que l’infection maternelle pendant la grossesse infecte le fœtus. Dans un tel contexte d’incertitude, ainsi qu’en raison des répercussions possiblement graves de l’infection par le virus Zika chez le fœtus, nos recommandations sont prudentes. Cependant, nous sommes également conscients qu’il peut se produire des circonstances dans lesquelles un patient se trouve dans l’incapacité de respecter nos conseils ou ne peut savoir avec certitude s’il doit les respecter. Dans une telle situation, nous croyons qu’il est approprié de prendre en considération les facteurs tels que ceux mentionnés ci-dessus afin d’aider à éclairer le processus de prise de décision (voir également ci-dessous, décision de voyager dans des régions à risque).

Zones à risque

On observe une transmission répandue dans la plupart des régions d’Amérique du Sud et d’Amérique centrale, ainsi que les Caraïbes, mais pas dans les régions tempérées de l’Argentine et du Chili. Une liste à jour des pays visés par nos recommandations est tenue à jour par l’Agence.

Certaines régions d’Afrique et d’Asie ont connu la transmission du virus Zika par le passé, ou sont considérées comme étant endémiques avec une très faible possibilité de transmission aux voyageurs. Actuellement, l’Agence ne désigne pas ces régions comme des régions à risque, ni les pays ou les territoires où le virus Zika a été signalé mais seulement chez les voyageurs ou en raison d’une transmission sexuelle.

Prévention – Décision de voyager dans des régions à risque

Tous les voyageurs

Les fournisseurs de soins de santé devraient discuter avec les voyageurs de ce qui est connu et inconnu à propos du virus Zika pour aider leurs patients à faire un choix éclairé sur les voyages à partir des présentes lignes directrices et des renseignements sur le virus Zika que contient la page Web du gouvernement du Canada sur le virus Zika. Voici les facteurs à prendre en considération :

  • La possibilité de séquelles graves telles que des complications neurologiques après l’infection (p. ex., SGB, encéphalomyélite aiguë disséminée).
  • La possibilité qu’une infection par le virus Zika durant la grossesse ait de graves répercussions sur le fœtus.
  • La possibilité de transmission sexuelle des hommes à leurs partenaires sexuelles, qui est particulièrement pertinente pour les couples qui tentent activement de concevoir un enfant.
  • La possibilité de comorbidités entraînant une prédisposition à des résultats plus graves (il existe peu de données probantes précises à cet égard, mais on peut raisonnablement s’attendre à de telles répercussions).
  • Les valeurs et les préférences des patients (y compris la perception du risque et la tolérance au risque).
  • Les possibles répercussions du respect des recommandations sur la planification d’un couple en matière de procréation.
  • La grande incertitude qui continue de freiner l’élaboration de solides évaluations du risque pour les Canadiens.
  • Les facteurs propres à l’itinéraire (voir la section sur le risque pour les voyageurs canadiens) qui pourraient avoir une incidence sur la probabilité d’être exposé au virus Zika.

Femmes enceintes et à celles qui planifient une grossesse

Le CCMTMV recommande aux femmes enceintes d’éviter de voyager dans les régions à risque. Les femmes qui planifient une grossesse doivent consulter leur fournisseur de soins de santé et envisager de reporter leur voyage dans les régions à risque (telles qu’elles sont définies ci-dessus). On conseille fortement aux femmes enceintes et à celles prévoyant une grossesse qui décident de voyager dans des régions où on observe la transmission du virus Zika ou qui ne peuvent éviter un tel voyage d’utiliser des mesures de protection individuelle pour prévenir les piqûres d’insectes (voir ci-dessous pour obtenir plus de renseignements). Pour les voyageurs en général (voir la section précédente), les fournisseurs de soins de santé devraient aider leurs patients à prendre une décision éclairée concernant les voyages ou d’autres aspects de la prévention de l’infection par le virus Zika. Le risque de graves résultats indésirables de la grossesse mérite une attention particulière.

