Chapitre 1 : Rapport d'étape sur le VIH/sida et les populations distinctes : Hommes gais, bisexuels, bispirituels et ayant des relations sexuelles avec des hommes – Introduction

Chapitre 1 – Introduction

Le présent rapport d'étape de l'Agence de la santé publique du Canada se concentre sur le VIH/sida chez les hommes gais, les bisexuels, les bispirituels et les autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HARSAH) au Canada. Ces populations partagent des facteurs de risque et de résilience communs vis-à-vis du VIH. Néanmoins, le présent rapport reconnaît les identités distinctes des hommes gais, des bisexuels, des bispirituels et des hétérosexuels qui font partie de cette population, ainsi que la diversité des identités et des expériences associées à l'origine ethnique, à l'âge, au statut socioéconomique, à l'orientation sexuelle, à l'identité de genre et à d'autres facteurs au sein de ces groupes. En particulier, le rapport reconnaît que les hommes ouvertement gais, bisexuels et bispirituels ont des identités uniques, forment des communautés distinctes au sein de l'ensemble de la société canadienne et ont des histoires communes en tant que communautés minoritaires au Canada. Les HARSAH qui ne se déclarent pas gais, bisexuels ou bispirituels ne partagent généralement pas ces identités, ces histoires et ces points de vue.

L'expression « HARSAH » correspond à une catégorie épidémiologique qui renvoie à une voie de transmission particulière du VIH. Par conséquent, l'expression englobe les hommes gais, les bisexuels, les bispirituels et les autres hommes qui ont des relations sexuelles avec des hommes. Les experts membres du groupe de travail national, qui ont orienté la rédaction du présent rapport, ainsi que d'autres chercheurs, ont fait remarquer que l'utilisation de cette expression est problématique, car on peut considérer qu'elle masque les identités, les histoires et les communautés gaies, bisexuelles et bispirituelles en les réduisant à un ensemble de pratiques sexuelles. Le présent rapport fait état des limites de cette expression. En dehors des discussions épidémiologiques, cette expression n'est utilisée dans le présent rapport que pour souligner le fait que tous les HARSAH ne se déclarent pas gais, bisexuels ou bispirituels.

Une approche axée sur la santé de la population a pour point de mire l'amélioration de l'état de santé des populations. Les mesures en matière de santé sont orientées vers toute une population ou sous-population plutôt que vers des individus. La concentration des efforts sur la santé des populations a pour corollaire la réduction des inégalités notées dans l'état de santé de différents groupes démographiques. L'hypothèse sous-jacente d'une telle approche est que la réduction des inégalités en matière de santé repose sur celle des inégalités d'ordre matériel et social. [1]

Le présent rapport résume les données probantes disponibles provenant de sources canadiennes au sujet des hommes gais, des bisexuels, des bispirituels et des autres HARSAH, notamment les renseignements suivants : les caractéristiques démographiques de cette population, le fardeau du VIH/sida pesant sur cette population, les facteurs qui influent sur la vulnérabilité et la résilience de cette population face au VIH/sida, et les initiatives de recherche et de lutte contre le VIH/sida au Canada. Le rapport adopte une approche axée sur la santé de la population, dans la lignée de l'approche de la santé publique adoptée par l'Agence de la santé publique du Canada dans ses efforts permanents pour protéger et promouvoir la santé des Canadiens. Une approche axée sur la santé de la population utilise des données probantes pour examiner comment les déterminants en dehors du secteur de la santé (c.-à-d. divers facteurs économiques et sociaux) affectent l'état de santé d'une personne. Le présent rapport accorde une attention particulière aux déterminants qui augmentent ou diminuent la vulnérabilité ou la susceptibilité à l'infection au VIH et au sida des hommes gais, des bisexuels, des bispirituels et des autres HARSAH. Le rapport examine également les déterminants qui contribuent à la résilience contre l'infection au VIH et le sida chez les hommes gais, les bisexuels, les bispirituels et les autres HARSAH.

Dans le présent rapport, les déterminants suivants sont examinés : le patrimoine biologique et génétique, le genre, le développement de la petite enfance, la culture, les réseaux de soutien social, le niveau de revenu et le statut social, les environnements sociaux et physiques, les services de santé, les habitudes de vie et compétences d'adaptation personnelles. En outre, le présent rapport prend en considération l'homophobie, l'hétérosexisme et la stigmatisation et la discrimination associées qui nuisent à la santé des hommes gais, des bisexuels, des bispirituels et des autres HARSAH.

Ces déterminants de la santé peuvent avoir une incidence sur la probabilité qu'a un individu de pratiquer des comportements à risque, tels que les rapports sexuels non protégés ou l'utilisation de seringues contaminées, qui augmentent le risque de contracter une infection au VIH. Dans ce contexte, le risque n'est pas absolu, mais basé sur la probabilité; par conséquent, tout le monde ne subit pas de conséquences néfastes. [2] Le chapitre 4 aborde plus en détail la relation entre les déterminants de la santé, la vulnérabilité et la résilience. Il convient de noter qu'une personne, un groupe ou une communauté peut surmonter les déterminants de la santé négatifs en adoptant des approches qui favorisent la résilience – c'est-à-dire des facteurs de protection qui atténuent le risque. Dans la préparation du présent rapport, le groupe de travail national a souligné l'importance de faire ressortir les sources et les exemples de résilience chez les hommes gais et les autres HARSAH qui vivent avec le VIH/sida ou qui risquent de le contracter. Le rapport intègre des preuves de résilience lorsque cela est possible.

