Chapitre 4 : Rapport d'étape sur les populations distinctes : VIH/sida et autres infections transmissibles sexuellement et par le sang parmi les jeunes au Canada – Déterminants de la vulnérabilité et de la résilience

Chapitre 4 - Déterminants de la vulnérabilité et de la résilience des jeunes au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang

Bien que la majorité des jeunes Canadiens vivent la transition vers l'âge adulte sans être infectés par le VIH ou par d'autres infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS), ce n'est pas le cas pour tous. Certains jeunes sont plus vulnérables aux infections que d'autres, attribuable à une variété de défis, obstacles et conditions rencontrés dans leur environnement social, culturel, économique et physique. La documentation existante a tendance à être axée sur certains groupes de jeunes « à risque » en fonction de caractéristiques ou de comportements individuels ou en raison de leur appartenance à un groupe social donné. Ces caractérisations ignorent les conditions sociales, culturelles, économiques et structurelles qui affectent la vie des jeunes et leurs possibilités de prendre des décisions concernant leur santé. Ce chapitre étudie ces conditions afin de permettre une compréhension plus holistique de leur incidence sur les voies empruntées par les jeunes vers l'âge adulte. Pour réduire les taux de VIH et autres infections transmissibles sexuellement et par le sang parmi les jeunes au Canada, il sera essentiel d'aborder les facteurs complexes qui ont des répercussions sur leur vulnérabilité aux infections et de créer des conditions qui favorisent la prise de décisions saines.

4.1 Statut socio-économique : éducation, emploi et revenu

L'état de la santé s'améliore à mesure que l’on s’élève dans l’échelle des revenus et dans la hiérarchie sociale. Des revenus plus élevés permettent de meilleures conditions de vie comme un logement plus sûr et la capacité d'acheter suffisamment de bons aliments. Les populations les plus en santé sont celles qui se trouvent dans les sociétés prospères où la richesse est répartie de façon équitableNote de bas de page 1.

Le statut socio-économique est une mesure de la position d'une personne ou d'une famille par rapport aux autres au sein d'une structure sociale hiérarchique, communément basé sur l'éducation, l'emploi et le revenu. Le statut socio-économique est l'un des meilleurs facteurs prédictifs de la santé individuelle. En règle générale, les personnes dont le statut socio-économique est moins élevé ont tendance à afficher des résultats de santé moins bons que celles dont le statut socio-économique est plus élevé. En moyenne, plus les gens sont privilégiés du point de vue de l'éducation, de l'emploi et du revenu, meilleur est leur état de santé. Le chapitre 2 a présenté des données sur l'éducation, l'emploi et le revenu parmi les jeunes au Canada. Ici, nous décrivons les possibilités et les difficultés en matière de santé qui émanent de ces facteurs pour les jeunes.

4.1.1 Éducation

L'éducation contribue à une meilleure santé en offrant les connaissances et les compétences personnelles et sociales qui permettent d'avoir un meilleur accès à l'information ou aux services en matière de santé, de mieux les comprendre et de mieux les utiliser. Les jeunes qui décrochent de l'école et ceux dont le niveau d'instruction est faible peuvent manquer des occasions clés d'acquérir ces outils importants.

L'éducation offre également de meilleures possibilités d'emploi et un revenu plus élevé.Note de bas de page 2 Les études postsecondaires deviennent de plus en plus importantes pour entrer et faire son chemin dans le marché du travail au Canada. Les jeunes qui n'ont pas obtenu leur diplôme d'études secondaires se voient offrir des possibilités d'emploi limitées et peuvent éprouver des difficultés à subvenir à leurs besoins de base. Pour subvenir à ces besoins, certains peuvent s'adonner à des activités telles que le travail du sexe, qui augmente leur vulnérabilité au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang.

L'interruption des études ou un faible niveau d'éducation peuvent également avoir des conséquences directes sur la santé en limitant l'accès au logement, à l'alimentation et aux services de santé adéquats. Les données tirées de la Surveillance accrue des jeunes de la rue au Canada (E-SYS) ont permis d'établir que le taux d'achèvement des études secondaires était relativement faible parmi les jeunes de la rue au Canada. Moins d'un tiers des jeunes de la rue âgés de 18 ans et plus ont obtenu leur diplôme d'études secondaires, un niveau d'éducation trois fois plus faible que celui de la population générale. Les jeunes de la rue étaient dix fois plus susceptibles de déclarer une santé physique et mentale moins bonne que celle de leurs pairsNote de bas de page 3. Plus de la moitié des jeunes de la rue font face à des obstacles lorsqu'ils désirent accéder aux services de santé. Parmi ces obstacles, la moitié des jeunes ont cité des obstacles structurels tels que l'absence de papiers d'identité (en raison de l'instabilité du logement) et les contraintes financières.

L'instruction des parents joue également un rôle clé dans la santé et le bien-être des jeunes. Une étude portant sur plus de 2 000 étudiants du secondaire en Nouvelle-Écosse a examiné l'association entre l'activité sexuelle, la prise de risque sexuel et le statut socio-économique des ménagesNote de bas de page 4. L'âge précoce des premiers rapports sexuels chez les jeunes filles et les jeunes hommes était associé à un niveau d'éducation plus faible des parents et au fait de ne pas habiter avec les deux parentsNote de bas de page 5. Pour les jeunes hommes, un père au chômage représentait un facteur supplémentaire de l'âge précoce des premiers rapports sexuels. Par comparaison, les facteurs qui ont tendance à protéger contre l'âge précoce des premiers rapports sexuels, la non-utilisation du condom et les rapports sexuels non planifiés comprenaient le fait d'habiter avec les deux parents et d'avoir des parents dont le niveau d'éducation était plus élevé et avaient un emploiNote de bas de page 6. Les connaissances et les compétences sont souvent transmissibles aux jeunes par les parents ou les gardiens. En outre, l'éducation reçue par les parents a une incidence sur leur emploi, leur revenu et sur les ressources auxquelles la famille a accès.

4.1.2 Emploi

L'emploi peut avoir une incidence diverse sur la santé des jeunes.Note de bas de page 7 En premier lieu, il donne accès aux ressources financières et matérielles (p. ex. remboursement des médicaments sur ordonnance) nécessaires pour protéger sa santé. Le stress psychologique lié à l'insécurité financière aggrave les effets négatifs pour la santé en perturbant les routines quotidiennes, en diminuant l'estime de soi et en augmentant l'anxiété générale. Le chômage augmente également la probabilité de se tourner vers la consommation d'alcool, le tabagisme et la consommation de drogue comme mécanismes d'adaptation.

4.1.3 Revenu familial et personnel

L'accès à un revenu personnel et familial est un autre facteur qui a une influence sur la santé et le développement des jeunes. Tel que mentioné, le revenu personnel facilite l'achat de médicaments sur ordonnance, de condoms et d'autres produits de soins de santé. Il offre également un sentiment d'indépendance, d'estime de soi et de valeur propre, qui contribue à la résilience face à de mauvais résultats de santé. Le revenu familial est un indicateur plus important que le revenu personnel des ressources auxquelles les jeunes qui vivent avec des parents ou des gardiens ont accès pour leur santé. Des données provenant de jeunes âgés de 10 à 19 ans ayant participé à l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes de 2002-2003 ont indiqué des taux plus élevés d'utilisation du condom au cours des derniers rapports sexuels parmi les jeunes qui vivaient dans des familles à revenu plus élevéNote de bas de page 8. Le revenu familial faible (< 50 000 $ par année) permettait également de prédire un âge plus précoce pour les premiers rapports sexuels, des partenaires sexuels multiples, des antécédents d'infection transmissible sexuellement et des rapports sexuels non protégésNote de bas de page 9. De même, les données provenant de l'Enquête nationale sur la santé de la population indiquaient que les jeunes provenant de familles dont le revenu était plus élevé (> 50 000 $ par année) étaient moins susceptibles de déclarer avoir fumé, avoir consommé de l'alcool en quantité excessive ou avoir eu plus d'un partenaire sexuel au cours de l'année précédente. Sur la même période, ces jeunes étaient plus susceptibles d'avoir « toujours » utilisé un condomNote de bas de page 10.

Un revenu personnel ou familial inadéquat peut également mener à des comportements qui compromettent la santé en vue de pourvoir aux premières nécessités de la vie. Ce comportement peut faire courir des risques accrus de mauvais résultats de santé, notamment l'infection par le VIH ou d'autres infections transmissibles sexuellement et par le sang. Par exemple, les jeunes de la rue qui ne peuvent pas avoir accès à l'assistance sociale trouvent d'autres moyens de gagner de l'argent et de répondre à leurs besoins fondamentaux. Les sources de revenu courantes des jeunes de la rue signalées dans le Système de surveillance accrue des jeunes de la rue comprenaient le travail du sexe pour survivre et la vente de droguesNote de bas de page 11. Les jeunes de la rue ont déterminé que le travail du sexe et la vente de drogues sont des sources de revenu plus lucratives, malgré les risques de se faire arrêter, d'être victimes de violence ou de devenir infectés par le VIH ou autres infections transmissibles sexuellement et par le sangNote de bas de page 12.

4.2 SexeNote de bas de page i

Le mot sexe fait ici référence à toute la gamme de rôles déterminés par la société, de traits de personnalité, d'attitudes, de comportements, de valeurs, de l'influence relative et du pouvoir relatif que la société attribue aux deux sexes en les différenciant. Les normes associées aux sexes influencent les pratiques et les priorités du système de santé. Un grand nombre de problèmes de santé sont fonction de la situation sociale ou des rôles des deux sexesNote de bas de page 13.

Le sexe et le genre sont deux notions distinctes. Bien qu'il n'existe aucune définition unique convenue, la première notion fait généralement référence aux caractéristiques biologiques, notamment l'anatomie (p. ex. la taille, les organes reproducteurs) et la physiologie (p. ex. l'activité hormonale), qui différencient les hommes des femmesNote de bas de page 14. La deuxième notion fait référence aux attentes et aux normes déterminées par la société et la culture concernant le comportement, les caractéristiques et les rôles appropriésNote de bas de page 15. Par exemple, cette notion du sexe est responsable de la croyance généralisée au Canada que les filles nouveau-nées doivent être habillées en rose et les garçons en bleu. Cette deuxième notion du sexe a des répercussions diverses sur la santé, notamment les normes de comportement acceptable, les attentes au sein des relations sexuelles et l'accès aux services de santé.

4.2.1 Normes sexuelles

Les normes et les attentes fondées sur la deuxième notion du sexe ont une influence sur la façon dont la sexualité est perçue et vécue. Les normes sexuelles ont des répercussions sur le choix des partenaires sexuels, les types de comportements sexuels adoptés, ainsi que le contexte dans lequel le comportement sexuel a lieu. Les normes sexuelles qui entourent la sexualité sont souvent différentes chez les hommes et chez les femmes. Par exemple, dans certaines sociétés, il peut être acceptable pour les hommes d'avoir des expériences sexuelles avant le mariage, alors que les attentes concernant le comportement des femmes peuvent être plus restrictives. Ces normes sexuelles sont établies à un jeune âge par l'intermédiaire de la socialisation. Les jeunes acquièrent des normes et des attentes sexuelles spécifiques qui ont une influence sur leurs résultats de santé tout au long de la vieNote de bas de page 16.

Les rôles de la masculinité et de la féminité fondés sur le sexe ont sur la sexualité, le comportement sexuel et les relations sexuelles une incidence qui crée un déséquilibre de pouvoir dans les relations sexuelles et des inégalités dans les résultats de santé. Par exemple, il se peut que l'on enseigne aux jeunes des normes fondées sur le sexe concernant le comportement sexuel, dans lesquelles les hommes sont considérés comme étant dominants et contrôlant la relation sexuelle. Cela fait courir aux femmes le risque d'être incapables de négocier l'utilisation d'un condom si leur partenaire masculin ne le désire pas et d'être victimes de violence sexuelle ou de coercition par leur partenaire masculin.

