Chapitre 4 : Le Rapport de l'administrateur en chef de la santé publique sur l'état de la santé publique au Canada 2011 – Créer des transitions saines


Chapitre 4 : Créer des transitions saines

La plupart des jeunes et des jeunes adultes au Canada sont en bonne santé et traversent sans difficulté les différentes étapes de la vie, mais certains ne le font pas avec la même aisance. Pour permettre à tous les jeunes et les jeunes adultes de vivre une saine transition, le Canada doit s'attaquer aux facteurs complexes et interreliés qui influencent, menacent ou perturbent leur santé et leur bien-être. Une approch fructueuse permettra aux jeunes et aux jeunes adultes de profiter tout au long de leur vie d'une bonne santé, d'une meilleure qualité de vie et d'une productivité accrue.

Ce chapitre met en lumière des interventions efficaces, prometteuses ou favorables qui ont été adoptées au Canada ou ailleurs et qui ont permis de résoudre des questions de santé courantes ou émergentes, comme la santé et la maladie mentale, le suicide, les blessures, l'intimidation, les comportements sexuels à risque, le poids santé ainsi que la consommation et l'abus de substances nocives. Il existe, bien sûr, une multitude de façons de s'attaquer à ces questions, que ce soit par l'amélioration de la résilience, la lutte contre la stigmatisation, la prévention et la gestion des risques, l'adoption d'une approche ciblée, la promotion de la santé, l'education et la sensibilisation, l'élaboration de politiques publiques qui favorisent la santé et l'adoption de lois en matière de protection. Ce chapitre présente des pratiques exemplaires qui sont le résultat d'interventions et de travaux de recherche et qui montrent ce qui peut être réalisé pour favoriser de saines transitions. Bien qu'il existe de nombreuses mesures qui ont fait leurs preuves ou qui s'annoncent prometteuses, seules quelques-unes seront exposées ici. Ces exemples mettent en évidence les progrès réalisés à ce jour ainsi que les étapes à franchir pour continuer d'accomplir des progrès. Enfin, ce chapitre met aussi en lumière les défis qu'il reste à relever.

Les relations d'entraide et les saines habitudes qui s'acquièrent pendant l'enfance ont une influence positive sur la santé et le bien-être des jeunes et des jeunes adultes. En fait, l'investissement le plus rentable à long terme sur le plan de la santé et de la qualité de vie sera obtenu si l'on intervient dès l'enfance (voir le Rapport de l'administrateur en chef de la santé publique sur l'état de la santé publique au Canada, 2009). Ces interventions sont certes déterminantes, mais il ne faut pas non plus sous-estimer celles qui sont destinées aux jeunes et aux jeunes adultes. Il est en effet possible d'aider les jeunes et les jeunes adultes à améliorer leur résilience, à prendre moins de risques, à établir des relations saines et à orienter leur choix de carrière de manière à bien gagner leur vie.

L'approche

Le présent chapitre montre comment les déterminants de la santé influent sur la santé et le bien-être à long terme et comment ils peuvent interagir, s'accumuler et évoluer tout au long de la vie. Les milieux physique et social (la maison, l'école et le milieu de travail) sont importants mais, si les besoins essentiels ne sont pas satisfaits, il est impossible de régler les problèmes de santé. Pour répondre à ces besoins chez les jeunes et les jeunes adultes, il faut tenir compte de certains facteurs que bon nombre de Canadiens tiennent pour acquis, comme le fait d'avoir un logement, un revenu, une famille, un réseau social ou communautaire et un accès à des services adéquats.

L'évaluation des inégalités socioéconomiques et des inégalités en matière de santé chez les jeunes et les jeunes adultes doit être fondée sur le revenu ou le niveau de scolarité des parents, car un grand nombre de jeunes canadiens sont encore à l'école et ne travaillent pas à temps plein. Le fait qu'ils n'ont pas de revenu ni de domicile à eux brouille la distinction entre « avoir » et « ne pas avoir ». Il existe d'ailleurs un débat à propos des facteurs qui devraient être considérés comme les plus déterminants. Certains chercheurs soulignent l'importance de l'héritage que lèguent les parents sur le plan de l'éducation et du revenu et qui peut se transmettre de génération en génération; d'autres soutiennent que les liens sociaux et le statut social constituent les principaux éléments de mesure de l'inégalité chez les jeunesNote de bas de page 383. Quoi qu'il en soit, les facteurs qui dépendent des parents, comme le niveau de revenu et le niveau de scolarité, ainsi que les liens sociaux avec la famille et les amis ont sans doute une influence sur la santé.

Ce chapitre s'intéresse également à la résilience, une qualité qui permet à tout individu d'entretenir des relations saines, d'acquérir des compétences, d'être indépendant et de faire preuve d'un bon esprit de décision. Une variété de facteurs qui évoluent au fil du temps peuvent influer sur la résilienceNote de bas de page 384-386. Les risques et la prise de risques font partie de la vie courante, mais ils prennent souvent une importance plus grande à l'adolescence et au début de l'âge adulte. En période de transition, les rôles, les relations, les expériences et les attentes évoluent et, selon les aptitudes et les compétences dont on dispose, ils peuvent être gérés de manière à favoriser ou à compromettre la santéNote de bas de page 10. Les comportements sains acquis en bas âge peuvent rester tout au long de la vie et jouer un rôle déterminant sur l'état de santé d'une personne.

Enfin, certaines interventions ou approches peuvent régler, en tout ou en partie, quelques-uns des problèmes de santé énoncés au chapitre 3. Les exemples présentés ci-après montrent l'étendue des efforts déployés. Par leurs interventions, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, les juridictions, les collectivités et les individus peuvent contribuer à améliorer la santé des jeunes et des jeunes adultes. Comme l'indique le chapitre 3, la plupart des jeunes et des jeunes adultes au Canada sont en bonne santé; les problèmes seront donc examinés en s'appuyant sur les inégalités en matière de santé et sur les mesures qui visent à réduire les écarts et les variations dans ce domaine.

Créer des milieux propices à la transition

Comme il est indiqué dans les chapitres précédents, les déterminants sociaux de la santé sont étroitement liés à l'état de santé et aux comportements adoptés à l'adolescence et au début de l'âge adulte. Ainsi, les personnes qui reçoivent les soins attentifs de membres de leur famille ou de mentors éprouvent un sentiment d'appartenance ou d'engagement envers leur école, leur collectivité et leurs amis, se disent également en meilleure santé, ont une plus grande estime de soi et sont moins portées vers les comportements à risqueNote de bas de page 10. La protection qu'apportent les milieux favorables constitue donc une façon efficace de résoudre les problèmes au moyen des interventions décrites.

Bâtir des familles solides : le programme Triple P – Le programme de pratiques parentales positives et le Renforcement des familles pour l'avenir

Certains programmes visant à renforcer les liens familiaux et les rapports enfant-parent ont eu des retombées positives chez les jeunes et les jeunes adultes. Par exemple, le programme Triple P – Le programme de pratiques parentales positives permet aux parents d'améliorer leurs connaissances, leurs compétences et leur confiance en vue de réduire la fréquence des problèmes comportementaux et affectifs chez leurs enfants ou leurs jeunes de moins de 16 ans. Créé en Australie, ce programme stimule l'intérêt et la participation des parents. Bon nombre de collectivités, dont certaines collectivités canadiennes, l'ont adopté, et les évaluations démontrent qu'en plus de réduire les problèmes comportementaux des enfants et des jeunes, ce programme aide à améliorer les compétences parentales et à gérer les conflits familiauxNote de bas de page 387-391. Un volet a été ajouté au programme Triple P afin d'aider les parents à promouvoir les compétences et les aptitudes positives chez leurs adolescents et ainsi à prévenir les comportements délinquants, antisociaux ou néfastes pour leur santéNote de bas de page 392. Le Manitoba mène actuellement un projet pilote Triple P, version adolescents. L'Agence de la santé publique du Canada a établi un partenariat avec le Manitoba en vue de soumettre le projet à une évaluation pour mesurer ses répercussions sur la santé et déterminer s'il est équitable et s'il peut être appliqué à d'autres groupes de la populationNote de bas de page 393, Note de bas de page 394.

L'Ontario a mis en œuvre un programme similaire. Adapté par le Centre de toxicomanie et de santé mentale de, le programme Renforcement des familles pour l'avenir s'adresse aux familles dont les enfants de 7 à 11 ans pourraient présenter à l'adolescence des risques de consommation de substances nocives, de dépression, de violence, de délinquance ou d'échec scolaire. Faisant appel à tous les membres de la famille, le programme vise à réduire la consommation d'alcool et de drogues chez les adolescents et à limiter les problèmes comportementaux par le renforcement des compétences et des liens familiaux. Il vise également à accroître la résilience et les aptitudes à vivre au quotidien chez les jeunes en améliorant la communication et le fonctionnement au sein de la famille. Les évaluations à court terme indiquent que le programme est susceptible d'améliorer le fonctionnement de la famille, les compétences parentales et le comportement psychosocial des enfantsNote de bas de page 395. Les évaluations à long terme démontrent, pour leur part, que le programme permet de retarder la première expérience de l'alcool et de réduire la consommation de drogues à l'adolescenceNote de bas de page 396, Note de bas de page 397.

Domicile familial, milieu de vie et famille

Les caractéristiques familiales (revenu parental, niveau de scolarité, situation familiale), le type d'approche parentale, la participation aux activités de l'enfant, le stress vécu par les parents ainsi que les tensions familiales peuvent avoir une influence sur le développement des enfants et des jeunes. Plus un jeune est proche de ses parents et de sa famille, plus ses relations familiales sont bonnes et moins il sera susceptible d'adopter des comportements à risque et antisociaux, de tomber dans la délinquance ou de vivre de la détresse. Il aura par ailleurs plus de chances d'entretenir de bonnes relations sociales, de terminer ses études secondaires ou de faire des études postsecondaires et de jouir d'une bonne santé généraleNote de bas de page 10, Note de bas de page 47, Note de bas de page 53, Note de bas de page 383. Lorsque les enfants arrivent à l'adolescence et au début de l'âge adulte, ils délaissent graduellement leur famille et entretiennent davantage de relations avec leurs pairsNote de bas de page 47.

Certains facteurs, comme le fait de vivre dans un ménage à faible revenu, peuvent nuire à la capacité des familles de fournir à leurs enfants et à leurs jeunes le soutien dont ils ont besoin pour bien s'épanouirNote de bas de page 9, Note de bas de page 10, Note de bas de page 398. Cependant, ces situations, souvent sources d'isolement et d'exclusion socioéconomique, peuvent être atténuées par un milieu familial sain capable de conserver une attitude positiveNote de bas de page 10. Les programmes axés sur la collectivité qui soutiennent les familles et qui leur permettent de surmonter ces difficultés par le renforcement des réseaux sociaux et l'établissement de relations saines avec les parents ont donné de bons résultats (voir l'encadré intitulé « Bâtir des familles solides : Le programme Triple P – Le programme de pratiques parentales positives et le Renforcement des familles pour l'avenir »). Certaines collectivités arrivent à obtenir de bons résultats auprès de certains groupes de population, comme les immigrants, grâce à des politiques visant à réduire les obstacles, structurels ou financiers, qui limitent l'accès aux services de loisirs, d'information et de santéNote de bas de page 59.

Réduire l'itinérance

Il n'existe pas de définition officielle de l'itinérance. De façon générale, ce terme renvoie à un ensemble très divers de conditions de logement : l'itinérance absolue (vivre dans la rue ou dans des refuges); l'itinérance cachée (vivre dans une voiture, chez des membres de la famille, chez des amis ou dans un établissement de soins); l'itinérance relative (vivre dans un logement non conforme ou incertain)Note de bas de page 399, Note de bas de page 400. La plupart des définitions de l'itinérance incluent également un élément temporel, établi selon la durée ou la fréquence des périodes d'itinérance : chronique (de longue durée ou répétitive, et souvent associée à une maladie ou à une dépendance); cyclique (conditions de vie changeantes); temporaire (de courte durée et souvent associée à un traumatisme)Note de bas de page 399.

Le terme jeunes de la rue se définit lui aussi de plusieurs façons. En général, les jeunes de la rue sont des personnes âgées de 12 à 24 ans qui sont sans logis ou qui habitent un logement inadéquat ou non sécuritaireNote de bas de page 401. Bien que la définition soit large, les jeunes de la rue sont différents des autres jeunes, car bon nombre d'entre eux ont quitté le foyer familial, ont abandonné l'école et ont subi une forme quelconque de violence ou de mauvais traitements. Ils vivent dans la précarité, la pauvreté, l'instabilité résidentielle et la vulnérabilité psychologiqueNote de bas de page 23-25.

Certains jeunes et jeunes adultes se retrouvent sans abri en raison de mauvais traitements, de négligence, d'une maladie mentale, d'un logement inadéquat, d'un manque d'emploi, d'un revenu insuffisant ou encore d'un manque de soutien parental ou économiqueNote de bas de page 23. Les jeunes qui vivent de façon autonome et dont les ressources sont limitées se heurtent à de nombreuses difficultés. Par exemple, ils n'ont pas l'âge minimal ou les critères requis pour être admissibles aux programmes de soutien au revenu et d'aide sociale qui exigent que les bénéficiaires possèdent une adresse fixeNote de bas de page 402. L'itinérance touche un vaste groupe de personnes, mais les 15 à 24 ans représentent près d'un tiers des sans-abri, situation plutôt préoccupante pour les jeunes et les jeunes adultesNote de bas de page 23, Note de bas de page 403.

Près de la moitié des jeunes qui vivent dans la rue ont eu recours à un organisme de protection de la jeunesse; environ la même proportion ont déjà été victimes de violence sexuelle et physique, raison pour laquelle ils ont quitté le foyer familialNote de bas de page 23. Compte tenu des nombreuses situations qui peuvent conduire à l'itinérance, ce problème n'est pas simple à résoudre. Il existe de nombreuses approches qui fonctionnent avec les jeunes itinérants, notamment les trois suivantes : cibler les jeunes de la rue; s'attaquer à un facteur de risque lié à la santé (par exemple, un trouble de santé mentale ou une maladie chronique); miser sur les stratégies globales de lutte contre l'itinérance et la pauvreté.

Les jeunes à risque et les sans-abri

Pour être plus efficaces, les interventions qui s'adressent aux jeunes doivent tenir compte des facteurs généraux qui déterminent leur état de santéNote de bas de page 23, Note de bas de page 400. Cependant, cibler des problèmes particuliers ne permettra peut-être pas de régler ce qui est à l'origine de certains comportements et de certains milieux à risque qui influencent les décisions. Il faut aussi prendre en considération le fait que l'expérience d'un jeune de la rue diffère de celle d'un adulte sans abriNote de bas de page 225. Les jeunes de la rue sont plus susceptibles de prendre des risques, d'être exploités par des adultes ou par leurs pairs et de recourir à des stratégies d'adaptation différentesNote de bas de page 225. Les données révèlent toutefois la nécessité d'offrir le plus tôt possible des programmes tels que le Renforcement des familles pour l'avenir (décrit dans l'encadré intitulé « Bâtir des familles solides »)Note de bas de page 23, Note de bas de page 225, Note de bas de page 395. Ce programme procure aux jeunes un logement stable et du soutien au début de leur vie. Bien que les recherches de suivi et les évaluations des programmes destinés aux jeunes de la rue soient peu nombreuses, on sait que les programmes qui ciblent les enfants en bas âge et leurs familles peuvent générer de bons résultats. Ainsi, les programmes qui misent sur l'éducation et l'emploi et qui offrent aux jeunes de la rue des possibilités de trouver un logement et de développer leurs aptitudes à vivre au quotidien donneront aussi de bons résultatsNote de bas de page 225, Note de bas de page 400. Ce type de programme comporte principalement trois volets : la prévention, l'intervention en situation de crise et le soutien intégré pour sortir du cycle de l'itinérance.

  • Pour être efficaces, les mesures de prévention devraient s'étaler sur une certaine période et porter sur les principaux facteurs de risqueNote de bas de page 225. Selon des faits démontrés, la famille représente un élément clé des stratégies de prevention, tout comme le soutien et les services qui favorisent les relations familiales saines et permettent aux jeunes de vivre avec leur famille (ou dans un environnement sécuritaire si le domicile familial ne l'est pas)Note de bas de page 225. L'école et les milieux d'apprentissage peuvent aussi offrir une gamme d'approches traditionnelles ou non traditionnelles pour aider les jeunes à demeurer à l'école jusqu'à la fin du secondaire. Certains groupes de population, comme les jeunes autochtones et les jeunes lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres et en questionnement (LGBTQ), sont surreprésentés parmi la population des jeunes de la rue en raison de leur passé de victimesNote de bas de page 404. Comme beaucoup de ces jeunes ont été victimes de violence, ont fait l'expérience des services juridiques ou des services de protection de la jeunesse ou sont atteints d'une maladie mentale reconnue, ces services pourraient leur apporter du soutien avant qu'ils n'adoptent des comportements à risque.
  • L'intervention en situation de crise concerne l'hébergement, l'alimentation et le soutien d'urgence. Ce volet consiste à offrir rapidement des services aux jeunes afin de les aider à surmonter des problèmes urgentsNote de bas de page 225. Les besoins essentiels doivent être comblés pour permettre aux jeunes d'assurer à long terme leur indépendance, leur stabilité et la prise en charge de leur dépendanceNote de bas de page 225. L'intervention en situation de crise doit, avant tout, permettre de cerner les besoins, d'accroître l'offre et l'accessibilité des services, et de répondre à des exigences particulières (par exemplte, les services adaptés à la culture des LGBTQ et au genre) et de limiter les conséquences négatives liées à la maladie ou à la dépendanceNote de bas de page 225, Note de bas de page 404.
  • Pour aider les jeunes et les jeunes adultes à sortir du cycle de l'itinérance, il faut éliminer les obstacles à la recherche d'un logement adéquat et abordable. En effet, il peut être difficile de rompre le cycle de l'itinérance lorsqu'on se heurte à des difficultés telles que le versement d'un acompte, les vérifications de solvabilité et la discriminationNote de bas de page 404, Note de bas de page 405. Pour assurer aux jeunes de la rue et aux sans-abri un avenir stable, il faut mettre l'accent sur l'éducation et la formation de sorte qu'ils acquièrent des compétences préalables à l'emploi, comme la capacité à résoudre des problèmes, la gestion financière, l'esprit d'initiative et la capacité d'adaptationNote de bas de page 225. Il serait également primordial d'éliminer les obstacles qui les empêchent d'accéder aux services sociaux et aux soins de santé (comme les limites d'âge) et de leur donner accès à des services de soutien en santé mentale et à des services de prise en charge des dépendances tout au long du processusNote de bas de page 404. Enfin, il faudrait leur fournir un suivi et un soutien à long terme pour qu'ils puissent réussir leur transition vers un autre mode de vieNote de bas de page 225. Les programmes prometteurs qui s'attaquent à l'itinérance chez les jeunes et les jeunes adultes se fondent généralement sur une approche intégrée (voir l'encadré intitulé « Les approches intégrées pour lutter contre l'itinérance »).
L'itinérance et les problèmes de santé mentale

L'itinérance peut nuire au rétablissement des personnes qui vivent avec un problème de santé mentale. Les programmes qui s'intéressent à l'itinérance et aux problèmes de santé mentale (et particulièrement à la maladie mentale) sont généralement axés sur la réadaptation et les traitements offerts dans le cadre de services de logement superviséNote de bas de page 400. Il existe deux modèles de logements-services.

  • Le modèle de la priorité au traitement, aussi connu sous le nom de « modèle de continuum des services », prévoit des services d'intervention et de suivi qui permettent de diriger les personnes vers les programmes de traitement et les centres d'hébergement appropriés avant de leur donner accès à un logement permanentNote de bas de page 400, Note de bas de page 414. Ce modèle, qui a été mis en application dans quatre collectivités des États-Unis, a été évalué afin de déterminer s'il était applicable au Canada. L'un des avantages de ce modèle est que les services sont dirigés et coordonnés à l'échelle communautaire ou sont offerts en collaboration avec les services locaux. Les évaluations ont aussi révélé une augmentation des programmes de logement supervisé, une amélioration du niveau de sensibilisation à l'échelle locale et une hausse des fonds consacrés aux plans d'action à long terme. Toutefois, la durée du processus de planification, le manque de souplesse, la fragmentation des services et le manque de logements permanents pourraient nuire à son application au CanadaNote de bas de page 414.
  • Le modèle de la priorité au logement permet d'accéder à un logement avant de recevoir des services de traitementNote de bas de page 400. Ce modèle a été adopté pour la première fois aux États-Unis par la Ville de New York dans le cadre du projet Pathways to Housing. Maintenant utilisé dans plusieurs centres urbains, il donne de bons résultats au point de vue de l'hébergement et du bien-être. En effet, en plus de réduire le nombre de sans-abri, le programme a permis aux personnes vivant avec une maladie mentale de passer moins de temps dans les établissements et, donc, plus de temps dans leur logement communautaire. Il faudrait toutefois approfondir la recherche afin de bien évaluer les effets sur la santé à long terme (par exemple, s'il y a maintien du bien-être)Note de bas de page 415. En utilisant le modèle de la priorité au logement, le programme At Home/Chez-Soi s'avère lui aussi fort prometteur. Mis sur pied par la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC), ce programme vient en aide à plus de 2 200 sans-abri vivant avec une maladie mentale dans cinq villes canadiennes, soit Vancouver (Colombie-Britannique), Winnipeg (Manitoba), Toronto (Ontario), Montréal (Québec) et Moncton (Nouveau-Brunswick). En date de mars 2011, le programme avait permis à plus de 1 800 participants de recevoir des services courants ou d'accéder à un logement et à des services d'aide (770 participants ont maintenant accès à un logement)Note de bas de page 416. Bien que ce programme n'en soit qu'à ses débuts, des résultats positifs ont déjà été observés.

Certains programmes répondent aux besoins particuliers des sans-abri en offrant des traitements et des services d'intervention adaptés à la culture, suivant une approche générale ou traditionnelle (voir l'encadré intitulé « S'attaquer à la dépendance et aux problèmes de santé mentale : le centre Wabano d'Ottawa »).

Les approches intégrées pour lutter contre l'itinérance

L'organisme Eva's Initiatives offre à la fois de la formation, du mentorat et des logements de transition aux jeunes de la rueNote de bas de page 225. Cet organisme collabore avec les sans-abri et les jeunes à risque afin de les aider à développer leur potentiel et à mener une vie productive, autonome et saine. Pour ce faire, il offre d'abord un refuge sécuritaire, puis un ensemble de services dynamiques et progressifs misant sur des solutions à long terme. Il gère un logement de transition, Eva's Phoenix, qui est situé à Toronto (Ontario) et qui accueille, pendant un maximum d'un an, une cinquantaine de jeunes âgés de 16 à 24 ans. Par ailleurs, l'organisme offre, chaque année, à 160 jeunes âgés de 16 à 29 ans des programmes de préapprentissage et d'emploiNote de bas de page 225, Note de bas de page 406. Il établit des partenariats avec le milieu des affaires, le marché du travail et la collectivité en général dans le but d'offrir aux jeunes à risque des possibilités et du mentorat de sorte qu'ils puissent acquérir des aptitudes pour vivre au quotidien, commencer une carrière et devenir autonomesNote de bas de page 406. La formation est donnée dans le cadre d'ateliers pratiques et se déroule dans des milieux propices à l'apprentissage, comme l'imprimerie d'Eva's PhoenixNote de bas de page 225. Selon des évaluations réalisées en 2003, 97 % des jeunes participants ont indiqué que leur passage chez Eva's Initiatives leur avait permis de reprendre leur vie en main et de quitter le refuge. Les évaluations révèlent également que les participants entretiennent des rapports plus réguliers avec leur famille (50 %), qu'ils continuent d'étudier ou de travailler (60 %) et qu'ils sont plus aptes à se trouver un emploi ou à le garder (78 %)Note de bas de page 406, Note de bas de page 407.

Compte tenu de ces réussites, des organismes de Victoria (Colombie-Britannique), de Calgary (Alberta), d'Edmonton (Alberta), de Hamilton (Ontario), d'Ottawa (Ontario), de Halifax (Nouvelle-Écosse) et de St. John's (Terre-Neuve-et-Labrador) ont lancé des programmes similairesNote de bas de page 408-410. Choices for Youth et le Naomi Centre sont deux organismes situés à St. John's qui veillent à offrir aux jeunes et aux jeunes adultes un logement sécuritaire, des conditions de vie adéquates ainsi qu'un milieu fondé sur la tolérance et l'équité. Ces éléments favorisent la responsabilisation et l'indépendance des jeunes et des jeunes adultes, les protègent contre la violence et les encouragent à s'engager et à accroître leur autonomieNote de bas de page 411-413.


S'attaquer à la dépendance et aux problèmes de santé mentale :
le centre Wabano d'Ottawa

À Ottawa, la proportion de sans-abri autochtones est d'environ 19 %. Parmi eux, on compte 70 % d'hommes et un nombre croissant de jeunes. On estime que 90 % des sans-abri autochtones éprouvent des problèmes de santé mentale ou de dépendanceNote de bas de page 417. Pour répondre aux besoins de cette population, le centre de santé autochtone Wabano a mis sur pied une unité mobile d'intervention en santé et en mieux-être qui utilise une approche adaptée à la culture. Cette unité offre notamment du soutien aux personnes qui n'ont pas droit ou n'ont pas un accès régulier aux services sociaux ou aux soins de santéNote de bas de page 418-420. Avec son équipe composée de spécialistes de la santé et de travailleurs sociaux, cette unité offre des services d'aide après un traitement ou une cure ou oriente les personnes vers des services de traitement des maladies et des blessures, des services de logement, des refuges et des banques alimentairesNote de bas de page 420. Les services en santé mentale peuvent intervenir en situation de crise, mener des évaluations et des consultations individuelles, offrir de l'assistance sociale et des services de soutien et orienter les personnes vers des services d'hébergement, des services juridiques et des services de traitement des maladies mentales ou des troubles psychiatriquesNote de bas de page 135, Note de bas de page 418, Note de bas de page 419. L'unité mobile fait appel aux méthodes de guérison traditionnelles et à l'approche globale des soins de santé en vue d'améliorer la santé affective, spirituelle, mentale et physiqueNote de bas de page 419, Note de bas de page 420. Les évaluations ont démontré que le centre Wabano redirigeait un nombre important de personnes vers divers organismes de soins; 10 des 17 répondants ont indiqué qu'ils avaient utilisé les services du centre, dont le programme de gestion de la colère, les services alimentaires ou médicaux ainsi que les services de transport, de consultation et d'hébergement. Dans les évaluations, les clients ont également indiqué qu'ils avaient recours au centre Wabano pour obtenir des services sociaux et des services de santé, pour discuter avec le personnel et pour participer au cercle de guérison que le centre est le seul à offrirNote de bas de page 419.

L'élaboration de stratégies globales de lutte contre la pauvreté et l'itinérance

Les collectivités et les organisations de toutes les régions peuvent participer à la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance (SPLI) du Canada et ainsi mettre sur pied des programmes pertinents qui répondent aux besoins locauxNote de bas de page 421, Note de bas de page 422. La SPLI aide les collectivités à régler, dans leur région, les problèmes auxquels se heurtent les sans-abri ou les personnes qui sont à risque de le devenir :

  • en finançant des logements supervisés et des logements de transition en attendant qu'un logement à plus long terme soit accessible;
  • en appuyant les mesures communautaires de prévention ou de réduction de l'itinérance;
  • en établissant des partenariats entre les juridictions et les secteurs;
  • en travaillant en collaboration avec divers intervenantsNote de bas de page 421, Note de bas de page 422.

Actuellement, la SPLI vient en aide à 61 collectivitésNote de bas de page 422. Celles-ci se trouvent principalement dans les grands centres urbains qui connaissent d'importants problèmes d'itinérance et qui ont établi des lignes de conduite dans le but de trouver des solutionsNote de bas de page 423, Note de bas de page 424. Le volet d'approche de la Stratégie permet d'aider les petites collectivités, les collectivités rurales et celles du Nord à mettre à niveau leurs infrastructures, en collaboration avec les secteurs public et privéNote de bas de page 425. Les responsables de la SPLI s'associent également avec des groupes autochtones ainsi qu'avec les gestionnaires de programmes de financement dans le but de répondre aux besoins particuliers des sans-abri autochtones qui vivent hors réserve, en milieu rural ou urbainNote de bas de page 426.

Certaines provinces et certains territoires ont eu du succès à mettre en œuvre de vastes stratégies de lutte contre l'itinérance. Par exemple, en 2009, l'Alberta a mis de l'avant sa stratégie globale intitulée A Plan for Alberta: Ending Homelessness in 10 Years. Délaissant la formule des refuges d'urgence, la Province vise plutôt à éliminer l'itinérance dans les dix prochaines années en octroyant aux personnes et aux familles itinérantes un logement permanent, tout en leur offrant le soutien dont elles ont besoin pour le conserver. Ce soutien comprend des possibilités d'emploi, des soins de santé, des services de traitement des dépendances, des programmes de formation en gestion du quotidien et des services d'aide pour rétablir les liens familiaux et culturels. Cette intervention intersectorielle, dirigée par la collectivité, a permis d'offrir un logement permanent à 1 779 sans-abri de l'Alberta, ce qui dépasse largement l'objectif de 1 000 bénéficiaires fixé pour 2009-2010Note de bas de page 405, Note de bas de page 427.

S'attaquer efficacement à l'itinérance et aux facteurs de risque pendant l'adolescence et au début de l'âge adulte exige de mieux comprendre qui devient sans-abri, pourquoi il le devient et comment cela se produit. La société canadienne doit parvenir à cerner ces facteurs de risque, à en évaluer les répercussions sur la santé et à mettre en œuvre des pratiques exemplaires. Conçu pour favoriser la compréhension de l'itinérance et la diffusion de l'information sur le sujet, le Système d'information sur les personnes et les familles sans abri (SISA) aide les établissements (par exemple, les refuges) dans leurs activités et leur planification. Il permet, en outre, de recueillir des données complètes sur les populations à risque afin de contribuer à un système d'information national sur l'itinéranceNote de bas de page 428, Note de bas de page 429. Actuellement utilisée dans la moitié des refuges pour sans-abri du Canada, le SISA permettra de recueillir davantage d'information sur les sans-abri, ainsi que sur leurs besoins, tout en leur offrant des services adéquatsNote de bas de page 429.

Écoles saines

La plupart des jeunes passent une partie importante de leur temps à l'école. L'école leur permet d'acquérir des compétences scolaires et sociales et d'améliorer leurs aptitudes à vivre au quotidien, des éléments essentiels à une saine transitionNote de bas de page 10. Plus les jeunes participent aux activités scolaires et parascolaires, plus ils ont de chances de réussir leur carrière et de bénéficier d'une meilleure situation socioéconomique au cours de leur vieNote de bas de page 53. En effet, les élèves qui ont à cœur leur apprentissage sont davantage portés à se remettre en question et à se fixer des objectifs de carrière à long terme. De plus, les jeunes qui disent éprouver un sentiment d'appartenance à leur école et se sentir en sécurité à l'école et pendant les activités parascolaires (sports d'équipe, clubs, etc.) ont moins tendance à adopter des comportements à risque et sont plus susceptibles d'éprouver un bien-être affectif, d'avoir une meilleure estime de soi et de se considérer en bonne santéNote de bas de page 10. Puisque le milieu scolaire joue un rôle important dans le bien-être actuel et futur des jeunes et des jeunes adultes au Canada, les mesures qui contribuent à aider les écoles à instaurer un climat sain, qui encouragent la participation et qui favorisent la réussite scolaire sont essentielles à une transition réussie.

Les écoles peuvent diffuser de façon efficace de l'information sur la santé (grâce à des programmes de promotion de la santé et d'éducation sur la santé) parce qu'elles sont bien placées pour influencer une grande population de jeunes. Dans le cadre de ces programmes, elles peuvent traiter des questions de santé, suggérer des moyens de prévention et aider les élèves à acquérir de saines habitudes. L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) et d'autres organismes tels que la Commission européenne encouragent la mise en œuvre de mesures de promotion de la santé dans les écoles des pays membres. L'OMS a d'ailleurs publié un ensemble de lignes directrices destinées à promouvoir les écoles-santé, notamment :

  • des politiques de santé en milieu scolaire, y compris des règlements et des pratiques qui favorisent les choix santé, comme l'offre d'aliments sains, la promotion d'un environnement sans fumée ni drogue, l'égalité entre les élèves et la préparation aux situations d'urgence;
  • des environnements physiques sains (y compris les locaux et les alentours) qui favorisent la pratique d'activités intérieures et extérieures, qui sont sécuritaires (c'est-à-dire qu'ils font l'objet de vérifications régulières, sont dotés d'équipement sportif conforme aux normes, etc.), qui facilitent l'apprentissage et, dans la mesure du possible, qui sont fondés sur des pratiques environnementales durables (le respect des normes de qualité de l'air et de l'eau);
  • des environnements sociaux sains fondés sur des relations harmonieuses entre les élèves et avec le personnel, les parents et la collectivité. Les services de soutien, la satisfaction des besoins ainsi que l'engagement et la participation des adultes sont autant de facteurs qui peuvent améliorer les relations à l'école;
  • les liens avec la collectivité en général, y compris avec les parents et les intervenants externes;
  • des possibilités d'améliorer les aptitudes personnelles en matière de santé;
  • des services de santé en milieu scolaire qui sont accessibles et répondent aux besoins de tous les élèvesNote de bas de page 430, Note de bas de page 431.

Une école-santé est une école qui s'améliore constamment pour devenir un milieu où l'on peut vivre, apprendre et travailler en santéNote de bas de page 432. Les programmes de santé efficaces implantés en milieu scolaire peuvent constituer un investissement des plus rentables, car ils améliorent non seulement la santé mais aussi les résultats scolairesNote de bas de page 433. Ils permettent également de prévenir les problèmes de santé chez les jeunes et de changer les conditions pédagogiques, sociales, économiques et politiques qui agissent comme facteurs de risqueNote de bas de page 432, Note de bas de page 433.

Les écoles-santé peuvent améliorer les connaissances des élèves et changer leurs attitudes à l'égard des enjeux sociaux et des questions de santéNote de bas de page 430, Note de bas de page 431. Plus directement, lorsque des services de santé sont offerts à l'école, la santé des élèves et leurs résultats scolaires s'améliorentNote de bas de page 431, Note de bas de page 434.

L'approche globale de la santé en milieu scolaire (AGSS) est un moyen de promotion de la santé utilisé dans les écoles du Canada. Elle favorise la réussite scolaire chez les élèves, en établissant les fondements d'une école saine au moyen d'une stratégie planifiée, intégrée et globale. Ainsi, les élèves des écoles AGSS adoptent des habitudes alimentaires plus saines, sont plus actifs et sont moins susceptibles d'être atteints d'embonpointNote de bas de page 435. Le Consortium conjoint pour les écoles en santé (CCES) est un bon exemple de partenariat entre les ministères fédéral, provinciaux et territoriaux de la Santé et de l'Éducation. Il offre un leadership et favorise une approche globale en matière de promotion de la santé en milieu scolaire. Le principe de base du Consortium est simple : la santé et l'apprentissage sont liés. Les travaux du Consortium s'étendent à l'échelle des juridictions et des secteurs, ce qui permet de partager des expériences, d'échanger de l'information, de cerner les pratiques exemplaires, de tirer profit des ressources, de réduire le chevauchement des efforts, d'encourager les partenariats et d'approfondir la recherche dans les domaines prometteursNote de bas de page 436. Par ailleurs, le Consortium s'est récemment engagé à promouvoir la santé mentaleNote de bas de page 437.