Prévention de la transmission par les moustiques

Il n’y a pas de vaccin ou d’immunoprophylaxie qui protège contre les infections par le virus Zika. Le CCMTMV recommande que tous les voyageurs qui se rendent dans des régions à risque doivent être avisés de respecter strictement les recommandations concernant l’utilisation de mesures de protection individuelle contre les piqûres de moustiques (voir ci-dessous). Étant donné que les moustiques qui transmettent le virus Zika peuvent piquer à n’importe quel moment (y compris pendant les heures de jour), des mesures de protection individuelle devraient être utilisées tout au long de la journée et de la nuit. L’adoption des mesures de protection individuelle fournira une protection contre le virus Zika ainsi que contre d’autres maladies vectorielles associées, comme le paludisme, la dengue et le chikungunya. Les recommandations en matière de mesures de protection individuelle se trouvent dans la Déclaration relative aux mesures de protection individuelle pour prévenir les piqûres ou morsures d’arthropodes du CCMTMV Note de bas de page 17. Ces recommandations sont résumées comme suit :

Mesures de protection individuelle pour prévenir les piqûres ou morsures d’arthropodes

1) Couvrez-vous :
  • Portez une chemise ample de couleur claire à manches longues rentrée dans un pantalon, des chaussures ou des bottes (évitez les sandales) et un chapeau.

2) Utilisez un insectifuge sur la peau exposée :

  • Il est recommandé que les adultes utilisent des insectifuges contenant du DEET (20-30 %) ou de l’icaridine (20 %).
  • Il est recommandé que les enfants âgés de six mois à douze ans utilisent des insectifuges contenant de l’icaridine (20 %). Comme autre option, ce groupe d’âge peut utiliser des insectifuges présentant des concentrations de DEET appropriées à son âge selon l’étiquette. Depuis la publication des lignes directrices en matière de mesures de protection individuelle le p-menthane-3,8-diol (20 %) est maintenant offert au Canada et il représente une option.
  • Si les piqûres ne peuvent pas être évitées en utilisant une barrière physique, envisagez d’utiliser jusqu’à 10 % de DEET ou d’icaridine pour les enfants de moins de six mois.

3) Protégez les lieux de vie de l’entrée des moustiques :

  • Séjournez dans une chambre climatisée bien protégée par des moustiquaires ou complètement fermée.
  • Réduisez vos risques dans les lieux de travail et d’hébergement en fermant les avant-toits, en éliminant les trous dans les murs et les toits, et en fermant toutes les autres ouvertures.

4) S’il est impossible d’empêcher l’entrée des moustiques dans les lieux de vie (p. ex. par des moustiquaires) :

  • Utilisez une moustiquaire (p. ex. pour dormir ou se reposer à l’intérieur), de préférence imprégnée d’insecticide.
  • Des moustiquaires peuvent également être utilisées pour protéger les enfants dans leur parc, berceau ou poussette.
  • Les moustiquaires fourniront également une protection contre des maladies comme le paludisme.

5) Appliquez de la perméthrine (insecticide) sur les vêtements et les autres accessoires de voyage pour une meilleure protection :

  • Bien que les traitements à la perméthrine pour les vêtements ne soient pas grandement accessibles au Canada, les cliniques de santé des voyageurs peuvent vous indiquer comment acheter de la perméthrine et du matériel prétraité avant ou pendant votre voyage.
  • Les traitements des vêtements à la perméthrine sont efficaces pendant plusieurs lavages.
  • Suivez toujours les instructions figurant sur l’étiquette lors de l’utilisation de la perméthrine.
  • Évitez de vaporiser la perméthrine directement sur la peau.

La sécurité des insectifuges, des moustiquaires imprégnées d’insecticide et des vêtements traités à la perméthrine/des traitements des vêtements à la perméthrine ont été examinées au Canada ou aux États-Unis. Leur sécurité est établie pour les enfants, les femmes enceintes et celles qui allaitent, s’ils sont utilisés conformément aux instructions figurant sur l’étiquette.

Prévention de la transmission sexuelle

L’ARN du virus Zika a été détecté dans le sperme deux mois après la fin de la maladie aiguë Note de bas de page 16Note de bas de page 57. On ne sait ni combien de temps peut durer l’élimination virale dans le sperme, ni à quelle fréquence cela peut se produire lorsque l’infection est asymptomatique, ni la facilité avec laquelle le virus peut être transmis par contact sexuel. Cependant, le nombre de rapports indiquant une transmission sexuelle montre une augmentation, ce qui suggère que cette voie de transmission ne serait pas rare. Utilisés correctement, les condoms réduisent au minimum le risque de transmission sexuelle.