Dans la cohorte du projet Cedar, on a constaté que les jeunes femmes autochtones affichaient des taux d'infection au VIH plus élevés que leurs homologues masculinsNote de bas de page 17. Plus de 80 % des jeunes participantes ont déclaré avoir eu des rapports hétérosexuels non protégés; 70 % d'entre elles ont indiqué avoir été victimes de rapports sexuels forcésNote de bas de page 18. Les résultats de l'étude ont montré que les pratiques sexuelles sécuritaires, notamment l'utilisation du condom, étaient compromises en raison du déséquilibre de pouvoir entre les hommes et les femmes, entre autres la crainte des jeunes femmes d'être victimes de violence ou de se faire abandonner par leur partenaire masculinNote de bas de page 19. Les entrevues menées dans le quartier centre-est de Vancouver et dans deux réserves de l'île de Vancouver auprès de 30 jeunes âgés de 15 à 19 ans qui se sont déclarés autochtones ont révélé une perspective différente sur l'interaction des sexes au sujet des rapports protégés et sur la négociation de ces derniers entre les sexesNote de bas de page 20. Les résultats de cette étude ont indiqué que les jeunes femmes jouaient un rôle actif dans la sexualité et les rapports protégés, alors que les jeunes hommes étaient quelquefois forcés par leur partenaire féminine à ne pas utiliser un condomNote de bas de page 21. Plus particulièrement, les jeunes femmes ont quelquefois fait pression sur leur partenaire masculin pour qu'il évite l'utilisation du condomNote de bas de page 22. Au sein de cette population, la grossesse et l'éducation des enfants revêtent une grande valeur, ce qui peut expliquer la pression exercée par les femmes pour ne pas utiliser le condom.

Les normes sexuelles concernant la masculinité peuvent également avoir une influence sur le consentement des hommes à utiliser un condom. Par exemple, les normes sexuelles entourant la masculinité peuvent étayer la croyance que les condoms sont un signe de faiblesse. Des études ont montré une utilisation moins fréquente du condom et des comportements sexuels à risque plus fréquents chez les jeunes des collectivités où les normes sexuelles stéréotypées concernant les hommes et les femmes étaient prédominantesNote de bas de page 23.

Les normes sexuelles peuvent également avoir une influence sur la façon dont les services de santé sont perçus ainsi qu’à l'accès à ces derniers. Des études menées auprès de jeunes hommes hétérosexuels laissent entendre que les constructions sociales de la masculinité ont une incidence sur l'accès aux services de santé sexuelle et aux comportements liés au dépistage du VIHNote de bas de page 24. Dans une cohorte composée de 50 hommes hétérosexuels qui se sont déclarés sexuellement actifs (âgés de 15 à 23 ans) en Nouvelle-Écosse, les participants ont déclaré qu'ils ne désiraient pas chercher à obtenir des services conventionnels liés à la santé sexuelle et à l'éducation et à la prévention en matière de VIH, malgré l'existence de centres de santé pour jeunes dans toute la provinceNote de bas de page 25. Les jeunes hommes ont indiqué qu'ils s'inquiétaient de paraître inexpérimentés sur le plan sexuel, manquant de connaissances ou « gais » s'ils cherchent à obtenir des renseignements au sujet de la santé sexuelle et des services d'éducation et de prévention en matière de VIHNote de bas de page 26.

Les normes et les attitudes fondées sur le sexe adoptées par les professionnels de la santé peuvent également avoir une incidence différente sur l'accès aux services de santé par les membres des deux sexes. Par exemple, dans une étude, les jeunes participants ont indiqué qu'ils ne s'étaient pas senti les bienvenus dans les cliniques de santé sexuelle, en raison de l'atmosphère physique qu'ils percevaient comme étant axée sur les femmesNote de bas de page 27. Cela comprenait la décoration de la clinique et les affiches et brochures sur les questions de santé sexuelle des femmesNote de bas de page 28. Dans une autre étude menée par Planned Parenthood of Toronto, les participants ont indiqué que les services liés à la santé sexuelle étaient principalement axés sur les femmes et leurs questions en matière de santé sexuelle et reproductiveNote de bas de page 29. Les jeunes participants ont indiqué le besoin de milieux sexuellement neutres et accueillants pour les jeunes afin d'augmenter l'accès des jeunes hommes aux services liés à la santé sexuelleNote de bas de page 30. L'impression que ces services sont axés sur les femmes a mené les jeunes hommes à croire que ces services ne sont pas importants pour leur propre santé et réduit la probabilité qu'ils y accèdent. Les résultats de l'étude Toronto Teen Survey (TTS) ont établi que les jeunes hommes cherchent moins souvent à accéder aux services liés à la santé sexuelle et sont moins susceptibles de demander des renseignements concernant la santé sexuelle; cependant, ils désirent s'informer au sujet de la sexualitéNote de bas de page 31.

Les jeunes transgenres font face à des problèmes particuliers en ce qui concerne les normes et les attentes sexuelles. Par exemple, le manque de connaissances ou de sensibilisation au sujet de cette population parmi les professionnels de la santé peut avoir une incidence sur l'accès qu'ont les jeunes transgenres à des services de santé de qualité. Dans le cadre de l'étude Toronto Teen Survey, un petit nombre de jeunes transgenres ont participé à une entrevue au cours de laquelle ils ont exprimé qu'ils craignaient d'être jugés et d'être victimes de discrimination par les professionnels de la santé en raison de la transphobieNote de bas de page 32. Les résultats ont également indiqué que les cliniques ne reconnaissent souvent pas l'identité des jeunes transgenres ou ne répondent pas à leurs besoins en matière de santé sexuelleNote de bas de page 33. Parmi les participants, la moitié des jeunes avaient eu accès à des services liés à la santé sexuelle, mais ont indiqué ne pas en avoir été satisfaits. L'étude a déterminé l'importance du langage neutre, de la création d'un espace permettant aux jeunes de s'auto-identifier et de la formation du personnel professionnel et médical sur l'identité sexuelle afin de mieux répondre aux besoins des jeunes transgenresNote de bas de page 34.

4.3 Orientation sexuelle

Un élément clé de notre identité, l'orientation sexuelle, est composé de l'auto-identification, de l'attirance physique et émotionnelle envers une autre personne et les comportements. Ces éléments interagissent de façons multiples, complexes et quelquefois incohérentes. Par exemple, une personne peut s'auto-identifier comme étant hétérosexuelle et pourrait être principalement attirée sur le plan physique et émotionnel par les membres du sexe opposé. Cependant, elle pourrait ressentir une légère attirance émotionnelle ou physique envers certains membres du même sexe et pourrait agir en fonction de cette attirance. Par conséquent, les orientations sexuelles existent sur un continuum, d'exclusivement homosexuelles à exclusivement hétérosexuelles, avec diverses identités sexuelles entre les deuxNote de bas de page 35. L'orientation sexuelle commence à se développer pendant la petite enfance et continue tout au long de la vie.

L'orientation sexuelle est un autre déterminant de la santé important qui peut avoir une incidence sur la vulnérabilité au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang. La santé physique, mentale, émotionnelle et sexuelle des jeunes non hétérosexuels, y compris les jeunes lesbiennes, gais, bisexuels et allosexuels ou en questionnement, est moins bonne que celle des jeunes hétérosexuels. L'orientation sexuelle a diverses répercussions sur les résultats de santé. Premièrement, étant donné la nature de certaines infections transmissibles sexuellement et par le sang, le risque de transmission varie considérablement selon le type d'exposition. Bien que la transmission se produise le plus souvent par l'intermédiaire de l'activité sexuelle ou des pratiques de consommation de drogue, la probabilité d'infecter quelqu'un d'autre ou d'en être infecté dépend du type d'activité auquel s'adonnent les jeunes. Note de bas de page 36 Par exemple, une analyse récente de la documentation apporte des preuves selon lesquelles les relations sexuelles vaginales sont associées à une probabilité par acte, de transmission du VIH moins élevée que les relations sexuelles anales.Note de bas de page 37 Par conséquent, l'orientation sexuelle a une incidence directe sur les résultats de santé tels que l'infection par le VIH ou les autres infections transmissibles sexuellement et par le sang en raison du type de comportements auxquels s'adonnent les jeunes.

Elle touche également la santé de façon indirecte, par l'intermédiaire des conditions sociales, psychologiques et culturelles. En particulier, les non-hétérosexuels subissent des niveaux de stress plus élevés en raison des attitudes sociales et culturelles envers les minorités sexuelles, un rejet et un isolement social, ainsi que la pression d'avoir à gérer leur identité en fonction de leur environnement. Les facteurs de stress de cette nature, quelquefois appelés « stress minoritaire », provoquent de l'hypertension artérielle, de l'anxiété et d'autres réactions physiologiques qui entraînent une mauvaise santé physique et mentale. Ils peuvent également être à la source de mécanismes d'adaptation qui compromettent la santé, tels que la consommation de drogues, les activités sexuelles non protégées ou le travail du sexe. Note de bas de page 38 Pour certains jeunes appartenant à une minorité sexuelle, la consommation de drogues peut être une tentative d'autotraitement visant à gérer la stigmatisation ou la honte ou à nier les sentiments ressentis pour les personnes du même sexe, ou peut être un mécanisme de défense contre les railleries ou la discrimination des autres.Note de bas de page 39 Par exemple, les jeunes qui se déclarent appartenir à une minorité sexuelle et qui ont participé à l'enquête Toronto Teen Survey ont expliqué que le fait d'adopter des comportements sexuels non protégés ou à risque les aidait à faire face à l'environnement social négatif dans lequel ils vivaient, malgré le risque de contracter le VIH ou d'autres infections transmissibles sexuellement et par le sangNote de bas de page 40.

Selon la recherche, par rapport à leurs pairs hétérosexuels, les jeunes lesbiennes, gais et bisexuels sont plus susceptibles de vivre leurs premiers rapports sexuels avant l'âge de 14 ans, de consommer des drogues et de l'alcool avant les rapports sexuels, d'avoir plusieurs partenaires sexuels, d'avoir été enceinte ou d'avoir fait tomber leur partenaire enceinte, d'autodéclarer des problèmes de drogues et d'alcool et de s'adonner au travail du sexe pour survivre.Note de bas de page 41 De même, dans le cadre d'une étude de cohorte portant sur des étudiants du secondaire à Montréal, les jeunes qui s'identifiaient comme étant gais, lesbiennes ou bisexuels ont signalé des taux significativement plus élevés de tabagisme, de consommation d'alcool et de consommation de marijuana et de drogues dures que leurs pairs hétérosexuels.Note de bas de page 42 Dans un échantillon de jeunes provenant des régions rurales de la Colombie-Britannique, les jeunes lesbiennes, gais et bisexuels étaient plus susceptibles que leurs pairs hétérosexuels d'indiquer que la consommation d'alcool leur permettait de faire face à la stigmatisation et à la discrimination.Note de bas de page 43

L'homophobie est un autre facteur de stress qui compromet la santé. Les attitudes sociales et culturelles envers les minorités sexuelles sont souvent exprimées de façon négative, allant de formes de discrimination plus voilées aux formes plus visibles du harcèlement verbal, de la violence physique ou autres formes d'intimidation. Ces expériences peuvent provoquer des réactions physiologiques (p. ex. hypertension artérielle, anxiété), des maladies mentales (p. ex. dépression), une mauvaise santé mentale (p. ex. manque d'estime de soi), la consommation de drogues et des actes autodestructeurs (p. ex. suicide). Note de bas de page 44 Parmi les jeunes en particulier, ces expériences peuvent mettre en péril la réussite scolaire et augmenter la probabilité du décrochage, des difficultés d'apprentissage et de l'isolement social.Note de bas de page 45 Dans un échantillon national de jeunes du secondaire ayant participé à l'enquête First National Climate Survey on Homophobia in Canadian Schools, plus de la moitié (56,6 %) des jeunes lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres, allosexuels et en questionnement ont indiqué avoir été victimes de harcèlement verbal en raison de leur orientation sexuelle perçue, par rapport à 14,1 % des autres jeunesNote de bas de page 46. Dans une étude québécoise de 2008 portant sur 2 747 étudiants du secondaire, 38,6 % des participants ont indiqué avoir été victimes d'actes de violence à l'école en raison de leur identité ou de la façon dont leurs camarades percevaient leur identité sexuelleNote de bas de page 47.