L'examen systématique des stratégies globales de promotion de la santé en milieu scolaire a révélé que les programmes qui s'intéressent aux comportements et à la santé mentale (par exemple, les programmes axés sur les aptitudes en classe, la littératie émotionnelle et l'estime de soi) se sont révélés efficaces pour promouvoir la santé mentale et réduire les comportements à risque, tout particulièrement lorsqu'ils étaient variés, intensifs et menés sur une longue périodeNote de bas de page 431. Par contre, les programmes axés sur la consommation et l'abus de substances nocives font un meilleur travail de sensibilisation s'ils sont ciblés, s'étendent sur une courte période et portent sur des facteurs comme l'estime de soiNote de bas de page 431. En général, les stratégies de promotion de la santé qui visent l'école dans son ensemble sont plus efficaces que les interventions individuelles menées par l'enseignantNote de bas de page 431. Il semble cependant nécessaire d'effectuer une analyse plus poussée afin de comparer l'efficacité des stratégies et des programmes destinés à l'ensemble de l'école par rapport à celle des initiatives individuellesNote de bas de page 431. Les évaluations qui seront menées devraient permettre de déterminer dans quelle mesure les programmes sont aptes à répondre aux besoins particuliers des collectivités auxquelles ils sont destinés.

Dans le but de limiter les effets des ménages à faible revenu et ainsi réduire le taux de décrochage au secondaire, on a amélioré l'accès aux études postsecondaires chez les jeunes défavorisés au CanadaNote de bas de page 438. Par exemple, le programme Passeport pour ma réussite utilise une approche communautaire globale afin d'offrir aux jeunes et aux jeunes adultes quatre formes de soutien : un soutien pédagogique, un soutien social (mentorat de groupe et professionnel), un soutien financier (le transport scolaire, les bourses, etc.) et un service de consultation (pour favoriser les liens entre les élèves, les parents et la collectivité). Le premier projet réalisé dans le cadre de ce programme a vu le jour à Regent Park, endroit où les taux de pauvreté et de décrochage atteignaient des niveaux inégalés à Toronto (Ontario)Note de bas de page 438-441. Selon une étude indépendante, la participation élevée à ce programme (93 %) a permis de faire passer le taux de décrochage de 56 % à 12 % et de réduire le taux d'absentéisme de 50 %. De même, le nombre de jeunes ayant fait des études collégiales ou universitaires a quadruplé, passant de 20 % à 80 %, tandis que le taux de grossesse chez les adolescentes a diminué de 75 %Note de bas de page 440, Note de bas de page 442. En raison du succès obtenu à Regent Park, le programme Passeport pour ma réussite a été mis en œuvre dans d'autres villes canadiennes, comme Hamilton, Ottawa, Kitchener et Kingston (toutes en Ontario), Montréal-Verdun (Québec), Halifax-Spryfield (Nouvelle-Écosse) et Winnipeg (Manitoba)Note de bas de page 440. Le Rapport de l'administrateur en chef de la santé publique sur l'état de la santé publique au Canada, 2008 donne plus de détails sur la mise en œuvre de ce programme à Regent ParkNote de bas de page 49. D'autres recherches sont menées à l'heure actuelle afin d'examiner les facteurs, scolaires ou autres, qui ont une influence sur les résultats en éducation et de déterminer dans quelle mesure le programme répond aux besoins des jeunes à risqueNote de bas de page 441.

Favoriser les études postsecondaires

Lorsque les jeunes sont déterminés à poursuivre leurs études, il en résulte des avantages à long terme observables à l'âge adulte. En effet, un haut niveau de scolarité est généralement associé à un meilleur emploi, à un revenu plus élevé, à un plus haut niveau de littératie en santé, à une meilleure compréhension des conséquences des comportements malsains et à une plus grande capacité à s'orienter dans le système de santé, autant de facteurs qui favorisent la santéNote de bas de page 53. Au cours des trois dernières décennies, on a noté au Canada une nette augmentation du nombre d'inscriptions aux études postsecondairesNote de bas de page 443. Ce succès est en partie attribuable à la mise en place de programmes de grande envergure qui, grâce à l'aide financière qu'ils offrent, ont permis d'accroître les possibilités et l'accès aux études. Neuf provinces et territoires participent au Programme canadien de prêts aux étudiants en définissant les critères d'admissibilité, en évaluant les besoins et en désignant les établissements admissibles (le Québec, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut ne participent pas à ce programme, mais ils offrent des programmes similaires)Note de bas de page 71. Le programme a versé plus de 28,1 milliards de dollars en prêts et a ainsi aidé plus de 3,8 millions d'étudiantsNote de bas de page 71. Le Programme canadien de prêts aux étudiants et le Programme canadien de bourses aux étudiants, récemment améliorés et élargis, regroupent en un seul endroit l'aide fédérale octroyée aux étudiants. Ces deux programmes s'adressent principalement aux personnes à faible revenu ou à revenu moyen, à celles qui sont aux prises avec une invalidité permanente (d'autres formes d'aide aux études sont également mises à leur disposition), à celles qui ont des personnes à charge (à temps plein ou à temps partiel) ainsi qu'à celles qui souhaitent poursuivre des études à temps partielNote de bas de page 120, Note de bas de page 122. Les provinces et les territoires offrent également d'autres programmes d'aide financièreNote de bas de page 120, Note de bas de page 122. Des fonds supplémentaires ont permis d'accroître l'admissibilité au Programme canadien de prêts aux étudiants et au Programme canadien de bourses aux étudiants, par exemple, en offrant de l'éducation aux adultes dans les territoires (pour augmenter les possibilités d'emploi dans le Nord), en fournissant une aide financière additionnelle pour les études à l'étranger et en accordant un allègement fiscal sur les frais associés aux certificats professionnels (pour couvrir les frais d'examen, par exemple)Note de bas de page 444.

Ces programmes ont permis d'améliorer les résultats en matière d'éducation, lesquels se traduisent par une augmentation des inscriptions dans les programmes d'études et par un plus haut taux de réussite (obtention du diplôme). Cependant, le niveau d'endettement des jeunes et des jeunes adultes au Canada lorsqu'ils arrivent sur le marché du travail reste préoccupant. Bon nombre de jeunes adultes, qui n'ont pas les moyens de poursuivre des études postsecondaires sans aide financière, se retrouvent avec une dette importante au moment d'obtenir leur diplômeNote de bas de page 208, Note de bas de page 209. Bien que les programmes de prêts et de bourses permettent d'éliminer les obstacles économiques aux études postsecondaires, d'autres facteurs peuvent empêcher les jeunes et les jeunes adultes de poursuivre leurs étudesNote de bas de page 383, Note de bas de page 445. Par exemple, les personnes qui vivent en région rurale ou éloignée peuvent se heurter à des difficultés autres qu'économiques, comme la distance (qui limite l'accès à l'éducation) ou le peu d'importance accordée aux études dans certaines collectivités.

Le retour aux études

Bien que le Canada ait réduit son taux de décrochage au secondaire, certains jeunes et jeunes adultes n'obtiennent toujours pas leur diplôme. Des interventions peuvent encourager ces jeunes à reprendre leurs études ou à suivre une formation afin d'améliorer leurs chances sur le marché du travail. Beaucoup de décrocheurs du secondaire comptent retourner aux études plus tard dans la vie et le font la plupart du tempsNote de bas de page 193, Note de bas de page 194. Par exemple, les jeunes autochtones qui, généralement, quittent l'école plus tôt que les autres jeunes au Canada sont également plus susceptibles de faire un retour aux étudesNote de bas de page 123. Dans l'ensemble, les jeunes femmes sont plus nombreuses que les jeunes hommes à reprendre leurs études. Toutefois, la réussite n'est pas à la portée de tousNote de bas de page 194. Les programmes qui encouragent les jeunes et les jeunes adultes à retourner à l'école doivent tenir compte de facteurs essentiels tels que la motivation et la compatibilité avec d'autres responsabilités, comme celle d'être parent (particulièrement pour les jeunes femmes). Pour les jeunes hommes, le retour aux études est souvent motivé par des expériences sur le marché du travail, de bons résultats scolaires obtenus par le passé ou le désir d'occuper un autre emploi ou d'augmenter son revenuNote de bas de page 194. Pour mieux comprendre les obstacles qui empêchent les jeunes de réussir leurs études et mieux prévenir le décrochage chez les jeunes adultes, il serait nécessaire d'explorer davantage ces questions.

Le Centre for Aboriginal Human Resource Development est un centre d'apprentissage, situé à Winnipeg (Manitoba), qui vise à aider les jeunes adultes autochtones à obtenir leur diplôme d'études secondaires, à suivre une formation professionnelle et à accéder à des services d'emploi. Cet organisme communautaire fournit de l'aide financière, des services d'hébergement temporaire et des services de garde pour répondre aux besoins des jeunes parents qui étudient dans le cadre de l'un de ses programmes. Chaque année, depuis 30 ans, le Centre aide environ 1 200 étudiants à se trouver un emploiNote de bas de page 446, Note de bas de page 447.

Marché du travail

Pour bon nombre de jeunes canadiens, le travail à temps plein marque la fin de la transition entre la jeunesse et l'âge adulte. En général, le travail offre aux Canadiens des possibilités économiques qui peuvent se répercuter sur leur santé et sur celle de leur famille. Des recherches indiquent qu'il existe une importante gradation dans la prévalence des maladies et des années de vie perdues entre le quintile de revenu supérieur et chacun des quintiles de revenu inférieursNote de bas de page 448, Note de bas de page 449. Bien que le travail procure un revenu et favorise un sentiment d'appartenance, deux facteurs liés à la santé, il peut également avoir des effets importants sur la santé physique et mentale (voir les sections « Stratégies en milieu de travail » et « Prévention des blessures en milieu de travail », plus loin dans ce chapitre).

Comme nous l'avons vu aux chapitres 2 et 3, accéder au marché du travail pour la première fois n'est pas facile. Une récession, une dépression économique ou d'autres situations économiques incertaines peuvent rendre l'expérience encore plus difficileNote de bas de page 72, Note de bas de page 73. Le manque d'expérience et de compétences pratiques constitue un autre obstacle auquel se heurtent les jeunes et les jeunes adultes au moment de faire leur entrée sur le marché du travail. Certains programmes aident les jeunes et les jeunes adultes au Canada à acquérir les connaissances et les compétences dont ils ont besoin pour décrocher un emploi à temps pleinNote de bas de page 72, Note de bas de page 126. D'autres leur fournissent un soutien au point de vue de la recherche d'emploi, du placement en milieu de travail et de l'apprentissage. C'est le cas de la Stratégie emploi jeunesse, qui propose entre autres les programmes suivants :

  • le programme Connexion compétences aide les jeunes de 15 à 30 ans qui éprouvent des difficultés (par exemple, les décrocheurs, les parents seuls, les jeunes autochtones, les nouveaux immigrants, les jeunes des milieux ruraux, les jeunes handicapés) à trouver un emploi et à acquérir des compétences professionnelles utiles;
  • le programme Objectif carrière aide les diplômés de niveau postsecondaire à acquérir des compétences et à trouver un emploi dans leur domaine d'études;
  • le programme Expérience emploi été fournit un soutien financier aux employeurs afin qu'ils créent des emplois d'été à l'intention des élèves de niveau secondaire et postsecondaireNote de bas de page 72.

Un tout nouveau programme, le programme Éco-stages jeunesse permet aux jeunes et aux jeunes adultes au Canada d'acquérir de l'expérience en milieu de travail, en leur offrant la possibilité de faire un stage rémunéré de trois à douze mois au sein d'organismes caritatifs, coopératifs, bénévoles ou à but non lucratif. En plus de favoriser l'acquisition d'expérience, le programme Éco-stages jeunesse appuie l'emploi dans le secteur communautaire et environnementalNote de bas de page 450. Les mesures de création d'emplois qui encouragent les employeurs à offrir aux étudiants et aux nouveaux diplômés des postes à court et à long terme sont importantes, car elles permettent aux jeunes et aux jeunes adultes d'acquérir des compétences, de la confiance et de l'expérience. Par exemple, Jeunesse Canada au travail aide les employeurs à créer, à l'intention des jeunes et des jeunes adultes, des possibilités de consolider leurs connaissances et de s'initier au domaine de la conservation du patrimoine et de la culture. Ce programme s'associe à la Fondation Héritage Canada, à Patrimoine canadien et à la Stratégie emploi jeunesse en vue d'offrir des emplois d'été et des stages destinés aux nouveaux diplômésNote de bas de page 126.

Collectivités en santé

Le milieu scolaire et le monde du travail peuvent influer sur la santé actuelle et sur la santé à long terme. Le milieu bâti, qui fait partie de notre environnement physique, comprend les immeubles, les parcs, les écoles, les routes et tout autre élément d'infrastructure. L'aménagement urbain, le réseau de transports et la façon dont est conçu le milieu bâti ont des effets sur la santé de la population parce qu'ils influencent la quantité et l'accessibilité des activités physiques récréatives et utilitaires et la facilité avec laquelle il est possible de les pratiquer. Les résidants de quartiers où l'aménagement urbain est mixte (c'est-à-dire où l'on trouve des magasins, des écoles et des centres d'emploi accessibles à pied) sont plus actifs que ceux de quartiers conçus en fonction de l'automobile. Un lien a d'ailleurs été établi entre l'étalement des quartiers résidentiels à usage unique et le taux élevé d'obésitéNote de bas de page 451. Les moyens de transport actif, comme la marche et le vélo, peuvent représenter une bonne partie de l'activité physique quotidienne recommandée par la Société canadienne de physiologie de l'exerciceNote de bas de page 131. L'accès à des installations et à des sentiers récréatifs, leur esthétisme et l'impression de sécurité qu'ils inspirent contribuent également à augmenter l'activité physique. Enfin, selon leur emplacement, certains quartiers offrent un accès facile à des aliments nutritifs et bon marchéNote de bas de page 452.

Dans le Rapport de l'administrateur en chef de la santé publique sur l'état de la santé publique au Canada, 2009, le milieu bâti est présenté comme un secteur d'intervention important qui peut contribuer à réduire le nombre d'enfants atteints d'embonpoint ou d'obésitéNote de bas de page 30. De fait, le niveau d'activité physique est considérablement plus élevé et le taux d'obésité plus faible dans les quartiers où il est facile de se déplacer à piedNote de bas de page 9, Note de bas de page 451. Davantage d'enfants et de jeunes sont obèses et en surpoids dans les quartiers défavorisés où il est difficile d'avoir accès à des aliments sains et à des installations récréatives et où les problèmes de sécurité sont plus grandsNote de bas de page 30. De la même façon, les quartiers où le taux de criminalité est élevé et où la circulation est rapide ou dense rendent difficile la pratique d'activités extérieures (pour d'autres renseignements sur l'embonpoint et l'obésité chez les jeunes, voir la section intitulée « Promouvoir un poids santé et un mode de vie sain », plus loin dans ce chapitre.) L'environnement peut également avoir des effets directs et indirects sur la santé mentale et le bien-être, ce qui peut se manifester par des épisodes de détresse, des signes de dépression et des problèmes de comportement. D'ailleurs, des données témoignent de la relation étroite qui existe entre les expériences vécues dans un environnement naturel, les capacités d'apprentissage et l'état de santé et de bien-être (par exemple, le niveau de stress, l'hyperactivité avec déficit d'attention et le fonctionnement cognitif)Note de bas de page 453.

Les jeunes et les jeunes adultes au Canada ont un rôle à jouer dans l'élaboration des politiques et des programmes qui influent sur leur santé et leur bien-être ainsi que sur l'ensemble de leur environnement social. Communities That Care (CTC), par exemple, permet aux collectivités de participer à la planification et à la mise en œuvre de programmes de prévention qui sont basés sur des faits démontrés et sont offerts aux jeunes de 13 à 17 ans. Ce programme aide les décideurs à choisir et à instaurer des programmes fondés sur des données probantes qui répondent aux besoins d'une population en particulier. L'objectif est de favoriser un développement sain et de s'attaquer à l'abus de substances nocives, à la délinquance, à la violence, à la grossesse chez les adolescentes, au décrochage scolaire, à l'absentéisme et aux problèmes de santé mentale. Des évaluations menées dans les collectivités américaines qui ont eu recours à CTC ont permis de noter, chez les participants, une baisse des facteurs de risque, du taux de criminalité et de la consommation de substances nocivesNote de bas de page 454, Note de bas de page 455. Certaines villes de la Colombie-Britannique et de l'Ontario qui ont utilisé le programme ont aussi obtenu des résultats positifs, mais des évaluations plus poussées sont nécessaires pour déterminer si CTC peut être appliqué avec succès au CanadaNote de bas de page 454.

Cultiver la résilience

La résilience désigne la capacité de surmonter les épreuves et les difficultés. Un grand nombre de facteurs dynamiques et non linéaires (comme la personne elle-même, les relations qu'elle entretient, son milieu de vie et son environnement physique) sont des facteurs qui agissent sur la résilience. Selon une définition plus complète, la résilience est la capacité d'une personne de surmonter les épreuves et de chercher à obtenir les soins et le soutien social dont elle a besoin; c'est aussi la capacité de recevoir ces soins et ce soutien auprès de sa famille, de sa collectivité et de son groupe culturelNote de bas de page 456-460.

La résilience est au cœur des questions traitées dans ce rapport en raison du rôle qu'elle joue dans la réussite du passage à l'âge adulte et de son effet déterminant sur la santé et le bien-être à long terme. On reconnaît généralement que la résilience est nécessaire pour surmonter les épreuves et qu'elle nécessite des aptitudes et des habiletés qui permettent de vaincre les difficultés. Tout le monde doit développer une force de résilience afin d'acquérir des aptitudes et des compétences et de s'entourer de la protection nécessaire pour traverser les épreuves de la vie. Le fait d'assurer le sain développement des enfants et des jeunes et de renforcer leurs acquis favorise de saines transitions. Les influences et les facteurs liés à l'enfance, comme les mauvais traitements et la négligence, peuvent avoir des effets dommageables sur la capacité à surmonter les difficultésNote de bas de page 461.

L'étude longitudinale de Kauai : une étude sur la résilience

L'étude longitudinale de Kauai, à Hawaï, a permis de suivre le développement de personnes à risque (en raison de complications prénatales ou périnatales, ou parce qu'elles vivaient dans la pauvreté ou dans un milieu familial conflictuel) de leur naissance, en 1955, jusqu'à la quarantaine. Cette enquête a permis d'étudier les facteurs qui ont une incidence sur le passage à l'âge adulte, notamment les facteurs de risque biologiques et psychosociaux, les expériences stressantes et les facteurs de protection. Dès l'âge de deux ans, les deux tiers des personnes à risque présentaient des problèmes d'apprentissage et de comportement. L'autre tiers ne présentait pas ce type de problèmes et avait acquis, avant la fin de l'adolescence, la capacité de résoudre des problèmes et de se fixer des objectifs d'avenir, ambitieux mais réalistes. Les jeunes qui ont réussi à s'adapter à l'âge adulte ont surmonté les épreuves grâce à trois types de facteurs de protection : des facteurs individuels, comme la sociabilité, la conscience de soi et l'empathie; des facteurs familiaux, comme un milieu stimulant; des facteurs communautaires, comme le soutien des aînés, des pairs, des enseignants, des voisins, des parents, du petit ami ou de la petite amie, des jeunes dirigeants, des pasteurs et des membres de l'Église. En particulier, les personnes qui ont pu établir, en bas âge, des relations avec des adultes sur qui elles pouvaient compter présentaient un meilleur état de santéNote de bas de page 386.

La recherche sur la résilience : le Resilience Research Centre du Canada

Le Resilience Research Centre de l'Université Dalhousie à Halifax (Nouvelle-Écosse) étudie la façon dont les enfants, les jeunes et les familles surmontent les épreuves en observant, au-delà de la résilience individuelle, le milieu social et l'environnement physiqueNote de bas de page 465.

Dans le cadre d'un projet international sur la résilience, une équipe de chercheurs a créé la Child and Youth Resilience Measure, un outil de mesure comptant 28 éléments qui est utilisé dans divers milieux de recherche dans le monde pour comprendre les facteurs associés à la résilience. Au Canada, les sites de recherche ont examinés les régions du Nord (le Centre-Nord du Labrador) et les régions du Sud (Winnipeg et Halifax)Note de bas de page 456. Dans le Sud, les jeunes attachaient une grande importance aux facteurs individuels, comme rester réalistes, prendre conscience de leur identité et améliorer leur confiance en soiNote de bas de page 466. Dans le Nord, les participants – principalement des jeunes innus du Nord du Labrador – insistaient, quant à eux, sur l'importance de la collectivité pour surmonter les épreuves, et ils ont affirmé que le développement de la résilience passait par la résolution des problèmes au sein de la collectivité, comme l'isolement et l'abus de substances nocivesNote de bas de page 467. À partir de cette information, il est possible d'adapter les interventions de manière à travailler sur les forces individuelles et collectives tout en examinant dans quel contexte la résilience peut être développée. Les programmes qui visent à accroître la résilience chez les jeunes et les jeunes adultes doivent tenir compte des connaissances locales, prendre en considération le contexte et les besoins de la population et comprendre ce qui contribue à la résilienceNote de bas de page 456.

D'autres travaux de recherche se sont intéressés à la résilience et à son importance pour faciliter le passage à l'âge adulte, dans le contexte de l'acquisition des compétences et des aptitudes à la prise de décision. Le projet Stories of Transition, par exemple, consiste à suivre des jeunes adultes pendant dix ans, après la fin de leur secondaire, afin d'examiner les choix qu'ils exercent, les études et la formation qu'ils suivent et les emplois qu'ils occupent. Selon les résultats de quatre milieux de recherche, soit la province de l'Île-du-Prince-Édouard, et les villes de Halifax (Nouvelle-Écosse), Guelph (Ontario) et Calgary (Alberta), les jeunes explorent les possibilités qui s'offrent à eux seulement pendant une courte période, de la fin de l'adolescence à la mi-vingtaine. Les participants ont indiqué avoir reçu peu d'information et de conseils en matière d'emploi, mais un bon nombre ont néanmoins affirmé avoir subi des pressions pour se trouver un emploi et s'établirNote de bas de page 468.

La résilience se définit de bien des façons, et les opinions varient quant au rôle qu'elle joue dans l'état de santé d'une personne et aux facteurs individuels et généraux qui peuvent l'influencerNote de bas de page 462. Les nombreux travaux de recherche sur la résilience qui ont été effectués au cours des deux dernières décennies ont démontré que les jeunes sont plus souvent confrontés à des épreuves (milieu défavorisé, pauvreté, mauvais traitements), mais que certaines interventions peuvent les aider à accroître leur résilienceNote de bas de page 461. Des études longitudinales, comme la classique étude longitudinale de Kauai, ont largement contribué à la recherche sur la résilience (voir l'encadré intitulé « L'étude longitudinale de Kauai : une étude sur la résilience »). En effet, elles ont permis de cerner avec précision les facteurs de protection et ceux qui prédisposent à la résilienceNote de bas de page 386, Note de bas de page 461. Ces études ont également démontré comment les facteurs de protection peuvent favoriser l'adaptation et comment certains processus d'ordre biologique, psychologique et social peuvent, au fil du temps, déterminer la capacité d'une personne de s'adapter à différentes situationsNote de bas de page 461.

La résilience influe sur la façon dont les gens s'adaptent aux difficultés tout au long de leur vie. Cette capacité d'adaptation est souvent influencée par la conscience de soi, par les relations interpersonnelles et par la façon dont une personne gère les divers aspects de sa vieNote de bas de page 384. On peut améliorer sa force de résilience en resserrant ses liens avec les autres, en trouvant des solutions aux problèmes, en agissant avec indépendance et en développant un bon esprit de décisionNote de bas de page 384, Note de bas de page 385. Pour la plupart des jeunes et des jeunes adultes au Canada, la résilience naît de ce que la chercheuse A. S. Masten appelle « la magie ordinaire », qui se trouve dans leurs expériences personnelles, leurs liens familiaux, leurs relations et leurs collectivitésNote de bas de page 385. Les personnes pour lesquelles il y a lieu de s'inquiéter sont celles qui ne disposent pas d'un système de protection de base (par exemple, absence de soutien social), qui ont du mal à gérer les traumatismes psychologiques et affectifs et les interruptions dans leur développement et qui sont incapables de se faire confiance, de se respecter, de se fixer des objectifs réalistes ou de résoudre des problèmes qui leur permettraient de survivre, de s'épanouir et d'établir des relations d'entraide et de collaborationNote de bas de page 463.

Les programmes les plus efficaces mettent l'accent sur la résilience chez les jeunes enfants de façon à la faire croître au cours de leur vieNote de bas de page 384. Cependant, de plus amples recherches permettraient de déterminer comment les parents, les enseignants et les travailleurs de première ligne pourraient aider les enfants et les jeunes à développer, préserver, rétablir et entretenir leur capacité à surmonter les difficultésNote de bas de page 464. Bien que la plupart des jeunes et des jeunes adultes au Canada soient en bonne santé, le fait que la population soit considérée comme homogène a pour conséquence que l'on ne tient pas compte de sa réelle diversité, qui varie selon le genre, la culture, la sexualité et l'origine ethnique. Des travaux de recherche sur la résilience sont en cours au Canada et ailleurs (voir l'encadré intitulé « La recherche sur la résilience : le Resilience Research Centre du Canada »).

La résilience se développe différemment chez les adolescents et les adolescentes. Chez les adolescents, les notions traditionnelles rattachées au «code de conduite masculin» sont fondées sur le courage, la force, la honte et un faible attachement affectif. Ces attitudes, qui masquent souvent la vraie résilience, peuvent nuire à l'établissement de relations saines et compromettre la santé mentale et le bien-être en généralNote de bas de page 469, Note de bas de page 470. Pour la plupart des adolescents, être fort se fait souvent au prix des relations avec les autres. Ainsi, renforcer la résilience des adolescents, c'est leur donner l'occasion d'établir des amitiés durables fondées sur la confiance (ce type d'amitié est plus fréquent chez les filles) et les encourager à entretenir des amitiés platoniques avec des filles (parce que celles-ci font généralement preuve de plus d'empathie et leur permettent d'exprimer davantage leurs sentiments). C'est aussi leur apprendre à exprimer une multitude d'émotions et à se choisir de bons conseillers, particulièrement parmi les membres masculins de la familleNote de bas de page 469. La résilience peut créer des différences entre les adolescents et les adolescentes au point de vue des travaux et de la persévérance scolaires et peut, par conséquent, avoir des effets sur la santé et le bien-être à long termeNote de bas de page 469.

La recherche sur les facteurs de protection et la résilience chez les adolescentes

S'appuyant sur les données de la National Longitudinal Study of Adolescent Health, le département de la Justice des États-Unis a constaté que de nombreuses adolescentes ayant adopté des comportements délinquants avaient été victimes de négligence, avaient subi des agressions physiques et sexuelles ou avaient vécu dans des quartiers défavorisésNote de bas de page 471. Il est toutefois important de noter que les comportements délinquants ne s'observent pas uniquement chez les adolescentes considérées comme à risque. L'étude a démontré que la présence d'un adulte attentionné, les bons résultats scolaires, le sentiment d'appartenance à l'école et les facteurs communautaires pouvaient favoriser la protection et la prévention. Cependant, dans de nombreux cas, ces facteurs de protection n'étaient pas suffisants pour annuler les effets des antécédents (comme ceux liés à une agression)Note de bas de page 471. Une recherche canadienne portant sur les comportements sexuels à risque chez les adolescentes de 12 à 17 ans ayant subi de la violence sexuelle a démontré que les risques d'adopter des comportements malsains augmentent en fonction de la gravité des actes subisNote de bas de page 472. Les interventions cliniques et le dépistage précoce semblent prometteurs pour améliorer la capacité d'adaptation et les aptitudes à la prise de décision. Cependant, d'autres recherches seraient nécessaires pour mesurer l'efficacité de ces interventions à améliorer la résilience chez les adolescentes à risqueNote de bas de page 471.

À l'adolescence, on peut observer, chez beaucoup de filles, une baisse de l'estime de soi et de la confiance en soi. Comparativement aux adolescents, les adolescentes ont davantage tendance à être pessimistes (par rapport à elles-mêmes et par rapport à la société), à anticiper les échecs en se basant sur leur expérience passée, à se blâmer et à se critiquer. Ainsi, les adolescentes sont plus susceptibles d'être déprimées et d'avoir une image négative d'elles-mêmes, ce qui les amène à perdre leur intelligence relationnelle et à détruire des relations sincèresNote de bas de page 470. Toutefois, comparativement aux adolescents, les adolescentes trouvent davantage de soutien auprès de leur réseau social et saisissent plus facilement les occasions d'exprimer leurs émotions. L'éducation et la formation axée sur les compétences sont essentielles pour améliorer les aptitudes, les acquis et les relations chez les filles et leur apprendre à replacer les problèmes dans un contexte social plus large (c'est-à-dire de les voir d'un point de vue extérieur à elles-mêmes), à déterminer où elles peuvent obtenir du soutien et à faire obstacle aux influences négatives pour les remplacer par des influences plus positives. Cultiver la résilience chez les adolescentes leur donne également le courage de s'affirmerNote de bas de page 470.

La résilience chez les jeunes LGBTQ se développe également dans un contexte familial, scolaire et socialNote de bas de page 249. Ces jeunes, dont on exige qu'ils se conforment aux normes de développement et de socialisation hétérosexuelles et traditionnellement associées aux genres, sont susceptibles d'être réduits à l'isolement, d'être stigmatisés et de faire preuve d'une faible résilience. Pour accroître la résilience chez les jeunes marginalisés, il faut leur donner les moyens de surmonter les épreuves avec confiance, de résister à la discrimination et à l'intimidation et de participer à la société afin d'établir des relations d'entraide et de collaborationNote de bas de page 21. L'Institute for Sexual Minority Studies and Services de l'Université de l'Alberta à Edmonton effectue des travaux de recherche sur les acquis nécessaires pour améliorer la résilience. Il s'est servi de résultats de recherche pour concevoir et mettre en œuvre deux programmes prometteurs : le Youth Intervention and Community Outreach Worker Program, qui fournit pendant un an de l'aide individuelle et du soutien social aux jeunes de la région d'Edmonton, et Camp fYrefly, un camp national qui vise à développer l'esprit d'initiative chez les jeunes des minorités sexuelles et les jeunes de genre variableNote de bas de page 20. Ces deux programmes mettent l'accent sur des méthodes d'enseignement communautaires fondées sur l'art afin d'aider les jeunes à améliorer leur résilience et leur esprit d'initiative, et ce, dans un environnement qui favorise le développement individuel, la socialisation et l'estime de soiNote de bas de page 20, Note de bas de page 21. L'objectif est d'apprendre aux jeunes qu'ils ont le pouvoir d'apporter une contribution utile à leur vie, à leur milieu d'apprentissage, à leur milieu familial ou de groupe et à leur collectivitéNote de bas de page 20, Note de bas de page 473.

Réduire les comportements à risque

Les risques font partie de la vie et s'observent dans les innombrables activités que nous accomplissons au quotidienNote de bas de page 149. Nous prenons des risques à tout âge, et cette étape est essentielle à l'apprentissage et au développement des jeunes et des jeunes adultes. Toutefois, pendant les périodes de transition, les rôles, les relations, les expériences et les attentes évoluent. Dans ce contexte, acquérir de nouvelles aptitudes et vivre des expériences nouvelles peut avoir des effets bénéfiques ou des effets néfastes sur la santéNote de bas de page 10. Les comportements acquis en bas âge peuvent durer toute la vie, et certains d'entre eux peuvent prémunir contre des troubles de santé chroniques ou peuvent être considérés comme des facteurs de risque à long termeNote de bas de page 10, Note de bas de page 386. Par exemple, le tabac, qui est un facteur de risque associé à certaines maladies chroniques, est un comportement adopté à l'adolescence (avant 20 ans) par 87 % des adultes au Canada ayant déclaré avoir fumé (voir le chapitre 3 pour d'autres détails sur le sujet)Note de bas de page 355.

Les comportements à risque sont complexes. Bien que, en réalité, les comportements restent des choix personnels, ils sont influencés par l'environnement social et économique dans lequel une personne travaille, apprend, vit et s'amuse. Lorsque cet environnement est déficient, il devient difficile de faire des choix sains. Ainsi, certaines personnes sont plus susceptibles que d'autres d'adopter des comportements à risque et ainsi de s'exposer à des blessures ou à des maladies. Lorsqu'on examine les comportements à risque, il faut donc tenir compte des déterminants de la santé et des conditions dans lesquelles certains jeunes et jeunes adultes vivent leurs transitions. Ces conditions peuvent être déterminées par des processus biologiques ainsi que par des déterminants et des comportements sociauxNote de bas de page 10. De façon générale, les données montrent que, chez les jeunes et les jeunes adultes, les comportements à risque sont souvent liés les uns aux autresNote de bas de page 10, Note de bas de page 474. Par exemple, les fumeurs réguliers sont généralement plus portés à consommer de l'alcool et des drogues illicitesNote de bas de page 10, Note de bas de page 474.

Certaines mesures font aussi appel à la sensibilisation pour apprendre aux jeunes et aux jeunes adultes à cerner et à gérer les risques, puis à appliquer cette nouvelle aptitude tout au long de leur vie (voir l'exemple de SauveQuiPense dans la section intitulée « Stratégies globales de prévention des blessures » du présent chapitre). Cette approche les amène à effectuer des choix judicieux (ou moins risqués) lorsqu'il y a risque de blessureNote de bas de page 149. Cependant, des programmes plus ciblés devraient être élaborés afin de répondre aux besoins de certains groupes de population qui bénéficient d'un soutien limité (un revenu modeste, un faible niveau de scolarité et un manque de soutien social) ou qui n'ont pas de bons modèles de conduite auxquels se rattacher. Ne pas répondre aux besoins de ces groupes de population pourrait entraîner d'autres inégalités en matière de santé.

Une étude menée en Écosse a montré qu'il existe un lien entre la consommation de substances nocives chez les jeunes et les jeunes adultes (peu importe le sexe) et les comportements sexuels à risqueNote de bas de page 474. Même si l'on sait que certains risques sont liés les uns aux autres, on dispose de peu de données et d'évaluations sur les interventions qui visent à prévenir à la fois la consommation de substances nocives et les comportements sexuels à risqueNote de bas de page 474. Des analyses ont démontré que les mesures qui ciblent un seul comportement à risque étaient prometteuses. Par exemple, les interventions stratégiques axées sur le contrôle des produits du tabac et de l'alcool ont permis de réduire les comportements à risqueNote de bas de page 474. Cependant, il demeure difficile de trouver des interventions efficaces qui portent sur l'ensemble des comportements à risque, et celles qui ont déjà été tentées en milieu scolaire, sous forme de programme de formation axé sur les aptitudes sociales et les connaissances pratiques, se sont révélées peu concluantes à long terme. Par contre, les interventions qui ciblent quatre grands domaines de risque (c'est-à-dire l'individu, la famille, l'école et la collectivité) ont donné de meilleurs résultatsNote de bas de page 474. En effet, certains programmes, comme le Renforcement des familles pour l'avenir (dont la version canadienne est décrite dans l'encadré intitulé « Bâtir des familles solides : le programme Triple P- Le programme de pratiques parentales positives et le Renforcement des familles pour l'avenir »), ont mené à la réduction des problèmes d'abus de substances nocives. Pour renforcer les facteurs de protection et ainsi minimiser les risques, ces interventions doivent examiner le contexte social, la nature évolutive des facteurs d'influence, les changements sociaux et l'importance des étapes de transitionNote de bas de page 474. Elles doivent également tenir compte du rôle que jouent les réseaux et les médias sociaux sur la santé des jeunes et des jeunes adultes d'aujourd'hui. C'est pourquoi d'autres travaux de recherche seraient nécessaires pour concevoir, adapter et évaluer les interventions susceptibles de prévenir les comportements à risque, pris isolément ou en association avec d'autres, en tenant compte des différences de comportements observées au sein de la population, et ce, dans le but de réduire la marginalisation et l'exclusionNote de bas de page 474.