1.1 Méthodologie

Pour le présent rapport, les auteurs se sont servis des deux types suivants de données probantes : les études approuvées par des pairs et la littérature griseFootnote 3, qui inclut des sources publiées et non publiées. Bien que le rapport mette l'accent sur les données publiées, il intègre également les voix d'hommes gais et d'autres HARSAH vivant avec le VIH/sida ou touchés par celui-ci, et ce, dans le chapitre 4 au moyen de citations personnelles. Ces témoignages sont fournis dans le but de mieux faire comprendre au lecteur les données probantes présentées.

Pour aider à l'élaboration du présent rapport, l'Agence de la santé publique du Canada a créé un groupe de travail composé de représentants des collectivités et des populations, de membres d'organisations non gouvernementales, de chercheurs et d'experts des politiques et des programmes. Le groupe de travail a agi en tant qu'organe consultatif et fourni des conseils et des commentaires tout au long du processus ainsi que sur les thèmes et les différentes versions du rapport. Les membres non gouvernementaux du groupe de travail ont été choisis à la suite d'une invitation ouverte, lancée à l'échelle nationale, d'après leurs connaissances personnelles et professionnelles des sujets rattachés au VIH/sida et aux hommes gais, aux bisexuels, aux bispirituels et aux autres HARSAH. Au groupe de travail participaient aussi des représentants des services concernés de l'Agence de la santé publique du Canada.

Pour chaque chapitre, la méthodologie utilisée a permis de faire la synthèse et le résumé des données probantes les plus récentes et pertinentes possible. Les données démographiques proviennent des sources disponibles, dont Statistique Canada. Les renseignements épidémiologiques et les données sur la surveillance ont été recueillis dans des rapports publiés par l'Agence de la santé publique du Canada et d'autres données publiées et non publiées. Les données et l'information sur la vulnérabilité ou la résilience au VIH/sida des hommes gais, des bisexuels, des bispirituels et des autres HARSAH proviennent de publications approuvées par des pairs et de la littérature grise. Les documents inclus dans le présent rapport répondaient aux critères suivants : avoir été publiés entre 2002 et 2011; traiter principalement des hommes gais, des bisexuels, des bispirituels ou des autres HARSAH au Canada; se rapporter à au moins un des déterminants de la santé liés au VIH ou au sida, ou traiter du VIH ou du sida dans le contexte de la prévention, des soins de santé, du traitement, du soutien ou du diagnostic pour les hommes gais, les bisexuels, les bispirituels ou les autres HARSAH; et être écrits en anglais ou en français. L'annexe A comprend également une liste des termes de recherche et les bases de données. De l'information supplémentaire a également été incluse pour donner le contexte ou combler les lacunes cernées par le Groupe de travail.

Les renseignements sur les travaux de recherche récents menés de 2006 à 2011 ont été recueillis auprès des organismes suivants : le Centre d'excellence en VIH/sida de la Colombie-Britannique, l'Association canadienne de recherche sur le VIH (ACRV), la Fondation canadienne de recherche sur le sida (CANFAR), les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), le Fonds de recherche du Québec – Société et culture (FQRSC), la Fondation Michael Smith pour la recherche en santé, le Réseau ontarien de traitement du VIH (ROTV), et le Conseil de recherche en sciences humaines du Canada (CRSH). Dans le cadre des recherches dans la littérature et des discussions avec les membres du groupe de travail, il est apparu que, pour certains domaines de recherche, aucune donnée probante de source canadienne n'avait pu être trouvée. Ces lacunes dans les connaissances ont été inscrites dans une liste des domaines devant faire l'objet de futures recherches au chapitre 5 du présent rapport.

Pour recueillir de l'information sur les réponses actuelles au VIH/sida chez les hommes gais et les autres HARSAH, y compris les projets d'une durée limitée, les réseaux, les coalitions, les comités, les stratégies et les initiatives politiques en place de 2006 à 2010, des modèles de collecte d'information ont été distribués aux représentants fédéraux, provinciaux et territoriaux par l'intermédiaire du Comité consultatif fédéral-provincial-territorial sur le sida et des consultants du programme national et régional de l'Agence de la santé publique du Canada sur le VIH/sida. Les réponses reçues provenaient de tous les territoires et de toutes les provinces. Les projets financés par l'AIDS Prevention Community Investment Program du Bureau de santé publique de Toronto ont également été inclus dans l'analyse. Le groupe national d'experts a aussi fortement contribué à trouver d'autres réseaux, coalitions, stratégies et projets à inclure dans le rapport.

Il est de notoriété publique que de nombreux programmes et services de lutte contre le VIH/sida servent des hommes gais et des autres HARSAH en plus des autres populations clés ou parmi celles-ci. Toutefois, aux fins du présent rapport, seuls les projets de lutte contre le VIH/sida d'une durée limitée s'adressant explicitement aux hommes gais et aux autres HARSAH ont été inclus. De plus, le manque de temps et les contraintes méthodologiques empêchent de tenir compte de l'influence bien réelle des déterminants de la santé sur la vulnérabilité des hommes gais et des autres HARSAH au VIH/sida, de sorte que les chapitres 5 et 6 portent uniquement sur les projets consacrés aux VIH/sida.

1.2 Références

[1] Agence de la santé publique du Canada. Qu'est-ce que l'approche axée sur la santé de la population? [Internet]. Ottawa : Agence de la santé publique Canada; 2001. [Consulté en juin 2009]. Accès : http://www.phac-aspc.gc.ca/ph-sp/approach-approche/appr-fra.php

[2] Agence de la santé publique du Canada. Risque, vulnérabilité, résilience – Implications pour les systèmes de santé [Internet]. Ottawa : Agence de la santé publique du Canada; 1997. [Consulté en juin 2009]. Accès : http://www.phac-aspc.gc.ca/ncfv-cnivf/index-fra.php


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