En raison de leur orientation sexuelle et de leurs attitudes sociales, les jeunes appartenant à une minorité sexuelle peuvent manquer de facteurs clés de protection dans la vie, tels que les liens avec leur famille, leur école ou leur communauté.Note de bas de page 48 L'isolement social peut augmenter la probabilité, pour ces jeunes, de s'adonner à des comportements d'adaptation négatifs. Les effets de l'homophobie et de l'isolement social peuvent être renforcés chez les jeunes appartenant à une minorité sexuelle qui habitent dans des collectivités rurales et éloignées, qui sont plus susceptibles de migrer vers une grande ville pour échapper à la stigmatisation et à la discriminationNote de bas de page 49. Le déménagement vers les centres urbains éloigne aussi physiquement ces jeunes de leur famille et de leurs pairs. Par exemple, une petite cohorte qualitative de 13 jeunes Autochtones bispirituels a déclaré que 90 % d'entre eux avaient déménagé à Toronto en raison des attitudes homophobes et de la violence auxquelles ils étaient confrontés, de la part de leur famille et de la collectivité au sens largeNote de bas de page 50. Les jeunes appartenant à une minorité sexuelle qui déménagent vers des centres urbains peuvent rencontrer des difficultés supplémentaires telles que le racisme, la pauvreté et l'isolement, le chômage, l'instabilité de l'emploi, le manque d'accès aux services de santé et aux autres services, ainsi que l'exploitation sexuelleNote de bas de page 51. Pour d'autres jeunes appartenant à une minorité sexuelle, le déménagement vers un centre urbain est synonyme de responsabilisation et peut augmenter la résilience en les éloignant d'un environnement social négatif.

Les chercheurs ont commencé à mettre l'accent sur les stratégies qui favorisent la résilience parmi les jeunes appartenant à une minorité sexuelle. Par exemple, la société McCreary Centre Society a examiné des stratégies qui soutiennent les jeunes appartenant à une minorité sexuelle à l'école. Ces stratégies comprennent la création d'un environnement sûr et bienveillant à l'école, la promotion d'attitudes saines au sujet des comportements à risque, le soutien aux familles dans leur rôle d'éducation des enfants, l'offre de possibilités de s'engager et la création d'un milieu propice au développement des jeunesNote de bas de page 52. Un environnement scolaire positif contribue à renforcer les compétences d'adaptation personnelle des jeunes à orientations sexuelles diverses, qui appuient l'apprentissage, l'achèvement des études secondaires et les ambitions d'études postsecondairesNote de bas de page 53.

4.4 Culture, race et groupe ethnique

Certaines personnes et certains groupes peuvent faire face à des risques additionnels pour leur santé à cause d'un milieu socio-économique déterminé dans une large mesure par des valeurs culturelles dominantes contribuant à perpétuer certaines conditions comme la marginalisation, la stigmatisation, la perte ou la dévaluation de la langue et de la culture et le manque d'accès à des soins et services de santé adaptés à la culture du patient.Note de bas de page 54

Le chapitre 2 a présenté des données permettant d'établir le profil de la diversité ethnoculturelle croissante des jeunes au Canada. La culture est un élément important de l'identité. Elle est composée de comportements, de pratiques, de valeurs et d'attitudes. Ces éléments de la culture sont influencés par d'autres éléments de l'identité humaine, notamment la race, l'ethnicité, le sexe ou l'orientation sexuelle. La culture reçoit également l'influence des contextes historiques, socio-économiques et politiques, des relations de pouvoir au sein de groupes et entre les groupes et des attitudes et pratiques institutionnalisées qui en résultent.

La culture, la race et l'ethnicité sont des déterminants importants des résultats de santé, y compris de l'infection au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang. Premièrement, la culture façonne les connaissances, les attitudes et les comportements d'une manière qui influence la vulnérabilité ou la résistance à des infections. Par exemple, la recherche indique des lacunes dans les connaissances au sujet de la sexualité et du VIH parmi les collectivités racialisées et immigrantes au Canada.Note de bas de page 55 La consommation de drogue, un facteur de risque lié au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang ayant fait l'objet de nombreuses recherches, est également façonnée par les valeurs culturelles. Les valeurs et les attitudes culturelles jouent un rôle dans la façon dont les gens consomment de l'alcool, le tabac ou les drogues, dans l'âge auquel ils commencent à consommer, dans la fréquence de la consommation et dans les contextes de consommation de certaines substances. Les valeurs culturelles comprennent également les croyances au sujet de la santé et de la maladie elles-mêmes, telles que les sources ou les causes de la maladie, la possibilité et le mode de traitement des maladies, les personnes qui peuvent traiter les maladies et celles qui doivent participer aux décisions relatives au traitement. Par exemple, dans certaines cultures, on pense que les maladies telles que le VIH sont causées par des forces surnaturelles, alors que dans d'autres cultures, on pense qu'un virus en est la cause. Ces croyances fondées sur la culture façonnent la manière dont les jeunes perçoivent leur vulnérabilité aux infections, les précautions qu'ils prennent pour les éviter, leur utilisation des services de santé préventifs (p. ex. le dépistage du VIH ou des infections transmissibles sexuellement) et les traitements qu'ils cherchent à obtenir s'ils manifestent des symptômes. Les valeurs culturelles comprennent également la perception de l'identité sexuelle. En particulier, les identités non hétérosexuelles prennent diverses significations et valeurs dans des contextes culturels différents. Dans de nombreuses cultures, les identités non hétérosexuelles engendrent de la crainte et sont perçues de façon négative (homophobie). Dans d'autres cultures, les identités non hétérosexuelles sont révérées. De même, les valeurs culturelles comprennent la perception de la sexualité, qui a une incidence sur les normes et les schémas liés aux relations sexuelles, comme la façon dont les gens parlent de la sexualité et avec qui ils en parlent, ainsi que les types de comportements auxquels ils s'adonnent. Par exemple, les valeurs et les attitudes culturelles peuvent dicter si les jeunes appartenant à certains groupes ethnoculturels se sentent suffisamment à l'aise pour discuter des questions de sexualité avec leurs parents ou avec des professionnels de la santé. Les jeunes d'Asie du Sud qui ont participé à l'étude Toronto Teen Survey ont signalé une gêne générale à l'idée de parler de sexualité et de santé sexuelle avec leurs parents. Ils ont également indiqué qu'ils craignaient que, s'ils se rendaient à une consultation dans une clinique de santé sexuelle, leurs parents ne le découvrentNote de bas de page 56.

La culture, la race et l'ethnicité sont aussi étroitement liées au statut socio-économique, aux rôles sexuels et aux autres déterminants de la santé. Les minorités ethnoculturelles sont représentées de façon disproportionnée dans les catégories socio-économiques moins favorisées au CanadaNote de bas de page 57. Plusieurs facteurs contribuent au statut socio-économique moins favorisé des minorités ethnoculturelles, notamment l'intériorisation des stéréotypes raciaux, les antécédents de colonisation, la discrimination raciale et l'inégalité en matière d'emploiNote de bas de page 58. Les effets du statut socio-économique moins favorisé sur la vulnérabilité au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang se font également sentir de façon disproportionnée chez les jeunes appartenant à une minorité ethnoculturelle (p. ex. accès limité aux services ou à l'information en matière de santé, incapacité à se permettre d'acheter des condoms ou d'autres moyens de prévention). En outre, les rôles sexuels sont également façonnés par les contextes culturels et créent des différences de vulnérabilité au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang parmi les jeunes appartenant à une minorité ethnoculturelle. Par exemple, dans certaines cultures, les rôles sexuels féminins sont construits de sorte à placer des restrictions plus sévères sur la sexualité des femmes, leur capacité à prendre des décisions dans les relations sexuelles et l'autorité de choisir avec qui elles désirent avoir des rapports sexuels. Ces rôles sexuels augmentent la vulnérabilité des femmes appartenant à ces groupes au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang.

Les valeurs culturelles peuvent également créer des conditions sociales, politiques et structurelles qui ont des répercussions sur la santé sexuelle des jeunes au Canada. En particulier, la discrimination raciale ou les antécédents de colonisation peuvent limiter les possibilités des jeunes appartenant à une minorité ethnoculturelle de protéger, d'améliorer ou de maintenir leur santé. Par exemple, ces conditions peuvent limiter l'accès à l'information ou aux services en matière de santé, ou à l'éducation et à l'emploi. Une comparaison des données recueillies dans le cadre de l'étude Toronto Teen Survey laisse entendre que les antécédents de colonisation et la discrimination raciale continuent d'alimenter le racisme structurel et social, l'exclusion et la discrimination parmi les collectivités de race noire, africaine et caribéenne. Cela a ensuite des répercussions sur l'accès à l'information et aux services en matière de santé sexuelle et entraîne des taux plus élevés d'infection au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sangNote de bas de page 59. Les jeunes de race noire ayant participé à cette étude étaient les moins susceptibles de déclarer avoir accès aux services de santé sexuelle; ils ont explicitement déterminé que le racisme est un facteur qui les empêche d'obtenir cet accèsNote de bas de page 60.

La recherche signale également les effets de la marginalisation historique des Autochtones au Canada. Des données provenant d'une cohorte de 61 jeunes Autochtones vivant en milieu urbain et rural de l'Ontario ont mis l'accent sur les effets multigénérationnels de la colonisation sur les collectivités, les familles et les parents autochtones. Ces effets comprenaient le manque d'estime de soi, la perte des capacités à prendre soin de soi et des compétences en éducation des enfants, les cycles récurrents de violence et de consommation de drogue, ainsi que la probabilité moins élevée d'utiliser un condom pendant les rapports sexuelsNote de bas de page 61. Les participants ont relié les comportements individuels à risque liés au VIH, tels que la consommation de drogue, au contexte historique de discrimination et de violence issu de la colonisationNote de bas de page 62. Dans une étude distincte portant sur 18 femmes sans abri âgées de 19 à 26 ans à Edmonton qui sortaient du sans-abrisme, neuf participantes qui s'étaient identifiées comme étant Autochtones ont indiqué que les séquelles de la colonisation, du racisme et de la pauvreté avaient eu une incidence majeure sur la surreprésentation des jeunes femmes autochtones dans la rue et sur leur capacité à trouver un logement stable et sûr. Pour les jeunes femmes autochtones, la discrimination et le sexisme passés et présents étaient des facteurs qui ont amplifié leur vulnérabilité au sans-abrisme et à l'infection au VIHNote de bas de page 63. Les participantes ont également noté que leur spiritualité et leurs liens avec la culture autochtone les avaient aidées à survivre dans la rue et à en sortirNote de bas de page 64. Dans ce sens, la culture peut être une source de résilience pour certains groupesNote de bas de page 65. Pour les Autochtones, la résilience améliore la capacité à faire face aux difficultés et à maintenir son identitéNote de bas de page 66. Dans tout le Canada, des initiatives ont été élaborées pour soutenir et renforcer la résilience des jeunes Autochtones et pour leur faire acquérir les compétences nécessaires pour faire face aux conséquences de la colonisation et de la vulnérabilité au VIH.Note de bas de page 67

4.4.1 Immigration

Les expériences de l'immigration peuvent renforcer les difficultés, les obstacles et les possibilités auxquels les jeunes font face dans le domaine de la protection de la santé. Par exemple, pour certains, l'expérience de l'immigration au Canada peut être difficile, car ils doivent apprendre une nouvelle langue, s'adapter à un nouveau statut social et à un nouveau revenu, ou lutter pour trouver un emploi. Les expériences de migration peuvent avoir une incidence sur l'accès aux services de santé, tels que le dépistage ou le traitement du VIH et des autres infections transmissibles sexuellement et par le sang, ou sur la recherche de renseignements sur la santé. Pour certains nouveaux arrivants, la satisfaction des besoins fondamentaux tels que l'alimentation, le logement et les vêtements peut être si difficile que l'obtention de services de santé ou la prise en charge de sa santé ne sont pas prioritaires. D'autres personnes peuvent arriver de pays où la prévention, le dépistage et le traitement du VIH et des autres infections transmissibles sexuellement et par le sang ne sont pas facilement accessibles. Par conséquent, elles peuvent avoir une expérience, des connaissances ou une conscience limitée de ces services et ne pas se sentir suffisamment à l'aise pour chercher à y avoir accès. Note de bas de page 68

Les nouveaux arrivants peuvent également éprouver des difficultés à naviguer entre les normes et les attentes de leur propre culture et celles des autres groupes culturels du Canada. Certains peuvent avoir l'impression qu'ils ont perdu la maîtrise de leur vie ou manquer d'estime de soi, alors que d'autres peuvent avoir l'impression de mieux maîtriser leur corps et leur sexualité dans un nouveau pays. Note de bas de page 69 Les expériences de migration peuvent avoir une incidence sur l'accès au soutien social et à l'information, ce qui entraîne des sentiments d'isolement social ou un manque de connaissances au sujet de l'existence des services de santé offerts.