Favoriser la santé mentale et les facteurs de protection

Bon nombre de facteurs et d'expériences vécues pendant l'enfance peuvent avoir une incidence sur les risques, pour les jeunes et les jeunes adultes, de développer des maladies mentales et des problèmes de santé mentale qui peuvent avoir des répercussions tout au long de la vie. La privation, les mauvais traitements, la négligence, un faible poids à la naissance ainsi que la situation d'emploi des parents, leur niveau de scolarité, leur santé mentale et leurs compétences parentales en sont quelques exemplesNote de bas de page 210, Note de bas de page 475, Note de bas de page 476. Le rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie intitulé De l'ombre à la lumière : La transformation des services concernant la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie au Canada met en évidence l'importance des efforts déployés en amont pour favoriser le bien-être affectif et social et, dans la mesure du possible, pour prévenir les maladies mentales et promouvoir le bien-être et la santé mentale dès le tout jeune âgeNote de bas de page 477. Les programmes qui visent à bâtir des familles solides et qui combinent les interventions en milieu familial et communautaire ont permis d'améliorer le bien-être des jeunes parents et celui de leurs enfants en créant des milieux plus favorables, en facilitant l'accès aux soins et en éliminant les obstacles qui les empêchent d'obtenir l'aide dont ils ont besoinNote de bas de page 47, Note de bas de page 478. Les interventions en milieu de travail peuvent également accroître le bien-être des parents en favorisant une bonne santé et en s'attaquant aux problèmes de santé mentale. Par exemple, un milieu de travail flexible permet aux familles de s'occuper de leurs problèmes de santé et encourage les parents à participer à la vie de leurs enfantsNote de bas de page 479. Les programmes communautaires peuvent faciliter l'inclusion sociale et contribuer au développement du capital social, deux importants déterminants de la santé mentaleNote de bas de page 478. Les interventions qui favorisent la santé mentale et le bien-être doivent permettre de reconnaître et d'examiner les déterminants socioéconomiques de la santé et les autres facteurs qui permettent aux enfants et aux jeunes d'accroître leur résilience (voir la section intitulée « Cultiver la résilience », dans les pages précédentes).

Les interventions les plus efficaces en santé mentale, particulièrement pour les populations à risque, sont celles qui :

  • s'inscrivent dans la duréeNote de bas de page 480, Note de bas de page 481;
  • tiennent compte de l'âge, de la culture et du genre;
  • comportent plusieurs volets de façon à cibler plus d'un élément;
  • sont menées en bas âge et mettent l'accent sur les relations et le développement cognitif;
  • sont destinées aux personnes, aux familles et aux collectivitésNote de bas de page 482.

La section qui suit examine :

  • les interventions destinées aux jeunes;
  • la promotion de la santé mentale en milieu scolaire;
  • l'accès aux services de santé mentale;
  • la promotion de la santé mentale et la littératie en santé mentale;
  • la lutte contre la stigmatisation associée à la maladie mentale;
  • les stratégies globales de promotion de la santé mentale et du bien-être.

Interventions destinées aux jeunes

De nombreuses maladies mentales se manifestent d'abord à l'adolescence. Les interventions qui s'adressent aux jeunes peuvent donc aider à résoudre les problèmes de santé mentale et favoriser le bien-être mentalNote de bas de page 210, Note de bas de page 478, Note de bas de page 482. Bien que les programmes généraux soient les moins coûteux à mettre en place, les programmes ciblés, par exemple ceux qui sont axés sur la prévention de la dépression, se révèlent les plus efficaces chez les jeunesNote de bas de page 482, Note de bas de page 483. Les programmes qui s'adressent spécialement aux jeunes à risque comprennent les thérapies comportementales et cognitives, les mesures de prévention et les programmes d'éducation en milieu scolaire (voir la section « Promotion de la santé mentale en milieu scolaire »).

La thérapie comportementale et cognitive vise à renforcer les aptitudes sociales et les compétences en résolution de problèmes qui, au fil du temps, permettent d'améliorer la résilience, de combattre l'isolement social et de réduire les mauvais résultats scolaires chez les jeunes à risqueNote de bas de page 478. Dans le cadre d'essais contrôlés randomisés, les thérapies comportementales et cognitives ont eu des effets positifs sur la santé mentale, notamment en réduisant les signes de dépression après la thérapie et entre les suivis. Les interventions les plus longues, celles comportant dix séances ou plus, étaient les plus efficacesNote de bas de page 478, Note de bas de page 484. Des études menées à l'étranger ont par ailleurs montré que la thérapie comportementale et cognitive donne de meilleurs résultats cliniques et offre un meilleur rapport coût-efficacité. Malgré tout, elle est rarement offerte au Canada. Il faudrait effectuer d'autres recherches pour déterminer sa rentabilité et son efficacité au paysNote de bas de page 478, Note de bas de page 482, Note de bas de page 485.

Les programmes d'intervention portant sur la dépression chez les jeunes ont permis de réduire de façon importante les symptômes de dépressionNote de bas de page 483. Tout particulièrement, ces interventions se sont avérées plus efficaces chez les filles à la fin de l'adolescence et chez les jeunes des minorités ethniques présentant des taux élevés de dépression déclarée. Dans l'ensemble, les programmes de prévention offerts par un spécialiste (plutôt que par un enseignant, par exemple), qui s'étalaient sur une courte période et qui proposaient un devoir ou un exercice à faire à la maison ont généré de meilleurs résultatsNote de bas de page 478, Note de bas de page 482, Note de bas de page 483.

Les programmes de prévention de la consommation d'alcool, de tabac et de drogues qui s'adressent spécifiquement à chaque genre sont également plus efficaces que ceux destinés aux deux sexesNote de bas de page 486. En effet, les programmes qui favorisent l'identité sexuelle offrent généralement un meilleur soutien aux adolescentes et aux jeunes femmes en période de transition et leur permettent d'acquérir les aptitudes nécessaires pour améliorer leur résilience et établir des relations sainesNote de bas de page 486. À partir d'une analyse critique, le Centre de toxicomanie et de santé mentale a défini plusieurs pratiques de promotion de la santé mentale qui abordent efficacement les problèmes de consommation et d'abus de substances nocives chez les jeunes. Voici celles qui s'appliquent tout particulièrement à ce groupe d'âge :

  • cerner et modifier les facteurs de risque et les facteurs de protection qui influent sur les problèmes de santé mentale;
  • intervenir dans différents milieux, en particulier en milieu scolaire, et faire appel à plusieurs approches;
  • mettre l'accent sur l'acquisition de nouvelles aptitudes, le renforcement de l'autonomie, le développement de l'autoefficacité et la résilience individuelle;
  • former des non-professionnels aptes à créer des relations basées sur l'entraide et la confiance;
  • fournir un soutien complet axé sur les rapports parent-enfant, les relations entre les pairs et le rendement scolaire;
  • fournir de l'information et des services adaptés à la culture, équitables et holistiquesNote de bas de page 487.

Promotion de la santé mentale en milieu scolaire

Même si les interventions précoces, comme celles qui s'adressent aux enfants de niveau préscolaire et primaire, ne sont pas étudiées dans le cadre du présent rapport, leurs avantages ne doivent pas être sous-estimés pour autantNote de bas de page 477, Note de bas de page 478. Déterminer qui sont les jeunes et les jeunes adultes à risque et offrir des services d'intervention précoce permet de réduire la prévalence des problèmes de santé mentale qui pourraient survenir plus tard dans la vie. Puisque 69 % des jeunes et des jeunes adultes ayant reçu un diagnostic de trouble d'anxiéte ou de trouble de l'humeur ont déclaré que leurs premiers symptômes se sont manifestés avant l'âge de 15 ans, les écoles pourraient donc jouer un rôle de premier plan afin de déceler ces problèmes rapidement, de réduire la stigmatisation et de promouvoir des stratégies efficacesNote de bas de page 210, Note de bas de page 488. Les interventions précoces favorisent, en effet, l'appartenance sociale et l'apprentissage affectifNote de bas de page 489. Les écoles sont un lieu d'interaction sociale où il est possible d'exercer sur les jeunes une influence durableNote de bas de page 481.

Les équipes de spécialistes en milieu scolaire sont habituellement composées d'enseignants, de travailleurs sociaux et d'intervenants auprès des enfants et des jeunes qui ont tous un rôle à jouer pour dépister les problèmes de santé mentale, faciliter l'accès aux services de santé mentale et orienter les jeunes vers ces servicesNote de bas de page 490. Dans la mesure où les programmes en milieu scolaire constituent un moyen efficace de joindre les jeunes, on s'est inquiété du changement dans la composition des équipes de soutien ainsi que dans la portée de leur action. Mais, depuis quelque temps, les enseignants reçoivent une formation qui leur permet de détecter les problèmes de santé mentale et de mettre en œuvre des programmes en classe pour appuyer le travail des spécialistes de la santé et des services sociauxNote de bas de page 490.

Accès aux services de santé mentale

La CSMC a défini les grandes lignes d'une vaste stratégie en matière de santé mentale (voir la section intitulée « Stratégies globales de promotion de la santé mentale et du bien-être »), ce qui montre l'importance pour les jeunes et les jeunes adultes d'avoir accès à des services de santé mentale qui répondent à leurs besoinsNote de bas de page 226, Note de bas de page 477. Mettre en place des services adaptés aux jeunes et aux jeunes adultes représente un défide taille étant donné les risques de dépendance, de consommation de substances nocives, de problèmes de santé sexuelle et de comportements agressifs qui accompagnent les problèmes de santé mentaleNote de bas de page 226, Note de bas de page 491.

Pour de nombreux jeunes et jeunes adultes, s'adresser à un établissement de soins primaires semble indiquer une maladie et crée de l'incertitude et des inquiétudes liées à la confidentialitéNote de bas de page 491. De plus, les gens ont souvent l'impression que les services de santé mentale sont conçus expressément pour les adultes et que, par conséquent, ils ne sont pas adaptés aux besoins ni à la réalité des jeunes et des jeunes adultes. À l'aide de ressources adéquates, les écoles pourraient offrir des services de santé mentaleNote de bas de page 491, Note de bas de page 492. D'ailleurs, les enseignants et les travailleurs sociaux sont les adultes les plus susceptibles de remarquer les symptômes, de constater les problèmes qu'ils causent et de recevoir les confidences des jeunes. Les spécialistes, eux, peuvent diagnostiquer les comportements et les symptômes et orienter rapidement les jeunes vers les services appropriésNote de bas de page 490, Note de bas de page 493. S'attaquer aux problèmes de santé mentale grâce à des programmes mis en place dans les écoles constitue une bonne façon d'entreprendre la lutte contre la stigmatisation, de cultiver la résilience et d'éliminer les obstacles qui empêchent les jeunes de recevoir les services appropriés.

En raison des limites d'âge et des seuils d'admissibilité, beaucoup de jeunes adultes qui atteignent 18 ou 19 ans n'ont plus accès aux services sociaux ni aux services de santéNote de bas de page 477, Note de bas de page 494. Le fait d'offrir des services en fonction de l'âge ne tient pas nécessairement compte de l'état de santé des jeunes ni de leur degré de maturité. Les services qui s'adressent aux adultes peuvent être méconnus des jeunes, leur sembler imprécis ou inappropriés sur le plan culturelNote de bas de page 225, Note de bas de page 494. Idéalement, les services devraient être progressifs afin d'assurer la continuité du traitement. En effet, les organisations devraient offrir de vastes programmes qui intégreraient tous les secteurs d'intervention et favoriseraient une approche systémique de la santé afin de s'attaquer aux problèmes à partir de l'enfance jusqu'à l'âge adulteNote de bas de page 495. De plus, la coordination entre les services permettrait de s'assurer que la limite d'âge est uniformisée entre les services sociaux, les services de santé et les services juridiques ainsi que dans les provinces, les territoires et les municipalitésNote de bas de page 494.

Promotion de la santé mentale et littératie en santé mentale

Selon l'OMS, la mise en œuvre de politiques publiques de promotion de la santé mentale qui ciblent les personnes aux prises avec un problème de santé mentale peut mener à des avancées importantes au point de vue de la santé mentale et du développement socioéconomique de la populationNote de bas de page 477. Les déterminants généraux de la santé peuvent influer sur la santé mentale. Plus précisément, l'appartenance sociale et l'adoption de comportements sains (par exemple, bien manger) peuvent avoir des répercussions positives sur le bien-être général d'une personne et sur sa capacité à gérer le stress et les changementsNote de bas de page 477.

La promotion de la santé mentale en milieu de travail peut aider à réduire l'anxiété, la dépression et le stress qui résultent d'une surcharge de travail, de contraintes de temps, de la précarité de l'emploi, de la banalité des tâches à accomplir, du bruit, des relations entre employés ainsi que des rapports avec l'employeurNote de bas de page 496, Note de bas de page 497. Par exemple, les employés qui ont accès à des programmes de formation en cours d'emploi, qui ont la possibilité de réduire leur charge de travail et qui jouissent d'un milieu de travail sain ressentent généralement un plus grand bien-êtreNote de bas de page 497. La mise en place de vastes politiques et stratégies permettrait de réduire et de gérer les risques en milieu de travail en prévenant les situations susceptibles de nuire au bien-être et à la santé mentale des employés. Les mesures qui soutiennent les jeunes et les jeunes adultes dans leur recherche d'emploi donnent également de bons résultats, notamment en améliorant leur capacité à gérer le stress et à se motiver, leur assurant ainsi une certaine stabilité d'emploi et un meilleur réseau de soutienNote de bas de page 477. À l'aide du financement du gouvernement fédéral, la CSMC travaille à mettre au point une norme nationale (National Standard of Canada for Psychological Health and Safety in the Workplace) ayant pour objectif à long terme de gérer de façon durable et systématique la santé et la sécurité psychologiques au travailNote de bas de page 498.

La littératie en santé mentale correspond à l'ensemble des connaissances et des aptitudes qui permettent aux gens d'acquérir, de comprendre et d'appliquer l'information sur la santé mentale. Ce terme, relativement nouveau, a d'abord été utilisé en Australie, il désigne les connaissances et les croyances qui permettent de reconnaître, de gérer ou de prévenir les troubles de santé mentale. Il est inspiré du concept de littératie en santé et de la capacité d'acquérir et de mettre en pratique les renseignements sur la santé. Les deux concepts ont évolué et, aujourd'hui, ils tiennent compte de l'importance, de la complexité et de l'interdépendance des facteurs individuels et sociauxNote de bas de page 499.

La littératie en santé mentale comprend la prévention de la maladie mentale, la reconnaissance des symptômes et des interventions possibles et la réduction de la stigmatisation. Dans l'ensemble, les Canadiens s'y connaissent assez bien en santé mentale : ils sont bien informés sur la prévalence des troubles mentaux, sont sensibilisés aux signes précurseurs et ont la capacité de reconnaître un trouble mentalNote de bas de page 499. Néanmoins, bon nombre continuent de croire que les problèmes de santé mentale sont rares et que les troubles comme la dépression et l'anxiété sont d'origine environnementale. En outre, ils peuvent difficilement faire la distinction entre la schizophrénie ou l'anxiété et la dépression (en particulier chez les jeunes) et confondent les problèmes de santé mentale avec d'autres problèmes de santéNote de bas de page 499. Alors que de nombreux Canadiens recommanderaient des soins médicaux pour traiter les troubles de santé mentale, les données indiquent que les personnes qui sont placées dans cette situation préféreraient se soigner elles-mêmes, chercher du soutien non officiel et modifier leur style de vie. Elles précisent également qu'elles seraient mal à l'aise d'avouer leur trouble mental par crainte de perdre leur sécurité d'emploi et leurs relations socialesNote de bas de page 499.

L'Alliance canadienne pour la maladie mentale et la santé mentale (ACMMSM) a créé un cadre national intégré (National Integrated Framework for Enhancing Mental Health in Canada) destiné à améliorer la littératie en santé mentale au CanadaNote de bas de page 499. Ce cadre de travail présente une liste d'objectifs pressentis liés à la littératie en santé mentale, entre autres : accroître la sensibilisation, lutter contre la stigmatisation et la discrimination, améliorer les systèmes de compétences pour fournir un meilleur soutien aux personnes atteintes de maladie mentale, offrir aux fournisseurs de soins une formation en santé mentale, assurer aux Autochtones un meilleur accès aux services et à l'information, peu importe leur lieu de résidence, et améliorer l'appui et la participation du public aux mesures et aux initiatives, et ce, aux différentes étapes de la vieNote de bas de page 499.

L'idéal pour rehausser le niveau de littératie en santé mentale et, par conséquent, améliorer les traitements offerts, c'est d'acquérir la capacité à comprendre et à cerner les problèmes de santé mentaleNote de bas de page 499, Note de bas de page 500. Inspiré de la démarche australienne (élaborée par le centre de recherche en santé mentale de l'Australian National University et financée par le centre de recherche ORYGEN de l'Université de Melbourne), le programme Premiers soins en santé mentale (PSSM) a été adapté et mis en œuvre en 2010 par la CSMC Note de bas de page 500, Note de bas de page 501. Aujourd'hui offerte dans de nombreuses collectivités, la version canadienne de ce programme a pour but d'aider les participants à améliorer leurs compétences et leurs connaissances en santé mentale et ainsi à mieux reconnaître et gérer leurs problèmes de santé mentale ou ceux d'un membre de leur famille, d'un ami ou d'un collègueNote de bas de page 500.

Généralement, un programme de premiers soins en santé mentale repose sur le même principe que les premiers soins traditionnels. Une aide est fournie jusqu'à ce qu'un traitement approprié soit trouvé ou que la crise soit résolue. On tente ainsi de protéger les personnes qui présentent un danger pour elles-mêmes et on empêche que le problème de santé mentale ne s'aggrave. Le rétablissement d'une bonne santé mentale est donc favorisé en offrant du réconfort à la personne en état de crise (voir l'encadré intitulé « Premiers soins en santé mentale Canada : l'exemple du Jack Project »). Des évaluations ont permis d'établir que le programme PSSM est efficace pour accroître les connaissances, réduire la stigmatisation et augmenter les comportements aidants. La formation en PSSM aide les participants à mieux reconnaître les signes de problèmes de santé mentale et à traiter la maladie mentale en apportant rapidement un soutien professionnel à ceux qui en ont besoinNote de bas de page 502, Note de bas de page 503. Les évaluations ont aussi indiqué que, grâce à la formation qu'il offre, le programme PSSM permet d'améliorer le niveau de littératie en santé mentale dans la collectivité et qu'il pourrait être appliqué à plus grande échelle, dans toutes les administrationsNote de bas de page 501, Note de bas de page 504. Toutefois, puisque les effets à long terme des premiers soins en santé mentale sont encore méconnus, il serait utile de poursuivre les recherches dans ce domaineNote de bas de page 503.

Premiers soins en santé mentale Canada : l'exemple du « Jack Project »

Le Jack Project a pris naissance en 2010 lorsqu'un fonds commémoratif a été créé en l'honneur d'un étudiant de première année de l'Université Queen's qui s'est suicidé. Géré par l'organisme Jeunesse, J'écoute, ce projet est appuyé par l'Université Queen's à Kingston (Ontario)Note de bas de page 505. Depuis 2007, l'Université Queen's soutient le programme PSSM Canada, grâce à ses trois instructeurs certifiés et aux cours qu'elle propose à son personnel et à ses étudiants. Actuellement, le programme PSSM est disponible en plusieurs centaines d'écoles publiques ainsi que dans 41 universités et 42 collèges de tout le Canada.

L'objectif du Jack Project est d'accroître le niveau de littératie en santé mentale chez ceux qui pourraient être appelés à donner des premiers soins en santé mentale. Le projet vise à offrir aux jeunes de 16 à 20 ans qui font la transition entre les études secondaires et les études postsecondaires des conseils et des renseignements sur la santé mentale et sur les ressources mises à leur disposition. Il vise à éliminer des obstacles liés à la santé mentale, tels que l'incompréhension et la stigmatisation, grâce à un microsite qui permet d'orienter les jeunes atteints de ce problème. Le microsite fournit de l'information au moyen d'applications Web, d'applications mobiles, de clavardage et de messagerie instantanéeNote de bas de page 506. Le Jack Project comprend également une campagne de sensibilisation sur les premiers soins en santé mentale. Cette campagne, qui s'échelonnera sur les deux prochaines années, sera menée dans 300 écoles secondaires et 30 collèges et universités de tout l'Ontario de manière à accroître le niveau de littératie en santé mentale chez les jeunesNote de bas de page 505. Elle vise à sensibiliser, soutenir et réduire la stigmatisation en aidant le personnel scolaire à reconnaître les signes de problèmes de santé mentale et à de fournir un soutien aux étudiants (voir également la section intitulée « Prévention du suicide et médias sociaux », plus loin dans ce chapitre)Note de bas de page 505, Note de bas de page 506.

Lutte contre la stigmatisation associée à la maladie mentale

La stigmatisation, peu importe la raison (problème de santé, appartenance culturelle, genre, orientation sexuelle), peut toucher de nombreuses personnes et survenir dans différents contextesNote de bas de page 507. En général, elle résulte de la mauvaise compréhension d'une réalité, ce qui conduit aux préjugés et à la discrimination. Ainsi, de nombreuses personnes qui vivent avec une maladie mentale ou un problème de santé mentale sont victimes de stigmatisation. Celle-ci peut avoir des répercussions néfastes sur la capacité d'une personne à se développer, à socialiser, à poursuivre des études, à occuper un emploi, à participer à des activités bénévoles ainsi qu'à chercher de l'aide et à obtenir des soinsNote de bas de page 507. Il existe plusieurs façons d'éliminer la stigmatisation associée à la maladie mentale. L'éducation précoce (dans les écoles primaires et secondaires) et la sensibilisation aux troubles de santé mentale provoquent généralement une remise en question des préjugés et réduisent la stigmatisation qui en découleNote de bas de page 507, Note de bas de page 508. Cibler les enfants et les jeunes est une méthode efficace pour promouvoir l'empathie et la tolérance et les sensibiliser à la maladie mentale avant qu'ils n'adoptent des attitudes négatives. D'ailleurs, l'éducation précoce s'est révélée plus efficace pour réduire la stigmatisation que les activités de sensibilisation à grande échelleNote de bas de page 507. En effet, les mesures qui visent à mettre fin à la stigmatisation chez les plus jeunes peuvent se répercuter tout au long de leur vie, ce qui permet, au fil du temps, d'avoir une plus grande incidence sur la population.

La stigmatisation associée à la santé mentale ne se répercute pas uniquement sur le bien-être des Canadiens; elle constitue également un obstacle pour ceux qui cherchent à obtenir des soinsNote de bas de page 509. Selon l'enquête intitulée De la jeunesse canadienne pour la santé mentale et maladie Survey, 63 % des répondants ont déclaré que la gêne, la peur, la pression des pairs et la stigmatisation les empêchaient d'obtenir l'aide dont ils ont besoinNote de bas de page 510. Même si les programmes de lutte contre la stigmatisation ont eu peu de succès, certains de leurs aspects se sont avérés réussis et prometteurs, notamment :

  • accroître l'éducation et la sensibilisation afin de dissiper chez les jeunes et les jeunes adultes les mythes les plus fréquents au sujet de la maladie mentale;
  • s'opposer aux principaux comportements discriminatoires au moyen d'une plus grande diffusion de l'information;
  • créer un contexte qui dérange les tabous et dissipe l'incompréhension au sujet de la maladie mentaleNote de bas de page 507.

De façon générale, mettre en contexte la maladie mentale, le trouble mental ou l'état de bien-être reste la façon la plus efficace de lutter contre la stigmatisation et la discriminationNote de bas de page 507. En 2009, la CSMC a lancé une stratégie décennale appelée Changer les mentalités pour lutter contre la stigmatisation et la discrimination. Cette stratégie est la plus vaste initiative jamais entreprise au Canada pour réduire de façon systématique la stigmatisation liée à la maladie mentale, et la Commission entend d'ailleurs collaborer avec les collectivités, les intervenants et certains groupes à risqueNote de bas de page 509, Note de bas de page 511. Les évaluations de certains programmes menés dans le cadre de la stratégie se feront en 2011. Cependant, une évaluation préliminaire de Solidaires pour la vie, un projet entrepris à Montréal (Québec) dans le cadre du programme Changer les mentalités, a révélé que les présentations faites dans les écoles secondaires permettaient d'accroître les connaissances sur la dépression et de changer les attitudes à l'égard de la maladie et de la recherche d'aideNote de bas de page 512. D'autres pays, comme l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni et les États-Unis, ont également créé des mesures contre la stigmatisation qui misent sur l'importance de faire évoluer les attitudes et les comportements concernant la maladie mentale et les troubles de santé mentaleNote de bas de page 513.

Stratégies globales de promotion de la santé mentale et du bien-être

Les politiques globales et intégrées, qui relèvent ou non du secteur de la santé, contribuent à améliorer de façon importante la santé mentale au sein des collectivités. Voilà pourquoi il est préférable d'adopter une approche intégrée et intersectorielle pour prévenir les maladies mentales et promouvoir la santé mentale. Les organisations et les administrations travaillent très fort à mettre en place un cadre de référence en matière de santé mentale. En 2005, la publication du livre vert de la Commission européenne sur la santé mentale a permis de faire avancer les choses. En effet, ce document a établi un cadre de travail et des lignes directrices dont les États membres pouvaient s'inspirer pour élaborer leurs plans d'action sur la promotion de la santé mentale et la prévention des maladies mentalesNote de bas de page 514. Il s'en est suivi un autre document, intitulé Mental Health Promotion and Mental Disorder Prevention: A Policy for Europe. Basé sur des faits démontrés, ce document détermine différentes mesures pouvant être mises de l'avant et recommande une approche intégrée et intersectorielleNote de bas de page 515, Note de bas de page 516. Il comprend également des programmes et des stratégies qui s'intéressent aux comportements et à d'autres déterminants de la santéNote de bas de page 516. Les collectivités saines peuvent, elles aussi, contribuer à améliorer la santé mentale de leur population en offrant différents services et aménagements, comme des espaces verts et des réseaux de soutien qui favorisent l'intégration de tous les membres de la collectivité, peu importe leur âge et leurs capacitésNote de bas de page 516. Même si leur efficacité est souvent difficile à mesurer, ces politiques et ces cadres de référence demeurent essentiels pour accroître la sensibilisation et acquérir les ressources nécessaires au maintien de programmes efficaces, puisqu'ils facilitent la coordination entre les secteurs et les administrations et assurent la mise en place d'approches à volets multiplesNote de bas de page 517.

En 2009, la CSMC a mis au point un cadre d'action intitulé Vers le rétablissement et le bien-être : Cadre pour une stratégie en matière de santé mentale au Canada afin de préparer le terrain à une vaste stratégie destinée à répondre aux besoins actuels et futurs des Canadiens en matière de santé mentaleNote de bas de page 226. Un des volets de cette stratégie porte sur les enfants et les jeunes et met l'accent sur les trajectoires de vieNote de bas de page 226. Un autre volet, axé sur les Inuit, les Métis et les membres des Premières nations, veillera à promouvoir la santé mentale des peuples autochtones au Canada et à examiner les questions de santé mentale du point de vue des croyances culturelles, de la justice sociale, de l'éthique et de la diversitéNote de bas de page 226, Note de bas de page 518. Pour ce faire, la CSMC élaborera des codes d'éthique concernant la prestation de programmes de première ligne en santé mentale et la lutte contre les dépendances dans les collectivités autochtonesNote de bas de page 226, Note de bas de page 518.

Par ailleurs, le cadre d'action de la CSMC prévoit la conception de programmes et de stratégies adaptables qui favorisent le bien-être des personnes, des familles et des collectivités. La participation de la collectivité et la mise en place d'un processus décisionnel sont nécessaires pour offrir un large éventail de services coordonnés ainsi que des programmes efficaces et adaptés à la cultureNote de bas de page 226. Santé Canada a mis en œuvre le Plan d'action stratégique pour le mieux-être mental des Premières nations et des Inuits afin de s'attaquer aux problèmes de santé mentale et de dépendance de ces groupes autochtones en leur fournissant des conseils stratégiques sur le bien-être mentalNote de bas de page 519. Le plan d'action se divise en cinq objectifs prioritaires :

  • créer, à l'intention des Inuit et des Premières nations, un éventail de services de mieux-être mental qui intègrent des approches traditionnelles, culturelles et courantes et dont la prestation serait assurée à l'échelle communautaire;
  • transmettre et mettre en commun les connaissances traditionnelles, culturelles et courantes qui sont susceptibles de favoriser le bien-être mental;
  • reconnaître que la collectivité constitue pour elle-même une ressource inestimable en admettant la diversité de ses connaissances et en améliorant sa capacité à veiller au mieux-être mental de ses membres;
  • améliorer le recrutement et le maintien en poste d'une main-d'œuvre compétente et qualifiée apte à fournir aux Inuit et aux membres des Premières nations des services de mieux-être mental et d'autres services efficaces et respectueux de la culture;
  • améliorer et resserrer la collaboration entre les services de santé mentale, les services de lutte contre les dépendances et les autres services pertinents de même qu'entre les programmes et les services offerts par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, les Premières nations et les collectivités inuitesNote de bas de page 519.

Le Groupe de travail Alianait a créé, à l'intention des Inuit une stratégie intitulé Alianait Inuit Mental Wellnesss Action Plan qui est une série de plans d'action axés sur les déterminants de la santé. En plus de faciliter la collaboration et l'échange de renseignements entre les principales organisations, ces plans d'action aident à formuler des recommandations pour les Inuit et fournissent des conseils stratégiques concernant l'élaboration et l'évaluation des programmesNote de bas de page 519, Note de bas de page 520. Ils mettent également l'accent sur l'importance d'aborder la question de la santé et du bien-être des jeunes et de les inciter à participer à la vie communautaire. Leur intégration, leur participation et leur engagement sont essentiels pour assurer la planification à long terme des mesures de santé mentaleNote de bas de page 520.

En 2005, l'OMS a publié un document intitulé Politiques et plans relatifs à la santé mentale de l'enfant et de l'adolescent dans lequel elle s'intéresse à certains programmes qui traitent des problèmes de santé mentale propres aux enfants et aux jeunesNote de bas de page 521. En collaboration avec d'autres intervenants et partenaires, le Comité consultatif sur les enfants et les jeunes de la CSMC a présenté un document-cadre portant sur la santé mentale des enfants et des jeunes au Canada. Intitulé Evergreen, ce document vise à aider les gouvernements, les établissements et les organisations à élaborer des politiques, des mesures et des services en santé mentale (voir l'encadré intitulé « Evergreen: un document-cadre sur la santé mentale des enfants et des jeunes au Canada »)Note de bas de page 522. Ce cadre d'action de portée nationale devrait permettre aux provinces, aux territoires et aux organismes non gouvernementaux de créer de nouvelles stratégies, de revoir les stratégies existantes, d'accroître la sensibilisation du public et de diffuser de l'information sur la santé mentaleNote de bas de page 522. Même s'il en est à ses débuts, le projet Evergreen est appelé à évoluer au fil des ansNote de bas de page 522, Note de bas de page 523. Les investissements récents dans la santé mentale des enfants et des jeunes serviront à aborder la question de l'intimidation, la résilience, l'établissement de relations saines et l'abus de substances nocivesNote de bas de page 524.

Evergreen : un document-cadre sur la santé mentale des enfants et des jeunes au Canada

Le document-cadre Evergreen se divise en quatre grandes orientations stratégiques : la promotion, la prévention, les interventions et les soins continus et, enfin, la recherche et l'évaluationNote de bas de page 522. Le volet promotion comprend la sensibilisation, la lutte contre la stigmatisation et la littératie en santé mentale. Les activités de promotion s'intéressent également à l'élaboration de profils d'intervenants et de réseaux qui se serviront du document-cadre comme outil de diffusion de l'information. Les activités de prévention s'appuieront sur une approche globale afin d'offrir des programmes d'éducation et de formation dans tous les milieux et à un large éventail d'intervenants, y compris aux parents et aux éducateursNote de bas de page 522. Les programmes aborderont aussi bien la santé prénatale que la santé physique et mentale. Le volet intervention et soins continus, quant à lui, s'appuiera sur les orientations stratégiques suivantes :

  • instaurer en milieu scolaire de nouveaux programmes reconnus, éprouvés et rentables à l'intention des populations à risque;
  • s'assurer que les obstacles d'ordre législatif, réglementaire ou politique n'empêchent pas les jeunes d'obtenir les soins et l'aide dont ils ont besoin, compte tenu de leur âge et de leur culture;
  • donner accès à des refuges, à des consultations sur le Web, à des services électroniques ainsi qu'à des services de soins d'urgence, 24 heures sur 24, 7 jours par semaine;
  • offrir des programmes intégrés axés sur les jeunes, les familles et les collectivités qui s'attaquent à la fois aux problèmes de santé physique et mentale et aux déterminants sociaux (par exemple, le logement et l'éducation)Note de bas de page 522.

Des investissements dans la prestation efficace des programmes, y compris dans les ressources humaines en santé mentale, peuvent améliorer la capacité du Canada à cerner, diagnostiquer et traiter les troubles de santé mentale courants chez les enfants et les jeunes. Enfin, le volet recherche et évaluation vise à appuyer la recherche dans les domaines de la promotion, de la prévention et des interventions afin d'accroître le nombre de personnes qui reçoivent des services en santé mentaleNote de bas de page 522.

En collaboration avec les provinces, les territoires et certains organismes communautaires, le gouvernement du Canada a annoncé, en juin 2011, qu'il investirait dans la promotion de la santé mentale des enfants et des jeunes. Par l'entremise de la Stratégie d'innovation de l'Agence de la santé publique du Canada, plus de 27 millions de dollars seront investis dans des programmes communautaires d'éducation et de soutien aux famillesNote de bas de page 526. Ces investissements serviront, en particulier, à résoudre les problèmes découlant d'une situation économique précaire, d'un faible niveau de scolarité, de mauvaises conditions de vie et de l'éloignement géographique (milieu rural ou région éloignée), autant de facteurs susceptibles de nuire à la santé mentale et au bien-être des enfants, des jeunes et des famillesNote de bas de page 526. Plusieurs programmes se sont déjà penchés sur les facteurs abordés dans ce rapport, notamment les suivants :

  • Le programme communautaire Connecting the Dots, qui sera offert au Yukon, en Colombie-Britannique et au Manitoba, permet de prévenir les problèmes de santé mentale et les problèmes de comportement grâce à la réduction des facteurs de risque et au renforcement des facteurs de protection à l'adolescence.
  • Au Nunavut, le Qaujigiartiit Health Resource Centre effectue des travaux de recherche sur la santé mentale et le bien-être à partir de l'expérience des jeunes du Nord, en examinant tout particulièrement la vie dans les collectivités éloignées, l'accès aux services communautaires et aux soins de santé ainsi que la participation des parents. Le centre de ressources offre également aux jeunes des camps d'été axés sur le bien-être et le renforcement de l'autonomie.
  • Community Partnerships for Youth Health, à Toronto (Ontario), travaille à la mise au point d'une trousse de promotion de la santé mentale en milieu scolaire destinée, en particulier, aux jeunes immigrants, aux jeunes réfugiés et aux membres d'une minorité ethnique.
  • En Colombie-Britannique, en Alberta, au Nouveau-Brunswick et en Ontario, le programme Creating Responsive Communities to Promote Healthy Relationships in Young Children incite les enfants et les adultes à réagir de façon efficace à l'intimidation en s'appuyant sur une approche globale qui vise la famille, l'école et la collectivité.
  • Handle with Care in At-Risk Communities est un programme de formation offert au Yukon, au Manitoba, en Ontario et à l'Île-du-Prince-Édouard qui montre aux parents et aux fournisseurs de soins comment créer des milieux propices au développement et à l'épanouissement des enfantsNote de bas de page 526.