Femmes enceintes et leur partenaire masculin

Lorsqu’un voyage dans une région à risque ne peut être évité, les femmes enceintes et leurs partenaires masculins devraient pratiquer l’abstinence ou utiliser des condoms jusqu’à ce qu’on en sache davantage  au sujet de l’élimination prolongée du virus Zika dans le sperme.  Si un homme s’est rendu dans une région à risque, ce couple doit également pratiquer l’abstinence ou utiliser des condoms (y compris après son retour) pendant la durée d’une grossesse.

Couples prévoyant une grossesse

Compte tenu des renseignements actuels sur la période d’incubation et la durée de la virémie ainsi que de l’incertitude concernant la durée de la persistance virale dans les tissus, les femmes qui souhaitent devenir enceintes devraient attendre au moins deux mois après leur retour d’une région à risque avant de tenter de concevoir un enfant. Pour un couple où le partenaire masculin s’est rendu dans une région à risque, il est raisonnable d’attendre six mois avant d’essayer de concevoir un enfant.

Couples dont la femme n’est pas enceinte ou ne prévoyant pas actuellement une grossesse

Les hommes qui reviennent d’une région à risque et qui désirent réduire la possibilité de transmission sexuelle à leur partenaire (en dehors du contexte d’une grossesse) peuvent le faire par l’utilisation appropriée des condoms. Même si, jusqu’à présent, la transmission n’a été signalée qu’après une infection symptomatique, et même s’il est plausible que le risque après une infection asymptomatique est plus faible, il n’existe pas de données à l’appui de la formulation de recommandations différentes pour les hommes symptomatiques ou asymptomatiques. L’utilisation de condoms confère probablement la plus grande protection dans les premières semaines suivant la maladie, mais compte tenu de la possibilité de la persistance à long terme dans le sperme, elle devrait être envisagée pendant les six mois suivant le retour d’une région à risque.

Analyses en laboratoire dans le contexte de la prévention de la transmission ou de la surveillance des femmes enceintes

Les analyses en laboratoire pour l’infection par le virus Zika sont entièrement décrites ci-dessous. En théorie, selon les renseignements issus d’autres infections virales semblables, l’absence d’anticorps anti-virus Zika spécifiques au moins deux semaines après la dernière exposition possible signifie que la personne n’a jamais été infectée, et qu’elle n’est pas contagieuse pour son partenaire sexuel ni pour le fœtus. De telles personnes séronégatives peuvent envisager l’abandon du suivi intensif des complications liées au virus Zika pendant la grossesse ainsi que des mesures pour prévenir la transmission sexuelle. L’absence d’ARN du virus Zika dans un échantillon de sperme pourrait indiquer l’absence de contagiosité, mais il n’existe pas de données à l’appui de cette pratique à l’heure actuelle. Le risque théorique de faible sensibilité de l’analyse pour certaines souches du virus Zika demeure. Toutefois, à l’heure actuelle, les tests sérologiques et la détection de l’ARN au Canada ne sont accessibles que pour les personnes symptomatiques et les femmes enceintes. Le dépistage des personnes asymptomatiques (hommes ou femmes non enceintes) n’est pas systématiquement offert.

Diagnostic en laboratoire

Au Canada, le test moléculaire pour le dépistage du virus Zika est effectué à l’aide de la méthode de transcriptase inverse-réaction en chaîne de la polymérase (RT-PCR). C’est le Laboratoire national de microbiologie qui fournit un soutien à l’échelle provinciale à cet égard et qui effectue les tests de confirmation. Bien qu’on ignore la sensibilité et la spécificité de ce test, on présume qu’elle est élevée, du moins durant les premiers jours de la maladie, car il semble que le virus Zika circule dans le sang durant les trois à cinq premiers jours suivant l’apparition des symptômes Note de bas de page 27. L’ARN du virus peut demeurer présent dans l’urine quelques jours après avoir cessé d’être détectable dans le sang Note de bas de page 27Note de bas de page 58. Les professionnels de la santé peuvent obtenir des renseignements sur les lignes directrices et les recommandations relatives au dépistage du Laboratoire national de microbiologie sur le site Web du gouvernement du Canada.