4.5 Développement sain de l'enfant

Les premières années de vie sont cruciales pour la croissance et le développement des enfants. Des dispensateurs de soins affectueux, un environnement d’apprentissage positif, une bonne alimentation et une interaction sociale avec d’autres enfants contribuent à un développement physique et social précoce qui peut avoir une incidence positive sur la santé et le bien-être tout au long de la vieNote de bas de page 70.

4.5.1 Liens familiaux

Les expériences de la petite enfance et l'environnement familial peuvent avoir des effets positifs sur le développement et la santé tout au long de la vie. En particulier, la présence ou l'absence de soutien familial peut contribuer aux résultats de santé physique et mentale à long terme. De nombreux enfants bénéficient d'une éducation positive par leurs parents, vivent dans une famille fonctionnelle et ont des liens étroits avec leur famille et leur communautéNote de bas de page 71. Les liens familiaux, le fonctionnement de la famille et la qualité des relations entre les jeunes et leurs parents ou leurs gardiens façonnent les normes, les attitudes et les comportements des jeunes et influencent leur vulnérabilité ou leur résilience au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang.

Des données provenant de l'enquête British Columbia Adolescent Health Survey (AHS) de 1992 à 2003 portant sur des jeunes de la septième à la douzième année (N = 72 000) laissent entendre que les liens familiaux représentent un facteur important de protection pour le développement sain des jeunes. Parmi les adolescents, ceux dont les liens familiaux étaient plus étroits étaient moins susceptibles d'avoir eu des rapports sexuels, d'avoir des rapports sexuels avant l'âge de 14 ans ou d'avoir causé une grossesse que leurs camarades du même âge dont les liens familiaux étaient moins étroits. De même, les jeunes femmes dont les liens familiaux étaient plus étroits étaient moins susceptibles d'avoir eu des rapports sexuels, de commencer à avoir des rapports sexuels à un âge précoce et de tomber enceintes que les jeunes femmes du même âge dont les liens familiaux étaient moins étroitsNote de bas de page 72. Des relations positives entre les parents et les enfants pendant les années d'enfance peuvent augmenter la résilience des enfants plus tard dans la vie et faire office de facteur de protection contre les comportements qui compromettent la santé.

4.5.2 Consommation d'alcool ou de drogues durant la grossesse

La consommation d'alcool ou de drogues pendant la grossesse est un autre facteur lié au développement sain de l'enfant, étant donné ses conséquences pour la santé et ses effets nocifs pour la mère et l'enfant. La consommation de substances telles que des drogues injectables pendant la grossesse peut également augmenter la probabilité que la mère contracte le VIH ou l'hépatite C et transmette l'infection à son enfant. Des données provenant de l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes de 2007-2008 ont établi que 5,8 % des mères interrogées avaient consommé de l'alcool pendant leur grossesseNote de bas de page 73. Cette prévalence pourrait atteindre 10,8 %, selon des données provenant de l'Enquête sur l’expérience de la maternité (EEM) au Canada, à laquelle 5 882 mères ont participéNote de bas de page 74. L'état matrimonial, le statut de fumeur, le statut d'immigrant et la réaction à la grossesse se sont également révélés être des corrélats importants de la consommation d'alcool par la mère pendant sa grossesseNote de bas de page 75. Les conséquences initiales de la consommation d'alcool par la mère sur la santé se prolongent jusqu'à l'âge adulte et peuvent comprendre la consommation excessive d'alcool au début de l'âge adulte et une probabilité accrue de dépendance à l'alcoolNote de bas de page 76. Les répercussions de la consommation d'alcool sur la vulnérabilité des jeunes au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang sont bien documentées tout au long du présent rapport.

De même, le tabagisme pendant la grossesse peut provoquer des effets nocifs pour la santé à long terme. En 2007, 10 % des femmes canadiennes âgées de 20 à 44 ans qui avaient été enceintes au cours des cinq années précédentes ont indiqué avoir régulièrement fumé pendant leur grossesse la plus récenteNote de bas de page 77. Des études ont montré que le tabagisme de la mère pendant la grossesse est associé à un risque accru de problèmes comportementaux tels que l'inattention et le trouble d'hyperactivité avec déficit de l'attentionNote de bas de page 78, ainsi qu'à un risque accru à vie de problèmes liés à la consommation d'alcoolNote de bas de page 79.

Les femmes qui consomment de l'alcool, qui fument ou consomment d'autres drogues pendant la grossesse peuvent être victimes de stigmatisation lorsqu'elles cherchent à avoir accès aux services de traitement de la toxicomanie et de soins de santé, notamment les services prénatals.Note de bas de page 80 De plus, les femmes les plus vulnérables à la consommation d'alcool et d'autres drogues pendant la grossesse sont souvent les plus difficiles à atteindre. Le Programme canadien de nutrition prénatale (PCNP) cible tout particulièrement les femmes enceintes à risque qui font face à des circonstances de vie telles que la pauvreté, la grossesse précoce, la consommation d'alcool ou de drogues, la violence familiale, l'isolement géographique et social et l'arrivée récente au CanadaNote de bas de page 81. Une évaluation sommative du programme de 2004 à 2009 a découvert que les participantes qui se sont jointes au programme au début de la grossesse étaient plus susceptibles de diminuer ou de cesser la consommation de cigarettes ou d'alcool, d'adopter des pratiques positives en matière de santé et de connaître des résultats plus sains au moment de la naissanceNote de bas de page 82. Des programmes tels que ceux-là démontrent l'importance qu'il y a à soutenir la santé des femmes enceintes et des femmes qui risquent de tomber enceintes afin de réduire la probabilité qu'elles et leurs enfants soient vulnérables à de mauvais résultats de santé, notamment l'infection au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang.

4.5.3 Sentiment d'appartenance à la collectivité

L'attachement à la collectivité offre aux enfants la possibilité d'acquérir de la confiance en soi, de l'estime de soi et un sentiment de maîtrise émotionnelle, ainsi que de nouer des relations positives avec d'autres personnes.Note de bas de page 83 Un fort sentiment d'appartenance à la collectivité a été associé à une meilleure autoévaluation de la santé générale et mentale.Note de bas de page 84

À l'aide d'un échantillon national représentatif de jeunes Canadiens âgés de 15 à 19 ans, l'Enquête nationale sur la santé de la population a examiné les effets de la participation à la vie communautaire sur les comportements à risqueNote de bas de page 85. Les résultats laissent entendre qu'un contact régulier avec les voisins, la qualité de membre des organisations communautaires et la participation aux services religieux étaient associés à une probabilité moins élevée de tabagisme, de consommation excessive d'alcool, de partenaires sexuels multiples et d'utilisation irrégulière du condomNote de bas de page 86. Les modèles théoriques indiquent qu'un sentiment d'appartenance communautaire forgé par les groupes d'amis, le voisinage, les institutions religieuses, les écoles et les clubs ou les équipes de sport peut avoir une influence sur la prise de décisions saines et les autres comportements chez les jeunes. Il accomplit cela en établissant des normes comportementales et des attitudes favorisant la santé, ainsi qu'en nourrissant un meilleur sentiment de sa propre valeur et d'estime de soiNote de bas de page 87.

4.5.4 Facteurs de stress pendant l'enfance

Le stress joue un rôle important dans le développement des aptitudes dont les enfants ont besoin pour faire face aux situations de la vie. Bien que certains niveaux de stress puissent être positifs, un stress intense et prolongé peut entraîner des effets nocifs pour la santé à court et à long termeNote de bas de page 88. Les jeunes sont très sensibles aux expériences négatives vécues pendant l'enfance, telles que la violence physique ou sexuelle, la dépression des parents et la consommation d'alcool ou de drogue par les parents. Ces expériences peuvent faire intervenir des facteurs de stress à court terme et chronique qui nuisent au développement de l'enfant et mener à la vulnérabilité ou à la résilience au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sangNote de bas de page 89.

De nombreux travaux de recherche illustrent le lien entre les facteurs de stress pendant l'enfance et les résultats de santé plus tard dans la vie. Chez les enfants qui sont victimes de violence sexuelle, physique, émotionnelle ou mentale, les conséquences se prolongent au-delà des premières années de vie. L'expérience de la violence sexuelle pendant l'enfance est souvent reliée à un manque d'estime de soi, aux premiers rapports sexuels à un âge précoce, aux difficultés à discuter de la contraception et des rapports sexuels protégés avec les partenaires sexuels, à la non-utilisation du condom, aux partenaires sexuels multiples, à la grossesse précoce et à des antécédents d'infections transmissibles sexuellementNote de bas de page 90. Les facteurs de stress pendant l'enfance ont également été associés au trouble de stress post-traumatique, à la maladie mentale et aux maladies physiques, notamment les troubles de l'alimentation et la consommation d'alcool et de drogue.Note de bas de page 91 Des données provenant d'un échantillon de plus de 17 000 participants à l'étude Adverse Childhood Experiences Study, une collaboration entre les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) et la clinique Kaiser Permanente’s Health Appraisal Clinic à San Diego, laissent entendre l'existence d'une relation marquée entre les expériences d'événements traumatisants ou violents pendant l'enfance, avant l'âge de 18 ans, et toute une gamme de problèmes de santé et de comportement, tels que la dépression, les tentatives de suicide, l'alcoolisme, le tabagisme et la consommation de drogue, le risque de violence de la part du partenaire amoureux, les partenaires sexuels multiples et les infections transmissibles sexuellementNote de bas de page 92.

Au Canada, certains groupes de jeunes sont plus souvent victimes des facteurs de stress pendant l'enfance. Le Centre canadien de lutte contre les toxicomanies a indiqué que les groupes de jeunes dont la vulnérabilité est accrue (c'est-à-dire les jeunes de la rue, les jeunes en détention, les jeunes appartenant à une minorité sexuelle et à genre variable, les Autochtones et les jeunes qui ont des problèmes de santé mentale) sont plus susceptibles d'avoir été victimes de violence sexuelle et physique, d'autres formes de violence, ainsi que de stigmatisation et de racisme. Il est intéressant de constater que les taux de VIH et d'autres infections transmissibles sexuellement et par le sang sont plus élevés parmi ces groupes que dans l'ensemble de la population des jeunes au Canada.