Les initiatives financées dans le cadre de la Stratégie d'innovation doivent générer des données fondées sur la pratique. L'information ainsi obtenue permettra d'acquérir de nouvelles connaissances dans le domaine de la promotion de la santé mentale, qui pourront par la suite être communiquées, adaptées et appliquées à de nombreuses collectivités canadiennes.

Prévenir le suicide

Le suicide est un problème de santé publique grave mais évitableNote de bas de page 527. Il est la cause de près de la moitié des morts violentes et représente 1,4 % du fardeau mondial de la maladieNote de bas de page 527. Ce fardeau ne mesure qu'une partie des conséquences d'un suicide, chaque suicide ayant des répercussions affectives, sociales et économiques sur les amis, les familles et les collectivités. Le suicide est lourd de conséquences, et ses effets se font sentir dans les collectivités mais aussi dans l'ensemble de la population canadienneNote de bas de page 528. Comme il est indiqué au chapitre 3, certains segments de la population affichent des taux de suicide ou de pensées suicidaires plus élevés que d'autresNote de bas de page 58, Note de bas de page 249, Note de bas de page 254, Note de bas de page 271-275, Note de bas de page 277, Note de bas de page 529. Pour cette raison, les interventions présentées dans ce rapport portent principalement sur les populations à risque. Toutefois, les principes à la base de ces interventions s'appliquent également aux programmes destinés aux jeunes et aux jeunes adultes.

Le fait que le suicide ne soit pas considéré comme un problème important de santé publique, que l'on continue de croire que l'isolement est le meilleur moyen de le prévenir et que l'on présume qu'il s'agit d'un problème propre à certaines populations nuit à l'efficacité des programmes de prévention. De plus, le suicide reste un sujet tabouNote de bas de page 530. Globalement, certaines interventions ont toutefois donné de bons résultats. Par exemple, les stratégies qui limitent l'accès aux armes à feu, aux substances toxiques ou à tout autre outil couramment utilisé dans les tentatives de suicide ont permis de réduire le taux de suicideNote de bas de page 530, Note de bas de page 531. Toutefois, ces stratégies ne s'attaquent pas aux causes fondamentales qui poussent les jeunes et les jeunes adultes à vouloir s'enlever la vieNote de bas de page 531. Les médias contribuent également au problème, car, en rapportant avec sensationnalisme les comportements suicidaires ou les gestes autodestructeurs, ils peuvent inciter ou encourager les jeunes à les reproduireNote de bas de page 528, Note de bas de page 531.

L'OMS a d'ailleurs formulé des lignes directrices sur la couverture médiatique des cas de suicideNote de bas de page 528. Il semble, par ailleurs, que certaines interventions fassent la promotion du suicide par le simple fait qu'elles fournissent de l'information sur le sujet. Toutefois, des recherches révèlent que le fait d'ouvrir le dialogue et de décrire cette réalité avec sensibilité peut conduire à une réduction des taux de suicideNote de bas de page 531. Certaines administrations et organisations ont élaboré des politiques pour gérer l'information et les messages qui peuvent encourager les comportements suicidairesNote de bas de page 532. Par exemple, l'Association canadienne pour la santé mentale a conçu, à l'intention des médias, des lignes directrices indiquant comment transmettre l'information de façon sécuritaire et sensible de manière à réduire les risques, notamment en citant des sources fiables, en décrivant les conséquences de l'incident, en créant un équilibre par la présentation d'éléments positifs (comme le récit de personnes ayant survécu à une crise), en précisant les signes avant-coureurs et en indiquant les sources d'aide possiblesNote de bas de page 533.

Bon nombre des personnes qui ont tenté de se suicider ou ont eu des pensées suicidaires ont indiqué avoir déjà eu un problème de santé mentale ou avoir déjà ressenti une profonde détresseNote de bas de page 534. Les interventions qui visent à prévenir le suicide et à en traiter les causes profondes ont permis de réduire le taux de suicide et de pensées suicidairesNote de bas de page 530. Toutefois, ce genre d'intervention ne suffira pas à régler le problème chez les jeunes et les jeunes adultes. En effet, les transitions sont, bien souvent, des périodes de grande vulnérabilité. C'est pourquoi les jeunes ont besoin de recevoir le soutien et l'attention de leurs pairs, de leur famille et de leur collectivité et de participer à des rituels familiaux ou communautaires, à des activités ou à des expériences structuréesNote de bas de page 10, Note de bas de page 123. Les collectivités qui ont accès à des ressources matérielles, psychologiques, intellectuelles et spirituelles sont habituellement les mieux placées pour aider les jeunes et les jeunes adultes en période de transition. Les résultats sont toutefois moins encourageants chez ceux qui reçoivent peu de soutien de leur famille ou de leur communauté, qui vivent dans des quartiers défavorisés présentant des taux élevés de violence, de suicide et de consommation et d'abus de substances nocives et qui, de ce fait, sont moins susceptibles de pouvoir compter sur des facteurs de protection et d'avoir accès à des mesures de préventionNote de bas de page 10, Note de bas de page 123.

Pour prévenir le suicide dans les populations autochtones à risque, il faudrait mettre en place une stratégie à volets multiples dans le but de combattre les préjugés et d'accroître la sensibilisation chez les jeunes autochtones. Il faudrait, pour cela, s'attaquer à l'ensemble des facteurs communautaires et aux causes sous-jacentes, notamment les influences issues de l'histoire et de la colonisation des peuples autochtones. Sensibiliser, c'est informer les gens pour qu'ils cessent de croire que toutes les collectivités autochtones sont en mauvaise santé. En effet, les statistiques sur le suicide donnent à penser que l'ensemble des collectivités autochtones sont aux prises avec de graves problèmes de santé et de bien-être. Toutefois, les données montrent que le suicide chez les jeunes ne touche pas toutes les collectivités autochtonesNote de bas de page 58, Note de bas de page 272. Comme c'est le cas dans les collectivités canadiennes, les jeunes et les jeunes adultes qui ont coupé les liens avec leur famille ou leur communauté et qui, en outre, n'ont pas accès aux services courent de plus grands risquesNote de bas de page 10. Grâce à une étude américaine sur le bon fonctionnement, qui a été menée auprès d'un échantillon aléatoire de jeunes autochtones, on a pu établir un indice de succès en se basant sur une série d'indicateurs, comme la bonne santé mentale, l'absence de toxicomanie et de criminalité, de rares écarts de conduite, des résultats scolaires satisfaisants, un bon fonctionnement psychosocial, des émotions positives et des comportements constructifs. L'étude a démontré que la satisfaction des familles était directement liée au bon fonctionnement. Au contraire, le fait de vivre dans une famille ou un quartier dysfonctionnel et de subir des mauvais traitements nuisait au bon fonctionnementNote de bas de page 535.

Chez certaines populations autochtones, le taux élevé de suicide est attribuable à des facteurs communautaires, comme l'exclusion sociale et la rupture du lien avec les traditions et la culture. Ces facteurs sont souvent profondément enracinés dans la collectivité et peuvent se répercuter sur plusieurs générationsNote de bas de page 58, Note de bas de page 272, Note de bas de page 536. Par exemple, les jeunes dont l'un des deux parents a fréquenté les pensionnats – qui, on le sait, ont eu un effet dévastateur sur le bien-être, la santé mentale et le type d'approche parentale – sont plus susceptibles d'avoir des pensées suicidaires que ceux dont les parents n'ont pas fréquenté ce type d'établissementNote de bas de page 537. S'attaquer aux effets intergénérationnels des pensionnats nécessite des approches variées faisant appel à des méthodes de guérison traditionnelles, occidentales et parallèlesNote de bas de page 538. Des programmes de guérison, tels que le Programme de soutien en santé, permettent aux anciens élèves des pensionnats et aux membres de leur famille victimes d'un traumatisme intergénérationnel de recevoir des services en santé mentale ainsi qu'un soutien émotionnel et culturel (dialogues, prières et guérison traditionnelle)Note de bas de page 539. Les collectivités qui affichent les taux de suicide les plus bas sont celles qui ont préservé leurs valeurs culturelles, qui disposent d'un certain niveau d'autonomie gouvernementale, qui ont réglé leurs revendications territoriales et qui assurent la gestion de leurs services culturels et de leurs services d'éducation, de santé et de maintien de l'ordre. Ces collectivités ont, en effet, indiqué que ces mesures avaient une incidence positive sur l'état de santé et de bien-être de leur populationNote de bas de page 58, Note de bas de page 272, Note de bas de page 536.

Les politiques infructueuses et les pratiques interventionnistes qui se sont succédé par le passé ainsi que la volonté de ne pas reproduire les mêmes erreurs font en sorte qu'il est particulièrement difficile de mettre en œuvre de nouvelles politiquesNote de bas de page 123. Les pratiques prometteuses viennent des collectivités qui se développent bien et qui s'inspirent de leurs succès passés. Plusieurs collectivités s'efforcent d'offrir des possibilités aux jeunes et aux jeunes adultes. Par exemple, certaines collectivités inuites qui affichent un lourd passé de suicide chez les jeunes et les jeunes adultes travaillent désormais avec le gouvernement du Nunavut et des organismes non gouvernementaux afin d'accroître la résilience, d'établir des facteurs de protection et de renseigner les jeunes à risque sur les services mis à leur disposition (voir l'encadré intitulé « Des programmes communautaires de prévention du suicide »).

Prévention du suicide et médias sociaux

Les médias se sont beaucoup intéressés aux liens entre l'intimidation et le suicide et aux déclarations des personnes signalant que l'intimidation avait joué un rôle dans leur décision de mettre fin à leurs jours. Parmi les sous-populations marginalisées, les jeunes et les jeunes adultes LGBTQ affichent des taux de tentatives de suicide et de pensées suicidaires plus élevés que le reste de la populationNote de bas de page 544, Note de bas de page 545. S'attaquer à cette question n'a pas donné les résultats espérés. Cependant, les jeunes et les jeunes adultes utilisent beaucoup les nouvelles technologies, les médias sociaux et autres ressources en ligne. Des recherches préliminaires dans ce domaine démontrent que le réseau Internet et les médias sociaux peuvent jouer un rôle dans la lutte contre le suicide (voir l'encadré intitulé « Prévenir le suicide chez les LGBTQ grâce aux médias sociaux : le projet It Gets Better »)Note de bas de page 274, Note de bas de page 545. Toutefois, de nombreux facteurs compromettent l'efficacité de ces programmes, comme l'environnement évolutif, le manque d'évaluation globale et les questions éthiques liées au fait d'aborder en ligne ce type de problème. Il faut également porter une attention particulière aux conséquences négatives des médias sociaux, en particulier s'ils sont utilisés pour aggraver les problèmes d'isolement et d'intimidation (voir la section intitulée « Lutter contre l'intimidation et les agressions »). C'est pourquoi il serait important de pousser la recherche afin de mieux comprendre comment se créent les communautés virtuelles, d'évaluer le degré de soutien offert et de mesurer l'efficacité des des prorammes qui y ont recours.

Des programmes communautaires de prévention du suicide

Le Isaksimagit Inuusirmi Katujjiqatigiit (Embrace Life Council) a mis sur pied et financé des activités communautaires et a fait du 10 septembre la journée Celebrate Life. Cette activité, menée en partenariat avec les collectivités et les gouvernements, vise à présenter une information coordonnée adaptée à la culture, à encourager la formation sur la prévention du suicide et à accroître la sensibilisationNote de bas de page 540. En collaboration avec les responsables d'autres initiatives connexes, la collectivité de Tuktoyaktuk (dans les Territoires du Nord-Ouest) participe à la campagne internationale du ruban jaune, qui encourage les jeunes en situation de détresse à choisir un adulte de confiance, identifié par une carte jaune, et à demeurer à ses côtés jusqu'à ce que leur situation se rétablisseNote de bas de page 540. Une évaluation de la campagne du ruban jaune, en Alberta, a révélé chez les participants un changement d'attitude à l'égard des services d'aide. On a en effet constaté une augmentation de près de 6 % du nombre de participants qui ont indiqué que, à l'avenir, ils iraient chercher de l'aideNote de bas de page 541. L'évaluation a également révélé une plus forte propension à recourir en priorité à l'aide professionnelle en cas de besoinNote de bas de page 541.

Par ailleurs, des programmes communautaires comme Artcirq (cirque de l'Arctique) donnent aux jeunes inuits d'Igloolik (Nunavut) la possibilité de s'exprimer par les arts et de communiquer avec leurs aînés. Ils intègrent des pratiques traditionnelles et privilégient l'expression du corps et de l'esprit tout en rehaussant l'estime de soi des participants. Mené conjointement avec Isuma Productions et le Cirque Éloize (fondé initialement pour assurer le développement des jeunes défavorisés grâce aux arts du cirque et de la scène), Artcirq permet aux jeunes d'Igloolik d'interagir, d'acquérir de nouvelles compétences et de s'exprimer. Au moyen de productions multimédias, Artcirq sensibilise également les collectivités du Nord (comme Igloolik) à la question du suicide. Misant sur le succès du film Atanarjuat, la légende de l'homme rapide, un autre film est en cours de tournage et portera, cette fois, sur un groupe de huit jeunes qui désirent prévenir le suicide dans leur petite collectivitéNote de bas de page 542, Note de bas de page 543. Bien que la réduction du nombre de suicides ne puisse être directement attribuée à un tel programme, depuis sa création, il y a 12 ans, Artcirq a permis à de nombreux jeunes de s'exprimer et de faire le pont entre les pratiques et les expériences des artistes du Nord et ceux du SudNote de bas de page 542, Note de bas de page 543.


Prévenir le suicide chez les LGBTQ grâce aux médias sociaux : le projet It Gets Better

Le projet It Gets Better est un nouveau joueur dans le monde de la prévention de l'intimidation. Ce projet vise à encourager la communication et le réseautage entre les jeunes et les jeunes adultes LGBTQ qui redoutent l'avenirNote de bas de page 546. Il présente, sous forme de vidéos et de récits, le vécu d'adultes d'horizons culturels différents. Les vidéos et les blogues montrent aux jeunes en détresse que l'avenir n'est pas aussi sombre qu'ils le croient et qu'il existe des ressources pour les aiderNote de bas de page 546.

Parallèlement, The Trevor Project, à l'origine un téléfilm portant sur les difficultés d'un jeune gai qui tente de se suicider, a évolué pour devenir la première ligne de prévention du suicide chez les jeunes LGBTQ aux États-UnisNote de bas de page 547. Ce projet permet de donner, 24 heures sur 24, des conseils et des services de soutien en direct et de mettre des ressources à la disposition des éducateurs et des parentsNote de bas de page 546, Note de bas de page 547.

Stratégies globales de prévention du suicide

Certaines administrations ont conçu des stratégies de prévention du suicide qui comprennent un large éventail d'initiatives, certaines de portée générale, d'autres plus ciblées. C'est le cas de l'Australie, de la Finlande, de la Suède et des États-Unis. Selon le gouvernement australien, la réduction du taux de suicide au cours des dix dernières années est en partie attribuable à sa stratégie de préventionNote de bas de page 548. En effet, l'Australie a mis en œuvre un cadre de travail, le LIFE (Living is for Everyone), qui part du principe que tous les Australiens ont un rôle à jouer dans la prévention du suicide; que, pour réduire le taux de suicide, il faut intervenir dans huit grands secteurs (les interventions publiques, les interventions sélectives, les interventions indiquées, la reconnaissance des symptômes, l'accès à un traitement précoce et à un soutien approprié, les traitements standards, le soutien à long terme et le soutien continu); et qu'il existe des services de soutien pour les individus, avant et après le traitement, ainsi que pour la collectivitéNote de bas de page 548.

Certaines provinces et certains territoires, comme le Nouveau-Brunswick et la Colombie-Britannique, ont aussi adopté une stratégie globale de prévention du suicide. Le Nouveau-Brunswick a d'ailleurs été la première province canadienne à élaborer une telle stratégie, qui lui permet de cerner et de cibler efficacement les personnes à risque au sein de sa populationNote de bas de page 549. Son programme mise sur les ressources communautaires actuelles et sur la contribution de partenaires locaux afin de répondre le mieux possible aux besoins de la collectivitéNote de bas de page 549, Note de bas de page 550. Le Programme de prévention du suicide du Nouveau-Brunswick repose sur trois principes directeurs.

  • Action communautaire : La prévention est une responsabilité partagée. Les collectivités, les familles et les amis jouent donc un rôle crucial de soutien et de sensibilisation. Les collectivités aident à cerner les besoins locaux, participent à l'affectation des ressources et sollicitent la collaboration de la population. Essentiellement, une collectivité engagée représente le fondement d'une prévention efficace du suicide.
  • Formation continue : L'éducation augmente l'efficacité des mesures de prévention. Par exemple, la formation appliquée en prévention du suicide, qui est offerte par l'entremise de LivingWorks Education, vise à améliorer la capacité des fournisseurs de soins (officiels ou non officiels) d'aider les personnes à risqueNote de bas de page 551. Depuis près de 25 ans, cette formation a été donnée à plus de un million de fournisseurs de soins dans plus d'une dizaine de pays. Elle a également fait l'objet de plus de 15 évaluations indépendantes qui, en se fondant sur le nombre de personnes formées et le nombre d'intervenants mettant en pratique les aptitudes acquises, ont confirmé son efficacité à parfaire les connaissances et les compétences des travailleurs communautairesNote de bas de page 552.
  • Collaboration entre les organismes : Des équipes interdisciplinaires offrent toute une gamme de services, allant des soins cliniques aux services sociauxNote de bas de page 550.

Le Canada peut intégrer la prévention du suicide à une vaste stratégie de bien-être qui serait axée sur la prévention des maladies mentales, ferait la promotion de la santé mentale et aborderait un vaste éventail de déterminants de la santé. Une approche exhaustive et globale permettrait aux collectivités de fournir des ressources et du soutien dans les domaines où les principaux déterminants sociaux de la santé (comme le logement) peuvent avoir une incidence directe sur la santé mentale.

Les approches doivent tenir compte des réalités culturelles, comme les connaissances et les pratiques traditionnelles des Inuit, des Métis et des Premières nations. Par exemple, la Stratégie nationale de prévention du suicide chez les jeunes Autochtones vise à accroître la résilience, à promouvoir les facteurs de protection et à réduire les facteurs de risque chez les jeunes autochtones. Cette stratégie examine les répercussions que le suicide entraîne sur les collectivités, y compris sur les autres jeunes, ainsi que les principaux facteurs socioéconomiques qui influent sur le suicide dans certaines collectivitésNote de bas de page 553. Le Réseau du respect de la vie, un projet de l'Organisation nationale de la santé autochtone, fait partie des initiatives mises en œuvre dans le cadre de cette stratégie. Par l'entremise de son site Web, il met à la disposition des intervenants et des jeunes autochtones une foule de ressources et d'information sur la prévention du suicide qui sont adaptées à la culture. Les intervenants peuvent aussi discuter en ligne et échanger des ressources et des stratégies de prévention du suicide. Le soutien social et médical, offert en ligne grâce à des échanges pertinents sur le plan culturel entre les jeunes, les pairs et les spécialistes de la santé, s'est également révélé prometteur, en particulier dans les régions rurales ou éloignéesNote de bas de page 554-556. Toutefois, il reste encore beaucoup à faire pour bien comprendre les effets de l'utilisation des réseaux virtuels et les défis qui en résultent.

Prévenir les blessures accidentelles

Les blessures et les décès attribuables aux blessures sont généralement évitables. En effet, l'expérience montre que, pour être efficaces, les mesures de prévention des blessures doivent tenir compte de trois grands facteurs : l'ingénierie (normes de conception des produits de consommation et du milieu bâti), l'application des lois, des règlements et des politiques ainsi que l'éducation (stratégies favorisant la sensibilisation et les changements de comportement)Note de bas de page 557. Ces trois facteurs s'intègrent d'ailleurs à l'ensemble des interventions décrites dans le présent rapport :

  • la prévention des blessures en milieu de travail;
  • la conduite prudente;
  • les stratégies globales de prévention des blessures.

Prévention des blessures en milieu de travail

Les jeunes adultes sont les plus touchés par les questions de santé et de sécurité au travailNote de bas de page 314. En effet, de tous les accidents de travail, le quart survient chez les jeunes âgés de 15 à 29 ans, et la majorité touche les jeunes hommesNote de bas de page 279. Les jeunes victimes d'un accident de travail occupent, le plus souvent, un emploi dans les domaines de la production manufacturière, de la construction et du commerce de détailNote de bas de page 279. Puisque, dans la vie courante, la plupart des blessures sont évitables, la sécurité en milieu de travail ne doit pas faire exception à la règle.

La prévention des blessures au travail profite à tous les Canadiens, puisque les blessures peuvent avoir une incidence sur la qualité de vie des citoyens ainsi que sur leur capacité à subvenir à leurs besoins. Elles réduisent le niveau de productivité général et augmentent les coûts associés aux pertes d'emploi, de temps et de productivitéNote de bas de page 314. Même si de nombreuses mesures de prévention sont déjà en place, il est possible de les améliorer et d'encourager des pratiques plus sécuritairesNote de bas de page 314. L'éducation, la sensibilisation et l'adoption de lois et de règlements sont essentielles pour réduire le nombre d'accidents de travail et les conséquences qui en résultent. C'est pourquoi le Canada continue de veiller au bien-être des jeunes travailleurs et de promouvoir la santé en milieu de travail grâce à des recherches et des études, comme celles réalisées par l'Institute for Work and Health de l'Université de Toronto (Ontario). Cet organisme a comme champ d'intérêt la prévention des maladies et des accidents professionnels et examine, pour ce faire, la santé des travailleurs, les politiques de prévention et les programmes en milieu de travailNote de bas de page 558.

La sensibilisation à la sécurité au travail est l'une des stratégies les plus courantes pour prévenir les blessures et promouvoir la santé. On a par ailleurs constaté que les interventions menées en bas âge sont particulièrement efficaces. En effet, les programmes mis en œuvre dans les écoles permettent d'instaurer une culture de la sécurité chez les enfants et les jeunes avant leur entrée sur le marché du travailNote de bas de page 314. Par exemple, la Colombie-Britannique a ajouté un volet santé et sécurité au travail à son programme d'enseignement; ainsi, le cours Planning 10 est dorénavant offert aux jeunes qui se préparent à un emploi d'été ou à un emploi permanent. WorkSafeBC a également conçu, pour les écoles, une trousse comprenant des plans de leçons destinés à renforcer les apprentissages de Planning 10. Cette trousse couvre un éventail de sujets, y compris les droits et les responsabilités, les causes de blessures, la reconnaissance des dangers, l'équipement protecteur, les pratiques liées à la santé au travail et la violence en milieu de travailNote de bas de page 559.

Les programmes de sensibilisation aux droits et aux responsabilités en matière de sécurité au travail ont également porté leurs fruits. Certains organismes offrent des renseignements et des programmes de formation en matière de santé et de sécurité au travail. Des recherches révèlent qu'il est plus facile de sensibiliser les jeunes travailleurs que leurs homologues plus âgés, puisque les jeunes ont davantage tendance à intérioriser le message et à suivre les conseilsNote de bas de page 559. Cependant, si les jeunes travailleurs ont plus de facilité à retenir l'information, il peut être difficile pour eux de l'utiliser concrètement, car, bien souvent, ils ne connaissent pas leurs droits et n'osent pas non plus signaler les problèmes de sécurité à leurs supérieurs ou à un organisme de protection des travailleursNote de bas de page 560. Par ailleurs, l'information sur la santé et la sécurité au travail devrait être adaptée à différentes réalités culturelles et traduite dans plusieurs langues afin de s'assurer qu'elle est bien comprise par certains groupes de population, comme les nouveaux immigrants, et qu'elle est accessible à ceux qui sont peu familiarisés avec les droits des travailleursNote de bas de page 561.

De vastes campagnes de sensibilisation ont permis de modifier la perception du grand public au sujet de la santé et de la sécurité au travail, notamment grâce à des messages publicitaires présentés à la télévision, dans les journaux et dans les magazines. De nombreux Canadiens ont, en effet, été exposés à ces publicités qui rappellent l'importance de la sécurité au travailNote de bas de page 562, Note de bas de page 563. Dans le cadre de ses campagnes de marketing, la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail de l'Ontario (CSPAAT) utilise des images très explicites pour faire passer un message bien simple : « Les accidents, ça n'existe pas. » Bien connues des Ontariens depuis 1999 (et vues ailleurs au Canada et à l'étranger), ces annonces publicitaires montrent comment des interventions clés auraient pu changer les chosesNote de bas de page 564, Note de bas de page 565. Dans ses publicités imprimées, la Commission fait également appel à l'humour pour illustrer des scènes typiques du milieu de travail où les gens prennent des précautions exagéréesNote de bas de page 398. Les messages visent à marquer suffisamment les gens pour les pousser à agirNote de bas de page 314. Des études révèlent en effet que l'exposition à des campagnes soutenues de marketing entraîne des changements dans les comportementsNote de bas de page 562, Note de bas de page 563. Cependant, même si ces publicités attirent l'attention des gens et restent ancrées dans leur esprit, leur contribution directe à la prévention est difficile à mesurer, et le message que l'on fait passer est peut-être plus fort que le changement de comportement qu'il entraîne sur le plan de la préventionNote de bas de page 314.

Il est également difficile de mesurer l'efficacité des modifications apportées aux lois et aux exigences relatives à l'indemnisation. La Saskatchewan a été la première province à adopter une loi appelée Occupational Health Act, qui tient compte des droits des travailleurs (en plus des questions de sécurité prévues par l'ancienne loi)Note de bas de page 64. Peu de temps après, le Centre canadien d'hygiène et de sécurité au travail a vu le jour. Son mandat consiste à promouvoir la santé et la sécurité dans tous les milieux de travail au CanadaNote de bas de page 64. De nombreuses lois veillent à assurer la santé et la sécurité des travailleurs, que ce soit dans les secteurs de compétence provinciale et territoriale ou dans les secteurs qui relèvent du gouvernement fédéral, comme les mines et les transports (en vertu du Code canadien du travail). Le Programme de santé au travail et de sécurité du public de Santé Canada vise à élaborer des politiques en matière de santé au travail, à encourager les pratiques exemplaires dans le domaine et à coordonner, à l'échelle nationale, la gestion des matières dangereuses utilisées en milieu de travail. Toutes ces politiques ont, en partie, contribué à la diminution du nombre d'accidents de travail au fil des ansNote de bas de page 64. Bien que les lois adoptées par les différents ordres de gouvernement protègent les travailleurs, il incombe à ces derniers de connaître leurs droits, leurs responsabilités ainsi que les mesures à prendre pour éviter les accidents. Au Canada, les employeurs sont tenus de protéger leurs employés en leur offrant de la formation, de la supervision et de l'information appropriée. Certaines provinces, comme la Colombie-Britannique, ont pris des dispositions pour s'assurer que tous les nouveaux employés, en particulier les jeunes travailleurs inexpérimentés, reçoivent une formation et des consignes claires pour assurer un milieu de travail sécuritaire. Malgré tout, les résultats tardent à se faire sentirNote de bas de page 314. Des recherches ont révélé que, selon le type de direction et la culture d'entreprise qui règnent dans leur milieu de travail, les jeunes travailleurs sont plus ou moins portés à exprimer leurs préoccupations liées à la sécuritéNote de bas de page 566.

Conduite prudente

La conduite automobile comporte de nombreux dangers pour les jeunes et les jeunes adultes. Le chapitre 3 indique, en effet, que les taux de blessures et de décès sont particulièrement élevés parmi ces deux groupes d'âgeNote de bas de page 100, Note de bas de page 101. L'inexpérience y est sans doute pour quelque chose. Les programmes d'apprenti conducteur ont toutefois contribué à augmenter la sécurité des nouveaux conducteurs en les protégeant contre des risques bien connus, comme la conduite nocturne, la présence de nombreux passagers et l'alcool au volantNote de bas de page 567, Note de bas de page 568. Des recherches indiquent, en outre, que les collisions sont plus fréquentes dans les premières semaines suivant l'obtention du permis de conduire et que cette période d'imprudence est tout de même vite passéeNote de bas de page 567. Pour contribuer à réduire le nombre de blessures, les compagnies d'assurances offrent également des rabais aux personnes qui suivent des cours de conduiteNote de bas de page 569. Bien que les excès de vitesse constituent aussi un problème fréquent chez les jeunes conducteurs au Canada, la présente section s'attardera principalement sur les distractions et l'alcool au volant.

Même si, au fil des ans, l'alcool au volant est de moins en moins fréquent, la conduite avec les facultés affaiblies (conséquence de la consommation d'alcool et de drogues) demeure un problème important chez les jeunes conducteurs au Canada. La réglementation, l'application de la loi, le marketing social et les mesures fiscales ont toutefois suscité un changement dans les comportementsNote de bas de page 366. De fait, les vastes programmes de sensibilisation ont porté leurs fruits, et le nombre de jeunes et de jeunes adultes qui conduisent sous l'influence de l'alcool a diminué avec le temps (voir l'encadré intitulé « Accroitre la sensibilisation à l'alcool au volant »)Note de bas de page 570. Il reste néanmoins beaucoup à faire pour s'assurer que les messages continuent de toucher les jeunes et les jeunes adultes canadiens à risque. Il y aurait lieu d'élargir la portée des messages à la conduite de tous les véhicules motorisés, notamment les bateaux, les véhicules tout-terrain et les motoneiges, qui représentent une importante source de préoccupation dans les collectivités rurales et éloignées.

Des programmes de prévention ciblés ont également contribué à prévenir et à réduire les cas de récidive. Dans le cadre du programme Alcohol Ignition Interlocks (AII), mis sur pied en Alberta, des appareils de mesure du taux d'alcoolémie sont installés dans les véhicules afin d'empêcher le conducteur de démarrer sa voiture s'il dépasse la limite établieNote de bas de page 575, Note de bas de page 576. Pour éviter qu'une personne ne contourne le système, l'appareil est doté de sondes de température et de pression (pour identifier le conducteur), d'un dispositif qui fait repasser le test pendant le trajet et d'un enregistreur qui garde en mémoire toutes les manœuvres du conducteurNote de bas de page 576. Des évaluations ont démontré que, combinés aux lois prévoyant la suspension du permis de conduire, ces appareils se sont avérés efficaces contre les récidivistes en dressant des obstacles à la conduite avec les facultés affaiblies. Toutefois, il est encore trop tôt pour savoir si l'utilisation à court terme de tels appareils peut avoir une incidence à long terme sur les responsabilités individuelles concernant l'alcool au volantNote de bas de page 577.

Accroître la sensibilisation à l'alcool au volant

MADD Canada (Les mères contre l'alcool au volant)

Les mères contre l'alcool au volant (MADD) est un organisme communautaire de défense des droits qui est largement reconnu pour ses succès dans la réduction du nombre de blessures et de décès associés à l'alcool au volant. L'idée derrière la création de cet organisme, qui a vu le jour aux États-Unis, a vite fait le tour du monde, puisqu'elle attire l'attention sur les victimes des conducteurs en état d'ébriétéNote de bas de page 570. MADD Canada dirige un programme scolaire et mène des campagnes nationales de sensibilisation en diffusant, par exemple, des messages à la radio et à la télévision. En général, les Canadiens n'oublient pas ces messages et associent le ruban rouge sur les antennes de voiture à cette fameuse campagneNote de bas de page 571. Le programme scolaire de MADD Canada vise, quant à lui, à réduire les risques par la sensibilisation, notamment grâce à des rencontres d'information dynamiques et adaptées à la réalité des jeunes (sur le plan du langage et de la culture). Depuis 1994, le programme sensibilise chaque année plus de un million d'élèves de la 7e à la 12e année aux risques associés à la consommation d'alcool et de droguesNote de bas de page 572.

arrive alive DRIVE SOBER (Arrivez sain et sauf – la sobriété au volant), Canadian Youth Against Impaired Driving et Étudiants de l'Ontario contre l'alcool au volant

Le programme arrive alive DRIVE SOBER utilise, depuis plus de 23 ans, des techniques de marketing, des messages d'intérêt public et même les réseaux sociaux pour faire de la prévention et ainsi sensibiliser les gens aux blessures et aux décès que peut entraîner la conduite avec les facultés affaibliesNote de bas de page 97. Les responsables du programme travaillent aussi avec des groupes nationaux et provinciaux à la mise sur pied de campagnes et d'activités de sensibilisation et ont, entre autres, apporté leur contribution à des publicités d'intérêt public, telles que jeCONDUIS Sur la route et changetheconversation.ca. Depuis quelque temps, le programme offre également une application mobile intitulée Choose Your Ride, qui suggère, par exemple, de prendre un taxi, d'appeler un ami ou d'utiliser le transport en commun au lieu de conduire en état d'ébriétéNote de bas de page 573.

Depuis des décennies, les programmes Canadian Youth Against Impaired Driving et Étudiants de l'Ontario contre l'alcool au volant réussissent à sensibiliser les jeunes au moyen de conférences annuelles, d'ateliers régionaux et de programmes d'encadrement par les pairs qui mettent l'accent sur la normalisation sociale. En plus de permettre aux jeunes d'accéder à des programmes et d'acquérir des connaissances à partager, ces programmes les incitent à devenir des leaders dans leur école et dans leur collectivitéNote de bas de page 574.

Les distractions au volant, principalement celles liées à l'utilisation d'appareils portatifs pour parler, envoyer des messages textes ou s'adonner à d'autres activités, posent de plus en plus de problèmes, en particulier chez les jeunes et les jeunes adultes canadiensNote de bas de page 100. La Colombie-Britannique, la Saskatchewan, le Manitoba, l'Ontario, le Québec, la Nouvelle-Écosse, l'Île-du-Prince-Édouard, Terre-Neuve-et-Labrador ainsi que certaines municipalités ont d'ailleurs interdit l'utilisation des téléphones cellulaires au volantNote de bas de page 102, Note de bas de page 578. Bien que l'adoption de telles lois révèle clairement les risques associés à ce genre de comportement, certaines personnes continuent de croire que l'utilisation des appareils mains libres est sécuritaire. Des rapports publiés au Québec indiquent que l'usage d'un téléphone cellulaire, qu'il soit ou non de type mains libres, nuit à la conduite et augmente le risque de collision. Le danger ne vient pas uniquement de la manipulation et de la gestion de l'appareil : le simple fait de tenir une conversation au téléphone représente un risque en soiNote de bas de page 579, Note de bas de page 580.

L'American Automobile Association Foundation for Traffic Safety a constaté que les téléphones cellulaires, plus que tout autre appareil, présentent un risque élevé, en particulier dans le cas de conversations stressantes, troublantes ou captivantesNote de bas de page 581. Mais il existe bien d'autres sources de distractions au volant, par exemple, discuter avec un autre passager, manger ou se maquillerNote de bas de page 582, Note de bas de page 583. Les systèmes de positionnement global (GPS) et les lecteurs DVD, que l'on trouve dans un nombre croissant de véhicules au Canada, peuvent aussi causer des distractions.