Au Laboratoire national de microbiologie, le dépistage sérologique, par dosage immunoenzymatique des IgG à l’interne au moyen de l’épreuve ELISA des Centers for Disease Control des États-Unis, puis par séroneutralisation par réduction des plages de lyse (test PRNT) pour confirmer la présence du virus Zika, est actuellement réalisé Note de bas de page 36.  Les anticorps apparaissent cinq ou six jours environ après l’apparition des symptômes Note de bas de page 30. La RT-PCR et le dépistage sérologique doivent tous deux être prescrits aux patients malades en phase aiguë dont les symptômes sont apparus depuis moins de 10 jours afin d’optimiser la sensibilité. Pour les patients convalescents chez qui les symptômes sont apparus il y a plus de 10 jours, seul le test sérologique devrait être prescrit. Les tissus ou liquides appropriés à prélever pour la RT-PCR diagnostique comprennent le plasma/sérum, l’urine, le liquide céphalorachidien (LCR), le liquide amniotique et le tissu placentaire. Le dépistage sérologique est habituellement réalisé au moyen de sérum, bien que des anticorps viraux aient parfois été détectés dans le liquide céphalorachidien après une atteinte neurologique.

Comme le virus Zika fait partie de la famille des flaviviridés, il peut y avoir réactivité croisée entre ce virus et d’autres flavivirus, comme le virus de la dengue, le virus du Nil occidental et le virus de la fièvre jaune (y compris chez des patients ayant été vaccinés), lors des tests sérologiques, y compris le dosage des IgM par l’épreuve ELISA effectué par les Centers for Disease Control and Prevention Note de bas de page 4. La confirmation du virus Zika repose donc sur l’amplification de l’ARN viral par RT-PCR, ou sur le test sérologique de confirmation (PRNT). Le test de confirmation exige généralement la neutralisation de la production des IgG, lesquels apparaissent parfois après les IgM. La spécificité du dosage des IgM par l’épreuve ELISA est limitée, en particulier lors de surinfections par des flavivirus. L’infection par le virus Zika est confirmée lorsque les échantillons de sérum montrent des IgM, et des anticorps spécifiques anti-virus Zika confirmé par un test PRNT. Toutefois, en phase aiguë et convalescente, il est également recommandé que des sérums soient prélevés toutes les deux à trois semaines des personnes atteintes de façon équivoque. Ces prélèvements serviront à documenter une séroconversion ou une augmentation diagnostique (de facteur de quatre ou plus) de la production d’anticorps neutralisants propres au virus. Cela s’explique par le fait que les personnes déjà infectées ou vaccinées contre un flavivirus pourraient présenter une réactivité croisée aux tests PRNT, ce qui les rend difficiles à interpréter.

Un test PCR au moyen d’un échantillon de liquide amniotique peut être effectué (lorsque l’amniocentèse est techniquement faisable) afin de confirmer l’infection par le virus Zika chez le fœtus. Cependant, comme on ignore pour l’instant dans quelle mesure l’infection par le virus Zika chez le fœtus nuit à la grossesse, il importe de soupeser les risques liés à l’amniocentèse et les l’utilité clinique de la connaissance du résultat. En effet, même s’il élimine la possibilité d’une infection par le virus Zika en cours, un résultat négatif au test PCR n’exclut pas une infection antérieure. Par ailleurs, on ne sait pas à quel moment l’ARN du virus Zika apparaît dans le liquide amniotique après l’infection, ni pendant combien de temps il reste détectable. Certaines données ont démontré que l’ARN viral pouvait subsister plusieurs mois dans le liquide amniotique Note de bas de page 59.

Le test PCR en vue du diagnostic d’infection congénitale par le virus Zika après l’accouchement peut être effectué au moyen d’un échantillon de tissu placentaire, ou de sang du cordon ombilical ou du nouveau-né, tandis que le test de confirmation de l’infection congénitale est réalisé au moyen de LCR. Il faut noter que la quantité d’ARN viral chez les nouveau-nés ou les fœtus ayant été infectés plusieurs semaines avant le prélèvement des échantillons ne sera possiblement plus détectable.

Dépistage et prise en charge

Évaluation des voyageurs et femmes non enceintes de retour de pays où le virus est endémique

Le test de dépistage (PCR) du virus Zika devra être envisagé chez tout voyageur malade présentant des antécédents cliniques et épidémiologiques compatibles avec une infection par le virus Zika, chez qui les symptômes sont apparus au cours des trois jours suivant leur arrivée, ou au cours des 14 jours suivant leur départ, d’un pays où la transmission du virus Zika est présente ou répandue. Il convient également, dans les cas appropriés, de dépister les autres infections virales apparentées de même que le paludisme.