Des données provenant de l'étude Surveillance accrue des jeunes de la rue étayent la recherche, ce qui laisse entendre que les jeunes de la rue sont touchés de façon disproportionnée par les facteurs de stress pendant l'enfance. Parmi les jeunes qui ont participé au cycle 5 de l'E-SYS, 58,8 % ont déclaré avoir été victimes de violence physique, 15,0 % de violence sexuelle, 65,3 % de violence émotionnelle et 60,7 % de négligenceNote de bas de page 93. L'expérience de la violence émotionnelle, physique ou sexuelle pendant l'enfance est un facteur important dans la décision des jeunes de la rue de quitter la maison Note de bas de page 94, ce qui peut mener à un cycle d'exposition à d'autres facteurs de risque associés au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang. Des données provenant de l'étude At-Risk Youth Study (ARYS), une étude de cohorte portant sur des jeunes de la rue en Colombie-Britannique, laissent entendre que les facteurs de stress tels que la violence émotionnelle et sexuelle pendant l'enfance sont liés au fait de commencer à s'injecter de la drogue et à participer au travail du sexe pour survivre dans cette populationNote de bas de page 95. Des données issues d'un échantillon longitudinal de jeunes Autochtones en Colombie-Britannique, âgés de 14 à 30 ans, qui ont participé au projet Cedar, laissent entendre que les jeunes Autochtones sont également touchés de façon disproportionnée par les facteurs de stress pendant l'enfance. Dans cet échantillon, 43,6 % des 605 participants ont signalé des antécédents de violence sexuelle pendant l'enfanceNote de bas de page 96. Parmi les jeunes composant l'échantillon qui ont déclaré avoir récemment participé au travail du sexe, 76 % avaient des antécédents de violence sexuelleNote de bas de page 97. Les jeunes femmes autochtones qui avaient été victimes de violence sexuelle étaient plus susceptibles de déclarer s'injecter quotidiennement de la cocaïne, être séropositives, avoir été récemment agressées et avoir participé au travail du sexe pour survivre au cours des six mois précédant l'entrevueNote de bas de page 98. Les participants de la cohorte masculine qui avaient été victimes de violence sexuelle ont également signalé des taux plus élevés de VIH, de VHC et d'infections transmissibles sexuellement, ainsi que de participation au travail du sexeNote de bas de page 99.

Les jeunes à orientations sexuelles diverses courent également un risque accru de connaître des facteurs de stress pendant l'enfance. Une étude qualitative menée à Montréal sur 40 Hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes ayant des antécédents de violence sexuelle pendant l'enfance a découvert qu'une telle violence avait une incidence sur la prise de risques sexuels à l'âge adulte et menait à une vulnérabilité accrue au VIH. Plus particulièrement, les participants à l'étude ont indiqué que les expériences de violence sexuelle menaient à une vue négative de l'homosexualité, à un manque d'estime de soi, à une mauvaise aptitude à négocier les relations sexuelles, à la consommation d'alcool ou de drogue, aux problèmes liés au corps et aux pensées suicidaires.

Les expériences vécues pendant la petite enfance ont des répercussions sur le développement de l'enfant et revêtent une importance essentielle pour la santé et le bien-être tout au long de la vie. Bien que de nombreux jeunes trouvent des mécanismes positifs leur permettant de faire face et de surmonter la violence et les autres facteurs de stress pendant l'enfance, ce n'est pas le cas de tous. Les interventions en matière de santé publique qui favorisent la résilience chez les jeunes grâce à des liens étroits avec la famille et la collectivité pourraient contribuer à atténuer les effets des facteurs de stress pendant l'enfance.

4.6 Environnements sociaux

On associe l'appui reçu de la famille, des amis et de la collectivité à une meilleure santé. De tels réseaux de soutien social pourraient se révéler très importants pour aider les gens à résoudre les problèmes et à faire face à l'adversité, ainsi que pour nourrir le sentiment d'être maîtres ou d'avoir une influence sur ses conditions de vieNote de bas de page 100.

L'environnement social est un important déterminant de la santé et du bien-être.Note de bas de page 101 Ce chapitre a déjà décrit dans les grandes lignes les effets protecteurs des liens avec la famille et la collectivité contre les comportements qui augmentent le risque de contracter le VIH et d'autres infections transmissibles sexuellement et par le sang. Les camarades et les environnements scolaires peuvent également influer sur la vulnérabilité et la résilience au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang.

4.6.1 Influences des camarades

Les relations avec les camarades jouent un rôle important dans le comportement sexuel des jeunes. Un examen de la documentation portant sur l'influence des groupes de camarades sur les comportements sexuels a conclu que les jeunes étaient plus susceptibles d'adopter les normes sexuelles de leurs camarades et de s'adonner à des pratiques sexuelles que, selon eux, leurs camarades approuvaientNote de bas de page 102. Cependant, les types de comportements adoptés peuvent dépendre des attitudes prédominantes du réseau de camarades. Par exemple, certains travaux de recherche laissent entendre que les camarades encouragent l'utilisation irrégulière du condomNote de bas de page 103 et les premiers rapports sexuels à un âge précoceNote de bas de page 104, alors que d'autres travaux concluent que les groupes de camarades favorisent les comportements qui améliorent la santéNote de bas de page 105.

D'autres études encore indiquent que les groupes de camarades pourraient avoir un effet indirect sur le comportement sexuel des jeunes. Par exemple, une étude menée dans le nord-ouest du Québec a effectué le suivi de 312 élèves de la maternelle à la septième année, afin d'explorer l'association entre le rejet par les camarades et des facteurs tels que l'âge au moment des premiers rapports sexuels, la délinquance générale et l'estime de soiNote de bas de page 106. L'étude a conclu que le rejet par les camarades était indirectement associé aux premiers rapports sexuels à un âge précoce, en raison de ses liens avec le manque d'estime de soiNote de bas de page 107.

Les jeunes qui vivent dans la rue appartiennent à des réseaux de camarades qui peuvent être une source soit de résilience, soit de vulnérabilité au VIH/sida et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang. Les sections précédentes de ce chapitre ont présenté des données probantes selon lesquelles les jeunes de la rue adoptent des comportements à risque, tels que la consommation de drogue, l'utilisation irrégulière du condom et le travail du sexe, dans une plus large mesure que les jeunes qui ne vivent pas dans la rue. Il est possible que les réseaux de camarades, combinés aux autres conditions sociales, culturelles et structurelles, favorisent l'adoption de comportements à risque par les jeunes de la rue. Parallèlement, la recherche laisse également entendre que les réseaux de camarades des jeunes de la rue offrent une source de soutien et peuvent favoriser la résilience. Les jeunes de la rue accordent une grande importance au soutien qu'ils reçoivent de la part de leurs amis.Note de bas de page 108 Par exemple, dans le cadre d'une étude menée en Alberta parmi des jeunes qui risquaient de devenir sans abri ou qui l'étaient au moment de l'étude, les participants ont déclaré avoir un « sentiment de camaraderie et d'appartenance à la communauté » en compagnie de leurs pairs.Note de bas de page 109 Ils considèrent la culture de la rue en général comme l'élément principal de leur vie sociale et accordent une grande importance au temps passé avec leurs amis.Note de bas de page 110 Des études indiquent que de nombreux jeunes de la rue accordent une grande valeur à leur communauté et ressentent le besoin de former une bande, car ils sont souvent minoritaires dans les refuges. Les amis de la rue sont souvent décrits comme des membres de la famille qui aident les jeunes à faire face aux difficultés de la vie dans la rueNote de bas de page 111. Une étude qualitative portant sur 18 jeunes femmes qui venaient de commencer à sortir de la vie dans la rue a indiqué que la communauté de la rue offre un sentiment de compétence sociale, d'appartenance et de liberté d'être soi-mêmeNote de bas de page 112. En d'autres termes, les relations, les familles et les amitiés de la rue peuvent être des ressources importantes pour la survieNote de bas de page 113.

4.6.2 Environnement scolaire

On a démontré que le sentiment d'appartenance à l'environnement scolaire réduit la probabilité d'avoir plusieurs partenaires sexuels et d'utiliser les condoms de façon irrégulière.Note de bas de page 114 Il a également été établi que cet attachement réduit la probabilité que les jeunes adoptent des comportements qui les font courir le risque de contracter le VIH et d'autres infections transmissibles sexuellement et par le sang.Note de bas de page 115 La qualité des relations avec les enseignants est l'un des aspects de l'environnement scolaire qui pourrait renforcer la résilience aux comportements qui mènent à l'infection au VIH et à d'autres infections transmissibles sexuellement et par le sang. Des niveaux plus élevés de soutien ressenti de la part des enseignants ont été associés à une probabilité moins importante d'avoir eu des rapports sexuels et à une probabilité plus élevée d'utiliser régulièrement un condomNote de bas de page 116.

L'environnement scolaire est un déterminant de la santé particulièrement important pour les jeunes à orientations sexuelles diverses et à genre variable. Les écoles peuvent être particulièrement hostiles pour les jeunes lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres, allosexuels ou en questionnement, qui sont vulnérables à l'isolement et à la discriminationNote de bas de page 117. Les facteurs de stress liés à la violence, à la discrimination et à la stigmatisation homophobes peuvent faire courir aux jeunes à orientations sexuelles diverses et à genre variable un risque accru de problèmes de santé physique, émotionnelle et mentaleNote de bas de page 118. Les liens sociaux et les environnements non discriminatoires offrent un espace sûr aux jeunes à orientations sexuelles diverses pour se développer et adopter des comportements sainsNote de bas de page 119.

Des relations positives avec les enseignants et les camarades d'école peuvent aider les jeunes à orientations sexuelles diverses à surmonter le stress associé à la déclaration ouverte de leur orientation sexuelle et à former leur identité sexuelle. Les enseignants peuvent contribuer à créer des environnements scolaires positifs, non discriminatoires et favorables; jouer un rôle dans la réduction des incidents d'intimidation et de violence contre les jeunes à orientations sexuelles diverses et à genre variableNote de bas de page 120. En outre, les réseaux de soutien entre pairs et de groupes de soutien, tels que les alliances gai-hétéro, peuvent contribuer à réduire l'isolement, l'éloignement et le désespoir. Des écoles sûres et proactives soutiennent la santé, la sécurité et les besoins éducatifs de tous les jeunes. Dans l'ensemble, de forts liens sociaux et communautaires peuvent contribuer à développer et à maintenir la résilience des jeunes au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang.

4.6.3 Soutien aux jeunes qui vivent avec le VIHNote de bas de page ii

La documentation concernant les jeunes vivant avec le VIH est limitée. Des entrevues qualitatives approfondies menées auprès de 34 jeunes séropositifs (âgés de 12 à 24 ans) vivant en Ontario, ont souligné l'importance d'un solide réseau de soutien social pour surmonter les difficultés associées à la vie avec le VIHNote de bas de page 121. Bien des participants faisaient partie de riches réseaux de soutien composés de leurs parents, d'autres membres de la famille et d'amis. Ces jeunes ont également souligné la valeur, pour le soutien social, qu'il y a à connaître d'autres jeunes vivant avec le VIHNote de bas de page 122. De plus, les commentaires des participants concernant les services aux jeunes étaient principalement positifs; les participants ont déclaré avoir des contacts réguliers avec un ou plusieurs fournisseurs de servicesNote de bas de page 123. Les jeunes qui vivent avec le VIH ont parlé de la nécessité de programmes personnalisés et accueillants pour les jeunes, tels que des camps d'été ou des haltes-accueil pour les jeunes, qui les aideraient à construire leur réseau de soutien socialNote de bas de page 124.

La divulgation de la séropositivité dans les relations sexuelles est un problème courant auquel font face les jeunes qui sont nés avec le VIH.Note de bas de page 125 Deux études qualitatives menées à Montréal sur des jeunes (âgés de 10 à 22 ans) ayant contracté le VIH pendant la période périnatale ont signalé que les jeunes craignaient de se faire rejeter, stigmatiser, trahir et mal comprendre s'ils divulguaient leur séropositivité à leurs camarades.Note de bas de page 126 Même s'ils ressentaient le besoin de divulguer leur séropositivité, ils s'inquiétaient de se faire rejeter et ont recensé plusieurs conditions qui doivent être réunies avant qu'ils se sentent suffisamment à l'aise pour divulguer leur séropositivité à un camarade ou à un partenaire. Ces conditions comprenaient une sérieuse relation de confiance avec l'autre personne, le sentiment d'être aimé et le fait d'avoir une relation amoureuseNote de bas de page 127. Cependant, dans bien des cas, la divulgation de la séropositivité s'est en premier lieu adressée à un camarade important, et non à un partenaire amoureux. La divulgation à un partenaire sexuel venait plus tard dans la vieNote de bas de page 128. Les participants ont expliqué qu'ils étaient pleinement conscients de la nécessité de prévenir la transmission du VIH à leur partenaire et qu'ils se sentaient responsables de cette préventionNote de bas de page 129. Des résultats similaires ont été obtenus dans le cadre d'une étude qualitative portant sur 10 enfants (âgés de 9 à 16 ans) qui avaient contracté le VIH pendant la période périnatale (les entrevues comprenaient 11 membres de la famille et 11 fournisseurs de services en Colombie-Britannique)Note de bas de page 130. Certains jeunes s'inquiétaient d'être rejetés ou stigmatisés après avoir divulgué leur séropositivité à un partenaire amoureux. Les résultats laissent entendre que le soutien aux jeunes vivant avec le VIH est important pendant leur période de transition vers l'âge adulteNote de bas de page 131.