Il faudrait donc mener de plus amples recherches sur les collisions associées à l'utilisation des appareils portatifs et autres appareils électroniques, notamment dans le but de déterminer qui utilise ces appareils et à quelles fins. Les recherches devraient permettre de recueillir des renseignements sur les différentes sources de distraction, sur l'heure à laquelle la collision s'est produite, sur la vitesse du véhicule au moment de l'incident ainsi que sur les conditions extérieures afin d'obtenir un portrait détaillé de la situation.

Stratégies globales de prévention des blessures

De nombreuses mesures globales ont été mises en place dans le but de prévenir les blessures, par exemple, les normes et les règlements sur la protection des consommateurs et sur l'environnement, les vastes campagnes de publicité, de marketing social et de sensibilisation, les trousses d'information à l'intention des organismes et des collectivités, la collecte de nouvelles données de recherche (y compris les indicateurs et les mécanismes de surveillance nationaux) et la mise en pratique des connaissances acquisesNote de bas de page 584. Certaines de ces mesures, en particulier celles liées à la circulation routière et aux automobiles, ont contribué à réduire le nombre de blessures au CanadaNote de bas de page 585. Ainsi, les Canadiens sont aujourd'hui mieux protégés contre les blessures et les décès prématurés grâce à des lois provinciales et territoriales qui réglementent le port d'équipement protecteur (comme les casques et les vêtements de flottaison), mais aussi grâce au resserrement des normes de sécurité concernant l'équipement et l'usage qui en est fait. Les associations sportives ont également contribué à cette diminution en imposant des exigences, telles que le port obligatoire du casque dans les ligues de hockey amateur. Malgré tout, les jeunes et les jeunes adultes au Canada continuent de subir des blessures et ils sont nombreux à ne pas utiliser d'équipement de sécurité dans les sports et dans les loisirs (voir le chapitre 3).

Bien que les blessures liées aux sports et aux activités récréatives soient évitables, il faut s'assurer que les stratégies de prévention ne découragent pas la pratique d'une activité physique et favorisent plutôt la prise de risques calculés. En fait, les mesures de prévention doivent combiner plaisir et sécurité. À ce titre, la Stratégie pancanadienne intégrée en matière de modes de vie sains et la Déclaration sur la prévention et la promotion montrent l'importance que les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux accordent à la prévention des blessuresNote de bas de page 142. En 2011, le gouvernement du Canada a investi cinq millions de dollars sur deux ans dans une stratégie intitulée Initiative pour s'attaquer aux risques de traumatisme crânien dans les sports chez les enfants et les jeunes. Cette stratégie a pour but d'encourager les activités communautaires qui incitent les sportifs amateurs à faire des choix sécuritairesNote de bas de page 143. Elle se penchera tout particulièrement sur les accidents qui entraînent des commotions, des noyades et des fractures et s'inspirera des mesures et des pratiques qui ont été mises en œuvre dans les collectivités pour joindre les enfants et les jeunes là où ils vivent et s'amusent. Par ailleurs, le gouvernement du Canada unira ses efforts à ceux d'organismes non gouvernementaux afin de promouvoir la prudence et de prévenir les blessures en mettant l'accent sur la compréhension des risques dans les sports et les loisirs, notamment dans les activités les plus pratiquées, comme le hockey, les sports d'hiver, le vélo, la natation et les sports nautiquesNote de bas de page 143.

Plusieurs pays membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ont mis en place des stratégies de prévention des blessures qui ont permis de réduire, dans une certaine mesure, le taux de blessuresNote de bas de page 584, Note de bas de page 586. L'exemple de la Suède est éloquent. Alors que ce pays affichait, en 1950, un des taux les plus élevés de blessures accidentelles chez les enfants et les jeunes dans le monde, il fait aujourd'hui partie des pays qui présentent l'un des taux les plus basNote de bas de page 586-588. S'appuyant sur les recommandations de l'OMS, la stratégie de prévention des blessures adoptée par la Suède part du principe que la solution aux problèmes de santé publique exige la participation de tousNote de bas de page 586-589. Par conséquent, la Suède fait de la sécurité une priorité dans ses politiques, ses infrastructures et ses campagnes de sensibilisation. Des évaluations ont attribué le succès de la Suède à différents facteurs, y compris les suivants :

  • un engagement à recueillir des données épidémiologiques et à investir dans ce domaine;
  • un système rigoureux de surveillance nationale des blessures qui rend compte des interventions et de leurs évaluations;
  • des lois et des politiques axées sur la sécurité des milieux;
  • des campagnes de sensibilisation du public et de vastes programmes de gestion des risques qui reconnaissent le caractère évitable de la plupart des blessures;
  • des valeurs sociales axées sur la prévention;
  • une participation accrue des différents secteurs et un sentiment de responsabilité collectiveNote de bas de page 586-590.

Une approche multisectorielle coordonnée, un encadrement rigoureux, une surveillance continue, un solide travail de recherche et d'évaluation, de vastes campagnes de sensibilisation et l'appui du public, voilà autant de facteurs qui ont permis à la Suède de réduire son taux de blessures, en particulier chez les enfants et les jeunesNote de bas de page 586-590.

Il existe, bien sûr, d'autres mesures de prévention des blessures. Grâce au Système canadien hospitalier d'information et de recherche en prévention des traumatismes (SCHIRPT), au Registre national des traumatismes, à l'Étude canadienne sur l'incidence des signalements de cas de violence et de négligence envers les enfants (ECI) et à la Base canadienne de données des coroners et des médecins légistes (BCDCML), le Canada a mis en place des pratiques de surveillance qui lui permettent de mieux recenser et de mieux comprendre les causes des blessuresNote de bas de page 591-594. Bien qu'il existe des lois et des règlements (notamment des exigences de sécurité et des normes d'utilisation de l'équipement protecteur), une meilleure coordination serait profitable. Les provinces et les territoires ont, eux aussi, adopté des mesures de prévention. Par exemple, la Stratégie ontarienne de prévention des traumatismes repose sur quatre grands principes : la responsabilité partagée et le leadership; une action basée sur des faits démontrés; des pratiques intégrées; et une reconnaissance de la diversitéNote de bas de page 141.

Les stratégies globales de prévention des blessures exigent un solide travail d'encadrement, puisqu'elles sont menées en collaboration avec un grand nombre d'organismes, de secteurs, de collectivités et de citoyens. Des organismes nationaux non gouvernementaux, comme Pensez d'Abord Canada, Communautés sécuritaires Canada, SécuriJeunes Canada et Sauve-Qui-Pense, continuent de faire partie intégrante de la lutte contre les blessures chez les jeunes et les jeunes adultes au Canada (voir l'encadré intitulé « Connaître les risques : l'exemple de Sauve-Qui-Pense »)Note de bas de page 149-151, Note de bas de page 595.

Connaître les risques : l'exemple de Sauve-Qui-Pense

Sauve-Qui-Pense est un organisme national voué à la prévention des blessures. Son objectif est d'aider les jeunes et les jeunes adultes au Canada à cerner et à gérer les risques, actuels ou futurs. Le programme s'appuie sur le principe que, pour montrer aux Canadiens à prendre des risques calculés, il faut les sensibiliser lorsqu'ils sont jeunes afin que ce message les marque pour le reste de leurs jours. Par conséquent, le programme privilégie des visites dans les écoles, là où il est facile de joindre les jeunes et d'établir le contactNote de bas de page 149, Note de bas de page 596. Sauve-Qui-Pense apprend aux jeunes à prendre des risques calculés en leur communiquant cinq messages positifs : attacher sa ceinture de sécurité, regarder avant de se lancer, s'équiper convenablement, suivre la formation qui convient et ne jamais conduire en état d'ébriétéNote de bas de page 149, Note de bas de page 597. Afin de promouvoir ces messages, Sauve-Qui-Pense a élaboré deux programmes éducatifs à l'intention des jeunes.

  • Aucun regret: Un programme de leadership qui est offert dans les écoles secondaires du Canada et qui initie les élèves et les enseignants à la gestion d'activités de prévention des blessures.
  • Aucun regret en direct: Une visite d'une heure d'une personne qui a été victime d'un accident évitable pour discuter de son expérience avec les élèves, puis présenter une vidéo sur la prise de risques calculés et sur les conséquences des mauvais choixNote de bas de page 596, Note de bas de page 598.

Les premières évaluations de ce programme montrent des résultats très positifs. Les élèves ont beaucoup appris sur la façon de prévenir les blessures et ont également amélioré leurs attitudes et leurs comportements en ce qui concerne les risques de blessure. Un an après avoir participé au programme, le nombre de blessures ayant nécessité des soins médicaux a diminuéNote de bas de page 596. Le programme incite aussi les jeunes à s'intéresser davantage à ce problèmeNote de bas de page 596. À l'heure actuelle, plus de 100 écoles secondaires au Canada (notamment au Yukon, en Colombie-Britannique, en Alberta, en Saskatchewan, en Ontario, au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse, à l'Île-du-Prince-Édouard et à Terre-Neuve-et-Labrador) ont participé au programme Aucun regret. Sauve-Qui-Pense aimerait joindre encore plus de jeunes et de jeunes adultes au Canada en offrant une formation en ligne et en recourant aux médias sociaux, comme Facebook, YouTube et Twitter. L'organisme collabore aussi avec les parents pour qu'ils initient leurs enfants à la prise de risques calculésNote de bas de page 596, Note de bas de page 599.

Lutter contre l'intimidation et les agressions

L'intimidation ne compromet pas seulement l'état de santé et de bien-être actuel d'une personne, mais peut avoir des répercussions sur son comportement, sa santé et son bien-être à long termeNote de bas de page 604, Note de bas de page 605. Comme l'indique le chapitre 3, la prévalence de l'intimidation et de la victimisation est inquiétante. Selon l'Enquête sur les comportements de santé des jeunes d'âge scolaire (Health Behaviour in School-Aged Children [HBSC]), réalisée en 2005-2006 dans 39 pays, les Canadiens âgés de 13 ans se classaient respectivement au 20e et au 27e rang pour ce qui est de l'intimidation et de la victimisationNote de bas de page 606. En tant que société, le Canada a beaucoup à faire pour régler ce problème. Tous les Canadiens peuvent jouer un rôle dans la lutte contre l'intimidation, que ce soit à l'école, au terrain de jeu, au travail ou en ligne. Bien que, de façon générale, les médias aient réussi à sensibiliser la population canadienne, il faut continuer de s'attaquer au problème afin de mieux le prévenirNote de bas de page 247.

L'intimidation est un problème relationnel destructeur caractérisé par des agressions à répétition avec abus de pouvoir de la part de l'intimidateur envers sa victimeNote de bas de page 600, Note de bas de page 601. L'intimidation peut survenir à la maison, à l'école, dans la collectivité et en ligne. Elle réunit trois conditions :

L'intimidation est un problème relationnel qui nécessite des solutions d'ordre relationnel (voir la section intitulée « Établir des relations saines »)Note de bas de page 607. Elle se caractérise par un abus de pouvoir de la part de l'intimidateur envers sa victime (qui est souvent marginalisée)Note de bas de page 600, Note de bas de page 601. Certaines personnes sont toutefois plus vulnérables que d'autres, que ce soit en raison de leur origine ethnique, de leur religion, de leur orientation sexuelle, de leur identité sexuelle, de leur apparence (y compris leur poids), de leur situation socioéconomique ou de leur invalidité. Quoi qu'il en soit, l'intimidation accentue leur isolement et peut entraîner des répercussions à long terme sur leur santé et leur vie socialeNote de bas de page 600. Le meilleur moyen de prévenir l'intimidation est de promouvoir des relations sainesNote de bas de page 607. Toutefois, puisqu'il s'agit d'un phénomène qui résulte de plusieurs facteurs, il faut privilégier une approche générale qui soutient les personnes en cause (l'intimidateur et sa victime) mais aussi le milieu social, c'est-à-dire les pairs, les éducateurs et les parentsNote de bas de page 607. Les interventions peuvent se dérouler dans différents contextes, que ce soit en classe, à l'école ou dans la collectivité.

Combattre l'intimidation dans les écoles

L'intimidation se produit généralement à l'école. C'est donc en milieu scolaire que l'on s'emploie le plus activement à la combattreNote de bas de page 608, Note de bas de page 609. Il existe d'ailleurs une foule de programmes de prévention en milieu scolaire. Pourtant, leurs résultats restent mitigésNote de bas de page 607, Note de bas de page 609. Le programme Olweus, conçu par le professeur de psychologie norvégien D. Olweus (dont les interventions ont été mises en œuvre dans des écoles de la Norvège et des États-Unis), est sans doute la plus réputée et la plus fructueuse des mesures de lutte contre l'intimidation (voir l'encadré intitulé « Le programme Olweus de prévention de l'intimidation »)Note de bas de page 610.

Les démarches qui englobent tout le milieu scolaire font partie des meilleures stratégies de prévention de l'intimidation. Elles visent à élaborer des politiques et des mesures de lutte contre l'intimidation en précisant les rôles et les responsabilités des enseignants et des élèves. Elles consistent, en particulier, à déterminer comment l'intimidation est gérée dans l'école et à établir des façons d'améliorer la situation. Pour prévenir l'intimidation à l'école, il faut être convaincu que ce type de comportement peut être éliminé grâce à une restructuration systématique de l'environnement social de l'écoleNote de bas de page 614. Voici quelques-unes des démarches qui ont donné de bons résultats :

  • l'encadrement et l'engagement des enseignants et des adultes;
  • l'établissement de règles et de valeurs comportementales claires et uniformes;
  • la participation des jeunes à l'élaboration et à l'application des programmes;
  • la participation de tous les intervenants;
  • la prise en compte des nombreux facteurs de risque et de protection;
  • l'importance accordée aux interventions précoces et à long termeNote de bas de page 614.

Les politiques qui connaissent le plus de succès sont celles qui favorisent la participation des élèves à l'élaboration des politiques scolaires et qui prévoient des récompenses et des sanctions afin de modifier les comportements et d'influencer les autres. On sait que les élèves qui participent à la vie étudiante et qui entretiennent des relations sociales à l'école se sentent plus en sécurité, éprouvent moins de problèmes affectifs, présentent moins de troubles de comportement et réussissent mieux à l'écoleNote de bas de page 615. À l'opposé, les élèves se sentent tristes et menacés dans les écoles où les adultes (par exemple, les enseignants, le personnel et les parents) sont présents en classe mais absents des lieux où les intimidateurs ont l'habitude de sévirNote de bas de page 615. Si l'on veut changer les comportements, il faut garder à l'esprit qu'une personne ne devient pas un intimidateur du jour au lendemain et que son comportement dépend de nombreux facteurs. Il faut donc privilégier les interventions à long terme qui multiplient les démarches et les messages de sensibilisationNote de bas de page 247, Note de bas de page 607. En effet, les interventions doivent favoriser l'acquisition de compétences sociales, comme la communication interpersonnelle, l'affirmation de soi, l'empathie et la capacité à résoudre des conflitsNote de bas de page 616.

Le programme Olweus de prévention de l'intimidation

Le programme Olweus de prévention de l'intimidation propose une approche générale à quatre volets : individuel, en classe, en milieu scolaire et dans la collectivitéNote de bas de page 611, Note de bas de page 612. Pour chaque volet, diverses interventions sont proposées, comme le resserrement de la surveillance des élèves à l'école et en classe, l'élaboration de règles et de politiques dans l'école, la reconnaissance des signes d'intimidation par le personnel, l'engagement des élèves et des parents, l'établissement de partenariats et la mise en place de campagnes de sensibilisation au sein de la collectivitéNote de bas de page 611. Au départ, 2 500 élèves de 42 écoles norvégiennes ont participé au programme pendant plus de deux ans et demi. Les élèves ont constaté une diminution de 50 % du nombre d'intimidateurs et de victimes, une réduction des comportements antisociaux et une amélioration du contexte social en classe. En 2001, toutes les écoles primaires et secondaires de la Norvège avaient adopté le programme OlweusNote de bas de page 610. Aux États-Unis, trois écoles qui ont pris part à une étude de cas, en Virginie, en Pennsylvanie et en Californie, ont confirmé le succès du programme, indiquant que les élèves, les enseignants et les adultes avaient été moins nombreux à signaler des cas d'intimidation. De plus, les élèves ont déclaré éprouver un plus grand sentiment de sécurité à l'école, puisqu'ils voyaient que les adultes tentaient de mettre fin à l'intimidationNote de bas de page 610, Note de bas de page 613.

Des programmes comme Racines de l'empathie permettent de réduire les agressions en améliorant les compétences sociales et affectives et en favorisant l'empathie. Racines de l'empathie est un programme offert en classe dans le cadre duquel un instructeur compétent reçoit la visite de parents du quartier, accompagnés de leur bébé. Les élèves observent le bébé et doivent décrire les sentiments que celui-ci éprouveNote de bas de page 617. Cet éveil affectif favorise une vie en classe plus sécurisante et chaleureuse (pour plus de détails sur ce sujet, consulter le Rapport de l'administrateur en chef de la santé publique sur l'état de la santé publique au Canada, 2009)Note de bas de page 30, Note de bas de page 618. S'attaquer à l'intimidation nécessite la collaboration de l'ensemble de la collectivité afin d'échanger sur les stratégies éprouvées, les ressources disponibles et les résultats de recherche. Même si les programmes en milieu scolaire sont les plus efficaces, chacun a un rôle à jouer afin de mieux faire connaître les dangers et les conséquences de l'intimidation. Une stratégie communautaire s'impose donc pour lutter contre les innombrables aspects de l'intimidation et réduire leurs conséquences à long terme sur la vie de ceux qui en sont victimesNote de bas de page 619.

PREVNet (Promotion des Relations et Élimination de la Violence) est un réseau national de chercheurs canadiens et d'intervenants gouvernementaux et non gouvernementaux résolus à combattre l'intimidationNote de bas de page 620. Avec la collaboration du Réseau national de centres d'excellence du Canada, PREVNet établit des partenariats multisectoriels en vue de faire connaître les résultats de recherche, d'accroître la sensibilisation, de changer les comportements, de mesurer la prévalence de l'intimidation, de mettre en œuvre et d'évaluer des stratégies de réduction de l'intimidation basées sur des faits démontrés et, enfin, de concevoir des politiques qui encouragent ce genre d'initiativesNote de bas de page 620, Note de bas de page 621. PREVNet a mis au point une stratégie à quatre piliers qui sert à orienter ses activités de recherche et de développement :

  • le pilier éducation vise à modifier les comportements et à susciter la volonté d'agir;
  • le pilier évaluation offre des outils universels permettant d'évaluer les problèmes et leurs répercussions;
  • le pilier intervention fournit des outils et des lignes directrices pour combattre l'intimidation et la victimisation;
  • le pilier politique encourage la création de politiques et de lignes directrices pour toutes les administrationsNote de bas de page 621.

Stratégies en milieu de travail

L'intimidation ne survient pas seulement en milieu scolaire. Comme le présent rapport s'intéresse aux jeunes et aux jeunes adultes canadiens de moins de 29 ans, il importe de souligner que l'intimidation se produit également en milieu de travail et qu'elle peut toucher les jeunes et les jeunes adultes, souvent inexpérimentés, qui viennent de décrocher un emploi. En milieu de travail, l'intimidation se traduit par des gestes ou des commentaires susceptibles de mettre un employé à l'écart ou de nuire à son bien-être, comme colporter des rumeurs à son sujet, l'exclure, critiquer son travail, lui retirer des responsabilités, lui dissimuler des renseignements ou le menacer de violence physique et sexuelleNote de bas de page 622. Les victimes d'intimidation peuvent alors se sentir démoralisées, fâchées, anxieuses ou stressées. L'intimidation mène également à une augmentation du taux d'absentéisme et à un roulement de personnel très élevé, ce qui peut, dans certains milieux de travail, entraîner une augmentation des coûts associés à l'aide aux employés ainsi qu'à la baisse de la productivité et de la motivationNote de bas de page 622.

Combattre l'intimidation en milieu de travail n'est pas une tâche facile pour les employeurs, étant donné qu'il existe différentes opinions sur ce qu'est l'intimidation et que la frontière entre un acte d'intimidation et un style de gestion dynamique est parfois difficile à tracer. Néanmoins, les programmes de santé et de sécurité au travail et les programmes de prévention de la violence en milieu de travail devraient tenir compte de cette réalité. L'organisation (l'employeur) et ceux qui défendent les intérêts des employés doivent s'entendre sur une définition de l'intimidation et présenter des exemples de comportements considérés comme acceptables, selon les circonstances. Cette définition doit ensuite être appliquée par tous les employés, clients et autres personnes qui entretiennent des liens avec l'organisation. Les employeurs et les employés devraient collaborer à la mise en place d'un programme de prévention, s'entendre sur les mesures à prendre pour prévenir l'intimidation, travailler ensemble à leur mise en application et, enfin, élaborer un protocole de déclaration et de prise en charge des incidents. Des données démontrent que, pour assurer la réussite d'un programme ou d'une stratégie de prévention, il faut que la direction et les employés s'engagent à éliminer ou à réduire l'intimidation dans leur milieu de travail et qu'ils mettent à jour, quand c'est nécessaire, leur programme ou leur stratégie en fonction des exigences réglementairesNote de bas de page 622.

Au Canada, les lois et les mesures législatives qui portent sur l'intimidation au travail sont peu nombreuses. Le Code canadien du travail et la Loi canadienne sur les droits de la personne protègent les employés contre certaines formes de harcèlement (surtout celles en milieu de travail)Note de bas de page 80, Note de bas de page 623. Toutefois, il incombe aux employeurs de contrer le harcèlement et de consentir des efforts raisonnables pour éviter qu'un employé en soit victime. Il revient aussi aux employeurs d'adopter des politiques appropriées, d'en évaluer l'efficacité, de les faire connaître aux employés, de les mettre à jour au besoin et d'offrir une formation sur le harcèlementNote de bas de page 622. Certaines administrations ont adopté des lois en matière de violence, de harcèlement et d'intimidation au travail. Par exemple, depuis février 2011, les travailleurs du Manitoba sont protégés contre le harcèlement psychologique en milieu de travail en vertu du Règlement sur la sécurité et la santé au travail. Ces nouvelles dispositions obligent tous les employeurs de la province à mettre en place des politiques de prévention du harcèlement et à informer leurs employés de leur droit de travailler dans un milieu sain et du rôle qu'ils ont à jouer à cet égardNote de bas de page 624, Note de bas de page 625. Les employeurs reçoivent de l'aide pour instaurer des programmes adaptés à leur environnement, à leur organisation et à leur domaine d'activité. La Saskatchewan, l'Ontario et le Québec se sont également dotés de lois et de politiques semblablesNote de bas de page 525, Note de bas de page 626, Note de bas de page 627. La Saskatchewan, par exemple, a mis au point des outils qui favorisent le « travailler mieux » afin d'aider les employés et leurs employeurs à reconnaître les cas de harcèlement, à y mettre fin et à promouvoir la santé et la sécurité en milieu de travailNote de bas de page 627, Note de bas de page 628.

S'attaquer aux problèmes de santé sexuelle et reproductive

La santé sexuelle fait partie intégrante de la santé d'une personne, d'un mode de vie sain et d'une transition réussie. Vivre une sexualité saine, ce n'est pas seulement éviter les conséquences négatives, comme les infections transmissibles sexuellement (ITS) et les grossesses imprévues. Une sexualité saine suppose également l'acquisition de connaissances, de compétences et de comportements favorables à une bonne santé sexuelle et reproductive ainsi qu'à des expériences sexuelles enrichissantes tout au long de la vie. Les attitudes d'une personne envers la sexualité et son aptitude à comprendre et à accepter sa propre sexualité influeront sur sa capacité à faire les bons choix et à respecter les choix des autresNote de bas de page 630.

Selon l'OMS, la santé sexuelle est un état de bien-être physique, mental et social lié à la sexualité. Elle exige une approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations sexuelles qui permet de vivre des expériences agréables et sécuritaires, sans contrainte, sans discrimination et sans violenceNote de bas de page 629.

La santé sexuelle revêt une importance particulière chez les jeunes et les jeunes adultes, puisque la plupart des Canadiens deviennent sexuellement actifs à l'adolescence et ont leur première relation sexuelle avant le début de l'âge adulteNote de bas de page 219. Les taux d'ITS à déclaration obligatoire sont plus élevés chez les 15 à 24 ans que chez les personnes plus âgéesNote de bas de page 161-163. La section qui suit traite des principales mesures qui favorisent la santé sexuelle et des facteurs qui peuvent avoir des conséquences néfastes sur la santé des jeunes et des jeunes adultes :

  • établir des relations saines;
  • favoriser l'éducation sur la santé sexuelle;
  • réduire les comportements sexuels à risque;
  • promouvoir la santé reproductive;
  • concevoir des stratégies globales pour s'attaquer aux problèmes de santé sexuelle.

Établir des relations saines

Le présent chapitre part du principe que les relations saines (celles que l'on entretient avec ses pairs, ses partenaires, ses parents et d'autres adultes et conseillers) permettent d'accroître la résilience et de réduire les risques de développer des problèmes de santé. Les répondants du Toronto Teen Survey ont indiqué que les relations saines étaient l'un des trois aspects de la santé sexuelle qu'ils souhaitaient approfondir, les autres étant le virus de l'immunodéficience humaine (VIH), le syndrome d'immunodéficience acquise (sida) et le plaisir sexuelNote de bas de page 631. Établir des relations à cet âge est important puisque, à cette étape de leur vie, les jeunes et les jeunes adultes socialisent davantage, ont leur première relation sexuelle et peuvent même devenir parents. Par conséquent, ils doivent acquérir les compétences, les connaissances et les attitudes nécessaires pour établir, dès l'adolescence, des relations saines basées sur le respect et l'entraide.

Les relations amoureuses sont particulièrement importantes pour un passage réussi à l'âge adulte. À l'adolescence, les jeunes explorent de nouveaux comportements qui leur feront vivre un éventail d'expériencesNote de bas de page 632. Il s'agit d'une période de vulnérabilité où les jeunes peuvent accomplir, délibérément ou non, des gestes qui nuisent à l'établissement de relations saines. Il peut s'agir de gestes subtils ou violents, qui peuvent être perçus comme des signes d'engagement ou d'amour et qui dépendent d'un certain nombre de facteurs, notamment le besoin de contrôler. Ces gestes peuvent cependant avoir des conséquences négatives à long termeNote de bas de page 632, Note de bas de page 633. Même si la violence dans les relations amoureuses peut survenir à tout âge, les jeunes et les jeunes adultes semblent plus susceptibles d'en être victimesNote de bas de page 253. Ce sont généralement les femmes qui déclarent à la police des actes de violence dans leurs relations amoureusesNote de bas de page 253. Quoi qu'il en soit, il est nécessaire d'aider les jeunes à établir des relations saines basées sur l'égalité afin de les soutenir pendant leur passage à l'âge adulteNote de bas de page 632. Les relations saines provoquent une remise en question des rôles traditionnels assignés à chacun des sexes, permettent de trouver un équilibre entre les pouvoirs et favorisent l'égalité des sexes.

La violence dans les relations amoureuses comprend tout comportement qui nuit au développement de l'autre en compromettant son intégrité physique, psychologique ou sexuelle. Il peut donc s'agir de violence psychologique, physique ou sexuelleNote de bas de page 632.

Pour prévenir la violence et promouvoir les relations saines, il importe d'agir le plus tôt possible. En effet, les interventions précoces (à la maison, à l'école et dans la collectivité) permettent aux enfants et aux jeunes d'apprécier la valeur des relations et de reconnaître que le respect, l'égalité et l'harmonie en font partie intégranteNote de bas de page 634. Des programmes comme Racines de l'empathie (dont il a été question dans la section intitulée « Lutter contre l'intimidation et les agressions ») apprennent aux jeunes à faire preuve d'empathie et à comprendre les conséquences de leurs comportements et de leurs gestesNote de bas de page 617, Note de bas de page 635. Des études ont également révélé que les programmes qui s'adressent spécifiquement aux personnes à risque (par exemple, les jeunes victimes de mauvais traitements) peuvent contribuer à réduire la violence dans les relations (voir l'encadré intitulé « Prévenir la violence dans les relations amoureuses : le Youth Relationships Project »)Note de bas de page 636-638.

Les mesures les plus fructueuses en ce domaine font intervenir de nombreux acteurs. Les collectivités ont un rôle important à jouer afin de soutenir les écoles qui offrent des programmes de sensibilisation. Ce travail de collaboration permet de réduire le chevauchement des programmes et laisse plus de latitude pour cerner les personnes qui vivent des relations instables et pour attaquer les problèmes sur plusieurs fronts. Les interventions dans les écoles touchent un grand nombre de jeunes et comprennent des programmes de petite ou de moyenne envergure axés sur la discussion et les jeux de rôles. Pour donner de bons résultats, les programmes doivent aborder toute une gamme d'expériences individuelles et considérer les différences entre les genres, la culture, l'origine ethnique et l'orientation sexuelle. Les mesures de prévention qui ont permis de réduire la violence dans les relations amoureuses, sont celles qui fournissent des outils pour assurer la sécurité des victimes (réelles ou potentielles) et qui placent la violence dans un contexte général, qui englobe l'égalité, les droits et les responsabilités (voir l'encadré intitulé « Établir des relations saines : le programme Fourth R »)Note de bas de page 638, Note de bas de page 639.

Prévenir la violence dans les relations amoureuses : le Youth Relationships Project

Le Youth Relationships Project (YRP) est un programme qui fait l'étude d'une intervention destinée à aider les jeunes à risque à établir des relations saines et non violentes avec leurs partenaires, actuels ou futurs. Ce projet réalisé en Ontario s'adresse aux jeunes qui présentent des antécédents de violence et de conflits familiaux et qui sont donc plus à risque de devenir eux-mêmes agresseurs ou victimes de violence. Le projet est fondé sur le principe que la victimisation et les actes de violence peuvent être réduits si on multiplie les sources d'information mises à la disposition des jeunes à risque et si on leur permet de vivre des expériences enrichissantesNote de bas de page 636. Le volet étude du projet portait sur 400 jeunes (âgés de 14 à 16 ans) sous la responsabilité des services de protection de l'enfance. Certains faisaient partie du groupe d'intervention, alors que les autres appartenaient au groupe témoin (services habituels). Le groupe d'intervention a été divisé en petits groupes mixtes qui, pendant 18 semaines, se réunissaient pour des séances de deux heures. L'objectif était de mieux faire comprendre aux participants le problème de la violence sexiste afin qu'ils acquièrent des compétences et des comportements sociaux axés sur la communication, la responsabilité et la participation collectiveNote de bas de page 636. L'évaluation du projet a révélé que, à long terme, les participants du groupe d'intervention étaient beaucoup moins susceptibles de faire l'objet de victimisation et de faire usage de violence physique et psychologique, comparativement aux jeunes du groupe témoin. Les participants du groupe d'intervention affichaient également une diminution de l'hostilité interpersonnelle et présentaient moins de signes de traumatisme par rapport aux membres de l'autre groupe. Même si l'évaluation de la détresse et des comportements violents reposait sur les renseignements fournis par les participants, le YRP a tout de même conduit à des changements de comportement positifs chez les jeunes à risque et a préparé le terrain pour d'autres programmes fructueux, comme le Fourth R (voir l'encadré intitulé « Établir des relations saines : le programme Fourth R »)Note de bas de page 637, Note de bas de page 638. Des travaux de recherche plus approfondis seraient toutefois nécessaires pour confirmer ces résultats.


Favoriser l'éducation sur la santé sexuelle

L'éducation sur la santé publique comprend un volet sur la santé sexuelle, qui permet d'acquérir les connaissances, la compréhension, le discernement, la motivation et les habiletés nécessaires à une bonne santé sexuelleNote de bas de page 640. Pour être efficace, l'éducation sur la santé sexuelle doit tenir compte des besoins, des expériences et des réalités des individus, des collectivités et des populationsNote de bas de page 22. La santé sexuelle comprend plusieurs aspects et suscite différentes perceptions. C'est pourquoi il est recommandé, dans les Lignes directrices nationales pour l'éducation en matière de santé sexuelle, de recourir à des programmes d'éducation généraux, qui favorisent les retombées positives (par exemple, le respect de soi et des autres, l'estime de soi, les relations sexuelles consentantes et la prise de décisions éclairées en matière de reproduction) tout en éliminant les conséquences négatives (par exemple, les ITS, le VIH et la violence sexuelle les grossesses imprévues)Note de bas de page 22.

Comme il est indiqué précédemment, les écoles constituent le milieu idéal pour transmettre de l'information, puisqu'elles accueillent la plupart des jeunes et des jeunes adultes au Canada et qu'elles peuvent intégrer la santé sexuelle à leur programme d'enseignement. En plus de fournir de l'information sur tous les aspects liés à la santé sexuelle, les programmes généraux contribuent à prévenir les ITS et à réduire la violence dans les relations.

Des études ont démontré que plus on informe les enfants et les jeunes sur la santé sexuelle, plus ils sont susceptibles de retarder le moment de leur première relation sexuelle et d'adopter des pratiques sexuelles sécuritaires (comme l'utilisation du condom)Note de bas de page 644. Elles indiquent également que, à long terme, les interventions en milieu scolaire peuvent être profitables, surtout si l'on tient compte des répercussions économiques et sociales qu'entraînent les grossesses imprévues et les problèmes de santé sexuelle, comme le VIH et le sida et les autres ITSNote de bas de page 644. Les mesures qui induisent des changements de comportement, même minimes, peuvent générer des économies tant sur le plan communautaire que sur le plan social. Par exemple, une grossesse imprévue à l'adolescence peut avoir des conséquences socioéconomiques disproportionnées pour les jeunes femmes et leurs famillesNote de bas de page 339, Note de bas de page 645.

Établir des relations saines : le programme Fourth R

Élaboré en Ontario, le programme Fourth R est une intervention globale qui a été mise en œuvre en milieu scolaire dans le but d'éliminer la violence, la consommation de drogues et les comportements sexuels à risqueNote de bas de page 641, Note de bas de page 642. Ce programme part du principe que les compétences relationnelles (relationship skills en anglais) coïncident avec les compétences de base acquises à l'école, soit la lecture, l'écriture et les mathématiques (les trois autres « r » en anglais, c'est-à-dire reading, 'riting et 'rithmetic). Il se divise en 21 leçons fondées sur les compétences et répond aux exigences du programme de santé et d'éducation physique offert en 9e année dans les écoles publiques de l'Ontario. Les trois principaux modules du programme encouragent la non-violence et les comportements sains en abordant les sujets suivants : la sécurité personnelle et la prévention des blessures; une croissance et une sexualité saines; la consommation et l'abus de substances nocivesNote de bas de page 641.

L'évaluation a établi que, comparativement aux étudiants du groupe d'école témoin (qui avaient suivi les leçons habituelles sur la santé), les participants au programme avaient acquis de nouvelles connaissances, compétences et attitudesNote de bas de page 643. Ils ont également déclaré vivre moins de violence dans leurs relations amoureuses deux ans après le programme de 9e annéeNote de bas de page 641. Depuis, le programme Fourth R a pris de l'ampleur et a été mis en application dans plus de 800 écoles en Ontario. Il a également été adapté pour répondre aux besoins de six autres provinces du CanadaNote de bas de page 643.