Les tests sérologiques peuvent être envisagés pour les voyageurs masculins de retour au pays dont la maladie compatible est résolue, et qu’il s’est écoulé au moins deux semaines après l’exposition, afin d’évaluer la possibilité de contagiosité aux partenaires sexuels. La même réflexion pourrait théoriquement s’appliquer aux voyageurs masculins demeurés asymptomatiques, mais le dépistage n’est pas offert actuellement aux membres de ce groupe au Canada. Le dépistage de patients asymptomatiques simplement par curiosité à propos de leur état sérologique ne serait pas une utilisation prudente des ressources limitées. Étant donné que certains troubles neurologiques tel que le SGB, se sont produits à la suite d’une infection par le virus Zika, on doit conseiller aux voyageurs de retour au pays de rapporter tout symptôme neurologique à leur médecin. La découverte d’un SGB ou d’un autre syndrome neurologique inhabituel exige l’exploration des antécédents de voyage pour le patient et les partenaires sexuels masculins. L’avis d’un spécialiste sera demandé si l’on croit que le virus Zika pourrait être associé à la maladie.

Dépistage en cas de grossesse

Évaluation des femmes enceintes ayant voyagé dans une région à risque

Les fournisseurs de soins de santé doivent s’enquérir des antécédents de voyage de leurs patientes enceintes, y compris les renseignements pertinents liés aux antécédents de voyage de leur(s) partenaire(s). Toute patiente mentionnant avoir, elle-même ou son partenaire, récemment voyagé dans une région à risque doit faire l’objet d’une évaluation plus approfondie.

Le test de dépistage chez la femme enceinte asymptomatique devra être discuté au cas par cas avec la patiente et son fournisseur de soins de santé. Le dépistage comprendrait un test sérologique au moins deux semaines suivant la dernière exposition possible, ainsi que des échographies régulières du fœtus, à une fréquence déterminée en consultation avec l’obstétricien de la femme jusqu’à ce que la sérologie soit négative. L’utilité des tests sérologiques dépend en partie des délais de réception des résultats, qui peuvent faire l’objet d’une discussion avec le laboratoire local.  La décision de procéder ou non au test de dépistage devra notamment tenir compte de l’utilisation des résultats que l’on fera pour guider la conduite subséquente, par exemple la découverte d’un pronostic fœtal défavorable justifiant des conseils professionnels appropriés.

Les femmes enceintes et leur partenaire pourraient à juste titre être préoccupés par le risque d’infection de leur fœtus par le virus Zika et demander à être conseillés sur la meilleure marche à suivre, y compris la question d’interruption de la grossesse. On ignore le risque d’infection verticale (avec des séquelles cliniques) dans le cas d’une infection symptomatique ou asymptomatique chez la mère dans un trimestre de grossesse donné, mais il semble plus élevé au cours du premier trimestre Note de bas de page 8. Toutefois des séquelles graves ont été signalées après l’apparition d’infections à tous les stades de grossesse Note de bas de page 55. Ces incertitudes laissent entrevoir la difficulté du counseling lié aux grossesses. Quoi qu’il en soit, les discussions et la prise de décisions éclairées au sujet des options à utiliser dans la prise en charge d’une infection par le virus Zika durant la grossesse, comme dans celle de toute autre infection ou anomalie congénitale, exigent une consultation rigoureuse auprès d’un spécialiste de la médecine fœto-maternelle ou d’un autre spécialiste connaissant bien les maladies infectieuses de l’appareil reproducteur. Les conseils que nous prodiguons aux patientes s’affineront à mesure que s’éclairciront les risques liés aux infections par le virus Zika pendant une grossesse, le tout afin d’aider chaque patiente à prendre sa propre décision au sujet de sa grossesse.