4.7 Santé mentale et maladie mentale

La santé mentale est la « capacité que nous avons tous de ressentir, de penser et d’agir de manière à améliorer notre aptitude à profiter de la vie et à relever les défis auxquels nous sommes confrontés. Il s’agit d’un sentiment positif de bien-être affectif et spirituel qui reconnaît l’importance de la culture, de l’équité, de la justice sociale, des interactions entre individus et de la dignité personnelle. »Note de bas de page 132

4.7.1 Santé mentale

La santé mentale est un aspect important de la santé et du bien-être en général. Le niveau d'estime de soi, l'auto-efficacité et la satisfaction générale de la vie sont des facteurs qui permettent de prédire chez les jeunes les comportements qui augmentent le risque de contracter le VIH et les autres infections transmissibles sexuellement et par le sang.

Il a été démontré que le manque d'estime de soi a une influence sur le comportement sexuel à risque, y compris l'utilisation irrégulière du condomNote de bas de page 133, ainsi que sur l'utilisation de drogues injectables. Par exemple, des données provenant d'une étude de cohorte de 2008 portant sur des jeunes de la rue âgés de 14 à 24 ans à New York et à Toronto laissent entendre que les jeunes qui signalaient des niveaux d'estime de soi plus élevés déclaraient également avoir une meilleure santé et consommer moins d'alcool et de drogue que les jeunes qui manquaient d'estime de soiNote de bas de page 134. Le manque d'estime de soi prenait sa source dans l'exclusion sociale, la marginalisation et la privation de ressourcesNote de bas de page 135. Les résultats de l'étude laissent entendre que l'estime de soi joue un rôle de protection important contre la consommation et l'abus d'alcool et de drogueNote de bas de page 136. De même, dans un échantillon de jeunes de la rue provenant de tout le Canada, les participants qui manquaient d'estime de soi couraient un risque plus élevé de se retrouver dans la rue et étaient plus vulnérables à la consommation de drogue, au travail du sexe et aux autres comportements qui augmentent la vulnérabilité au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sangNote de bas de page 137. Des études ont montré que l'auto-efficacité (c'est-à-dire la mesure de sa propre capacité à effectuer des tâches et à atteindre des objectifs) permet de prédire les facteurs de risque associés au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang, y compris l'utilisation irrégulière du condomNote de bas de page 138. Par exemple, une étude portant sur les jeunes Autochtones à Regina, en Saskatchewan, a révélé que les jeunes dont l'auto-efficacité était plus élevée étaient plus susceptibles d'utiliser un condomNote de bas de page 139.

4.7.2 Maladie mentale

Les jeunes peuvent rencontrer des difficultés et vivre des événements marquants qui augmentent le stress et mènent à la dépression, à l'anxiété, au trouble de stress post-traumatique et au suicide. La maladie mentale augmente à son tour la vulnérabilité au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sangNote de bas de page 140. Le lien entre la maladie mentale et les comportements à risque est particulièrement prononcé chez les jeunes qui sont touchés de façon disproportionnée par les facteurs de stress pendant l'enfance ainsi que par la stigmatisation et la discrimination, tels que les jeunes à orientations sexuelles diverses et à genre variable, les jeunes immigrants et nouveaux arrivants au Canada, ainsi que les jeunes appartenant à une minorité ethnoculturelle. Par exemple, des données recueillies auprès de jeunes sur une période de trois ans ont révélé que les risques de comportement suicidaire ou de maladie mentale étaient les plus fortement associés aux identités sexuelles lesbiennes, gaies ou bisexuellesNote de bas de page 141. Les immigrants et les nouveaux arrivants au Canada courent également un risque de maladie mentale en raison du stress physique, émotionnel, social et financier associé à l'établissement dans un nouveau pays. Les facteurs tels que l'apprentissage d'une nouvelle langue, le sous-emploi, le faible statut socio-économique, l'éloignement de la famille et le contexte culturel peuvent également mener au stress, à la dépression ou à l'anxiété. Note de bas de page 142

La maladie mentale est également un déterminant important de la santé chez les jeunes qui prennent en charge une infection transmise sexuellement et par le sang chronique, telle que le VIH, l'hépatite B ou le virus de l'hépatite C. Les personnes qui vivaient avec ces troubles médicaux couraient deux fois plus de risques d'être atteintes de dépression et d'anxiété que la population générale.Note de bas de page 143 Parallèlement, la dépression et les autres maladies mentales peuvent contrecarrer la capacité des personnes qui vivent avec une maladie chronique de prendre leurs médicaments comme ils leur ont été prescrits, de faire de l'exercice physique, de manger convenablement et de communiquer avec leur famille, leurs amis et les fournisseurs de services de santéNote de bas de page 144. En outre, la stigmatisation associée à la maladie mentale peut décourager les jeunes de chercher à obtenir des soins et du soutien et leur faire ressentir de la honte ou entraîner des mécanismes d'adaptation négatifsNote de bas de page 145.

À l'instar de la vulnérabilité au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang, la santé mentale et la maladie mentale reçoivent l'influence de plusieurs facteurs dans un contexte social plus large. Pour réduire la vulnérabilité des populations de jeunes au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang, il est important d'aborder ces facteurs. La documentation laisse entendre que la promotion d'une santé mentale positive chez les jeunes (p. ex. estime de soi, auto-efficacité, sentiment de sa propre valeur, satisfaction de la vie) présente des avantages non seulement du point de vue de la prévention de la maladie mentale, mais également de la protection contre le VIH et les autres infections transmissibles sexuellement et par le sang.

4.8 Environnements physiques

4.8.1 Instabilité de logement, sans-abrisme et conditions de logement

Pour certains jeunes, il peut être difficile de trouver un endroit sûr et stable pour vivre. Les possibilités de logement sûres et abordables sont rares pour les jeunes qui n'ont qu'un revenu minimalNote de bas de page 146. De même, les jeunes de la rue qui quittent la rue rencontrent des difficultés à trouver des conditions de logement abordables, sûres et en bon étatNote de bas de page 147.De plus, il se peut que les jeunes se heurtent à la discrimination de la part des propriétaires et n'aient pas accès aux références associées aux immeubles locatifs précédents ou ne puissent pas produire certains modes de paiement comme les chèques certifiésNote de bas de page 148. Les études portant sur les jeunes de la rue au Canada ont signalé de multiples obstacles à la découverte d'un logement abordable, subventionné et adéquatNote de bas de page 149. Dans le cadre d'une étude portant sur cette population, les participants ont souligné les mauvaises conditions des appartements abordables, comme le manque de propreté, le délabrement et la situation dans des quartiers mal desservisNote de bas de page 150, et ont indiqué qu'ils préféreraient retourner dans la rue ou dans les refuges pour sans-abrisNote de bas de page 151.

Outre l'instabilité du logement, de nombreux jeunes de la rue connaissent un sans-abrisme caché, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas de logement permanent, mais utilisent divers types de logements transitoires. Parmi les jeunes de la rue ayant participé à l'étude Surveillance accrue des jeunes de la rue, 38,8 % ont indiqué qu'ils dormiraient dans un refuge ou un centre pour itinérants cette nuit-là, 19,6 % ont indiqué qu'ils rentreraient dans leur propre logement, 14,2 % se rendraient chez un parent, 11,6 % dormiraient chez un ami ou un partenaire et près de 10 % dormiraient dans la rueNote de bas de page 152. Les autres groupes de jeunes vulnérables, notamment les jeunes qui utilisent des drogues injectables, connaissaient également l'instabilité du logement. Parmi les jeunes qui ont participé à l'étude I-Track (de 2005 à 2008), plus de la moitié des jeunes hommes et des jeunes femmes avaient vécu dans des conditions de logement stable et instable au cours des six mois précédents (52,1 % de jeunes hommes et 56,3 % de jeunes femmes)Note de bas de page 153.

La recherche indique également que le manque de logements abordables dans les quartiers de la classe moyenne éloigne les jeunes de la rue des quartiers sûrs et les mène dans des zones défavorisées.Note de bas de page 154 Dans les quartiers défavorisés, les jeunes sont plus susceptibles de se retrouver avec des camarades qui utilisent des drogues injectables ou ont adopté d'autres comportements à risque; ils peuvent avoir un accès plus limité aux services ou à l'information en matière de santé. Le fait de vivre dans la rue dans un quartier où le monde de la drogue est au premier plan peut augmenter la vulnérabilité à la consommation de drogue, à l'injection de drogues et au travail du sexe pour survivre, ce qui accroît le risque d'exposition au VIHNote de bas de page 155.

L'environnement de la rue peut également avoir une influence sur la capacité des jeunes de la rue à s'injecter de la drogue de façon sécuritaire. Une étude menée à Montréal, portant sur 39 jeunes de la rue atteints du virus de l'hépatite C qui s'injectaient de la drogue, a examiné l'incidence de la vie dans la rue sur les pratiques d'injection sécuritairesNote de bas de page 156. Les jeunes qui utilisent des drogues injectables et n'ont pas de logement stable et sûr peuvent être forcés de s'injecter de la drogue dans la rue, dans des conditions précaires, afin d'éviter de se faire prendre par les autorités d'application de la loiNote de bas de page 157. Dans ces circonstances, il peut devenir un défi d'utiliser un matériel d'injection propreNote de bas de page 158. Des résultats similaires se sont avérés dans une cohorte de jeunes de la rue à Vancouver qui ont déclaré avoir utilisé des drogues injectables au cours des six mois précédentsNote de bas de page 159. Environ trois quarts d'entre eux (76,5 %) ont indiqué s'être injecté de la drogue en public au moins une fois, et 27,2 % ont indiqué toujours s'injecter de la drogue en publicNote de bas de page 160. Les jeunes ayant participé à l'étude ont déclaré qu'ils s'injectaient de la drogue le plus souvent dans la rue (74,7 %), dans les toilettes publiques (40,7 %), sur les terrains de stationnement (37,7 %) et dans les parcs (36,4 %)Note de bas de page 161. Comme il est souvent impossible de se procurer du matériel propre dans ces conditions, l'injection en public peut augmenter le risque de contracter le VIH, le virus de l'hépatite C et d'autres infections associées à l'injectionNote de bas de page 162. En outre, la vie dans la rue ou dans des conditions instables peut faire obstacle à l'accès aux soins de santé et à la prise des médicaments tel que prescritsNote de bas de page 163. L'un des obstacles de cette nature serait l'absence d'un lieu physique où ranger ses médicamentsNote de bas de page 164.

L'accès à des conditions de vie stables, adéquates et favorables est également une préoccupation des jeunes qui vivent dans des établissements de soins de longue durée. Les résultats du projet Youth, Disability, HIV Vulnerability & Prevention Community-Based Participatory Research Project dans la région du Grand Toronto ont révélé que les restrictions physiques associées aux établissements de soins limitaient la possibilité de se livrer à des activités sexuelles. Par conséquent, les jeunes ont développé des stratégies pour avoir des rapports sexuels dans des lieux peu sûrs et inconfortables, tels que des bains publics et en public (p. ex. dans la rue, dans les parcs). La recherche laisse entendre que l'utilisation du condom dans ces lieux est moins probableNote de bas de page 165.