Toutefois, l'éducation sur la santé sexuelle est généralement d'une efficacité limitée dans les écoles, en raison du temps consacré à l'enseignement, du matériel pédagogique ou encore d'une résistance de la part de la collectivité. Certains enseignants se sentent également mal à l'aise avec le sujetNote de bas de page 640. Par ailleurs, une coordination accrue s'impose entre les collectivités et les différentes administrations afin de s'assurer que l'éducation sur la santé sexuelle est accessible et adaptée aux différents besoins des jeunes et des jeunes adultes au CanadaNote de bas de page 22.

Pour répondre aux différents besoins et points de vue, les programmes doivent aussi inclure la question de la diversité. Selon les résultats du Toronto Teen Survey, les Noirs et les personnes originaires de l'Afrique et des Caraïbes sont les moins portés à se renseigner sur les questions d'ordre sexuel ou à avoir accès à cette informationNote de bas de page 631, Note de bas de page 646. En raison de leurs antécédents culturels, qui leur dictent ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas, certains jeunes doivent également surmonter d'autres obstacles susceptibles de compromettre leur éducation sexuelle et de nuire à leur santé sexuelle et reproductiveNote de bas de page 647, Note de bas de page 648. On a également constaté dans l'ensemble des collectivités un manque ou une absence d'information à propos des minorités sexuelles.

Informer les gens sur la question de l'orientation sexuelle peut répondre aux besoins de certains jeunes et jeunes adultes des minorités sexuelles (ceux qui se désignent comme LGBTQ). En effet, les jeunes LGBTQ qui ont participé au Toronto Teen Survey ont rapporté qu'ils avaient du mal à obtenir des services de santé sexuelle et que les cours sur la santé sexuelle offerts à leur école n'abordaient pas les sujets qui les préoccupent personnellementNote de bas de page 631, Note de bas de page 649. En réalité, la plupart des études traitent de l'hétérosexualité chez les adolescents et, par conséquent, font généralement abstraction des minorités sexuelles et des personnes à genre variable. Pourtant, les rares recherches effectuées sur les minorités sexuelles et les personnes à genre variable font état de la complexité de leur identité, de leurs comportements et de leurs désirs ainsi que du caractère diversifié et hétérogène de leur sexualitéNote de bas de page 337, Note de bas de page 650. Les efforts consentis pour répondre aux besoins des jeunes en matière d'éducation sexuelle permettraient de réduire la stigmatisation, de dissiper les craintes, de combattre les stéréotypes et de mettre un terme à la discriminationNote de bas de page 644, Note de bas de page 651.

Certaines écoles secondaires de l'Ontario ont mis en place le programme Girls Chat Project, qui vise à sensibiliser les jeunes immigrantes et les jeunes réfugiées à la santé sexuelle et à l'image corporelle, à l'estime de soi, à la sexualité et à la violence sexuelle. Dans le cadre de ce programme, les adolescentes se réunissent à l'école chaque semaine afin de discuter et d'échanger avec d'autres jeunes qui vivent des défis et des expériences semblablesNote de bas de page 652, Note de bas de page 653. Les enseignants, le personnel administratif de l'école et d'autres travailleurs communautaires peuvent également participer à des séances d'information et échanger sur les besoins de ces jeunes femmes et sur la façon de leur offrir des services appropriésNote de bas de page 653, Note de bas de page 654. Le projet existe depuis maintenant sept ans. Il est offert dans six écoles secondaires à Ottawa, et plus de 100 jeunes femmes y participent chaque semaineNote de bas de page 653, Note de bas de page 654. Des études de ce projet ont démontré qu'il s'agit d'un programme prometteur qui permet de stimuler l'esprit d'initiative chez les jeunes femmes, facilite leur intégration sur le plan psychologique et social et favorise les relations harmonieuses entre les élèves et le personnel de l'école.

Réduire les comportements sexuels à risque

Pour assurer leur développement et faciliter leur passage à l'âge adulte, les jeunes et les jeunes adultes doivent apprendre à faire des choix responsables et éclairés à propos de leur sexualité. Les attitudes et les comportements qu'ils adoptent à l'égard de la sexualité se définissent dès leur tout jeune âge et restent sensiblement les mêmes tout au cours de leur vieNote de bas de page 655, Note de bas de page 656. Certains comportements sexuels à risque, comme l'activité sexuelle précoce, l'utilisation occasionnelle du condom et les relations sexuelles avec des partenaires multiples ou simultanés, augmentent les risques de contracter une ITS, de provoquer une grossesse imprévue ou de développer des problèmes de santé à long termeNote de bas de page 655-657. Plus les jeunes et les jeunes adultes acquièrent des connaissances et des compétences en la matière, plus ils sont en mesure de gérer judicieusement leur sexualité et de faire des choix responsables.

Il se peut que certains jeunes ne comprennent pas ou comprennent mal les répercussions des comportements sexuels à risqueNote de bas de page 656. Ce manque de sensibilisation pourrait, entre autres, expliquer la récente hausse du nombre de cas déclarés d'ITS (voir le chapitre 3). Selon les données autodéclarées, la plupart des jeunes âgés de 14 à 17 ans se disent bien informés sur la santé sexuelle; toutefois, le quart des élèves de 9e et de 10e année qui ont déclaré être sexuellement actifs ont également admis ne pas utiliser de moyen de contraceptionNote de bas de page 658. Bien que de vastes campagnes d'information aient été mises en œuvre pour sensibiliser la population aux risques associés à certains comportements sexuels, il semble que des programmes plus ciblés donneraient de meilleurs résultats auprès des jeunesNote de bas de page 659, Note de bas de page 660.

Par ailleurs, pour s'attaquer aux comportements sexuels à risque des jeunes de la rue, il faut examiner l'ensemble des facteurs déterminants pour leur santé. Habituellement, les interventions en santé publique portent sur une seule question à la fois et, par conséquent, ne permettent pas de s'attaquer aux causes fondamentales des comportements adoptés par les jeunes de la rue. Il faut savoir que la plupart d'entre eux ont quitté leur foyer en raison de problèmes familiaux, de conflits, de violence, de mauvais traitements et de consommation ou d'abus de substances nocives. Les programmes de prévention qui misent sur les milieux sociaux, tels que la famille, l'école et la collectivité, permettent de réduire le nombre de jeunes qui se retrouvent dans la rueNote de bas de page 23. Comme il est mentionné au chapitre 3, les jeunes de la rue sont particulièrement vulnérables aux risques associés à la santé sexuelle : ils présentent des taux élevés d'ITS et sont plus susceptibles de contracter le virus de l'hépatite B (VHB) et le virus de l'hépatite C (VHC)Note de bas de page 661-663. Paradoxalement, les programmes publics de vaccination contre le VHB sont offerts en milieu scolaire, alors que la plupart des jeunes de la rue ne fréquentent pas l'école de façon régulièreNote de bas de page 23, Note de bas de page 664, Note de bas de page 665. Lorsqu'elles reposent sur la collaboration intersectorielle, les interventions qui encouragent l'utilisation du condom et l'exclusivité sexuelle sont particulièrement efficaces pour réduire la propagation des ITS et des infections transmissibles par le sangNote de bas de page 23. Cependant, de nouvelles stratégies d'intervention pourraient être nécessaires afin de s'assurer que les populations à risque ont accès à des soins de santé et à des programmes d'immunisationNote de bas de page 664. Un examen systématique des programmes de prévention des ITS et du VIH destinés aux jeunes a d'ailleurs permis de cerner quatre grands domaines où il y aurait lieu d'intervenir afin de réduire les comportements sexuels à risque.

  • Cibler les comportements considérés comme gérables et réalisables, par exemple, encourager l'usage du condom. La recherche montre que de telles interventions réduisent, à court et à long terme, les comportements sexuels à risque et, par conséquent, les taux d'ITS et de VIHNote de bas de page 666, Note de bas de page 667;
  • Concevoir des programmes adaptés. Les jeunes et les jeunes adultes au Canada ne forment pas une population homogène. Il est donc essentiel de garder à l'esprit que ce qui fonctionne pour une personne peut être inefficace pour une autre, d'où l'importance de mener des interventions qui tiennent compte de la diversité culturelle et ethnique des populations, de leur niveau de développement, de leur orientation sexuelle, de leur identité sexuelle et des risques comportementauxNote de bas de page 666, Note de bas de page 667;
  • Adapter les théories cognitives et de l'apprentissage. Les interventions qui misent sur la sensibilisation, l'autoefficacité et le renforcement des aptitudes personnelles sont efficaces pour aider les jeunes à communiquer davantage avec leurs partenaires (grâce à des jeux de rôles) et leur apprendre à faire des choix responsables, à faire un usage approprié des méthodes de contraception et à manifester leur intention d'avoir des relations sexuelles protégéesNote de bas de page 667;
  • Aborder des sujets autres que les risques associés à la sexualité. Les interventions qui se penchent sur des sujets diversifiés, comme la résolution de problèmes, la prise de décision, les aptitudes sociales, le perfectionnement des compétences, les différences de perceptions selon le genre et les croyances culturelles, contribuent également à réduire les comportements sexuels à risque. Les interventions qui misent sur les compétences et la résilience semblent également très prometteusesNote de bas de page 667.

Promouvoir la santé reproductive

Pour certains jeunes et jeunes adultes, le passage à l'âge adulte coïncide avec une autre étape importante de la vie, qui comporte elle aussi son lot de responsabilités : devenir parents. Une bonne santé reproductive nécessite la mise en place de programmes qui favorisent la santé des parents et celle des enfants. Il est aussi possible de concevoir des programmes efficaces pour les personnes qui, en raison de facteurs individuels et socioéconomiques, sont prédisposées à des problèmes de santé, de sorte que leurs enfants puissent commencer leur vie du bon pied.

Le Canada a réussi à offrir une plus grande variété de soins prénataux et à améliorer la santé maternelle et infantile. Cependant, pour continuer sur cette voie, il faut non seulement qu'il maintienne ces services, mais il doit aussi les améliorer, lorsque la situation le permet. Les femmes qui ont déclaré avoir reçu des soins prénataux inadéquats pendant leur grossesse ont notamment invoqué les raisons suivantes : l'absence d'adresse permanente, un accès limité aux soins de santé, l'absence de moyen de transport, des problèmes de garde d'enfants ainsi que la peur des répercussions liées à la consommation de substances nocives ou au dépistage d'une maladieNote de bas de page 668. C'est au sein de ce groupe de femmes que les comportements prénataux et les situations à risque sont les plus difficiles à reconnaître ou à traiter. Et la situation se complique davantage dans les collectivités défavorisées qui, en raison de nombreux problèmes sociaux, n'offrent pas un milieu propice à une grossesse en santé. Les programmes de soins prénataux qui reposent sur une approche communautaire ont obtenu un certain succès en ciblant les collectivités et les personnes en difficulté. Le Programme canadien de nutrition prénatale, par exemple, vient en aide aux femmes enceintes à risque, ainsi qu'à leurs enfants, dans plus de 2 000 collectivités au CanadaNote de bas de page 669, Note de bas de page 670. Les évaluations ont permis d'établir que les participantes adoptent des comportements plus sains et obtiennent de meilleurs résultats cliniques; on a en effet constaté une réduction de la consommation de substances nocives pendant la grossesse, un taux plus élevé de naissances en santé et une hausse de l'allaitement naturelNote de bas de page 669. Par ailleurs, certaines régions éloignées ont également accès à des programmes de santé sexuelle et reproductive qui sont adaptés à leurs besoins et à leurs réalités culturelles. Le Programme de soins de santé maternelle et infantile en est un bon exemple (voir l'encadré intitulé « Le Programme de soins de santé maternelle et infantile »)Note de bas de page 671.

Au Canada, le taux de grossesse chez les adolescentes a diminué au fil des années et, de plus en plus, les Canadiens retardent la naissance de leur premier enfantNote de bas de page 107, Note de bas de page 108. Les grossesses chez les adolescentes représentent un problème de santé publique qui, la plupart du temps, pourrait être évité, d'autant plus qu'il entraîne bien souvent des conséquences négatives sur la santé des parents et sur celle des enfantsNote de bas de page 645, Note de bas de page 675. En effet, comparativement aux femmes qui deviennent mères à un âge plus tardif, les jeunes filles mères sont plus susceptibles de développer des maladies rénales, des troubles dépressifs et des problèmes d'anémie, d'hypertension et de prééclampsie. Quant à leurs enfants, ils présentent des taux plus élevés de mortalité périnatale, de naissance prématurée et de faible poids à la naissanceNote de bas de page 111. Les jeunes filles mères et leurs enfants courent également des risques socioéconomiques à long terme, tels qu'un niveau de scolarité inférieur, une diminution des possibilités d'emploi et l'absence d'un partenaire contribuant au revenu familialNote de bas de page 675. Des études montrent que les femmes vivant dans des conditions socioéconomiques favorables ont davantage de chances de terminer leurs études postsecondaires avant la maternité, alors que celles qui vivent dans une situation socioéconomique précaire sont plus susceptibles d'être mères à un jeune âge et ont moins de chances de poursuivre des études postsecondaires, de se trouver un emploi, de se marier ou de cohabiter avec un partenaire avant la naissance de leur premier enfantNote de bas de page 37, Note de bas de page 676, Note de bas de page 677. De leur côté, les femmes ayant une situation socioéconomique élevée ont de meilleures connaissances et compétences en santé et un accès facilité à la contraception et à l'avortementNote de bas de page 675. Par ailleurs, les femmes plus vulnérables aux pressions de la maternité sont plus souvent exposées à des facteurs externes pouvant mettre leur santé en péril, comme les comportements à risque, les problèmes de santé et l'accès limité aux soins de santéNote de bas de page 675. Les programmes de santé publique peuvent avoir une incidence bénéfique sur la santé des jeunes parents en leur donnant accès à des services de soutien et en assurant à leurs enfants un début de vie en santéNote de bas de page 675.

De nombreux facteurs, tels que les choix, les occasions, les réseaux de soutien et les facteurs socioéconomiques, peuvent également expliquer les grossesses chez les adolescentes. La prévention des grossesses est une question complexe qui exige l'adoption d'une stratégie globale et holistique. La plupart des administrations ont mis en place des stratégies en milieu scolaire qui font la promotion de la santé sexuelle et de la contraceptionNote de bas de page 678. Bien que ces programmes aient donné de bons résultats, ils abordent rarement les causes fondamentales de la grossesse chez les adolescentes, telles que les conditions socioéconomiques précaires, le faible niveau de scolarité des parents, les problèmes de violence et les troubles de santé mentaleNote de bas de page 678, Note de bas de page 679. Les grossesses chez les adolescentes peuvent également être attribuables à un accès limité aux soins de santé et aux méthodes de contraception (particulièrement dans les régions rurales et éloignées), à la stigmatisation (particulièrement dans les petites collectivités), à un manque de connaissances en matière de reproduction, à une utilisation inadéquate de la contraception, à une difficulté de négocier l'usage du condom et à un sentiment d'obligation d'avoir des relations sexuellesNote de bas de page 679, Note de bas de page 680.

Le Programme de soins de santé maternelle et infantile

L'objectif à long terme du Programme de soins de santé maternelle et infantile (PSSMI) est de soutenir les femmes enceintes des Premières nations ainsi que les familles ayant des nourrissons et des jeunes enfants, qui vivent dans les réserves, pour que ces personnes profitent de toutes leurs possibilités en matière de développement et d'espérance de vieNote de bas de page 671. Cet objectif peut être accompli grâce à un programme local, intégré et efficace, qui est adapté aux réalités culturelles des Premières nations et qui répond aux besoins individuels, familiaux et collectifsNote de bas de page 672. Le programme repose sur une approche globale, qui est axée sur les soins de santé maternelle et infantile des Premières nations et qui mise sur les forces de la collectivité, notamment le soutien des aînés, le Programme canadien de nutrition prénatale, les services de prévention de l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation fœtale, les services de soins infirmiers et de santé buccodentaire, le Programme de soins à domicile et en milieu communautaire ainsi que d'autres programmes communautairesNote de bas de page 672. Le PSSMI offre des services de santé reproductive et mène des évaluations et des tests de dépistage auprès des femmes enceintes et des nouveaux parents afin de cerner les besoins des familles. Des visites à domicile permettent également d'assurer un suivi, de diriger les personnes vers d'autres services et de gérer les différents cas, selon les besoinsNote de bas de page 672. Dans l'ensemble, les programmes de visites à domicile, notamment ceux qui s'inspirent du modèle Olds aux États-Unis, ont permis d'améliorer, dans une certaine mesure, la santé des parents et des enfantsNote de bas de page 673. Selon un rapport de l'Assemblée des Premières Nations, les visites à domicile effectuées dans le cadre du PSSMI ont permis de diagnostiquer et de gérer des cas de dépression post-partum et d'améliorer les réseaux de soutien aux mèresNote de bas de page 674. Elles offrent également la possibilité d'aborder la question de la santé sexuelle et reproductive. Dans certaines collectivités, les intervenants offriront une formation sur la santé reproductive en milieu scolaire et mettront en œuvre des programmes de santé avant la grossesse à l'intention des jeunes adultes afin d'encourager un début de grossesse en santéNote de bas de page 674.

Parmi les différentes interventions qui ont été menées dans le but de prévenir les grossesses et les ITS chez les adolescentes, certaines ont donné des résultats contradictoires; les autres n'ont pas fait l'objet d'une évaluation, n'ont pas été appliquées à d'autres populations ou sont de portée trop restreinte. Malgré cela, plusieurs mesures de prévention des grossesses chez les adolescentes s'avèrent prometteuses.

  • Les programmes d'éducation en milieu scolaire qui combinent la prévention des grossesses et des ITS chez les adolescentes ont contribué à la réduction du nombre de grossessesNote de bas de page 678. Alors que certains encouragent l'abstinence, d'autres font à la fois la promotion de l'abstinence et de l'utilisation de moyens de contraception chez les adolescents sexuellement actifs. Les programmes qui sont les plus susceptibles de modifier favorablement les comportements sont ceux qui portent sur les facteurs de risque et les facteurs de protection (comme l'éducation sexuelle, la sensibilisation aux ITS et au VIH et le sida, mais aussi sur des questions qui n'ont rien à voir avec la sexualitéNote de bas de page 678. Les évaluations indiquent que les adolescents qui ont reçu une formation générale sur la sexualité courent moins de risques de grossesse que ceux qui ont eu droit à une éducation uniquement axée sur l'abstinence ou qui n'ont reçu aucune éducation sexuelleNote de bas de page 681.
  • Les programmes d'éducation communautaire permettent aux parents et aux personnes qui sont en contact avec les jeunes de transmettre des renseignements et des compétences en matière de santé sexuelleNote de bas de page 682. Ces programmes leur montrent comment aborder des questions telles que la contraception, les comportements sexuels, les relations ainsi que la prévention des ITS et des grossessesNote de bas de page 678.
  • Certains programmes donnent accès à des services généraux de santé reproductive qui peuvent être adaptés selon le lieu de résidence, l'âge, le genre, l'orientation sexuelle et la culture des populations visées. Ces programmes se montrent plus efficaces, puisqu'ils permettent aux jeunes de mettre en application ce qu'ils ont appris et de choisir des activités qui conviennent à leurs réalités.
    • Les programmes qui font participer les adolescents et les jeunes hommes à des discussions libres au sujet de la santé sexuelle sont efficacesNote de bas de page 679, Note de bas de page 683. Trop souvent, les programmes de prévention n'abordent pas l'éducation sexuelle des hommes et ne tiennent pas compte de leurs perceptions à l'égard de la contraception et de la négociation. Cette question est d'autant plus cruciale que, traditionnellement, il était plus difficile pour les jeunes femmes de négocier des relations sexuelles sans risque, et ce, même si elles en connaissaient les bienfaits. L'établissement de relations saines pourrait contribuer à régler la questionNote de bas de page 679, Note de bas de page 683, Note de bas de page 684.
    • Les programmes qui offrent aux jeunes des possibilités de poursuivre des études, d'entreprendre une carrière ou de se perfectionner permettent de contrer l'ennui, de diminuer les comportements à risque et d'atténuer le sentiment de ne pas avoir d'avenirNote de bas de page 679, Note de bas de page 684.
    • La santé sexuelle fait partie de la vie. Les programmes doivent tenir compte de cette réalité qui n'est pas exclusive aux étudiants et aux jeunes. Des études ont d'ailleurs démontré que les programmes communautaires qui réunissent un grand nombre d'organismes et d'intervenants, comme les parents ou d'autres conseillers, donnent de bons résultatsNote de bas de page 683.

Pour être efficaces, les programmes de prévention doivent tenir compte des opinions et des perceptions. Il faudrait donc mener de plus amples recherches pour mieux comprendre les perceptions et les expériences des jeunes femmes qui ont vécu une grossesse précoce et d'autres grossesses afin d'en savoir davantage sur leurs habitudes de contraception et leur accès aux servicesNote de bas de page 685. Il existe également très peu d'information sur les jeunes hommes et les perceptions qu'ils ont des femmes, de la grossesse et de leur rôle au sein de la famille. Des programmes de prévention destinés aux hommes pourraient aider à améliorer les compétences, le niveau de compréhension et les relations, ce qui pourrait avoir une incidence considérable sur la santé reproductiveNote de bas de page 684.

Un des défis en santé publique consiste à trouver un équilibre entre la prévention des grossesses précoces et les messages positifs concernant la maternité et les naissances. Bien que les grossesses tardives soient de plus en plus fréquentes, il arrive que certains jeunes au Canada choisissent d'avoir des enfants en bas âgeNote de bas de page 684, Note de bas de page 686, Note de bas de page 687. Par exemple, certaines cultures favorisent les grossesses précoces et, dans ces cas précis, le fait de reporter la grossesse pourrait conduire à la marginalisationNote de bas de page 684, Note de bas de page 686, Note de bas de page 687.

Pour s'attaquer au problème des grossesses précoces, il est nécessaire d'élaborer un processus à deux volets : d'une part, les interventions qui misent sur la prévention (abordées précédemment) et, d'autre part, les interventions qui ciblent la santé des jeunes parents afin de leur offrir, ainsi qu'à leurs enfants, un soutien et des services appropriés. Certaines jeunes filles mères déclarent avoir perçu leur grossesse comme une expérience positive qui les a empêchées, contrairement à leurs pairs, de sombrer dans l'alcool et la drogue, destin vers lequel elles se dirigeaient tout probablement avant de tomber enceintes. D'autres ont également déclaré que la maternité était leur principale source de motivation pour se trouver un emploi ou retourner aux étudesNote de bas de page 688. Les politiques et les programmes de prévention jettent trop souvent le blâme sur ces jeunes mères en présentant la grossesse précoce comme le signe d'un échec personnel. De nouvelles interventions devraient être mises en œuvre afin de soutenir les jeunes familles et de prévenir les grossesses subséquentes sans marginaliser pour autant les jeunes mères. Puisque les études révèlent que les jeunes filles mères sont souvent moins scolarisées et présentent une situation économique précaire, les responsables de la santé publique ont un rôle à jouer afin d'assurer un avenir en santé à ces femmes et à leurs enfants.

Concevoir des stratégies globales pour s'attaquer aux problèmes de santé sexuelle

Les institutions et les organismes gouvernementaux et non gouvernementaux, de même que le secteur de la santé publique, ont la responsabilité de promouvoir la santé sexuelle. Au cours des deux dernières décennies, d'immenses progrès ont été réalisés grâce à une série d'interventions permettant de mieux comprendre la sexualité humaine et de mieux transmettre ces connaissances. Toutefois, même en ce qui concerne les questions plus connues des jeunes et des jeunes adultes au Canada, comme le VIH et le sida, il est évident que d'autres efforts doivent être consentis pour accroître la sensibilisation et déterminer les interventions qui sont les plus susceptibles de favoriser la santé sexuelle.

Le Canada a établi des lignes directrices et a favorisé l'éducation en matière de santé sexuelle. Il a également encouragé la recherche sur le sujet et a pris des mesures pour lutter contre le VIH et le sida. Le document intitulé Lignes directrices canadiennes sur les infections transmissibles sexuellement représente, pour les cliniciens et les spécialistes de la santé publique, une source inestimable d'information sur la prévention, le diagnostic, le traitement et la gestion des ITS. Des experts en médecine, en soins infirmiers et en santé publique se sont portés volontaires pour assurer la mise à jour des recommandations portant sur les ITS à la lumière des résultats des plus récentes études. Ces mises à jour permettent de mieux cerner les questions actuelles et d'être au fait des dernières découvertes médicales concernant les ITSNote de bas de page 168. De même, les Lignes directrices canadiennes pour l'éducation en matière de santé sexuelle offrent de l'information sur les programmes les plus efficaces afin de guider les spécialistes œuvrant dans le domaine de la promotion et de l'éducation sur la santé sexuelle (voir la section intitulée « Favoriser l'éducation sur la santé sexuelle »)Note de bas de page 22.

Les données de surveillance sur les maladies à déclaration obligatoire, y compris la chlamydia, la gonorrhée et la syphilis, sont recueillies à l'aide du Système de surveillance des maladies à déclaration obligatoireNote de bas de page 689. Les provinces et les territoires ont également établi leurs propres systèmes de gestion et d'évaluationNote de bas de page 689. Ces données sont compilées par les services de santé publique et de soins de santé en se basant sur les résultats positifs de test de laboratoire.

L'Organisation panaméricaine de la santé (OPS) recommande à ses États membres d'intégrer les objectifs suivants à leurs stratégies de promotion de la santé sexuelle :

  • promouvoir la santé sexuelle et éliminer les obstacles susceptibles de nuire à une bonne santé sexuelle;
  • offrir une éducation sexuelle globale et complète;
  • offrir une éducation, une formation et un soutien aux spécialistes en santé sexuelle;
  • assurer l'accès à des services généraux de santé sexuelle;
  • promouvoir la recherche et l'évaluation en santé sexuelle et transmettre les connaissancesNote de bas de page 690.

Les programmes qui se rattachent ou s'harmonisent à la Stratégie nationale d'immunisation (SNI), une stratégie globale qui vise à combler les besoins actuels et futurs de tous les Canadiens en matière d'immunisation, ont eu une incidence considérable sur la santé de la population et ont permis de prévenir de nombreuses maladies, y compris celles transmissibles sexuellementNote de bas de page 691, Note de bas de page 692. Bien que l'administration de certains vaccins de routine soit devenue la norme depuis des années (par exemple, la rougeole, la rubéole et les oreillons [RRO]), d'autres vaccins recommandés ne sont pas reçus par tous les CanadiensNote de bas de page 693. Toutes les provinces et tous les territoires ont mené des stratégies d'immunisation financées par l'État dans le but de lutter contre le virus du papillome humain (VPH) et le VHB. Ces stratégies visent à protéger les enfants et les jeunes avant même qu'ils soient exposésNote de bas de page 167, Note de bas de page 694. Depuis 2007, les jeunes filles de la 4e à la 9e année (selon la province ou le territoire) peuvent recevoir le vaccin contre le VPHNote de bas de page 167. Quant au vaccin contre le VHB, il a d'abord été intégré à un programme universel de vaccination en milieu scolaire, mais certaines provinces et certains territoires l'administrent désormais aux nourrissons dès leur première année de vieNote de bas de page 692, Note de bas de page 693. Les programmes d'immunisation en milieu scolaire, qui permettent à tous les élèves d'être vaccinés, sont habituellement offerts à un nombre accru de jeunes et de jeunes adultes au CanadaNote de bas de page 695.

Le VIH et le sida continue. d'être très préoccupant à l'échelle mondiale. Bien que le nombre de personnes atteintes au Canada soit moins élevé que dans d'autres pays développés comparables, les données sur les comportements sexuels et la prévalence des ITS démontrent que le potentiel de propagation du VIH chez les jeunes au Canada reste une menaceNote de bas de page 696. Les jeunes et les jeunes adultes les plus à risque sont les jeunes hommes qui ont des relations sexuelles non protégées avec des hommes, les jeunes de la rue, les travailleurs du sexe et les consommateurs de drogues injectablesNote de bas de page 697.

L'Initiative fédérale de lutte contre le VIH/sida au Canada veille à soutenir les mesures pancanadiennes, à suivre l'évolution de la pandémie à l'échelle mondiale et à établir des liens de collaboration afin de s'attaquer aux problèmes à mesure qu'ils se présententNote de bas de page 104. L'Initiative est menée en partenariat avec l'Agence de la santé publique du Canada, Santé Canada, les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) et Service correctionnel Canada. Elle représente l'élément central de la vaste stratégie fédérale de lutte contre le VIH/sida et témoigne de l'engagement du Canada à combattre le VIH et le sida, comme le stipule le plan d'action national intitulé Au premier plan : le Canada se mobilise contre le VIH/sidaNote de bas de page 104, Note de bas de page 170. Selon cette initiative, les jeunes forment une des huit principales populations touchées par le VIH et requièrent, de ce fait, des stratégies cibléesNote de bas de page 170.

Le Canada participe activement à l'effort mondial de lutte contre le VIH et le sida. Son Initiative fédérale de lutte contre le VIH/sida prévoit d'ailleurs des activités de collaboration internationale dans le cadre desquelles il s'engage à fournir des conseils stratégiques et du soutien technique, à échanger des expériences et de l'information dans le domaine de la santé, à promouvoir le transfert des connaissances au sujet des interventions nationales et internationales et, enfin, à assurer la cohérence stratégique de ses activités internationales de lutte contre le VIH et le sidaNote de bas de page 169, Note de bas de page 698. Grâce à l'Initiative canadienne de vaccins contre le VIH, le Canada contribue également aux efforts internationaux qui visent à trouver un vaccin contre le VIH qui serait à la fois sécuritaire, efficace, abordable et accessible partout dans le mondeNote de bas de page 105.

Le Canada s'est engagé à faire respecter les droits et les besoins des personnes qui vivent avec le VIH et le sida ou qui sont à risque de le contracter. Cet engagement l'amène à travailler avec des partenaires étrangers dans le but de mettre fin à la pandémie de le VIH et le sida. À l'occasion de la Session extraordinaire de l'Assemblée générale des Nations Unies sur le VIH/sida, le Canada a approuvé un plan d'action décennal élaboré dans le cadre de la Déclaration d'engagement sur le VIH/sida et selon lequel les pays signataires conviennent de travailler en collaboration dans le but d'atteindre de grands objectifs en matière de prévention, de soins, de traitement, de soutien, de droits de la personne et de recherche et développementNote de bas de page 170. Le Canada a aussi appuyé l'objectif du millénaire pour le développement qui vise à freiner la progression du VIH et le sida d'ici 2015Note de bas de page 170. Combattre le VIH et le sida exig de s'attaquer à d'importants déterminants de la santé, de prévenir la propagation de la maladie, d'offrir en temps opportun des traitements et des soins efficaces et de contribuer à l'avancement de la rechercheNote de bas de page 170.

Promouvoir un poids santé et un mode de vie sain

L'embonpoint et l'obésité engendrent des problèmes de santé publique qui sont actuellement en pleine expansion au Canada. Bien que tous les groupes d'âge soient touchés, ces problèmes sont susceptibles d'avoir des répercussions déterminantes sur la santé des jeunes et des jeunes adultes, aujourd'hui et dans l'avenir. Régler les problèmes d'embonpoint et d'obésité exige l'adoption d'un mode de vie sain, notamment en favorisant l'activité physique et une alimentation équilibrée. Deux autres aspects doivent également être pris en considération : l'image corporelle et les troubles de l'alimentation. Même s'il existe un vaste éventail de problèmes et de solutions, l'objectif qu'il faut atteindre à long terme se résume ainsi : maintenir le corps en bonne santé. Or, le poids santé reste une question complexe, puisque certains jeunes et jeunes adultes sont atteints de troubles de l'alimentation, alors que d'autres cherchent à atteindre un idéal de beauté. La section qui suit porte sur l'atteinte d'un équilibre corporel chez les jeunes et les jeunes adultes au Canada.

Embonpoint et obésité

L'embonpoint et l'obésité représentent un important problème de santé publique que l'on observe dans toutes les régions du pays et dans toutes les couches de la population. Habituellement, les personnes qui pratiquent peu d'activité physique et ont une mauvaise alimentation sont les plus susceptibles de présenter un excès de poids, de développer une maladie connexe et de connaître d'autres problèmes de santé au cours de leur vieNote de bas de page 290, Note de bas de page 699. Toutefois, la question est bien plus complexe que la simple atteinte d'un équilibre entre les apports caloriques et l'élimination du surplus. En effet, les prédispositions génétiques ainsi que l'environnement physique et social peuvent également favoriser ou empêcher l'atteinte d'un poids santéNote de bas de page 287, Note de bas de page 452, Note de bas de page 700. Des changements dans l'offre alimentaire, comme l'absorption de portions plus généreuses et l'accès à une grande variété d'aliments préparés et prêts à manger (souvent bon marché, très sucrés et à forte teneur en gras), ajoutent aux difficultés éprouvées par ceux qui souhaitent maintenir un poids santéNote de bas de page 297, Note de bas de page 452. En outre, les environnements physiques et sociaux dans lesquels les Canadiens vivent, s'instruisent, travaillent et s'amusent ont subi de profonds changements. Les déplacements à pied, toujours plus rares dans les quartiers, le marketing alimentaire, la proximité et l'accessibilité des épiceries ainsi que les modes de vie sédentaires ne représentent que quelques exemples de ces nombreux changements.

L'embonpoint et l'obésité figurent également parmi les facteurs de risque de nombreuses maladies chroniques, comme le diabète de type 2, le cancer et les maladies cardiovasculairesNote de bas de page 292. Comme l'indique le chapitre 3, la prévalence du diabète chez les jeunes et les jeunes adultes est plus élevée au sein des Autochtones que dans l'ensemble de la population canadienneNote de bas de page 304, Note de bas de page 308. C'est pourquoi Santé Canada a lancé l'Initiative sur le diabète chez les Autochtones (IDA), qui est offerte dans plus de 600 collectivités autochtones. Cette initiative vise à soutenir toute une gamme de services de promotion de la santé, de prévention, de dépistage et de traitement qui sont axés sur la collectivité et adaptés à la culture des Inuit et des membres des Premières nations vivant dans les réserves. Il existe également un volet prévention à l'intention des Métis, des Inuit et des membres des Premières nations vivant à l'extérieur de leurs collectivités traditionnellesNote de bas de page 701.

Le contexte socioéconomique, combiné aux habitudes de vie et aux compétences individuelles, a aussi des répercussions importantes sur la qualité de l'alimentation en influençant non seulement la disponibilité des aliments mais aussi les choix personnelsNote de bas de page 702, Note de bas de page 703. De fait, comparativement aux familles à revenu élevé, les individus et les ménages à faible revenu sont moins susceptibles de consommer des aliments bons pour leur santé et leur bien-êtreNote de bas de page 452.

Des études permettent également d'associer l'insécurité alimentaire et les problèmes de poidsNote de bas de page 452, Note de bas de page 704. Dans les régions nordiques et éloignées, les aliments sains et nutritifs sont souvent vendus à des prix très élevés. Pour de nombreux ménages à faible revenu, cette réalité vient aggraver le problème d'insécurité alimentaire. Dans cette optique depuis avril 2011, le programme Nutrition Nord Canada vise à rendre les aliments nutritifs périssables plus accessibles dans les collectivités nordiques et éloignées en allongeant la liste d'aliments périssables subventionnés et en encourageant les détaillants à garder ces aliments en stockNote de bas de page 705.