Évaluation des femmes enceintes présentant des symptômes évoquant une infection par le virus Zika

Les tests (y compris la PCR) devraient être offerts aux femmes enceintes qui présentent des signes et des symptômes aigus compatibles avec une infection par le virus Zika. Tel qu’il est décrit ci-dessus, la RT-PCR et le test sérologique devraient tous deux être prescrits aux patients malades en phase aiguë dont les symptômes sont apparus depuis moins de 10 jours, afin de maximiser la sensibilité. Pour les patients convalescents chez qui les symptômes sont apparus il y a plus de 10 jours, seul le test sérologique devrait être prescrit. Une surveillance au moyen d’échographies répétées est indiquée, sauf si la femme présente un résultat négatif aux tests de dépistage en laboratoire. Les femmes dont le fœtus présente une anomalie congénitale présumée devraient également se voir offrir un dépistage si elle ou son partenaire s’est rendu dans toute région où la transmission du virus Zika pourrait se produire, même à un faible niveau.

Les données actuelles ne permettent pas d’estimer le risque de microcéphalie ou d’autres événements indésirables liés à la grossesse chez une femme connue pour être infectée par le virus Zika. Bien qu’on puisse mesurer le périmètre crânien et le diamètre bipariétal dès la 15e semaine, il n’y a pas d’âge gestationnel précis à partir duquel la microcéphalie peut être exclue. On recommande des échographies régulières pour le suivi étroit des mesures décrites ci-dessus et leur tendance au fil du temps. Il est possible que les changements dans l’anatomie intracrânienne ne puissent être expliqués qu’à un stade avancé du troisième trimestre, ou plus tard.

Évaluation du fœtus des femmes enceintes atteintes d’une infection causée par le virus Zika

On recommande aux femmes enceintes atteintes du virus Zika ou soupçonnées d’en être atteintes (si les résultats des tests sont attendus) et aux voyageuses enceintes asymptomatiques qui reviennent de régions à risque et qui attendent un diagnostic de passer une série d’échographies (toutes les trois ou quatre semaines) afin d’évaluer les risques et d’obtenir des conseils. La voyageuse enceinte asymptomatique dont le fœtus montre des calcifications dans le système nerveux central ou une microcéphalie à l’échographie devrait envisager de subir un test de dépistage spécifique du virus Zika (p. ex. amniocentèse) afin que l’on puisse déterminer le mieux possible la cause probable de l’anomalie.

Évaluation d’un nourrisson né d’une femme atteinte d’une infection par le virus Zika ou d’un nourrisson soupçonné d’être atteint d’une telle infection congénitale

Les nourrissons nés de femmes présentant une infection par le virus Zika confirmée ou soupçonnée pendant leur grossesse, de même que les nourrissons présentant une microcéphalie, des calcifications intracrâniennes ou d’autres symptômes d’une infection congénitale par le virus Zika et nés d’une femme ayant été potentiellement exposée au virus compte tenu de ses déplacements, devraient également subir des tests de dépistage. Ces tests comprennent le test sérologique, la PCR du sérum (cordon ombilical ou échantillon du nourrisson) ainsi que la PCR du placenta; advenant le prélèvement d’un échantillon de LCR, celui-ci peut aussi être envoyé aux fins de la PCR et du test sérologique. Les nourrissons présentant une infection par le virus Zika congénitale, confirmée ou soupçonnée, devraient également subir des tests plus approfondis, notamment certaines analyses de laboratoire courantes (FSC et enzymes hépatiques), une échographie de la tête, un examen ophtalmologique et une évaluation de l’audition. Le neurodéveloppement des nourrissons présentant une infection par le virus Zika congénitale doit être suivi tout au long de la petite enfance afin d’évaluer la possibilité de séquelles à long terme.

Les nourrissons nés de femmes présentant les symptômes d’une infection par le virus Zika active au moment de l’accouchement courent un risque de transmission périnatale de la maladie.  Dans les quelques cas limités d’infection périnatale signalés jusqu’à maintenant, peu ou pas ont démontré de symptômes ni d’anomalies de laboratoire (éruption cutanée et thrombocytopénie) Note de bas de page 32. Quoi qu’il en soit, ces nourrissons doivent tout de même être surveillés étroitement en raison du spectre inconnu de la maladie potentielle liée à cette nouvelle infection. Le test sérologique et la PCR sur échantillon de sérum sont recommandés durant la maladie aiguë. Il faut s’assurer dans de tels cas de prendre les mesures nécessaires pour effectuer un bilan exhaustif englobant les autres causes possibles importantes et traitables d’infection congénitale, comme le cytomégalovirus et la toxoplasmose.