Des données provenant d'une étude de cohorte canadienne portant sur 4 000 jeunes sexuellement actifs âgés de 15 à 19 ans ont également permis de découvrir que la taille du ménage était associée à la non-utilisation du condom au cours des rapports sexuels les plus récents.Note de bas de page 166 Alors que le fait de vivre dans un ménage composé d'un grand nombre de membres était un facteur de risque de non-utilisation du condom, le fait de vivre dans un grand logement contenant plusieurs pièces était un facteur de protection. Les auteurs de l'étude suggèrent que la perte de l'intimité pourrait favoriser les activités sexuelles dans d'autres endroits où la supervision parentale et l'accès aux condoms sont limitésNote de bas de page 167. Cette étude souligne le rôle important que joue l'environnement physique dans la capacité des jeunes à atténuer les risques à caractère sexuel et à avoir des rapports sexuels protégésNote de bas de page 168.

4.8.2 Les jeunes et le système de justice pénale

Il n'existe qu'une recherche limitée sur l'incidence de l'incarcération sur la vulnérabilité des jeunes au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang. Les taux de consommation de drogue (injectable et non injectable) parmi les jeunes détenus laissent entendre qu'il est possible de devenir infecté pendant l'incarcération. Une étude portant sur 417 jeunes (âgés de 14 à 19 ans) en détention en Colombie-Britannique a signalé une consommation importante de drogues non injectables parmi les participantsNote de bas de page 169. Presque tous les jeunes (98 %) ont indiqué avoir utilisé de la marijuana, plus de 80 % avaient consommé des champignons ou de l'ecstasy et 72 % avaient pris de la cocaïne. Même si le taux d'utilisation de drogues injectables était inférieur à 8 %, l'étude a noté que cette population de jeunes incarcérés pourrait risquer de passer aux drogues injectables à l'avenirNote de bas de page 170.

Les difficultés et les obstacles rencontrés par les jeunes qui sortent de prison peuvent également créer des conditions qui les rendent plus vulnérables au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang. Par exemple, ils peuvent éprouver des difficultés à trouver un emploi, avoir un revenu minimal pour pourvoir à leurs besoins de base et faire face à la stigmatisation et à la discrimination en raison de leur incarcération. Les antécédents de détention ont été reliés à l'instabilité du logement et au sans-abrismeNote de bas de page 171. Par exemple, 58,8 % des jeunes de la rue ayant participé à l'étude Surveillance accrue des jeunes de la rue ont indiqué s'être retrouvés dans un établissement de détention, un centre de détention pour jeunes ou une prison, pour une nuit ou pendant plus longtempsNote de bas de page 172. Parmi les jeunes de la rue de la cohorte ARYS, 80,5 % ont indiqué avoir été incarcérésNote de bas de page 173. Parmi les jeunes de l'étude I-Track, 16,3 % ont déclaré avoir été incarcérés au cours des six mois précédentsNote de bas de page 174.

Les difficultés rencontrées pour pourvoir aux besoins de base à la sortie de prison peuvent mener à des mécanismes d'adaptation négatifs, tels que l'utilisation de drogues injectables, les rapports sexuels non protégés et le travail du sexe. Les résultats d'une étude portant sur des jeunes de la rue à Vancouver laissent entendre l'existence d'une relation marquée entre l'incarcération et l'utilisation de méthamphétamineNote de bas de page 175. Parallèlement, les antécédents d'incarcération peuvent également avoir un effet protecteur et favoriser des comportements de recherche d'aide au moment de la libération. Par exemple, parmi les jeunes de la rue, on a déterminé qu'une incarcération antérieure est associée à un taux de participation plus élevé à une forme quelconque de traitement de la toxicomanieNote de bas de page 176.

4.9 Habitudes de vie

Les habitudes de vie et les compétences d'adaptation personnelles désignent les mesures que l'on peut prendre pour se protéger des maladies et favoriser l'autogestion de sa santé, faire face aux défis, acquérir de la confiance en soi, résoudre des problèmes et faire des choix qui améliorent la santé. Les définitions du « mode de vie » ont trait non seulement aux choix personnels, mais aussi à l'influence des facteurs sociaux, économiques et environnementaux sur les décisions que prennent les personnes à propos de leur santé. On reconnaît de plus en plus que les « choix » personnels relatifs au mode de vie sont grandement influencés par les conditions socio-économiques dans lesquelles les personnes vivent, apprennent, travaillent et s'amusentNote de bas de page 177.

4.9.1 Éducation en matière de santé sexuelle

L'éducation en matière de santé sexuelle est un outil essentiel dans la prévention du VIH et des autres infections transmissibles sexuellement et par le sang, car il apporte des renseignements, de la motivation et des compétences comportementales qui favorisent la santé sexuelle et permettent d'éviter les résultats de santé négatifs. Les Lignes directrices canadiennes pour l'éducation en matière de santé sexuelle déclarent ce qui suit :

L’éducation en matière de santé sexuelle devrait être offerte à tous les Canadiens comme un élément important des programmes et des services de promotion de la santé. Tous les Canadiens ont droit à une éducation en matière de santé sexuelle qui correspond à leurs besoins. Des populations diverses, comme les [lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, bispirituelles, allosexuelles et en questionnement], les personnes âgées, les personnes qui ont un handicap [physique ou développemental] et les personnes qui sont désavantagées sur le plan socio-économique, comme les jeunes de la rue, n’ont souvent pas accès à l’information et à une éducation qui répondent à leurs besoins particuliers.Note de bas de page 178

Il existe de nombreux véhicules structurés et non structurés pour fournir de l'éducation en matière de santé sexuelle. Les écoles jouent un rôle clé dans la prestation de cette éducation, mais les capacités varient dans l'ensemble du Canada, selon le programme d'études provincial ou territorial, le caractère public, privé ou confessionnel du programme d'études et la formation des enseignants. La vaste majorité (92 %) des jeunes participants à l'étude Toronto Teen Survey nés au Canada ont déclaré qu'ils avaient reçu une éducation en matière de santé sexuelle, sous une forme ou une autreNote de bas de page 179. Cependant, les jeunes nouveaux arrivants (au Canada depuis trois ans ou moins) affichaient des taux d'éducation en matière de santé sexuelle significativement plus faibles à l'âge de 18 ansNote de bas de page 180. Parmi eux, 78 % ont indiqué qu'ils avaient entendu parler du VIH; cependant, le VIH/sida était également l'une des trois priorités en matière de santé sexuelle au sujet de laquelle les jeunes désiraient s'informer davantageNote de bas de page 181. Les jeunes qui participaient à cette étude ont déclaré qu'ils désiraient recevoir des renseignements au sujet des relations saines, du plaisir, de la grossesse, de l'orientation sexuelle et de la prévention du VIH/sida et des infections transmissibles sexuellement et par le sang. Ils ont également dit préférer obtenir ces renseignements auprès de professionnels tels que des médecins, des infirmières et des éducateurs en santé sexuelleNote de bas de page 182.

Les connaissances au sujet du VIH et des autres infections transmissibles sexuellement et par le sang ont toujours été assez élevées parmi les jeunes au Canada.Note de bas de page 183 Par exemple, les résultats de l'étude M-Track ont révélé que les hommes gais, bisexuels et bispirituels et les autres Hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes âgés de 15 à 24 ans avaient un niveau de connaissances relativement élevé au sujet du VIH.Note de bas de page 184 La plupart des participants savaient que les relations sexuelles avec un seul partenaire monogame non infecté peuvent réduire le risque de transmission du VIH (~84 %), et qu'il est possible de se protéger contre le VIH en utilisant un condom correctement à chaque rapport sexuel anal (~80 %).Note de bas de page 185 Presque tous les jeunes ont correctement indiqué qu'une personne qui a l'air en bonne santé peut être infectée par le VIH (~93 %), alors qu'environ 75 % des jeunes savaient qu'ils ne manifesteraient pas nécessairement des symptômes s'ils contractaient une infection transmise sexuellement et par le sang.Note de bas de page 186 Néanmoins, les connaissances au sujet de la santé sexuelle, du VIH et des autres infections transmissibles sexuellement et par le sang pourraient être en déclin. Des données issues de l'étude The Canadian Youth, Sexual Health and HIV/AIDS Study ont révélé que les connaissances au sujet de la santé sexuelle et du VIH ont chuté parmi les jeunes âgés de 12 à 16 ans depuis 1989; par exemple, l'étude a signalé qu'une grande proportion de jeunes de ce groupe d'âge pensaient que l'on pouvait guérir du VIHNote de bas de page 187. Les résultats de l'étude en ligne de l'Association canadienne pour la santé des adolescents portant sur plus de 1 000 jeunes âgés de 14 à 17 ans ont également mis en relief un manque de connaissances au sujet des infections transmissibles sexuellement et par le sang. Les obstacles à l'accès aux renseignements exacts en matière de santé sexuelle pourraient expliquer ces faibles niveaux de connaissancesNote de bas de page 188. Par exemple, 69 % des jeunes ont déclaré dans l'étude en ligne qu'ils ne pouvaient pas trouver des renseignements sur la santé sexuelle et 62 % ont dit qu'ils avaient rencontré d'autres obstacles lorsqu'ils avaient essayé d'obtenir de tels renseignementsNote de bas de page 189.

Une éducation en matière de santé sexuelle efficace et généralisée, qui répond aux besoins divers de tous, est essentielle pour aider les jeunes à éviter l'infection au VIH et les autres infections transmissibles sexuellement et par le sang. Elle permet de s'assurer que les jeunes ont accès à des renseignements dépourvus de jugement, afin de prendre des décisions éclairées au sujet de leur propre santé. Elle peut également augmenter la capacité des jeunes à renforcer leur résilience aux facteurs de risque sociaux, économiques et culturels qui menacent leur santé sexuelle.

4.9.2 Perceptions du risque associé au VIH et au dépistage du VIH

Les jeunes ont différentes perceptions de leur risque personnel de contracter le VIH. Même si les perceptions de la maladie peuvent être façonnées par les valeurs culturelles, elles peuvent également être influencées par des facteurs tels que le niveau de revenu, les connaissances au sujet de la maladie, ainsi que la discrimination et la stigmatisation associées au VIH. Pour certains, le VIH est une maladie qui touche les autres, pas eux. D'un autre côté, certains jeunes ont une vision fataliste de leur santé et de leur avenirNote de bas de page 190. Par exemple, dans une étude portant sur des jeunes Autochtones, les participants ont indiqué éprouver de l'accablement et un « sentiment général de désespoir face à l'avenir »Note de bas de page 191 qui incluait le risque d'infection au VIH. D'autres études ont révélé que certains jeunes Autochtones considèrent le VIH comme un problème communautaireNote de bas de page 192 et sont fréquemment en contact avec une personne touchée ou infectée par le VIHNote de bas de page 193. La sensibilisation au VIH et les discussions continues à ce sujet parmi les jeunes Autochtones dans leur collectivité pourraient être un facteur positif de résilience.

Les jeunes hommes et les jeunes femmes vulnérables à l'infection au VIH ont différentes réactions au dépistage de l'infection. Par exemple, certains désirent savoir s'ils sont séropositifs, alors que d'autres ne le veulent pas et évitent le dépistage. Les raisons pour lesquelles les jeunes décident de subir un dépistage sont diverses. La crainte d'un résultat positif au test du VIH est fréquemment citée par les jeunes comme un motif de ne pas subir de dépistageNote de bas de page 194. En outre, la stigmatisation associée à un résultat positif au test du VIH peut décourager les jeunes du dépistage.

Les perceptions du risque personnel de contracter le VIH peuvent avoir une influence sur les pratiques subséquentes de dépistage du VIH. Parmi les participants à l'étude M-Track qui ne s'étaient pas déclarés séropositifs ou qui n'avaient jamais subi de dépistage du VIH, la raison la plus fréquente du non-dépistage était la perception qu'ils ne couraient qu'un faible risque (perception signalée par environ 48 % des jeunes)Note de bas de page 195. Environ 28 % des jeunes ont également déclaré qu'ils craignaient de subir un dépistage; une proportion approximativement égale de jeunes ont déclaré qu'ils savaient déjà qu'ils étaient séropositifs (27 %)Note de bas de page 196. Le volet ontarien de l'étude M-Track, l'étude Lambda (N = 2 438), a mis en lumière des résultats similaires sur le dépistage au VIH parmi les jeunes gais et bisexuelsNote de bas de page 197. Les plus jeunes participants (âgés de 16 à 19 ans) affichaient le taux de dépistage le plus faible; 46,2 % d'entre eux n'avaient jamais subi de dépistageNote de bas de page 198. Environ un quart (25,9 %) des jeunes âgés de 20 à 24 ans n'avaient jamais subi de dépistage, ce qui représente une augmentation des taux de dépistage au fil du temps.Note de bas de page 199 L'enquête de la Colombie-Britannique ManCount (N = 1 139), également associée à l'étude M-Track, a découvert que 23 % des participants gais, bisexuels et bispirituels et des autres Hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes âgés de moins de 30 ans n'avaient jamais subi de dépistage du VIHNote de bas de page 200.