Par ailleurs, l'alimentation des parents influe souvent sur les habitudes alimentaires des jeunes. Des études révèlent en effet que les jeunes qui mangent régulièrement à la maison présentent un taux d'embonpoint moins élevé. Ils sont également plus susceptibles de consommer des aliments sains, de recevoir du soutien familial, d'avoir de la facilité à communiquer et d'entretenir des relations harmonieuses avec les membres de leur familleNote de bas de page 699. Toutefois, les jeunes qui vivent en milieu familial ne peuvent pas toujours choisir ou acheter leurs aliments. Les habitudes alimentaires dépendent également des compétences culinaires, du temps consacré à la préparation des repas et du niveau de compréhension de l'étiquetage nutritionnel et de documents tels que Bien manger avec le Guide alimentaire canadienNote de bas de page 706.

Les publicités qui font la promotion de boissons et d'aliments malsains et qui s'adressent directement aux jeunes et aux jeunes adultes contribuent aux problèmes d'embonpoint et d'obésitéNote de bas de page 452. Une étude américaine indique, en effet, que les enfants consomment 45 % plus d'aliments lorsqu'ils sont exposés à la publicité téléviséeNote de bas de page 707. De même, les adultes ont davantage tendance à grignoter après avoir vu une publicité de grignotinesNote de bas de page 707. Au Québec, il est interdit de présenter à la télévision des messages publicitaires destinés aux enfants de moins de 13 ans. Ailleurs au Canada, la réglementation protège les enfants de moins de 12 ans contre la publicité qui valorise la mauvaise alimentation ou qui présente les grignotines comme un repas en soiNote de bas de page 708, Note de bas de page 709. Malgré ces restrictions, les jeunes et les jeunes adultes demeurent la cible du marketing et de la publicité internationale présentée par Internet et par les services de câblodistribution et de télédiffusion par satelliteNote de bas de page 710. Pour mieux comprendre ce problème, des chercheurs canadiens étudient l'influence qu'exerce la publicité, diffusée à la télévision et dans Internet, sur les choix alimentaires afin d'en mesurer les effets à l'échelle du paysNote de bas de page 711.

Bien manger avec le Guide alimentaire canadien contient des recommandations sur la qualité et la quantité d'aliments qui favorisent le maintien d'une bonne santé et qui réduisent les risques d'obésité et de maladies chroniques liées à l'alimentationNote de bas de page 712, Note de bas de page 713. De plus, le gouvernement du Canada a récemment lancé la trousse Mangez bien et soyez actif, qui vise à renseigner les enfants, les jeunes et les jeunes adultes sur les bienfaits de l'activité physique, de l'alimentation équilibrée et des choix santéNote de bas de page 714. Le gouvernement du Canada participe, en outre, à des activités de sensibilisation et a notamment pris part à la Campagne d'éducation sur le tableau de la valeur nutritive, qui a pour but d'aider les Canadiens à comprendre les renseignements nutritionnels et à les utiliser pour faire des choix santéNote de bas de page 715. Il a aussi publié le document Bien manger avec le Guide alimentaire canadien – Premières nations, Inuit et Métis, une version adaptée du guide alimentaire traditionnel qui tient compte des besoins des peuples autochtones. Ce document met également l'accent sur l'importance de combiner l'activité physique régulière et une saine alimentationNote de bas de page 139.

On sait que l'activité physique a une incidence sur le poids santé. D'ailleurs, plusieurs mesures et stratégies font la promotion de l'activité physique, de la saine alimentation et du poids santéNote de bas de page 716. La Stratégie pancanadienne intégrée en matière de modes de vie sains, par exemple, a été lancée en 2005 par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, en partenariat avec des organismes non gouvernementaux, des organisations autochtones et le secteur privé, dans le but d'améliorer la santé de la population et de réduire, à ce chapitre, les disparités entre les CanadiensNote de bas de page 142, Note de bas de page 717. La Stratégie s'adresse à l'ensemble de la population, mais cible également les personnes à risque, les personnes qui promettent un retour élevé sur les investissements (comme les enfants et les jeunes) ainsi que les personnes qui vivent dans des collectivités isolées, rurales ou autochtonesNote de bas de page 142. Elle s'est donné pour objectif d'augmenter de 20 %, d'ici 2015, la proportion de Canadiens qui sont physiquement actifs, qui s'alimentent sainement et qui maintiennent un poids santéNote de bas de page 142. En septembre 2010, les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de la Santé du Canada (sauf celui du Québec) ont approuvé les documents suivants : Pour un Canada plus sain : faire de la prévention une priorité; Déclaration sur la prévention et la promotion de la part des ministres canadiens de la Santé, de la Promotion de la santé et du Mode de vie sain et Freiner l'obésité juvénile : Cadre d'action fédéral, provincial et territorial pour la promotion du poids santéNote de bas de page 142, Note de bas de page 452, Note de bas de page 718. Ces stratégies s'intéressent à l'obésité des enfants au Canada et établissent, pour les dix prochaines années, les programmes et les mesures de prévention destinés aux enfants et aux jeunes de moins de 18 ansNote de bas de page 452. Elles s'harmonisent avec la nouvelle Stratégie pancanadienne intégrée en matière de modes de vie sains ainsi qu'avec la Déclaration sur la prévention et la promotionNote de bas de page 142. De son côté, l'Agence de la santé publique du Canada encourage l'adoption d'un mode de vie sain en faisant la promotion des nouvelles lignes directrices sur l'activité physique de la Société canadienne de physiologie de l'exercice (SCPE)Note de bas de page 719. Ces lignes directrices, publiées en janvier 2011, fournissent de l'information sur les activités physiques qui favorisent une bonne santé, en précisant l'intensité et la fréquenceNote de bas de page 719. Par exemple, pour produire des bienfaits mesurables sur la santé, on recommande aux jeunes adultes âgés de 18 ans et plus de faire 150 minutes (ou 2,5 heures) d'activité physique modérée à intense par semaine et aux enfants et aux jeunes âgés de 5 à 17 ans d'en faire environ 60 minutesNote de bas de page 720.

Par ailleurs, Sport Canada travaille en collaboration avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, les organisations sportives canadiennes, les organismes de services multisports, les centres canadiens multisports et d'autres organisations afin d'encourager les Canadiens à participer à des activités sportives. Les mesures et les stratégies qu'il finance visent à favoriser la participation sportive des enfants et des jeunes et, en particulier, celle des jeunes filles et des femmes, des personnes handicapées, des familles à faible revenu, des jeunes à risque, des minorités visibles et des peuples autochtonesNote de bas de page 136, Note de bas de page 721. Il a également offert son soutien à des projets menés par des organismes non gouvernementaux, tels que le programme Bon départ de la Fondation Canadian TireNote de bas de page 722. Ce programme aide à couvrir les frais d'inscription, le coût de l'équipement ou les frais de transport dans le but de permettre aux enfants et aux jeunes de participer à des activités sportives ou à des loisirs organisés. Depuis 2005, ce programme a aidé financièrement plus de 330 000 enfantsNote de bas de page 723. ParticipACTION, un organisme à but non lucratif financé par Sport Canada et l'Agence de la santé publique du Canada, est devenue la voix de l'activité physique et de la participation sportive au CanadaNote de bas de page 722. Par l'entremise de la communication, du renforcement des compétences et de l'échange de connaissances, ParticipACTION sensibilise les jeunes à une vie saine et activeNote de bas de page 135, Note de bas de page 722.

Depuis janvier 2007, le crédit d'impôt pour la condition physique des enfants permet aux parents de recevoir un crédit d'impôt d'une valeur maximale de 500 $ par année pour couvrir les dépenses admissibles liées aux activités physiques et sportives des enfants de moins de 16 ansNote de bas de page 133, Note de bas de page 134. Bien que le crédit d'impôt offre une aide aux familles, il ne profite pas réellement aux ménages à faible revenu, qui ne peuvent assumer les coûts associés aux activités organisées. Les familles les plus défavorisées sont donc moins susceptibles de tirer avantage de cette mesure fiscaleNote de bas de page 724. Même si le crédit d'impôt n'est pas conçu pour répondre au problème complexe d'obésité, il s'agit néanmoins d'une mesure incitative de nature à encourager les enfants et les jeunes à être actifs et à maintenir un poids santéNote de bas de page 134, Note de bas de page 724, Note de bas de page 725.

Les stéréotypes négatifs dont sont victimes les personnes atteintes d'embonpoint ou d'obésité peuvent influer sur leur santé mentale à court et à long terme en minant leur estime de soiNote de bas de page 726. Vu l'importance que la société accorde à l'apparence physique, tous les Canadiens, y compris les jeunes et les jeunes adultes, peuvent devenir insatisfaits de leur apparence ou se sentir obligés d'atteindre un idéal de beauté (en prenant parfois des mesures extrêmes pour y parvenir). Les efforts visant à lutter contre l'embonpoint et l'obésité doivent faire abstraction du poids et de l'apparence, et cibler plutôt l'adoption de comportements sains et la recherche d'un équilibre. Fait surprenant : les stéréotypes négatifs émanent souvent des spécialistes de la santé et des membres de la familleNote de bas de page 726, Note de bas de page 727. Par conséquent, promouvoir une image corporelle saine et un poids santé constitue un défide taille en santé publique, peu importe la culture, l'origine ethnique, la situation socioéconomique et le genreNote de bas de page 452, Note de bas de page 728. Dans bien des cas, la stigmatisation et les stéréotypes négatifs liés à l'apparence corporelle peuvent contribuer au problème de poids (voir la section intitulée « Image corporelle et troubles de l'alimentation »)Note de bas de page 726, Note de bas de page 727.

Health at Every Size (HAES) est une initiative axée sur la santé qui remet en question l'obsession de la société pour la perte de poids et les régimes miracles et met plutôt l'accent sur la santé et les modes de vie sains par le respect du corpsNote de bas de page 729, Note de bas de page 730. L'objectif est de favoriser l'acceptation de soi et le respect de la taille et de la forme de son corps tout en valorisant le plaisir de manger à sa faim et de satisfaire son appétitNote de bas de page 729, Note de bas de page 731, Note de bas de page 732. HAES part du principe que le poids n'est pas un déterminant de la santé, puisque des personnes de tailles différentes peuvent toutes être en bonne santé. Cette approche, défendue par des chercheurs et des spécialistes de la santé dans le monde entiers, aurait contribué à améliorer certains paramètres physiologiques (comme la pression sanguine), à modifier les comportements par rapport à la santé (comme l'activité physique et les habitudes alimentaires) et à apporter des effets psychologiques bénéfiques (sur l'humeur, l'estime de soi et l'image corporelle). Globalement, cette approche aurait obtenu de meilleurs résultats que les traitements traditionnels pour perdre du poidsNote de bas de page 731, Note de bas de page 733, Note de bas de page 734.

Le milieu bâti peut également avoir une incidence sur le mode de vie des jeunes et des jeunes adultesNote de bas de page 735. Tel qu'il a été discuté dans le présent chapitre, sous la section « Collectivités en santé », les milieux de vie qui favorisent les transports et les loisirs actifs et qui donnent accès à des installations récréatives et à des aliments abordables et nutritifs peuvent avoir une incidence positive sur la santé des CanadiensNote de bas de page 736. Étant donné que tout le monde n'a pas les mêmes intérêts pour les sports organisés, il faudrait faciliter l'accès à d'autres types d'activité physique, comme la marche, le vélo, le jeu ou la randonnée pédestreNote de bas de page 735.

Un peu partout au Canada, des investissements substantiels sont réalisés pour améliorer les environnements physiques et ainsi encourager les modes de vie sains. Le programme Chantiers Canada offre un financement à long terme aux provinces, aux territoires et aux collectivités afin d'appuyer l'aménagement d'installations sportives intérieures et extérieures et de promouvoir le transport actif, comme la marche, le vélo et le patin à roues alignéesNote de bas de page 737, Note de bas de page 738. Tous les ordres de gouvernement jouent un rôle important dans la lutte contre l'excès de poids chez les jeunes et les jeunes adultes. Les différents intervenants doivent donc collaborer afin de promouvoir l'activité physique, l'alimentation équilibrée et le poids santé. D'autres travaux de recherche seraient toutefois nécessaires pour bien comprendre l'incidence des déterminants de la santé sur le poids des jeunes et des jeunes adultes au Canada et permettre aux intervenants d'intégrer à leurs programmes des renseignements fondés sur des faits démontrés. Bien que de nombreuses mesures soient déjà en place, il reste encore beaucoup à faire pour régler les problèmes de poids, tout particulièrement au sein des populations à risque, comme les Inuit, les membres des Premières nations et les familles en situation socioéconomique précaireNote de bas de page 452, Note de bas de page 725.

Image corporelle et troubles de l'alimentation

De saines habitudes alimentaires contribuent à la santé physique et au bien-être des jeunes et des jeunes adultes en réduisant le risque de maladie, en renforçant les muscles et les os, en redonnant des forces et en favorisant le maintien d'un poids santéNote de bas de page 713, Note de bas de page 739. La société véhicule une quantité de messages sur le poids et l'alimentationNote de bas de page 740, Note de bas de page 741. Vu l'importance que celle-ci accorde à l'apparence physique, les adolescentes, en particulier, peuvent devenir insatisfaites de leur apparence ou se sentir obligées d'atteindre un idéal de beautéNote de bas de page 728, Note de bas de page 740, Note de bas de page 741. Certaines subissent la pression de leur famille pour perdre du poids, alors que d'autres se sentent préoccupées par leur apparence physique et adoptent, à la maison, de mauvais comportements liés à l'alimentationNote de bas de page 740-742.

Bien que les femmes attachent généralement plus d'importance à leur apparence que les hommes, ceux-ci sont également exposés à des images fabriquées et sentent de plus en plus qu'ils doivent se conformer à une image corporelle idéaleNote de bas de page 743. Les hommes ont tendance à associer leur beauté à leur masse musculaire et à la forme de leur corpsNote de bas de page 743, Note de bas de page 744. Des études révèlent que leur insatisfaction à l'égard de leur corps peut conduire à des difficultés d'adaptation psychologique, à des troubles de la conduite alimentaire (alimentation compulsive, boulimie, anorexie et peur de la difformité), à l'utilisation de stéroïdes et à la dépendance à l'exercice physiqueNote de bas de page 743, Note de bas de page 745. Les troubles de l'alimentation et la dépendance à l'exercice peuvent passer inaperçus chez les garçons et les jeunes hommes, car l'exercice et la fréquentation d'un centre de conditionnement physique font partie des pratiques culturelles acceptablesNote de bas de page 745. Par conséquent, de nouvelles recherches s'imposent dans le domaine afin de cerner les tendances des troubles de l'alimentation chez les garçons et les jeunes hommes, d'en évaluer la prévalence et d'en reconnaître les symptômes dans le but d'élaborer des programmes plus ciblésNote de bas de page 746, Note de bas de page 747.

La télévision et les médias imprimés exposent les jeunes hommes et les jeunes femmes à des images corporelles irréalistes. Dans cette ère de l'image, du maquillage et des manipulations numériques, bon nombre des traits esthétiques recherchés sont retouchés ou même créés artificiellement. Des études soutiennent que les médias jouent un rôle non négligeable dans l'insatisfaction que les jeunes et les jeunes adultes éprouvent à l'égard de leur corps. Chez certains, cette insatisfaction peut entraîner une diminution de l'estime de soi et conduire à l'adoption de pratiques alimentaires néfastesNote de bas de page 748. Des programmes d'initiation aux médias pourraient aider les jeunes et les jeunes adultes à se forger une image de soi plus favorableNote de bas de page 751.

Par ailleurs, les jeunes et les jeunes adultes accordent beaucoup d'importance aux amitiés. Les relations d'amitié influent souvent sur la perception qu'une personne a d'elle-même et sur les habitudes alimentaires qu'elle adopte. De fait, la communication avec les pairs renforce souvent le message négatif voulant que la minceur et un faible poids corporel soient synonymes de beautéNote de bas de page 752, Note de bas de page 753. L'adoption de régimes alimentaires stricts au sein du milieu familial peut également accroître le risque de développer une image corporelle négative. En effet, il semble que l'attitude des parents par rapport à l'alimentation, à l'image corporelle et au poids a une incidence sur la perception que les adolescents ont de leur propre corpsNote de bas de page 754, Note de bas de page 755.

Bien que les troubles de l'alimentation soient considérés comme un problème de santé mentale, des facteurs génétiques et biologiques pourraient prédisposer certaines personnes à adopter de mauvaises habitudes alimentaires. Des facteurs de risque liés à la personnalité ou à l'environnement social et culturel, l'insatisfaction corporelle, l'adoption de régimes alimentaires restrictifs et le recours à la nourriture pour faire face au stress pourraient également contribuer aux troubles de l'alimentationNote de bas de page 240, Note de bas de page 728, Note de bas de page 756. En effet, ces facteurs de risque sont connus pour influer sur le comportement des adolescents à la recherche d'un corps « parfait »Note de bas de page 728, Note de bas de page 742, Note de bas de page 756. Les troubles de la conduite alimentaire peuvent se traduire par une consommation excessive ou insuffisante de nourriture (comme les régimes restrictifs, l'alimentation compulsive ou les pratiques purgatives), alors qu'une alimentation normale vise avant tout à combler la faimNote de bas de page 728. Les comportements pathologiques et les mauvaises habitudes alimentaires sont liés aux troubles de l'alimentationNote de bas de page 728. Ces troubles complexes se caractérisent par une perception déformée de son image corporelle et par des problèmes d'identité, de concept de soi et d'estime de soi. Chez certaines femmes, ces perceptions se traduisent par une obsession de la nourriture, un sens aigu de l'autocritique ainsi que par des pensées et des sentiments négatifs au sujet de leur poids et de leur corpsNote de bas de page 240, Note de bas de page 728, Note de bas de page 742.

Les troubles de l'alimentation peuvent être difficiles à détecter et à diagnostiquer, particulièrement dans le contexte social actuel où la performance, les régimes alimentaires et les sports sont perçus comme étant normaux et où la minceur et l'insuffisance pondérale sont difficilement vues comme des problèmes de santéNote de bas de page 756-758. Le diagnostic précoce est important pour un traitement efficace des troubles de l'alimentation, qui peuvent être soignés par des traitements psychologiques et médicaux adaptés aux besoins du patientNote de bas de page 728. Les traitements comprennent souvent des soins médicaux individuels, des médicaments, des conseils en nutrition et des traitements de psychothérapie individuelle, familiale ou de groupeNote de bas de page 759.

La promotion du poids santé requiert la collaboration de tous les secteurs et de tous les ordres de gouvernementNote de bas de page 452. De nombreux facteurs contribuent aux troubles de l'alimentation chez les jeunes et les jeunes adultes, et ces facteurs ne peuvent pas être changés immédiatement. D'autres études doivent être menées pour mesurer les répercussions à long terme des troubles de l'alimentation chez les adolescents et mieux comprendre les conséquences des régimes alimentaires sur leur croissance. De plus, les différents facteurs sociaux, économiques, physiques et environnementaux doivent être pris en considération pour créer des milieux de vie qui aideront les Canadiens à faire des choix santéNote de bas de page 452.

Les personnes qui sont régulièrement en contact avec les jeunes et les jeunes adultes (par exemple, les familles et les enseignants) doivent être formées pour pouvoir détecter les comportements et les symptômes typiques d'un trouble de la conduite alimentaire, et ce, avant que les troubles de l'alimentation se développent. Il serait également essentiel de reconnaître les responsabilités de la collectivité dans la promotion de saines images corporelles. En effet, la société doit investir des efforts pour faire comprendre aux jeunes et aux jeunes adultes que l'estime de soi n'est pas une question d'apparence physique. Il faudrait également leur apprendre à faire des choix santé et à prendre de bonnes décisions au sujet des aliments qu'ils consomment en les amenant à se concentrer davantage sur une saine alimentation plutôt que sur la nourriture et le poids. Les programmes d'initiation aux médias pourraient également aider les jeunes et les jeunes adultes à se forger une image plus positive d'eux-mêmesNote de bas de page 728, Note de bas de page 751.

La consommation et l'abus de substances nocives

Le Canada a réussi à réduire le tabagisme et à limiter ses conséquences néfastes sur la santé. Par ailleurs, les Canadiens âgés de 15 ans et plus sont nombreux à boire de l'alcool, mais la plupart le font avec modération (voir le chapitre 3)Note de bas de page 364, Note de bas de page 760, Note de bas de page 761. Cependant, comparativement à d'autres groupes d'âge, les jeunes et les jeunes adultes au Canada sont plus susceptibles de consommer des substances nocives et de le faire de façon abusiveNote de bas de page 343, Note de bas de page 364, Note de bas de page 762.

On tient souvent pour acquis que la consommation et l'abus de substances nocives reposent sur un manque d'information ou une mauvaise compréhension des conséquences à court et à long terme. Des études démontrent toutefois que la consommation de substances nocives est un phénomène plus complexe qui résulte souvent d'une accumulation de facteurs de risque fortement liés les uns aux autres et qui touche aussi bien la situation familiale, le cercle d'amis, le milieu scolaire que les déterminants socioéconomiquesNote de bas de page 763. Par conséquent, le passage de la consommation à l'abus (c'est-à-dire la surconsommation et la dépendance) est bien souvent le résultat de différents facteurs.

  • Risques individuels : Alors que, par le passé, les hommes étaient plus portés que les femmes à consommer des substances nocives, de récentes études révèlent que, comparativement aux générations qui les ont précédées, les femmes d'aujourd'hui sont plus susceptibles de boire de façon excessive, de se soûler, de fumer et de consommer des drogues licites ou illicites.
  • Situation familiale : Une histoire familiale marquée par de mauvaises compétences parentales, une faible supervision, des rapports parent-enfant inadéquats, des conflits familiaux, des mauvais traitements ou des antécédents de consommation sont autant de facteurs susceptibles de contribuer à la consommation et à l'abus de substances nocives.
  • Cercle d'amis : Si certains jeunes consomment des substances nocives sous la pression de leurs pairs, d'autres choisissent justement de côtoyer des jeunes qui appartiennent à ce milieu et qui partagent ce type de valeurs. Un groupe peut établir des pratiques de consommation qui deviennent la norme dans certains milieux.
  • Milieu scolaire : De piètres résultats scolaires en bas âge (un rendement scolaire inadéquat, un faible maîtrise de la lecture, des difficultés à résoudre des problèmes, un faible niveau de participation sociale et un manque de relations interpersonnelles) ainsi que l'incapacité à adapter sa conduite en fonction des consignes peuvent avoir une incidence sur les comportements et les choix de vie.
  • Milieu communautaire : Le milieu de vie peut créer des conditions favorables à la consommation de substances nocives, selon la disponibilité des drogues licites et illicites, le niveau d'acceptation sociale ainsi que les valeurs et les normes qui y prédominentNote de bas de page 343, Note de bas de page 763.

Les milieux scolaires et communautaires jouent un rôle actif dans la lutte contre la consommation et l'abus de substances nocives. Toutefois, le succès limité qu'ils connaissent démontre la nécessité d'une meilleure coopérationNote de bas de page 343. Sur le plan de la santé publique, une approche à quatre volets est souvent utilisée pour aborder la question : la prévention, le traitement et la réadaptation, l'application des lois et des règlements et la réduction des méfaits causés par la consommation de substances nocivesNote de bas de page 343.

  • La prévention permet d'éviter – ou du moins de retarder ou de réduire – la consommation de substances nocivesNote de bas de page 343. Des méta-analyses montrent que ces activités sont plus efficaces lorsqu'elles sont mises en œuvre en bas âge, avant qu'il y ait consommation. De nombreux programmes de grande envergure adoptent une approche axée sur la prévention, appelée Programme de sensibilisation aux dangers de la drogue, qui compte sur les services de police pour présenter de l'information crédible aux jeunes et aux jeunes adultes afin de les aider à résister à la tentation de consommerNote de bas de page 343, Note de bas de page 431. Cependant, les évaluations ont révélé que, même si les participants retiennent l'information qui leur est fournie, cette connaissance ne prévient pas réellement la consommation. Les activités de prévention ont davantage de chances de réussir lorsqu'elles misent sur le développement sain et la résilience (renforcement des acquis). Le fait d'avoir des parents attentionnés qui s'engagent activement dans le milieu scolaire et communautaire est généralement reconnu comme un facteur de protectionNote de bas de page 343.
  • Même si l'objectif ultime est de prévenir les risques d'abus, on sait que les traitements et la réadaptation peuvent réorienter les personnes qui adoptent un comportement à risque. Le succès des programmes de traitement repose sur la collaboration et le soutien de tous les intervenants. En effet, des études démontrent que les interventions les plus efficaces sont celles qui ciblent les besoins et les motivations des jeunes, qui soutiennent les familles et les collectivités et les intègrent au processus de traitement et qui offrent toute une gamme de services après le traitementNote de bas de page 343. Les stratégies adoptées seront plus ou moins complexes selon la substance consommée, l'engagement des organismes participants et la possible incompatibilité entre les questions légales et les valeurs morales. Toutefois, l'efficacité des traitements est souvent compromise par l'incapacité des personnes en cause de s'entendre sur les objectifs à poursuivre. De plus, la nature même de ce qui est efficace et acceptable varie selon la population. Par exemple, les programmes de traitement et de réadaptation qui intègrent les pratiques traditionnelles et les cercles de guérison semblent prometteurs auprès des jeunes autochtonesNote de bas de page 343.
  • L'application des lois et des règlements est une approche multisectorielle qui vise l'établissement d'un milieu sain et sécuritaire pour l'ensemble de la société. Elle permet non seulement de contrer les activités et les comportements criminels, mais également d'établir une politique de tolérance zéro, particulièrement dans les écoles et les lieux publicsNote de bas de page 343, Note de bas de page 764.
  • La réduction des méfaits est une approche utilisée en santé publique pour prévenir les effets secondaires (maladie, surdose, décès) des comportements à risque, comme la consommation d'alcool et de drogues chez les personnes dépendantes ou chez celles en attente d'une rééducationNote de bas de page 765-768. Cette stratégie est fondée sur le principe que la consommation de drogues existe, que certains consommateurs ne peuvent s'arrêter ou ne sont pas prêts à le faire et que, entre-temps, des mesures doivent être mises en place afin de réduire les risques de méfaits tant pour le consommateur que pour la collectivitéNote de bas de page 343, Note de bas de page 766, Note de bas de page 767, Note de bas de page 769, Note de bas de page 770. À l'échelle mondiale, cette approche est principalement centrée sur la prévention du VIH et le sida. Divers organismes, comme l'OMS, le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC) et le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), reconnaissent l'importance de réduire les effets négatifs dans le cadre d'une vaste lutte contre la consommation de drogues et les maladies infectieusesNote de bas de page 768, Note de bas de page 771-773. Une telle intervention mise sur l'abstinence, l'application de la loi, l'éducation, la prévention des maladies, la distribution de condoms, le contrôle des infections, la surveillance des maladies, le dépistage et le traitementNote de bas de page 774.

Les Canadiens ont un intérêt immédiat à résoudre les problèmes causés par l'abus de substances nocives. En 2002, les coûts (liés à la santé, à l'application de la loi et à la perte de productivité) engendrés par l'abus de substances nocives étaient estimés à 39,8 milliards de dollars au Canada (le tabagisme représentait 43 % du coût, l'alcool, 37 % et les drogues illégales, 21 %)Note de bas de page 775. Les avantages que l'on peut retirer à encourager et à offrir des traitements adéquats sont, par conséquent, énormes. Une étude réalisée au Royaume-Uni, la National Treatment Outcome Research Study, révèle en effet que chaque livre sterling dépensée pour prévenir l'abus de drogues permet d'épargner environ trois livres sterling en coûts associés à la justice pénaleNote de bas de page 776.

Bien qu'il y ait beaucoup de similitudes entre la consommation et l'abus de drogues, d'alcool et d'autres substances nocives, ils seront abordés séparément dans les pages qui suivent afin de bien illustrer chacune des problématiques et d'éviter de comparer les comportements qui peuvent être légaux et socialement acceptables et ceux qui sont illégaux. Par exemple, si, dans la plupart des provinces et des territoires, les personnes âgées de 19 ans et plus ont l'âge légal de consommer de l'alcool, la consommation de drogues illicites est toujours illégale, peu importe l'âge. Les contextes varient donc d'un cas à un autre, bien que certaines approches soient similaires. La discussion qui suit présente des interventions utilisées dans les trois cas suivants :

  • la consommation et l'abus de drogues;
  • la consommation et l'abus d'alcool, et la consommation d'alcool pendant la grossesse;
  • les initiatives de lutte contre le tabagisme.

Consommation et abus de drogues

La Stratégie nationale antidrogue constitue l'approche globale du gouvernement du Canada pour s'attaquer à la consommation de drogues illicites partout au pays. Lancée en 2007, la Stratégie est un travail de collaboration auquel participent le ministère de la Justice du Canada, Sécurité publique Canada et Santé Canada. Elle vise à établir des collectivités plus sécuritaires et en meilleure santé en réduisant la consommation de drogues illicites au Canada, tout en contribuant à leur élimination. La Stratégie met de l'avant trois plans d'action : la prévention de la consommation de drogues illicites, le traitement des dépendances et la lutte contre la production et la distribution de drogues illicitesNote de bas de page 764, Note de bas de page 774, Note de bas de page 777, Note de bas de page 778.

  • Le Plan d'action en matière de prévention est destiné aux jeunes. Il vise à aider les collectivités à relever les défis futurs et à fournir de l'information à l'intention des parents, des éducateurs et des spécialistes de la santé. Il propose des outils de sensibilisation en milieu scolaire et met de l'avant une campagne de sensibilisation nationale qui s'adresse aux élèves du primaire et du secondaire ainsi qu'à leurs parentsNote de bas de page 338, Note de bas de page 764, Note de bas de page 779.
  • Le Plan d'action en matière de traitement encourage les approches novatrices axées sur le traitement et la réadaptation, améliore les soins offerts aux Inuit et aux membres des Premières nations et offre un traitement aux jeunes contrevenants. Il permet, par ailleurs, à la Gendarmerie royale du Canada d'orienter les jeunes ayant des problèmes de consommation de drogues vers des programmes de traitement appropriésNote de bas de page 338, Note de bas de page 764, Note de bas de page 780.
  • Le Plan d'action en matière d'application de la loi vise à combattre le crime par l'application de la loi, à enquêter sur les crimes de drogue, à poursuivre en justice les personnes accusées de ces crimes, à appuyer et élargir les enquêtes antidrogue de la Gendarmerie royale du Canada et à accroître les capacités des administrations en matière d'enquête et d'inspectionNote de bas de page 764, Note de bas de page 777, Note de bas de page 781.

La campagne de sensibilisation, 0droguepourmoi, utilise le cinéma, la télévision et Internet (par exemple, Facebook et YouTube) pour renseigner les jeunes sur les effets de la drogue et leur montrer comment dire non. Le site Web 0droguepourmoi a reçu plus de 791 000 visites, et les annonces diffusées sur YouTube ont été visionnées plus de 208 000 fois en un peu plus d'une année. Le site Facebook, quant à lui, compte plus de 67 000 adeptes. La stratégie 0droguepourmoi tire profit de la popularité des médias sociaux et, grâce à des idées originales et à l'utilisation judicieuse des outils de communication, favorise la participation des jeunes à cet important enjeu de santéNote de bas de page 782. Des recherches supplémentaires seraient toutefois nécessaires pour évaluer l'efficacité réelle des médias sociaux à joindre les jeunes et les jeunes adultes.

La Stratégie nationale antidrogue aide également les collectivités, les provinces et les territoires à cibler les populations à risque, notamment grâce aux mesures suivantes :

  • le financement de mesures de prévention et de promotion de la santé pour réduire la consommation de drogues illicites chez les jeunes et les jeunes adultes de 10 à 24 ans grâce au Fonds des initiatives communautairesNote de bas de page 783;
  • l'appui au Programme national de lutte contre l'abus de l'alcool et des drogues chez les Autochtones afin d'améliorer les soins et le soutien offerts aux populations autochtonesNote de bas de page 784;
  • la collaboration avec les provinces et les territoires pour combler les lacunes observées dans les systèmes et les services de traitement des dépendances par l'entremise du Programme de soutien au financement du traitement de la toxicomanieNote de bas de page 785.

La réduction des méfaits n'est plus traitée comme un élément distinct de l'approche du gouvernement du CanadaNote de bas de page 774, Note de bas de page 786. En fait, elle a été intégrée aux trois autres volets de la Stratégie : l'application de la loi, la prévention et le traitement. Le gouvernement du Canada met la priorité sur le soutien et le traitement des dépendances de manière à aider les toxicomanes à demeurer sobresNote de bas de page 764, Note de bas de page 774, Note de bas de page 786. D'ailleurs, dans le domaine de la santé publique, la promotion de l'abstinence et l'accès facilité aux traitements s'harmonisent avec les objectifs de la Stratégie nationale antidrogueNote de bas de page 774, Note de bas de page 786. À ce titre, le rôle de l'Agence de la santé publique du Canada consiste à :

  • répondre aux besoins des populations à risque en matière de santé;
  • déterminer et comprendre les types d'infections et de comportements à risque grâce à l'épidémiologie et à la surveillance de routine (Surveillance accrue des jeunes de la rue du Canada [SAJR], vaccins contre l'hépatite B, hépatite C et le VIH et le sida);
  • échanger et mettre en application les connaissances acquises afin que les programmes et les politiques s'appuient sur des faits démontrés;
  • donner aux collectivités les moyens de trouver des solutions (par exemple, grâce au Programme d'action communautaire sur le sida, au Fonds pour les projets sur le VIH et le sida des communautés hors-réserve des Premières nations, des Inuits et des Métis et au Programme de prévention, de soutien et de recherche pour l'hépatite C)Note de bas de page 774, Note de bas de page 786.

Certaines administrations intègrent des méthodes de réduction des méfaits à leurs stratégies antidrogue. Par exemple, la stratégie antidrogue de Vancouver inclut, outre les volets prévention, traitement et application de la loi, la réduction des méfaitsNote de bas de page 787. Le Centre d'excellence pour le VIH/sida de la Colombie-Britannique a mené récemment une étude rétrospective sur les décès par surdose avant et après l'ouverture du centre d'injection supervisé de Vancouver. Cette étude a permis de constater une réduction de 35 % du nombre de décès par surdose dans la régionNote de bas de page 788.

La recherche sur les programmes en cours met toutefois en évidence les lacunes qui existent dans la lutte contre l'abus de substances nocives et cerne les domaines où les investissements sont le plus susceptibles d'avoir des effets bénéfiques sur les individus, les collectivités et les familles. Elle a indiqué, entre autres, qu'il serait profitable d'investir dans l'élaboration de programmes adaptés en fonction de l'âge, dans la collecte de nouvelles données de recherche, dans l'évaluation des mesures et des stratégies actuelles ou à venir ainsi que dans le perfectionnement des connaissances et des compétences de ceux qui travaillent avec les jeunes et les jeunes adultes qui sont ou ont déjà été vulnérables à la consommation ou à l'abus de substances nocivesNote de bas de page 343.

Les programmes adaptés en fonction de l'âge utilisent généralement deux types d'approches : fournir aux enfants de l'information et des interventions ciblées, puis intervenir auprès des jeunes grâce à des stratégies et des mesures adaptées à leur âgeNote de bas de page 789. Les interventions précoces permettent aux enfants d'acquérir les compétences nécessaires pour effectuer des choix de vie sains. Elles permettent, en outre, de prévenir une initiation précoce à la consommation de substances nocives et de cibler rapidement les facteurs de risque, comme les difficultés scolaires et sociales, les problèmes d'abus et les troubles psychologiques. Par ailleurs, pour être efficaces, les programmes destinés aux jeunes doivent être adaptés à leurs besoins et cibler leurs intérêts, leurs activités et leurs valeurs, en plus de les informer sur les substances nocives les plus consomméesNote de bas de page 343, Note de bas de page 789. On sait que les programmes destinés aux adultes ne conviennent pas aux jeunes ni aux jeunes adultes qui vivent une transition différée. Pour cette raison, les mesures de lutte contre la consommation et l'abus de substances nocives chez les jeunes et les jeunes adultes devront peut-être dépasser les limites de ce qui peut être considéré comme un programme s'adressant strictement aux jeunesNote de bas de page 343, Note de bas de page 789.