Traitement

Il n’existe à l’heure actuelle aucun traitement antiviral précis pour traiter une infection par le virus Zika. Le traitement en est un de soutien et consiste en la prescription d’antipyrétiques (acétaminophène durant la grossesse), d’une hydratation et de repos. L’aspirine et autres médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont à éviter jusqu’à ce que le diagnostic de la dengue puisse être écarté afin de réduire le risque d’hémorragie Note de bas de page 60. En général, la maladie symptomatique dure sept jours ou moins. Des soins médicaux d’urgence sont recommandés en présence de tout symptôme associé au SGB, et il importe que les fournisseurs de soins de santé soient informés des voyages récents du patient dans une région où circulent le virus Zika et/ou les symptômes de cette infection.

Advenant une infection par le virus Zika confirmée pendant la grossesse, une consultation auprès d’un spécialiste de la médecine fœto-maternelle ou d’un infectiologue sera demandée. La présence d’une microcéphalie, de calcifications intracrâniennes ou d’autres anomalies requiert les conseils appropriés d’un néonatalogiste et d’un spécialiste pédiatrique en maladies contagieuses prodigués aux parents au sujet du développement neurologique potentiel de leur nourrisson.

Recommandations pour le virus Zika

Mesure à prendre

Groupe

Recommandation

Décision de voyager dans des régions à risque

Tous les voyageurs

Les fournisseurs de soins de santé devraient discuter des connaissances actuelles sur le virus Zika, des risques associés ainsi que des préférences et des valeurs des patients. Certains voyageurs peuvent décider de reporter un voyage dans une région à risque.

Femmes enceintes

Les femmes enceintes devraient éviter de voyager dans des régions à risque.

Femmes prévoyant une grossesse

Les femmes prévoyant une grossesse devraient envisager de reporter un voyage dans une région à risque.

Prévention de la transmission par les moustiques

Tous les voyageurs

Tous les voyageurs qui se rendent dans des régions à risque doivent respecter strictement les recommandations en matière d’utilisation de mesures de protection individuelle contre les piqûres de moustiques à toute heure du jour et de la nuit.

Prévention de la transmission sexuelle

Femmes enceintes et leur partenaire masculin

Les couples devraient pratiquer l’abstinence ou utiliser des condoms lorsqu’ils se trouvent dans une région à risque et pendant toute la durée de la grossesse.

Couples prévoyant une grossesse

Les femmes prévoyant une grossesse devraient attendre au moins deux mois après leur retour d’une région à risque avant de tenter de concevoir un enfant.

Les partenaires masculins qui se sont rendus dans une région à risque devraient attendre six mois après leur retour avant de tenter de concevoir un enfant.

Couples dont la femme n’est pas enceinte ou ne prévoyant pas actuellement une grossesse

Les partenaires masculins qui ont voyagé dans une région à risque devraient envisager l’utilisation de condoms pendant une période de six mois après leur retour.

Dépistage et prise en charge

Tous les voyageurs

Le test de dépistage devra être envisagé chez tout voyageur malade présentant des antécédents cliniques et épidémiologiques compatibles avec une infection par le virus Zika, chez qui les symptômes sont apparus au cours des trois jours suivant leur arrivée dans une région à risque, ou au cours des 14 jours suivant leur départ d’une telle région.

La RT-PCR et le test sérologique doivent tous deux être prescrits aux patients malades en phase aiguë dont les symptômes sont apparus depuis moins de 10 jours, afin de maximiser la sensibilité.

Pour les patients convalescents chez qui les symptômes sont apparus il y a plus de 10 jours, seul le test sérologique devrait être prescrit.

Partenaires masculins

Les tests sérologiques peuvent être envisagés pour les voyageurs masculins de retour au pays dont la maladie compatible est résolue, et qu’il s’est écoulé au moins deux semaines après l’exposition, afin d’évaluer la possibilité de contagiosité aux partenaires sexuels.

Toutes les femmes enceintes

Toutes les patientes enceintes ayant voyagé dans une région à risque devraient subir une évaluation plus approfondie.

Femmes enceintes asymptomatiques

Les femmes enceintes asymptomatiques devraient envisager un test de dépistage qui comprendrait un test sérologique au moins deux semaines après la dernière exposition possible ainsi que des échographies régulières (sauf si séronégative), à une fréquence déterminée en consultation avec l’obstétricien de la femme.