Dans l'enquête I-Track, une proportion élevée de participants ont déclaré avoir subi un dépistage du VIH (81,0 %) et du virus de l'hépatite C (79,3 %).Note de bas de page 201 Parmi les participants qui n'avaient jamais subi de dépistage du VIH, les raisons les plus fréquemment citées comprenaient : « Je n'y ai jamais pensé » (22,6 %), « Je ne cours qu'un faible risque d'infection au VIH » (14,5 %), « Je ne pourrais pas faire face si je savais que j'étais infecté » (12,9 %), « J'avais peur d'être victime de discrimination » (9,7 %), et « Cela pourrait avoir des répercussions sur mes relations » (9,7 %).Note de bas de page 202 Parmi les participants de la rue à l'étude Surveillance accrue des jeunes de la rue, plus de 70 % percevaient leur risque de contracter le VIH, une infection transmissible sexuellement ou une hépatite virale comme étant nul ou faibleNote de bas de page 203. Cependant, une grande proportion a déclaré avoir déjà subi un dépistage du VIH (81,3 %), du virus de l'hépatite C (76,0 %), de la chlamydia (75,1 %) et de la gonorrhée (73,6 %)Note de bas de page 204.

4.10 Accès aux services et à l'information en matière de santé

Les services de santé, en particulier ceux conçus pour entretenir et favoriser la santé, pour prévenir la maladie et pour restaurer la santé et les diverses fonctions de l'homme contribuent à la santé de la population. L'ensemble des soins offerts par ces services de santé englobe le traitement et la prévention secondaireNote de bas de page 205.

4.10.1 Situation géographique et environnement physique

Certains jeunes ont des difficultés à accéder aux services de santé en raison de leur situation géographique ou de leur environnement physique. Les jeunes qui vivent dans des collectivités rurales et isolées rencontrent davantage de difficultés à avoir accès à un médecin de famille et aux services de dépistage des infections transmissibles sexuellement et par le sang/du VIH que les jeunes qui vivent dans des centres urbains, ce qui peut contribuer aux inégalités en matière de santé entre les jeunes en milieu rural et les jeunes en milieu urbainNote de bas de page 206. Des études menées auprès de jeunes et de travailleurs de la santé dans des collectivités éloignées de la Colombie-Britannique ont recensé plusieurs obstacles structurels aux services de santé pour cette populationNote de bas de page 207. Ces obstacles comprenaient l'inaccessibilité géographique des cliniques de santé, les heures d'ouverture limitées (p. ex. pendant l'école ou les heures de travail) et le manque de transports en commun. Ces obstacles sont encore renforcés pour les jeunes qui dépendent de leurs parents ou de leurs gardiens pour accéder aux cliniques.

L'emplacement physique peut également constituer un obstacle. Par exemple, il se peut que les jeunes de la rue n'aient pas de papier d'identité, ne puissent pas se déplacer pour obtenir des services ou ne puissent pas les recevoir pendant les heures d'ouverture normales. Une étude menée à Calgary a découvert que les jeunes de la rue avaient tendance à utiliser plutôt les services de santé d'urgence, tels que les salles d'urgence des hôpitaux et les cliniques sans rendez-vous, que les services de préventionNote de bas de page 208. Les jeunes de la rue qui n'y avaient jamais vécu étaient plus susceptibles de rechercher l'accès aux services de prévention, tels que les médecins de famille, alors que les jeunes qui vivaient dans la rue étaient plus susceptibles de se rendre à une clinique mobile pendant les heures d'ouverture non standardNote de bas de page 209.

4.10.2 Accès aux services de santé confidentiels

Les préoccupations concernant la confidentialité sont un thème constant dans la documentation sur les obstacles à l'accès aux services de santé chez les jeunes. Les jeunes craignent que leurs pratiques sexuelles et leurs résultats de santé sexuelle soient divulgués aux parents et qu'ils soient jugés par les professionnels de la santé, leurs amis et leurs collectivitésNote de bas de page 210.

Par conséquent, les jeunes peuvent s'inquiéter que leurs résultats au test du VIH et des autres infections transmissibles sexuellement et par le sang soient divulgués à leur famille, à leurs amis et à leur collectivitéNote de bas de page 211, ce qui les pousse à se déplacer dans un autre quartier ou une autre collectivité pour protéger leur confidentialité. Cependant, il n'est pas toujours possible d'aller ailleurs, en particulier pour les jeunes qui vivent dans des régions rurales ou éloignées. Dans une étude portant sur les jeunes, vivant en Colombie-Britannique, les préoccupations concernant la confidentialité et l'anonymat étaient plus vives parmi les jeunes qui vivaient dans les collectivités rurales du Nord que parmi les jeunes qui vivaient en milieu urbainNote de bas de page 212.

La stigmatisation associée au VIH et aux infections transmissibles sexuellement et par le sang aggrave les préoccupations liées à la confidentialité chez les jeunes qui vivent avec une infection ou qui risquent de la contracter. La recherche laisse entendre que les jeunes pourraient se fier de plus en plus à d'autres sources de services et d'information en matière de santé, notamment les ressources sur Internet. Les fournisseurs de services de santé ont commencé à étudier le potentiel des services de santé en ligne pour tenter de résoudre les questions de confidentialité. Par exemple, Santé publique Ottawa, une autorité sanitaire locale en Ontario, a récemment étudié l'utilisation d'Internet pour fournir aux jeunes des formulaires de demande d'analyse en laboratoire pour le dépistage du VIH et d'autres infections transmissibles sexuellement et par le sang sans rendez-vous chez le médecin. Le nombre de téléchargements du formulaire de demande d'analyse et l'augmentation du nombre d'analyses en laboratoire au cours de la campagne attestent de sa popularité parmi les jeunesNote de bas de page 213. Cependant, de tels services pourraient ne pas être suffisamment établis pour répondre pleinement aux préoccupations des jeunes en matière de confidentialité. Des travaux de recherche qualitative auprès de jeunes Ontariens séropositifs âgés de 12 à 24 ans ont étudié l'utilisation d'Internet comme voie de promotion et d'information sur la santéNote de bas de page 214. Bien que les participants aient affiché des taux élevés d'accès sur Internet, d'utilisation et d'intérêt, peu d'entre eux ont utilisé Internet pour chercher à obtenir des renseignements ou des services en matière de santéNote de bas de page 215. Les raisons citées comprenaient les préoccupations liées à la confidentialité lors de la consultation des sites Web sur le VIHNote de bas de page 216. Bien que les participants n'aient pas utilisé Internet pour obtenir de l'information en matière de santé, ils étaient enthousiastes à l'idée de la création d'un site Web par des jeunes séropositifs en vue de promouvoir la santé et le réseautage socialNote de bas de page 217.

4.10.3 Discrimination

La stigmatisation et la discrimination sont d'autres facteurs qui ont des répercussions sur l'accès des jeunes aux services et à l'information en matière de santé. Les résultats de l'étude Toronto Teen Survey ont montré que de nombreux jeunes à orientations sexuelles diverses et à genre variable ont vécu des expériences négatives lorsqu'ils ont cherché à avoir accès aux services de santé sexuelle, principalement parce qu'ils sentaient que les fournisseurs de services les stigmatisaient et n'étaient pas conscients de leurs besoins particuliersNote de bas de page 218. Par exemple, les jeunes hommes homosexuels ayant participé à l'étude ont indiqué avoir connu des expériences négatives avec le système de soins de santé, des lacunes importantes dans les services de santé sexuelle adaptés aux hommes, un manque d'éducation complète en matière de santé sexuelle à l'école, de la peur et de la stigmatisation associées aux infections transmissibles sexuellement et par le sang et au VIH/sida, ainsi que les répercussions de l'homophobie et des normes sexuellesNote de bas de page 219.

La discrimination en fonction de la race et du groupe ethnique peut également décourager les jeunes de chercher à obtenir des services de santé. Par exemple, les résultats de l'étude Toronto Teen Survey ont indiqué que les jeunes de race noire sont victimes de racisme lorsqu'ils tentent d'obtenir des services de santé sexuelleNote de bas de page 220. Cette population a également signalé les taux les plus faibles (34 %) de fréquentation des cliniques de santé sexuelleNote de bas de page 221. Les jeunes originaires d'Asie ou les jeunes Autochtones ont également indiqué être moins susceptibles de se rendre dans les centres de services de santé pour obtenir des informations sur la santé sexuelle ou pour subir un dépistage, alors que les jeunes de race blanche ont indiqué être plus susceptibles de le faireNote de bas de page 222. Parmi les participants autochtones d'une cohorte communautaire, 12,3 % des jeunes ont indiqué qu'ils avaient connu de la peur, de la discrimination et de l'évitement pendant leur expérience de dépistageNote de bas de page 223.

Tout comme l'identité personnelle est composée de nombreux éléments (p. ex. le sexe, l'âge, l'identité sexuelle, la race, le groupe ethnique, les aptitudes), la discrimination peut également être subie à différents niveaux. Ces couches multiples de la discrimination fondée sur la race, le groupe ethnique, la confession, l'âge, le statut socio-économique, les aptitudes, le sexe ou l'identité sexuelle peuvent renforcer les obstacles à l'accès aux services et à l'information en matière de santé concernant le VIH et les autres infections transmissibles sexuellement et par le sangNote de bas de page 224. Le projet Teens Resisting Urban Trans/Homophobia (TRUTH) a examiné l'incidence des diverses formes d'exclusion sociale, telles que l'homophobie et l'hétérosexisme, sur les jeunes nouveaux arrivants lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres et allosexuels à TorontoNote de bas de page 225. Les résultats préliminaires ont indiqué que ces jeunes font l'objet de multiples couches de discrimination sous  forme de l'homophobie, de la transphobie et du racisme qui, à leur tour, dressent des obstacles devant l'accès aux services et à l'information en matière de santéNote de bas de page 226.

La stigmatisation et la discrimination, notamment l'homophobie et le racisme, peuvent conduire à des expériences négatives pour les jeunes lorsqu'ils accèdent les services et les soins.Note de bas de page 227 La réduction de l'accès aux services peut contribuer encore plus à leur vulnérabilité aux infections transmissibles sexuellement et par le sang et au VIH.Note de bas de page 228 De nombreux fournisseurs de services reconnaissent la nécessité de services de counseling et de services de santé sexuelle qui répondent aux besoins particuliers des jeunes (qui abordent notamment la discrimination structurelle) et qui soutiennent la diversité grâce à des programmes favorisant l'intégration culturelle.

4.11 Résumé

Les inégalités des taux de VIH et d'autres infections transmissibles sexuellement et par le sang sont influencées de façon complexe par des déterminants généraux de la santé sociaux, culturels, économiques et structurels qui ont une répercussion sur l'état de santé et le bien-être des jeunes tout au long de leur vie. Ce chapitre a donné une vue d'ensemble de la façon dont ces déterminants de la santé créent des inégalités parmi les jeunes, rendant certains groupes de jeunes plus vulnérables au VIH et aux autres infections transmissibles sexuellement et par le sang. Il est important que les programmes et les interventions visant à la prévention et à la maîtrise de ces maladies déterminent et abordent les déterminants généraux de la vulnérabilité chez les jeunes. Les chapitres 5 et 6 donnent un aperçu de la stratégie actuelle de lutte contre le VIH et les autres infections transmissibles sexuellement et par le sang parmi les jeunes au Canada, y compris les efforts de recherche visant à approfondir nos connaissances au sujet des déterminants de la vulnérabilité et les programmes d'intervention concernant le risque d'infection.

Notes en fin de chapitre

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