Bien que les programmes en milieu scolaire puissent être efficaces pour certains, les consommateurs les plus à risque sont généralement moins portés à fréquenter l'école de façon régulière et sont donc moins susceptibles de répondre positivement aux messages grand publicNote de bas de page 343. Quoi qu'il en soit, les meilleures pratiques instaurées en milieu scolaire font intervenir plusieurs facteurs.

  • Choix du moment et pertinence du programme : Les leçons doivent être coordonnées et pertinentes. De plus, les interventions ont de meilleures chances de réussir si elles sont mises en œuvre avant que les élèves adoptent des comportements à risque et si elles proposent un suivi pour renforcer les comportements positifs.
  • Contenu contextuel : En participant à l'élaboration de stratégies de prévention, les jeunes et les jeunes adultes apportent un point de vue différent. Cette approche leur permet d'obtenir une information précise basée sur leur expérience, de mieux comprendre le problème de consommation de substances nocives et de trouver des façons de le régler. En adoptant le point de vue des jeunes, elle tient compte de leurs habiletés, leurs activités et leurs connaissances et, par conséquent, se révèle plus fructueuse qu'une démarche axée uniquement sur la non-consommation.
  • Formation : Le milieu scolaire devrait offrir une formation professionnelle plus poussée sur les drogues et les programmes interactifsNote de bas de page 343, Note de bas de page 789.

Les interventions qui mettent l'accent sur la consommation d'alcool, telles que le School Health and Alcohol Harm Reduction Project (SHAHRP), ont obtenu un certain succès en milieu scolaire (voir l'encadré intitulé « Le School Health and Alcohol Harm Reduction Project »).

Les spécialistes qui travaillent auprès des jeunes, ou dans le cadre de mesures qui s'adressent aux jeunes, représentent souvent le premier point de contact et sont, de ce fait, les mieux placés pour repérer rapidement les personnes à risqueNote de bas de page 343. Les jeunes côtoient également des fournisseurs de soins et de services sociaux qui peuvent les encourager à faire des choix sains, leur fournir des conseils ou les diriger vers d'autres spécialistes. Par conséquent, les programmes d'éducation qui s'adressent aux adultes en contact avec des jeunes devraient être offerts à grande échelle et inclure un volet sur les facteurs de risque liés à la consommation de substances nocives, sur les stratégies d'évaluation et d'intervention ainsi que sur les ressources mises à la disposition des jeunes, de leurs familles et des autres adultes de leur entourage. Une bonne connaissance des facteurs de risque et des facteurs de protection est essentielle pour répondre aux besoins immédiats et prévenir les problèmesNote de bas de page 343.

Consommation d'alcool

De nombreux jeunes et jeunes adultes au Canada présentent une consommation d'alcool à risque, ce qui entraîne des effets immédiats et à long terme sur leur santé et leur bien-être. La consommation abusive d'alcool et la consommation excessive occasionnelle peuvent affaiblir le jugement et, par conséquent, entraîner des comportements encore plus dommageables (voir le chapitre 3 pour d'autres renseignements à ce sujet). La consommation excessive d'alcool à court et à long terme peut causer des intoxications, des maladies et des blessures et mener à des comportements sexuels à risque, à des voies de fait et même à la mortNote de bas de page 343, Note de bas de page 365, Note de bas de page 366, Note de bas de page 793, Note de bas de page 794.

Pour contrer la consommation et l'abus d'alcool, les interventions les plus efficaces sont celles de grande envergure, destinées à l'ensemble de la population, et qui visent à améliorer l'accès aux programmes, à fournir de l'information et à favoriser l'adoption de comportements sains. Un examen systématique de 32 interventions liées à l'alcool a été mené en se fondant sur quatre grands critères : leur efficacité, la qualité des résultats obtenus, leur pertinence culturelle et les coûts liés à leur mise en œuvre et à leur maintienNote de bas de page 795. L'établissement d'un âge minimal pour la consommation d'alcool, les mesures de contrôle et de restriction concernant la vente d'alcool aux mineurs, l'imposition de taxes sur l'alcool, la réduction du taux légal d'alcoolémie, l'émission de permis d'apprenti conducteur et la suspension du permis de conduire constituent quelques-unes des interventions qui ont donné les meilleurs résultatsNote de bas de page 789, Note de bas de page 795, Note de bas de page 796. La majorité d'entre elles visent les jeunes et les jeunes adultes plutôt que le reste de la population. De même, les vastes campagnes d'éducation et de sensibilisation constituent un moyen efficace de s'attaquer aux problèmes de consommation d'alcool, tels que la consommation excessive occasionnelleNote de bas de page 789, Note de bas de page 795. Le but de ces campagnes et initiatives est de faire comprendre aux jeunes et aux jeunes adultes les risques et les méfaits associés à la consommation excessive d'alcool, de leur apprendre à reconnaître les situations où leurs pairs ont besoin d'aide et de leur montrer comment agir, le cas échéant (par exemple, reconnaître les signes d'une intoxication alcoolique)Note de bas de page 795, Note de bas de page 797.

Le School Health and Alcohol Harm Reduction Project

Le School Health and Alcohol Harm Reduction Project (SHAHRP) est une étude longitudinale menée dans le but de réduire les méfaits de l'alcool sur la santé par l'entremise de leçons en classeNote de bas de page 790. Sur une période de quatre ans, le National Drug Research Institute de l'Australie a ciblé des élèves âgés de 13 et 14 ans dans 14 écoles de Perth, en Australie. Le but de l'étude consistait à réduire les problèmes de santé chez les élèves qui consomment de l'alcool, ainsi que les méfaits auxquels s'exposent ceux qui ne consomment pas d'alcool, mais qui subissent l'influence de ceux qui en abusentNote de bas de page 790, Note de bas de page 791. Les leçons sont données en trois phases : huit leçons la première année, cinq leçons de rappel l'année suivante et quatre autres leçons deux ans plus tardNote de bas de page 790. Les leçons sont divisées en sous-activités de manière à permettre la présentation de l'information, la consolidation des compétences, la prise de décisions individuelles et de groupe ainsi que les discussions fondées sur des scénariosNote de bas de page 791.

Une étude de suivi après un an a montré que le projet SHAHRP a eu un effet statistiquement significatif sur les connaissances, les attitudes et les comportements liés à l'alcool. À la fin de l'étude, les élèves ayant participé au projet avaient réduit leurs comportements à risque liés à la consommation d'alcoolNote de bas de page 791. Les résultats révèlent, par ailleurs, que les élèves sont plus réceptifs lorsque le message intègre des expériences vécues par certains d'entre euxNote de bas de page 791. Cela était particulièrement vrai pour les élèves qui avaient déjà consommé de l'alcool et qui, jusqu'ici, étaient rarement touchés par les interventions qui prônaient la non-consommation ou le report de la première expérience de l'alcoolNote de bas de page 791. L'étude a montré que le projet, qui ne conseille pas uniquement l'abstinence ou le report de consommation, a néanmoins permis de réduire davantage la consommation d'alcool que les programmes en classe ou les programmes généraux qui s'en tiennent à ces deux aspects. Compte tenu des conclusions de l'étude, le programme a été appliqué à plus grande échelle en AustralieNote de bas de page 792.

L'OMS a adopté, en 2010, la Stratégie mondiale visant à réduire l'usage nocif de l'alcool, qui reconnaît que la consommation d'alcool est un important problème de santé publique à l'échelle mondiale. La Stratégie établit des liens entre tous les facteurs qui influent sur la santé et les comportements liés à la consommation d'alcool. Elle insiste sur l'importance de réduire les inégalités en matière de santé en s'attaquant aux comportements à risqueNote de bas de page 796. Les mesures qu'elle préconise nécessitent une solide coordination entre toutes les administrations (y compris les administrations à l'étranger) et doivent fournir de l'encadrement, cibler les populations à risque (notamment les jeunes), renforcer les partenariats et les réseaux de soutien, faire un suivi des méfaits causés par l'alcool, réaliser des évaluations et communiquer les résultatsNote de bas de page 796.

Prévenir la consommation d'alcool pendant la grossesse

L'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation fœtale (ETCAF) est un terme utilisé pour décrire les effets que peut avoir l'exposition prénatale à l'alcool sur la santé d'un enfant. Il peut s'agir de troubles de la vision et de l'ouïe, d'un retard de croissance et de lésions cérébrales qui entraîneront, plus tard, des problèmes d'attention, de mémoire, de raisonnement et de jugement tout au long de la vie. L'ETCAF est considéré comme l'une des principales causes connues de déficience intellectuelle au Canada. La recherche de mesures de prévention efficaces demeure un défi pour le secteur de la santé publiqueNote de bas de page 800.

Le soutien et les soins prénataux continuent d'avoir des effets positifs sur la santé des femmes enceintes et des nourrissons au Canada. En effet, ces mesures permettent aux femmes de faire des choix judicieux en évitant, par exemple, certains comportements à risque, comme la consommation d'alcool pendant la grossesse et l'allaitementNote de bas de page 50, Note de bas de page 368, Note de bas de page 798-800. Ces succès sont largement attribuables aux services de soins prénataux et de dépistage, aux campagnes pour une grossesse en santé ainsi qu'à d'autres stratégies d'éducation préventiveNote de bas de page 798-801. Toutefois, certaines femmes enceintes ne reçoivent toujours pas le soutien et les soins requis pour assurer le sain développement de leur enfant. Cette situation peut être le résultat de conditions socioéconomiques défavorables, d'un manque d'information, d'un accès difficile ou limité à des renseignements sur la santé et à des services de soutien et de l'interaction possible avec d'autres comportements à risque adoptés par les femmes enceintes ou par leur partenaire (comme le tabagisme et l'exposition à la fumée secondaire)Note de bas de page 802. Cependant, les femmes qui sont les plus susceptibles d'adopter des comportements néfastes sont également les plus difficiles à joindre. C'est pourquoi une attention particulière doit être accordée à leurs conditions et leur milieu de vie.

L'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation fœtale (ETCAF) désigne les effets sur la santé qui se manifestent chez les personnes dont la mère a consommé de l'alcool pendant la grossesse. Bien qu'il soit difficile de déterminer la prévalence de l'ETCAF, l'exposition prénatale à l'alcool représenterait l'une des principales causes de troubles de développement et de troubles cognitifs chez les enfants au CanadaNote de bas de page 368, Note de bas de page 800. La prévention de ces troubles est complexe et nécessite une démarche globale et multifactorielle faisant appel à divers types d'intervention et à de nombreux fournisseurs de servicesNote de bas de page 800. Les vastes campagnes de sensibilisation ont connu un certain succès, mais des études révèlent que de nombreux facteurs peuvent influer sur la consommation d'alcool en général (par exemple, la dépendance) et particulièrement pendant la grossesse (l'accès aux soins, l'alimentation et la violence)Note de bas de page 800. Pour cette raison, l'Agence de la santé publique du Canada a mis au point un cadre de prévention qui aborde quatre aspects :

  • sensibiliser le public au moyen de stratégies et de campagnes d'envergure axées sur une vaste gamme d'activités de promotion et de sensibilisation et mettant à contribution divers intervenants communautaires de manière à offrir un soutien social et à susciter des changements sociaux;
  • fournir aux adolescentes et aux jeunes femmes des services-conseils de sorte qu'elles puissent discuter ouvertement et en toute sécurité de leur grossesse, de la consommation d'alcool et d'autres questions connexes avec les réseaux de soutien et les spécialistes de la santé;
  • offrir des services de soutien prénatal adaptés à la culture et au genre et abordant un large éventail de problèmes de santé, y compris ceux liés à l'alcool et à la santé mentale;
  • donner aux mères et aux familles un soutien postnatal pour les aider à maintenir les saines habitudes qu'elles ont acquises pendant leur grossesse et répondre aux nouveaux besoins qui peuvent survenir après la grossesse et la naissance. Cette étape est importante pour entreprendre des interventions précoces destinées aux enfants atteints de l'ETCAFNote de bas de page 800.

La sensibilisation du public et l'élaboration de politiques sociales contre les dangers associés à la consommation d'alcool pendant la grossesse ont permis d'améliorer, dans une certaine mesure, les services de soutien et de susciter des changements sociauxNote de bas de page 368. La plupart des Canadiens sont familiarisés avec les affiches, les publicités télévisées et les mises en garde concernant les effets possibles de l'alcool sur le fœtusNote de bas de page 803. En effet, les vastes campagnes contre la consommation d'alcool pendant la grossesse ont permis une bonne assimilation du message et une sensibilisation accrue à cette question, à court et à long terme, en plus de provoquer des changements de comportementNote de bas de page 799. L'expérience américaine démontre cependant que les messages de mise en garde (comme ceux apparaissant sur les étiquettes de produit) ne suffisent pas à sensibiliser ou à susciter un changement dans les habitudes. En fait, ces messages ont généralement une influence sur les segments de population qui courent le moins de risques de consommer de l'alcool pendant la grossesseNote de bas de page 368. À ce titre, des études ont révélé que les étiquettes de mise en garde apposées sur les contenants de boissons alcoolisées ne permettent pas de changer les habitudes ni de réduire les méfaits causés par l'alcoolNote de bas de page 799. Pour cette raison, le Canada a établi un cadre d'action à plusieurs volets qui vise, entre autres, à accroître la sensibilisation en communiquant de manière efficace une information plus humaine, de meilleure qualité et adaptée à la culture. Ce cadre d'action reconnaît que seule la sensibilisation ne suffit pas. C'est pourquoi il prévoit le recours à des outils efficaces de prévention, de dépistage précoce et de diagnostic, à des services d'orientation ainsi qu'à des mesures et des programmes communautaires ciblés qui, mis ensemble, peuvent contribuer à améliorer l'état de santé et la vie sociale des populationsNote de bas de page 804.

Bien qu'il soit important d'informer la population en général, ce travail de sensibilisation a généralement très peu d'effets sur les groupes les plus à risqueNote de bas de page 368. Toutefois, les programmes d'intervention communautaire visant à éliminer les obstacles qui limitent l'accès aux soins prénataux ont réussi, dans une certaine mesure, à réduire les risques pour la santé prénatale dans les collectivités en difficulté. Par exemple, le Programme canadien de nutrition prénatale (PCNP) et le Programme canadien de nutrition prénatale – Volet Premières nations et Inuits (PCNP-VPNI) visent à assurer la santé de la mère et de l'enfant grâce à des démarches fondées sur des faits démontrés et à la contribution de travailleurs communautairesNote de bas de page 669, Note de bas de page 670, Note de bas de page 672. L'objectif du PCNP et du PCNP-VPNI est d'offrir des activités adaptées aux besoins et aux réalités culturelles des collectivitésNote de bas de page 669, Note de bas de page 672. Bien que les problèmes de consommation d'alcool pendant la grossesse soient plus fréquents chez les participants au PCNP que dans la population en général, les évaluations démontrent que les femmes qui reçoivent un soutien dans le cadre de ce programme (par exemple, les programmes de renoncement à l'alcool et le counseling de groupe sur la nutrition) étaient plus susceptibles de ne pas consommer d'alcool pendant leur grossesseNote de bas de page 805.

Des recherches indiquent, par ailleurs, que les interventions les plus efficaces pour aider les jeunes femmes à réduire leurs comportements à risque pendant la grossesse sont celles qui minimisent les facteurs de risque grâce à des services ciblés et des services-conseils, qui misent sur la persistance des spécialistes (comme ceux qui encouragent l'abandon du tabac), qui s'attaquent à l'isolement et à la dépression et qui offrent aux femmes la possibilité de s'exprimer ouvertement et en toute sécuritéNote de bas de page 801, Note de bas de page 806. De fait, ces interventions ont été appliquées avec succès à plus grande échelle de manière à inclure, entre autres, les partenaires et les membres de la famille en mesure d'aider les femmes enceintes à résister à la tentation de boire ou de fumerNote de bas de page 806, Note de bas de page 807. Les femmes à risque sont plus susceptibles de répondre positivement aux interventions des membres de leur famille, des spécialistes de la santé ou des travailleurs sociaux en qui elles ont confianceNote de bas de page 808. Plusieurs médecins ont en effet réussi à réduire la consommation d'alcool pendant la grossesse chez des femmes issues de différents milieux socioéconomiques et présentant divers profils de risqueNote de bas de page 809. Les données suggèrent, en outre, que les interventions sont plus efficaces lorsqu'elles s'adressent aux populations à haut risque et, tout particulièrement, lorsqu'elles sont combinées à des visites à domicile sur une longue période (de deux à cinq ans après la grossesse) (voir l'encadré intitulé « S'attaquer aux troubles causés par l'alcoolisation fœtale : le programme STOP FAS au Manitoba »)Note de bas de page 810-812. Plusieurs obstacles semblent toutefois limiter l'accès aux soins prénataux et, en particulier, pour certains segments de la populationNote de bas de page 668, Note de bas de page 808, Note de bas de page 813.

Pour s'attaquer au problème de consommation d'alcool pendant la grossesse, il est essentiel d'accroître les connaissances sur le sujet et d'offrir des services éprouvés et pertinents aux femmes enceintes. Le Système canadien de surveillance périnatale (SCSP) est un système national de surveillance continue qui vise à améliorer la santé des femmes enceintes, des mères et des nourrissons par la collecte et l'analyse systématiques de données actuelles et pertinentes sur leur état de santé et sur les facteurs qui déterminent leur santé (comme la consommation d'alcool pendant la grossesse)Note de bas de page 814. Le SCSP fait appel à la collaboration de différents partenaires provinciaux, territoriaux ou autres afin de définir des variables et des indicateurs normalisés sur lesquels s'appuieront les futurs rapportsNote de bas de page 814. L'Enquête sur l'expérience de la maternité (EEM), qui est menée dans le cadre de ce programme, fait état des connaissances, des points de vue, des pratiques et des expériences des femmes avant, pendant et après la grossesseNote de bas de page 815. Cependant, malgré tous les efforts déployés, le sujet est encore mal documenté. En effet, les femmes qui sont le plus susceptibles d'adopter des comportements prénataux malsains n'obtiennent habituellement pas de soins prénataux et, par conséquent, l'information sur le déroulement de leur grossesse demeure insuffisante.

S'attaquer aux troubles causés par l'alcoolisation fœtale : le programme STOP FAS au Manitoba

Le programme STOP FAS au Manitoba a été lancé dans les années 1990 pour contrer la hausse du nombre d'enfants atteints de l'ETCAFNote de bas de page 812. Inspiré du programme américain d'assistance parent-enfant, ce programme d'intervention utilise le mentorat pour venir en aide aux femmes enceintes, ou qui ont récemment donné naissance à un enfant, et qui combattent un problème d'alcool ou de drogueNote de bas de page 810, Note de bas de page 812. Cette approche vise à offrir un programme personnalisé qui permet de modifier graduellement les comportements. Pendant une période de trois ans, chaque femme reçoit les services d'un mentor qui l'aide, elle et sa famille, à se fixer des objectifs personnels, à surmonter des difficultés socioéconomiques (comme les problèmes de logement, la violence familiale et l'accès aux soins de santé, aux services communautaires et aux traitements contre la toxicomanie et l'alcoolisme) et à choisir des méthodes de planification familialeNote de bas de page 810-812. Des évaluations du programme ont révélé que les femmes qui ne consommaient pas d'alcool ou de drogues pendant au moins six mois ou qui utilisaient régulièrement une méthode de planification familiale couraient 60 % moins de risques de donner naissance à un enfant atteint de l'ETCAF. De même, environ 65 % des femmes ont réussi un programme de traitement des dépendances et 28 % ont terminé avec succès un programme d'enseignement ou de formation. Enfin, 63 % des enfants de mères à risque vivaient avec leur famille (23 % avec leur mère et 40 % avec leur père ou avec un membre de la famille élargie)Note de bas de page 812.

Initiatives de lutte contre le tabagisme

Le taux de tabagisme connaît actuellement une baisse importante et constante au Canada. Ce progrès est attribuable à un changement d'attitude à l'égard du tabac et à de vastes mesures, comme la Stratégie fédérale de lutte contre le tabagisme, qui visent à réduire la prévalence du tabagismeNote de bas de page 152. Malgré cette réussite, les jeunes et les jeunes adultes continuent de fumer, ce qui peut avoir de graves conséquences sur leur santé tout au long de leur vieNote de bas de page 355, Note de bas de page 356, Note de bas de page 760, Note de bas de page 816.

La plupart des Canadiens ont déjà été exposés directement ou indirectement aux effets nocifs du tabac (par l'entremise des membres de leur famille ou de leurs amis). La Loi sur le tabac régit la fabrication, la vente, l'étiquetage et la promotion des produits du tabac au Canada, tandis que la Stratégie fédérale de lutte contre le tabagisme est une initiative intersectorielle ayant pour objectif de convaincre les jeunes, en particulier, d'arrêter de fumer (ou de ne pas commencer), de les protéger contre la fumée secondaire et de réglementer les produits du tabacNote de bas de page 153, Note de bas de page 154. Les provinces et les territoires ont également mis sur pied des programmes d'abandon du tabagisme. Par exemple, le programme de la Saskatchewan intitulé Partnership to Assist with Cessation of Tobacco (PACT) permet aux spécialistes de la santé de se familiariser avec les principes et les pratiques de renoncement au tabac et leur apprend à établir des relations de confiance avec les personnes qui désirent arrêter de fumerNote de bas de page 817.

Depuis 2001, les efforts consentis par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont permis de créer un environnement antitabac au Canada. Le succès des mesures et des stratégies canadiennes dans ce domaine est en partie attribuable au respect des lois et des politiques existantes. Selon les données de 2009 de l'Évaluation du comportement des détaillants face à certaines restrictions de l'accès au tabac chez les jeunes, près de 90 % des détaillants vendent des produits du tabac uniquement aux personnes qui ont l'âge légal de les acheterNote de bas de page 818. Les dispositions de la Loi sur le tabac qui interdisent la publicité sur les produits du tabac sont également appliquées avec succès, et on observe un haut taux de conformité aux règlements provinciaux et territoriaux qui interdisent les présentoirs de produits du tabac dans les commerces de détail. Le respect des lois par les détaillants contribue à diminuer le pourcentage de jeunes qui achètent des cigarettes et à réduire la prévalence du tabagisme chez les jeunesNote de bas de page 818.

Cependant, les taux de tabagisme chez les peuples autochtones sont plus élevés que dans le reste de la population canadienneNote de bas de page 176. Même si l'on tient compte de l'utilisation traditionnelle du tabac pour la guérison, la prière et les cérémonies, les aînés des Premières nations estiment qu'il y a une différence entre l'utilisation traditionnelle du tabac et son utilisation moderne et que la dépendance au tabac commercial ne relève plus de la traditionNote de bas de page 819.

Les collectivités peuvent jouer un rôle dans la réduction du tabagisme chez les jeunes et les jeunes adultes en remettant en question les pratiques sociales, en faisant connaître les méfaits du tabac sur la santé et en adoptant des lois qui interdisent l'usage du tabac dans les endroits publicsNote de bas de page 153, Note de bas de page 820. Les changements se font graduellement. Jusqu'à maintenant, plus de 300 collectivités canadiennes ont mis en vigueur des règlements ou des politiques antitabac dans les lieux publicsNote de bas de page 821. Afin de les aider à établir et à évaluer leurs politiques, Santé Canada a créé la Trousse d'outils sur les règlements municipauxNote de bas de page 820, Note de bas de page 821. Les gouvernements provinciaux et territoriaux travaillent également à assurer un meilleur contrôle de l'usage du tabac dans les lieux publics. En 2006, l'Ontario a mis en œuvre la Loi favorisant un Ontario sans fumée, qui interdit l'usage du tabac dans les lieux de travail et les lieux publics clos (comme les boutiques, les restaurants, les bars, les taxis, etc.)Note de bas de page 822. Les provinces et les territoires ont adopté des lois et des stratégies de contrôle du tabac et imposent des restrictions dans de nombreux endroits publics afin de limiter l'exposition à la fumée secondaireNote de bas de page 820.

De son côté, la Commission des étudiants du Canada sollicite la participation des jeunes à la lutte contre le tabagisme. En effet, grâce au travail du Comité action jeunesse et à la création d'un comité consultatif de jeunes adultes, un réseau de jeunes a été mis sur pied dans le but de fournir des conseils et des commentaires à propos des politiques sur le tabacNote de bas de page 823. Le fait de permettre aux jeunes et aux jeunes adultes de participer au processus décisionnel permet de créer des mesures et des stratégies de réduction du tabac plus pertinentes à leur génération. De nouveaux programmes sont également mis en place dans le but de maintenir et d'améliorer l'efficacité des mesures antitabacNote de bas de page 824. Par exemple, les modifications à la Loi sur le tabac (Loi restreignant la commercialisation du tabac auprès des jeunes) interdisent dorénavant l'ajout d'arôme (sauf le menthol) et d'autres additifs aux cigarettes, petits cigares et feuilles d'enveloppe afin d'éviter de rendre ces produits plus attirantsNote de bas de page 824, Note de bas de page 825. Cette loi impose également de nouvelles restrictions concernant la publicité sur le tabac et établit des exigences minimales pour l'emballage de certains produitsNote de bas de page 824-826.

De façon générale, les programmes d'abandon du tabagisme destinés aux jeunes adultes constituent une bonne façon de les amener à cesser de fumer et à améliorer leur état de santé actuel et futur. Ils permettent, par conséquent, d'obtenir un retour élevé sur les investissements et procurent des avantages à long termeNote de bas de page 827. Cependant, ce genre de programme semble davantage attirer les fumeurs plus âgésNote de bas de page 828, Note de bas de page 829.

Résumé

Ce chapitre a mis en lumière des problèmes préoccupants auxquels le Canada, en tant que société, devrait s'attaquer afin d'améliorer l'état de santé et de bien-être actuel et futur des jeunes et des jeunes adultes. Bien qu'il existe des interventions éprouvées et prometteuses, beaucoup de lacunes subsistent dans les connaissances, l'information et les pratiques exemplaires.

Si l'on veut favoriser une saine transition de l'enfance à l'âge adulte, il est essentiel de s'attaquer aux déterminants sociaux de la santé. On sait que les mesures axées sur la famille, l'école, le milieu de travail et la collectivité contribuent à améliorer l'état de santé et de bien-être des jeunes et des jeunes adultes au Canada. En particulier, les programmes qui visent à bâtir des familles solides donnent de bons résultats. En effet, il a été démontré que les jeunes qui entretiennent des rapports harmonieux avec leur famille sont moins susceptibles de prendre des risques et d'adopter des comportements antisociaux. Ils ont également plus de chances d'entretenir des relations sociales positives et de nourrir des aspirations scolaires. De même, les programmes généraux qui encouragent la poursuite des études et la persévérance scolaire et ceux qui offrent une formation sur la recherche d'emploi et sur l'acquisition de compétences professionnelles fournissent un soutien efficace aux populations. Cependant, pour de meilleurs résultats, les programmes doivent cibler les jeunes et les jeunes adultes et favoriser l'établissement de relations de confiance et de respect avec les adultes. Même si l'on connaît les bienfaits de la résilience, d'autres travaux demeurent nécessaires pour approfondir les connaissances sur le sujet, offrir des programmes ciblés, appropriés et facilement accessibles, faciliter la prise de décision et évaluer l'efficacité et la pertinence des interventions menées auprès des jeunes et des jeunes adultes, en tenant compte des milieux dans lesquels ils vivent, apprennent, travaillent et s'amusent.

Pour assurer le maintien d'une bonne santé mentale tout au long de la vie, il est important d'investir dans des programmes qui favorisent la santé et le bien-être émotionnel et social et qui aident à prévenir les problèmes de santé mentale chez les jeunes et les jeunes adultes. Par exemple, les programmes en milieu scolaire et les thérapies comportementales et cognitives fonctionnent particulièrement bien chez les jeunes et les jeunes adultes au Canada. Toutefois, certains d'entre eux continuent de faire l'objet de stigmatisation, d'être victimes d'un manque de sensibilisation ou de se heurter à des obstacles de taille qui les empêchent d'accéder à des soins pertinents et appropriés. Il importe de réduire la stigmatisation, d'améliorer la sensibilisation et de rehausser le niveau de littératie en santé mentale afin de pouvoir mieux prévenir et régler le problème et d'offrir un meilleur soutien en milieu familial et communautaire. Le meilleur moyen d'y parvenir consiste à mieux comprendre en quoi les interventions actuelles sont efficaces. Ces efforts nécessiteront une démarche coordonnée et concertée qui pourrait être facilitée grâce à de vastes stratégies en matière de santé mentale, comme celles de la CSMC.

La prévention du suicide est une question complexe qui peut se résoudre avec la contribution des individus, des familles, des collectivités et des gouvernements. En effet, pour venir en aide aux plus vulnérables, il faut s'attarder aux facteurs qui sont susceptibles de conduire au suicide, par exemple, la stigmatisation sociale, les rapports intergénérationnels et les facteurs communautaires (comme c'est le cas dans certaines populations autochtones). Les médias sociaux peuvent sans doute jouer un rôle de soutien dans la prévention du suicide, mais ils peuvent aussi être utilisés comme source d'intimidation et d'isolement. C'est pourquoi d'autres recherches sont nécessaires pour mieux comprendre le rôle des médias sociaux et leur influence sur les jeunes. Les vastes stratégies de prévention du suicide donnent généralement de bons résultats, mais elles doivent pouvoir compter sur l'engagement de la collectivité et reposer sur une approche à plusieurs volets axée sur l'apprentissage continu et la collaboration intersectorielle.

Bien que les blessures soient évitables la plupart du temps, elles constituent une cause importante de décès et d'hospitalisations chez les jeunes et les jeunes adultes. Par conséquent, les interventions qui visent à sensibiliser la population aux risques de blessure, à modifier les comportements et à réduire le nombre de blessures revêtent une importance cruciale, au même titre que les politiques et les lois destinées à assurer la sécurité des citoyens. De plus en plus, les milieux de travail deviennent sécuritaires grâce aux efforts consentis par les employés, les employeurs et différents organismes en vue de réduire les risques de blessure, que ce soit par la création de programmes de formation, l'application des lignes directrices et l'adoption de politiques sur la sécurité en milieu de travail. Cependant, il y a encore place à amélioration. Les programmes éducatifs qui s'adressent spécifiquement aux jeunes sont essentiels pour les sensibiliser aux risques de blessure et les amener à faire des choix sécuritaires, notamment dans les sports et les loisirs. Les lois et les règlements encouragent également des pratiques moins dangereuses et garantissent des produits, de l'équipement et des véhicules plus sécuritaires. Les vastes mesures qui misent sur l'encadrement, la surveillance coordonnée, la réglementation, l'éducation, la prévention, le soutien communautaire et l'infrastructure connaissent aussi un certain succès.

L'intimidation constitue un problème relationnel qui peut se résoudre par l'établissement de relations saines et respectueuses entre les jeunes et les jeunes adultes au Canada. En général, la lutte contre l'intimidation est menée en milieu scolaire. D'ailleurs, les démarches les plus fructueuses sont celles qui sont mises en place à la grandeur de l'école, qui misent sur la responsabilité, l'empathie et l'esprit d'initiative, favorisent la participation des adultes et privilégient les interventions à long terme menées en bas âge. En milieu de travail, la lutte contre l'intimidation passe par de saines relations employeur-employé et par de vastes politiques de prévention du harcèlement.

On sait que la plupart des Canadiens vivent leur première expérience sexuelle à l'adolescence et au début de l'âge adulte. Par conséquent, les interventions qui s'adressent aux jeunes et aux jeunes adultes doivent promouvoir une bonne santé sexuelle, prévenir les comportements à risque et favoriser les relations solides et harmonieuses en misant sur le respect, la responsabilité et l'empathie. Les programmes en milieu scolaire contribuent également à prévenir les grossesses imprévues et les ITS.

La promotion de la santé reproductive constitue un important volet de la santé sexuelle. Par conséquent, il est essentiel de soutenir les parents et de leur donner les outils dont ils ont besoin pour prendre de bonnes décisions en matière de reproduction. Grâce à ce soutien, il est possible de modifier les comportements, actuels ou futurs, à l'égard de la nutrition prénatale et des tests de dépistage. Le Canada a également instauré de vastes programmes axés sur la population qui ont permis de réduire les cas d'ITS et du VIH et le sida, d'en faire le suivi et de poursuivre la lutte mondiale contre le VIH et le sida.

Il est important pour tous les Canadiens et, en particulier, pour les jeunes et les jeunes adultes de mener une vie saine. Bien que les effets négatifs de l'embonpoint et de l'obésité soient connus, l'efficacité des interventions menées dans ce domaine est peu documentée, et l'information concernant les facteurs de risque, comme la sédentarité et les mauvaises habitudes alimentaires, reste limitée. Le milieu familial, la collectivité ainsi que les infrastructures et les stratégies qui facilitent l'accès à des activités récréatives abordables, à des aliments nutritifs et à d'autres ressources jouent un rôle essentiel dans l'adoption de comportements sains tout au long de la vie. Les troubles de l'alimentation et la diffusion d'images corporelles irréalistes ont également une incidence sur la santé et le bien-être des jeunes adultes. Pour s'attaquer à ces problèmes, il faudrait adopter une approche à volets multiples et mettre en place des programmes destinés à accroître la sensibilisation, à dénoncer les images stéréotypées, à déceler et traiter rapidement les troubles de l'alimentation ainsi qu'à former des mentors et des adultes pour qu'ils puissent reconnaître les comportements malsains et leurs symptômes.

Bien que la consommation de certaines substances nocives (comme le tabac) soit moins fréquente au Canada, de nombreux jeunes et jeunes adultes continuent de présenter des risques de consommation et d'abus. S'attaquer au problème de toxicomanie est une démarche complexe qui nécessite une solide compréhension des facteurs individuels et socioéconomiques. Les programmes instaurés en milieu scolaire constituent une bonne façon de diffuser l'information et de mettre en œuvre des stratégies ciblées. De même, les lois ou les règlements qui fixent un âge légal de consommation, qui imposent des interdictions et établissent des mesures de contrôle donnent eux aussi de bons résultats. De vastes stratégies à volets multiples ont également été mises de l'avant dans le but de prévenir la consommation de substances nocives, de traiter la dépendance qu'elles occasionnent et de rendre ces substances le moins accessibles possible. Enfin, des programmes de sensibilisation de grande envergure veillent également à faire participer les jeunes à la discussion de manière à faciliter la diffusion de l'information et à mieux renseigner la population.

Ce chapitre a mis en lumière des interventions et des mesures prometteuses et efficaces qui font toute la différence lorsqu'il s'agit de créer des conditions favorables à une saine transition. Elles viennent confirmer que tous les Canadiens et tous les secteurs de la société ont un rôle à jouer dans la mise en œuvre de programmes efficaces qui donnent des résultats concrets. Elles constituent, par conséquent, un bon point de départ à partir duquel il est possible de s'inspirer, de réfléchir, de planifier et d'agir. Alors que certains Canadiens continuent de mettre leur santé et leur bien-être en péril, d'autres sont victimes des lacunes du système. Nous pouvons faire davantage pour eux. Le chapitre 5 présente les mesures prioritaires à mettre d e l'avant afin d'assurer à tous les Canadiens un avenir en santé.

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