Femmes enceintes symptomatiques

La RT-PCR et le test sérologique doivent tous deux être prescrits aux patientes malades en phase aiguë dont les symptômes sont apparus depuis moins de 10 jours, afin de maximiser la sensibilité.

Pour les patientes convalescentes chez qui les symptômes sont apparus il y a plus de 10 jours, seul le test sérologique devrait être prescrit.

Une surveillance au moyen d’échographies répétées est indiquée, sauf si la femme présente un résultat négatif aux tests de dépistage en laboratoire.

Fœtus des femmes enceintes atteintes d’une infection par le virus Zika confirmée ou présumée

Les femmes enceintes atteintes d’une infection par le virus Zika confirmée ou présumée durant la grossesse devraient subir une série d’échographies (toutes les trois ou quatre semaines).

 

Nourrissons dont la mère est atteinte d’une infection par le virus Zika confirmée ou présumée ou chez qui on soupçonne une infection congénitale par le virus Zika

Les nourrissons nés de femmes présentant une infection par le virus Zika confirmée ou présumée pendant leur grossesse, de même que les nourrissons présentant une microcéphalie, des calcifications intracrâniennes ou d’autres symptômes d’une infection congénitale par le virus Zika et nés d’une femme ayant possiblement été exposée au virus, devraient également subir des tests de dépistage.

Ces tests comprennent le test sérologique, la PCR du sérum (cordon ombilical ou échantillon du nourrisson) ainsi que la PCR du placenta; advenant le prélèvement d’un échantillon de LCR, celui-ci peut aussi être envoyé aux fins de la PCR et du test sérologique.

Nourrissons atteints d’une infection congénitale par le virus Zika confirmée ou présumée

Les nourrissons présentant une infection congénitale par le virus Zika, confirmée ou présumée, devraient également subir des tests plus approfondis, notamment certaines analyses de laboratoire courantes (FSC et enzymes hépatiques), une échographie de la tête, un examen ophtalmologique et une évaluation de l’audition.

Le neurodéveloppement des nourrissons présentant une infection par le virus Zika confirmée doit être suivi tout au long de la petite enfance afin d’évaluer la possibilité de séquelles à long terme.

Traitement

Cas de femmes enceintes

Acétaminophène, hydratation et repos. L’aspirine et les autres médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens sont à proscrire jusqu’à ce que le diagnostic de la dengue puisse être écarté. Des soins médicaux d’urgence sont recommandés pour tous les symptômes associés au syndrome de Guillain-Barré. Il est conseillé de consulter un spécialiste en médecine materno-fœtale ou un spécialiste en maladies infectieuses. Si des anomalies fœtales sont repérées, un counseling approprié doit être offert.

Cas de femmes non enceintes

Antipyrétiques, hydratation et repos. L’aspirine et les autres médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens sont à proscrire jusqu’à ce que le diagnostic de la dengue puisse être écarté. Des soins médicaux d’urgence sont recommandés pour tous les symptômes associés au syndrome de Guillain-Barré ou à d’autres syndromes neurologiques.

Autres ressources et liens utiles

Remerciements

La présente déclaration a été élaborée par le groupe de travail sur le virus Zika composé des participants suivants : Libman, M (président), Boggild A, Brophy J, Bui Y, Drebot M, Geduld J, McCarthy A, Safronetz D, Schofield S, Tataryn J, Vanschalkwyk J, Yudin M.

Le CCMTMV reconnaît et apprécie la contribution d’Alex Demarsh et de Tanya Christidis à cette déclaration.

Membres du CCMTMV : McCarthy A (présidente), Acharya A, Boggild A, Brophy J, Bui Y, Crockett M, Greenaway C, Libman M, Teitelbaum P et Vaughan S.

Membres de liaison : Audcent T (Société canadienne de pédiatrie), Gershman M (Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis) et Pernica J (Association pour la microbiologie médicale et l’infectiologie Canada).

Membres d’office : Marion D (Centre des services de santé des Forces canadiennes, ministère de la Défense nationale), McDonald P (Division des médicaments anti-infectieux, Santé Canada), et Schofield S (Entomologie de la lutte antiparasitaire, ministère de la Défense nationale).

Conflit d’intérêts

Aucun déclaré.

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